Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

Article NOMOI

NOMOI (N6 uot). Démosthène a défini la loi une règle obligatoire (£éyga) 1, formulée par des hommes sages; un redressement des fautes volontaires ou involontaires ; un contrat (auv0-vxrl) 2 qui lie toute la cité et qui détermine comment tous lés citoyens doivent vivre dans la même ville. C'est, en quelque sorte, l'ouvre de la Divinité. C'est un présent que les Dieux ont fait aux hommes3. Cette définition a paru si belle aux jurisconsultes romains qu'ils l'ont reproduite dans leurs oeuvres ou bien purement et simplement, ou bien en la rapprochant de la définition donnée par le stoïcien Chrysippe dans son Traité des Lois4, ou bien en lui empruntant quelquesuns des éléments dont elle se compose 5. Le droit attique établit une distinction bien nette entre, d'une pari, les lois, et v4 toi, et, d'autre part, les décrets, Tâ 4r,ï9iagara, a; ces derniers ne viennent qu'au-dessous des Iois et ne sont valables, qu'ils émanent du Sénat ou de l'Assemblée du peuple, que s'ils sont en harmonie avec les lois. Le principe est fréquemment rappelé par les orateurs et il était ainsi formulé: « Aucun décret, soit du Sénat, soit du peuple, ne doit prévaloir sur la loi » «C:at6g.a Il LL BkV, MTE tOU~.rç gŸ TE Or UOV, VÔU.OU XU'.?tüi'CEpOY Eivat7. Que cette règle n'ait pas toujours été observée, cela est certain, et il ne faut pas trop s'en étonner. Beaucoup de démagogues ne se croyaient pas liés par les principes du droit constitutionnel; ils s'attribuaient le droit de légiférer sans se conformer aux lois, sans admettre aucune restriction à leurs caprices, agissant au hasard des circonstances e. Mais leurs entreprises étaient ensuite sévèrement jugées et donnèrent souvent ouverture à l'action connue sous le nom de nxoavdu, 3v gins'r; e On aurait, a priori, été tenté de croire que le pouvoir législatif, dans une démocratie telle que la démocratie athénienne, appartenait, sans restriction, à l'Assemblée du peuple. C'eclt été une grave erreur, au moins pour le ive siècle et pour une bonne partie du Par défiance des entraînements d'une foule trop nombreuse et irresponsable, par crainte de témérités irréfléchies, la constitution d'Athènes avait établi, pour la confection et l'abrogation des lois, une procédure spéciale, qui a déjà été exposée sommairement (EIONLESIA, p. 524), et qu'il convient de présenter maintenant plus complètement. Les orateurs ont quelquefois parié de la souveraineté du peuple, de son droit de faire tout ce qui lui plaît En réalité, c'était une commission législative, la commission des nomothètes (volxoèiTxt), qui introduisait dans 1-e Corpus juris altier' des lois nouvelles, ou qui modifiait et supprimait les anciennes lois. Au commencement de chaque année, dans la première assemblée du mois d'hécatombéon, le 1.1 de ce mois, avait heu l'É77dyotporovia v6gwv". Les prytanes interrogeaient le peuple sur le point de savoir si la législation en vigueur lui paraissait susceptible d'additions ou de corrections. Ils donnaient, à cet effet, lecture des lois existantes, d'abord des lois sur le Sénat, puis des lois sur les affaires d'intérêt général, puis des lois sur les neuf archontes, et ainsi de suite. Un débat, plus ou moins vif, devait s'engager, les uns demandant la réforme de telle ou telle loi, les autres plaidant pour sa conservation. Un vote, à mains levées, avait lieu ensuite sur l'opportunité d'une revision. Si le vote était défavorable aux novateurs, tout était terminé. Dans le cas contraire, les auteurs des propositions de réformes étaient invités à formuler leurs innovations et à les publier, en les affichant sur l'Agora, devant les statues des héros éponymes. Là, chaque citoyen pouvait en prendre connaissance, les étudier à loisir et se former une opinion, Ces propositions devaient aussi être remises au secrétaire du Sénat, pour qu'il pût, dans les assemblées suivantes, en donner lecture au peuple''-, Quelques jours s'écoulaient, pendant lesquels étaient tenues deux assemblées ordinaires, au cours desquelles les citoyens échangeaient leurs impressions. Dans la quatrième assemblée de la première prytanief3, la commission législative des nomothètes était formée t4 Au temps où l'on tenait pour très suspects les documents insérés dans les plaidoyers des orateurs, et notamment dans le discours de Démosthène contre Timocrate, on se montrait très réservé lorsqu'on parlait des nomothètes. Aujourd'hui,l'authentieitéde beaucoup de ces textes estad• mise par d'éminents critiques, et l'on n'écarte plus comme supposé ou falsifié le règlement sur l'irtyEtpOnOV c Vdg.wv NOM 100 --NOM La désignation des nomothètes appartenait aux prytanes du Sénat 1. Étaient-ils élus ou bien leurs noms étaient-ils tirés au sort? Prenait-on, en bloc, toute une section judiciaire, un Stcaa'rsptov, ou, s'il le fallait; deux ôtxaaTs pta ? Ce qui est certain, c'est, que les nomothètes devaient être tous des héliastes ]DIKASTAI], des juges en exercice pour l'année, et qu'ils offraient, par conséquent, des garanties d'âge, de maturité d'esprit, d'expérience des affaires, que l'on n'aurait pas trouvées chez tous tes membres de l'Assemblée. Le serment qu'ils avaient prêté en qualité d'héliastes, à leur entrée en fonctions, les mettait, semblait-il, à l'abri des passions, des emportements momentanés, dont le premier venu aurait subi I'influence. Ils étaient, d'ailleurs, habitués à l'observation des formes judiciaires, à l'audition attentive des arguments qui pouvaient être invoqués dans des sens opposés, et moins accessibles que leurs concitoyens à des mouvements inconsidérés. Le nombre des nomothètes ne paraît pas avoir été rigoureusement fixé. Il variait sans doute avec les circonstances, avec l'importance des projets qui leur étaient soumis, mais il était relativement élevé. Dans un cas, nous en trouvons cinq cents 2 ; dans un autre, mille. et un 3. Les débats de l'assemblée des nomothètes étaient dirigés, comme ceux de l'assemblée du peuple, par des proèdres (xpouiupot) et par un épistate ou président. Ce fait était naguère contesté et l'on prétendait que, comme dans les tribunaux ordinaires, la direction appartenait aux thesmothètes°. Mais il est aujourd'hui mis hors de doute par la découverte de plusieurs inscriptions. Dans l'une notamment, on trouve, à deux reprises, la mention expresse des proèdres et de l'épistate des nomothètes Il est presque évident que ces proèdres et cet épistate étaient fournis par le Sénat; mais ils ne doivent pas être confondus avec les proèdres et l'épistate qui exerçaient régulièrement leurs fonctions. Ils étaient nommés spécialement pour la nomothesia, et pris sans doute en dehors de la tribu qui exerçait alors la prytanie. Devant les nomothètes, un débat s'engageait, analogue à celui qui se fût produit dans un procès ordinaire'. Les novateurs attaquaient naturellement la loi ancienne, celle dont ils poursuivaient la réforme ou l'abrogation. Mais cette loi avait aussi ses défenseurs, non seulement les conservateurs de bonne volonté qui tenaient à son maintien, mais encore des avocats d'office, cinq citoyens, élus par l'assemblée, sans distinction de tribu, et chargés de faire valoir les raisons qui militaient en faveur de la loi critiquée. Les proèdres, après ce débat contradictoire, mettaient aux voix la question du maintien de la loi existante. Si le vote lui était favorable, il n'y avait plus rien à faire. Mais, lorsque la majorité se prononçait pour l'abrogation, un second vote avait lieu sur l'adoption de la loi nouvelle proposée pour remplacer la loi abrogée. -C'est, du moins, ce qui semble résulter de la loi citée par Démosthène : « Les proèdres feront voter, à mains levées, d'abord sur la loi en vigueur, pour savoir si elle est ou non utile au peuple athénien, puis sur la loi proposée » Mais que serait-il arrivé si le second vote avait été négatif, comme le premier, parce que la nouvelle loi ne donnait pas satisfaction aux partisans d'une réforme? On se serait trouvé sans loi, sans loi ancienne puisqu'on l'avait abrogée, sans loi nouvelle puisqu'on l'avait rejetée. Les orateurs semblent toujours dire que les nomothètes doivent opter entre la loi dont l'abrogation est demandée et la loi qu'on veut lui substituer 3. Ce qui paraît démontré, c'est que le vote des nomothètes suffisait pour la perfection d'une loi. On ne demandait de ratification ni au Sénat, ni à l'Assemblée du peuple 9. Les novateurs devaient, d'ailleurs, se montrer prudents. Car, « si quelqu'un, ayant obtenu l'abrogation d'une des lois existantes, l'a remplacée par une loi qui soit désavantageuse au peuple athénien ou contraire à une autre loi restée en vigueur, il est exposé à l'action publique accordée contre les auteurs de propositions de lois nuisibles à l'Étal, la 7tapavdµmv ypatps 10 ». Or la peine de cette action était arbitraire. Ce pouvait être, outre l'annulation de la loi jugée mauvaise, ou injuste, ou inopportune, une très forte amende; ce fut quelquefois la mort". Si, immédiatement après le vote des nomothètes, les adversaires de la loi nouvelle la dénonçaient au peuple comme illégale, et s'engageaient, sous la foi du serment (Dra q.oalm), à intenter le plus tôt possible la ttapavd5esu ypap' , l'effet de la loi nouvelle était provisoirement suspendu'". Grâce à cette procédure, disent les auteurs anciens, une loi nouvelle n'entrait dans le Corpus juris attici qu'après constatation de l'absence d'une loi sur le même sujet ou après abrogation de cette loi antérieure Il y avait, par conséquent, unité de loi sur toute question juridique. Les difficultés inhérentes à l'application de lois contradictoires ou presque inconciliables étaient épargnées aux juges athéniens. Les textes étaient simples, clairs, intelligibles pour tous. Le premier venu des citoyens se renseignait vite sur la disposition qui lui était applicable et n'avait presque rien à envier à un juriste de profession". La nomothesia, telle que nous venons de l'exposer, remonte-t-elle jusqu'à Solon? Démosthène l'attribue expressément à ce législateur, mais ce n'est pas une raison suffisante pour répondre affirmativement; de nombreux exemples démontrent que les orateurs, lorsqu'ils voulaient fortement impressionner leurs juges par la citation d'une loi, même d'une loi de date assez récente, ne craignaient pas de dire que Solon en était l'auteur. Il est presque évident, et Grote l'a justement fait remarquerlo, que, soit au point de vue du fond, soit au point de vue de la forme, la loi sur l'i rtZetpo-covéz vdi.mv ne peut pas être datée du commencement du vie siècle avant notre ère. Les dix prytanies dont elle parle n'existaient pas alors, pas plus que les statues des héros éponymes auxquelles elle fait allusion. Mais le principe de la nomothesia se concilie très bien avec les institutions de Solon ; il se concilie même beaucoup NOM ®101-NOM mieux avec elles qu'avec les institutions de ses successeurs, Clisthène, IJphialte, Périclès, plus démocratiques que les siennes'. Solon avait bien compris que les lois, si parfaites qu'on les suppose,ne peuvent pas être immuables à perpétuité. Il s'était borné à demander à ses concitoyens de laisser les siennes intactes pendant dix ans 2. Une législation qui résiste à l'action, au mouvement de la vie, à la recherche du bien, court le risque d'être entièrement brisée, tandis que des concessions faites à temps peuvent prévenir une révolution. Solon avait donc admis l'éventualité de modifications à son oeuvre ; mais il avait édicté des mesures pour que les changements n'eussent lieu qu'avec sagesse et prudence Dans sa classification des démocraties. Aristote distingue soigneusement les pays dans lesquels les assemblées du peuple sont souveraines et peuvent voter les décrets qui leur plaisent, sans être soumises à une règle supérieure, d'autres pays dans lesquels il y a des lois constitutionnelles obligatoires même pour tout le peuple assemblé. Les premiers de ces pays sont, dit-il, un terrain d'élection pour les démagogues, tandis qu'il ne peut pas y avoir de démagogie là où la loi a conservé tout son empire, là où le peuple, dans l'exércice de ses pouvoirs, doit se conformer à une règle obligatoire Solon connaissait la mobilité du caractère de ses concitoyens, et il est naturel d'admettre que, dans son organisation de la démocratie, il ait restreint les pouvoirs des assemblées plénières. Les restrictions s'expliquent même mieux dans son oeuvre que dans celle de ses successeurs, de Clisthène en particulier, qui, sans vouloir encore de la démocratie absolue, augmenta notablement les droits du peuple. De la nomothesia que nous venons de décrire, il faut rapprocher la revision ou réforme des lois, la ôtdpGwatç ràv véutov. La constitution athénienne avait essayé de remédier au danger qui résulte de ce que, dans un recueil de lois, il y a, à côté de lois restées en vigueur, des lois abrogées ou tombées en désuétude, ou bien des lois contradictoires sur un même sujet. La juxtaposition de textes inconciliables rend, en effet, malaisée pour les citoyens la détermination de ce qui est permis et de ce qui est défendu ®. Les thesmothètes, qui, dans l'exercice annuel de leurs fonctions, étaient, plus que les autres magistrats, mêlés à la pratique des affaires, et, par cela même, se trouvaient mieux placés pour observer ces contradictions et ces défectuosités devaient, probablement à la fin de leur mandat, les signaler au peuple. Leur rapport et les textes susceptibles de revision étaient inscrits sur des tablettes et affichés devant les statues des héros éponymes. Des propositions de correction ou d'amendement pouvaient alors être présentées. Les prytanes convoquaient une assemblée, dans laquelle le peuple manifestait son avis sur l'opportunité d'une revision. Si son avis était favorable, des nomothètes étaient nommés, et la l dp0mctç avait lieu, suivant toute vraisemblance, en observant les mêmes formes que pour la rédaction d'une loi nouvelle 7. Nous ne dirons rien ici de la force obligatoire que les bons citoyens reconnaissaient aux lois de leur pays. Nous nous bornons à renvoyer nos lecteurs aux raisons que, la veille de sa mort, Socrate, « victime de l'injustice, non pas des lois, mais des hommes8 o, exposait à Criton pour justifier son refus de se soustraire par la fuite à l'application des lois sous l'empire desquelles il avait toujours vécu. Un citoyen, disait-il, ne doit avoir aucune défaillance dans sa soumission aux lois établies ; cette soumission est pour lui une obligation absolue, un devoir. On trouve cependant, à ce point de vue, des traces d'une distinction entre les lois qui sont conformes à la justice et celles qui paraissent s'en écarter, entre ce qui est tout à la fois juste et légal (ôtxatov), et ce qui est simplement légal (vdptpov). Dans le premier cas, les citoyens sont obligés dans le for intérieur aussi bien que dans le for extérieur; dans le second cas, l'obligation n'existe que dans le for extérieur. Aristote recommande même aux plaideurs, lorsque la loi positive de leur pays leur est défavorable, de se placer sous la protection d'une sorte de droit naturel, d'une loi commune supérieure Ce n'est pas ici le lieu de parler des actes que les Athéniens appelaient quelquefois vdp.ot à -;.r' âvip(f0. Ces prétendues lois étaient, en réalité, des décrets de l'Assemblée du peuple. Ils pouvaient être inspirés par l'intérêt général, mais ils n'étaient faits que pour une personne déterminée, vôpt, et ne s'appliquaient pas, comme les lois, à tous les citoyens. Aussi n'observait-on pas alors la procédure de la nornothesio ; l'assemblée décidait elle-même. On peut citer comme exemple de ces vdp.ot quelques exigences spéciales non applicables aux décrets ordinaires. La validité du vote était subordonnée à la présence dans l'assemblée de six mille votants nombre qui n'était pas ordinairement atteint 12, et auquel on ne devait arriver qu'au moyen de convocations spéciales. De plus, les suffrages étaient exprimés au scrutin secret, et non pas à mains levées. Quant aux décrets de naturalisation ou de concession du droit de cité, que l'on rapproche habituellement de ces vdp.ot srt' àvèpi, l'usage s'établit, au ive siècle, et se généralisa même bientôt, de les soumettre à la ôoxqJ.aada d'un tribunal d'héliastes 13. Dans plusieurs textes des poètes, des philosophes et des orateurs, on trouve une antithèse nettement établie entre des lois qui sont écrites, yeypauaisot vop.ot, et d'autres lois qui ne sont pas écrites, des ypapot vdp.ot, lois dont l'autorité est cependant de beaucoup supérieure à celle des premières. Le sens de ces mots céypapot vdp.ot n'est pas le même en droit international et dans le droit particulier d'un pays déterminé tel que l'Attique. Pour les Athéniens, les ypapot vdµot correspondent quelquefois au jus naturale, dont parlent les Institutes de Justinien, à ce jus quod natura omnia animalia docuit''°. C'est en ce sens que Démosthène parle d'une loi naturelle, d'une vduoç T ç QSaecnç10, qui n'est pas spéciale au genre humain et que reconnaissent également les animaux. Dans un sens plus élevé, les «ypapot v9s.ot sont ces « naturalia jura, quae apud moues gentes NOM 102 -NOM peraeque servantur, divina quadarn providentia eonstituta, et semper jirrna nique immutabilia permanent 1 ». Xénophon, qui traite assez longuement de ces lois qui ne sont pas écrites, a, en effet, bien en vue ce que beaucoup d'entre nous appellent aujourd'hui le droit naturel, un certain nombre de préceptes qui sont admis dans tous les pays civilisés et qui doivent être appliqués, sans distinguer entre le cas où le législateur les e expressément formulés et le cas où il a gardé le silence-. « Ces lois, dit-il, ne sont pas d'institution humaine ; elles sont d'origine divine. Ceux qui violent un de ces préceptes venus des Dieux subiront nécessairement une peine, tandis que ceux qui se bornent à fouler aux pieds les lois humaines échappent quelquefois à toute répression 3. » Sophocle établit, comme Xénophon. un parallèle entre les lois émanées d'un simple mortel et les prescriptions divines, qui n'ont pas besoin d'être écrites et qui ne peuvent pas être abrogées. « Ce n'est ni d'aujourd'hui ni d'hier qu'elles existent ; elles ont toujours été et nul ne saurait dire quand elles ont apparu » Ces préceptes, supérieurs et antérieurs aux législations humaines, sont, comme le dit Démosthène, des règles communes à tous les hommes : Tb xo1Vbv âaéVTwv âvlpcé uv5, Ce sont des lois générales admises par tout le monde, une xotvt, vdµoç, par opposition aux lois spéciales et particulières d'un pays déterminé (iôtoç vdpoç) 5. On enseigne volontiers aujourd'hui que ces lois naturelles ne sont pas nombreuses et qu'elles se réduisent à quelques règles de morale. Telle paraît avoir été l'opinion des anciens, dont la liste n'est pas longue : respecter les Dieux, honorer ses parents, s'abstenir de relations incestueuses, rendre aux morts les honneurs funèbres, se montrer reconnaissant d'un bienfait, etc. La légitime défense, l'emploi de la force pour repousser une attaque injuste, l'impunité pour l'homicide commis dans l'exercice de ce droit, rentrent également dans le droit naturel. En droit international, pour le règlement des relations inter ,gentes, comme il n'y a pas de pouvoir supérieur qui paisse imposer une loi écrite, il faut bien se résigner, en l'absence de traités diplomatiques, à n'appliquer que des lois non écrites, les usages admis par la gé_rrilité des États grecs, une sorte de droit commun 'E))é3tet ; usages traditionnels dont l'observation semblait imposée par des considérations religieuses. Les égards dus aux hérauls, la convenance d'une déclaration de guerre avant l'ouverture des hostilités, la conduite à tenir envers les prisonniers de guerre ou les habitants d'une ville prise d'assaut, la sépulture des soldats tombés sur les champ' de bataille, le respect des temples, des asiles et des autres lieux consacrés, tous ces points étaient régi Dar des cou tomes non écrites, mais presque universellement admises et généralernent appliquées'. Les mots Ci ypapoç vdtr.oç se trouvent enfin employés dans une acception tout à fait spéciale par une loi de l'an 403 avant notre ère; cette loi était ainsi conçue : 1Ypxy a vdpcp Tzç è yç µi1 a , Oit Si l'on prenait ce texte à la lettre, il conduirait à dire que, dans le silence des lois écrites, le juge athénien aurait dr1 s'abstenir de juger. Mais une telle proposition serait inconciliable avec la formule du serment qui était imposé aux hëliastes10, Ceux-ci s'obligeaient, en effet, pour le cas où ils auraient à statuer sur une question non prévue par la loi, à adopter l'opinion qui leur paraîtrait la plus conforme 'g(oteiQAat. Voici quel était probablement le sens de la loi. Lors du rétablissement de la démocratie, sur la proposition de Tisamène, on procéda à une revision générale des lois, Toutes les,dispositions que l'on maintint en vigueur furent inscrites sur des tablettes et exposées dans le l'épile; les autres furent considérées comme abrogées. Défense fut alors faite à tous les magistrats d'agir en vertu d'une de ces lois qui n'avaient pas été conservées". On pourrait aussi, à la rigueur, interpréter le texte litigieux en ce sens que toute allégation d'une loi non écrite sur les tablettes devait être tenue pour suspecte et considérée comme non avenue 12. E. CAR.LEMER.