Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

OCULARIUS

ODEUM. 'S2tliïov. -Conformément à l'étymologie ( ôEty, i, )', on appelait de ce nom en Grèce certains édifices, spécialement destinés à des auditions de chant et de musique 2. Mais, tandis que sur les théâtres [THEATREM] les renseignements abondent, il nous en est au contraire parvenu fort peu sur ales odéons. Cependant les témoignages anciens confrontés avec les ruines permettent de répartir l'ensemble de ces édifices en deux groupes, de structure très distincte. Dans le premier groupe, il faut d'abord citer l'odéon de Périclès, à Athènes, sur lequel Plutarque nous a transmis quelques détails assez précis'', L'auteur y signale, à lintérieur, la quantité des sièges et des colonnes (7o),éuèpnv xxi 7.o),uaruaov)'1. II décrit aussi la disposition particulière du toit, n qui s'inclinait circulairement à partir d'un ]rE7COrU.€vov) n. Enfin il nous apprend que l'édifice était, quant à sa forme, une copie de la tente du Grand Roi"". 011E Tous ces traits, ainsi que certaines comparaisons des comiques', nous donnent l'idée d'une construction ronde, dont le toit conique s'appuyait sur une rangée de colonnes (7oA7attui,ov2, pourvue de gradins qui faisaient toutle tour de l'enceinte 70AuEOcovl, et laissant au milieu un espace libre oit s'élevait vraisemblablement alpe estrade ft gx, xpi(ixçl3 pour les artistes. Cet édifice, situé tout près el; u gauche du théâtre de Dionysos', avait été construit, vers 415, par les soins de Périclès, en vue des concours de chant, de cithare et de tinte qu'il adjoignit au programme traditionnel des Panathénées Le pseudo-Dicéarque proclame cet odéon «le plus beau de l'univers » G.11 fut, au siècle suivant, restauré par Lycurgue'. Mais, en l'an 86 avant Jésus-Christ, pendant le siège d'Athènes par Sella, le tyran Aristion, forcé de se réfugier dans la citadelle, l'incendia préalablement, de crainte qu'il ne servit de forteresse aux assiégeants ', Environ treille ans après, il fut rebâti, sur le modèle original, aux frais d'Ariobarzane III, roi de Cappadoce ° L'odéon de Périclès est le plus ancien édifice de ce genre qu'ait connu Athènes". Et même il parait certain qu'elle n'en posséda point d'autre, pendant toute la période classique Ce qui tend à le prouver, c'est que, dans tous les textes, il est désigné simplement par les mots (,si t dotov, sans aucune qualification complémentaire L1, Nous sommes donc autorisés à rapporter au monument de Périclès toutes les allusions de cette époque. Elles nous apprennent qu'il ne servait pas exclusivement à des séances musicales, mais qu'on l'employait aussi comme salle d'audience dans certains procès, par exemple dans les actions d'aliments (®ixat c oou)i-, comme magasin à blé 13, comme lieu de rassemblement ou de campement pour Ies troupes, hoplites ou cavaliers 3' Y donna-t-on ;jamais des représentations dramatiques`' Sa forme ne permet guère de le supposer. Mais c'est dans l'Odéon qu'avait lieu ce prélude, assez mal connu, des Dionysies urbaines, qu'on appelait le orpoityw Tasoocais . Le 8 Eiaphébolion, devant le peuple réuni à l'odéon, les poètes tragiques qui devaient prendre part au concours paraissaient, accompagnés de leurs acteurs et de leurs choreutes, sans masques ni coutumes, une couronne sur la tète. Chaque poète, à ce qu'il semble i faisait l'annonce du sujet de sa pièce et présentait au public ses acteur'sl', Nous connaissons fort peu d'odéons de ce premier type, c'est-à-dire àforme circulaire. On peut citer cepennant la Skias (I'xtéç) de Sparte, qui, d'après la description des anciens, était un édifice rond, à toit en coupole le Elle était l'ceuvre de Théodoros de Samos na (600 environ avant Jésus-Christ), et, par conséquent, i1 ne serait pas impossible quelle eût servi de modèle au constructeur de l'odéon de Périclès 1. Dans ce même groupe d'odéons circulaires on peut encore ranger avec assez de vraisemblance celui de Philadelphie en Lydie", l'odéon construit à Rome par Trajan «1, enfin un odéon (ou zunphitlléàtre) d'époque romaine à Sparte21. Toutefois la grande majorité des odéons connus était construite d'après un tout autre type. C'étaient des théâtres, qui ne différaient essentiellement des théâtres ordinaires qu'en un point, l'adjonction d'un toit (Oéa'cpx è wp6p~a'', t/aeatra tentaz°), Ainsi s'explique que le même édifice soit appelé par les auteurs anciens tantôt grôo?ov, tantôt OEaipav 2 . Et c'est aussi, selon toute apparence, le motif pour lequel 'Vitruve, dans sa description très détaillée des théâtres grec et romain", s'abstient de tout précepte spécial sur la construction des odéons. Aussi bien les fouilles, opérées en 1848 et surtout en 18d7 sur l'emplacement de l'odéon d'tlérode Atticus, à. Athènes, ont-elles fait une lumière complète sur les édifices de ce type". Ce monument avait été élevé par l'opulent sophiste à la mémoire de s3 seconde femme, Appïa Annia Régina, décédée en 160 avant JésnsChrist "7. Il dépassait en richesse, selon Pausanias, toutes les autres constructions du même genre en GrèceMalgré les injures du temps et deshommes30, il en reste "ou jeu'r d'tiui encore des ruines fort imposantes, dont les fouilles ont permis de restituer très exactement le plan. On y constate une orchestra à peu près demi-circulaire ; une cavea. avec deux diandlnata, au haut de laquelle règne un large portique; un mur de fond (seaenae fa'oos percé de trot„ portes et, flanqué de deux ailes ou parasce'îites ; enfin tan layeiotz élevé de 1 m.10 au-dessus du niveau ODE -`152GEC de l'orchestra, en un mol toutes les parties constitutives d'un théâtre ordinaire'. Mais ce théâtre, nous le savons par Ptlilostrate2, était recouvert d'un toit en bois de cèdre. Et lesruines elles-mémes portent, du reste, témoignage en ce sens 3. Le nombre des places dans l'odéon d'Ilérode est évalué par Tuckermann à 'ii 772, par Schillbach (qui admet des sièges dans l'orchesth(1) à 3.38. De cette brève étude il résulte, comme on voit, que les caractères spécifiques d'un odéon se réduisent à deux seulement. Le premier, c'est sa destination. Tout odéon est un édifice public, construit en vue de récitations ou d'exécutions musicales 4. Ce qui ne veut pas dire, du reste, qu'il ne puisse, à l'occasion, être utilisé pour d'autres emplois'. Le second caractère, qui découle du premier, c'est l'existence d'un toit. Ce toit répondait évidemment à une double fin, qui était de procurer à la salle une meilleure acoustique et, en même temps, de garantir les spectateurs contre l'ardeur du soleil et les intempéries. Les anciens donnent le nom d'odéon, abstraction faite de sa forme et de son architecture, à tout édifice qui réalise ces deux conditions. C'est à tort, en revanche, qu'on a considéré parfois comme un trait distinctif des odéons la petitesse relative de leurs dimensions'. Car, s'il est vrai que l'addition d'un toit limitait par avance l'étendue de l'édifice, certains odéons, tels que celui d'llérode à Athènes, n'en dépassaient pas moins l'ordinaire mesure des théâtres. Bien plus arbitrairement encore certains modernes se sont imaginé que tous les odéons étaient construits dans le voisinage d'un théâtre découvert, de façon à offrir un refuge au public, en cas de pluie soudaine '. C'est là une interprétation erronée d'une remarque accidentelle de Vitruve', relativement au ihéàtre de Dionysos et à l'odéon de Périclès. Mais Vitruve ne fait nullement de cette proximité une règle. Et, en fait, nous connaissons nombre d'odéons, qui n'étaient point construits dans le voisinage d'un théâtre 0. Peu nombreux sont les édifices auxquels les textes anciens donnent expressément le nom d'odéon. Ce sont : la Skias de Sparte 10 ; 20-iL°, à Athènes, l'odéon de Périclès, l'odéon d'Hérode Atticus et l'odéon vu par Pausanias près de la fontaine Ennéacrounos " ; 3° l'odéon construit par le même Mérode Atticus à Lorinlite ; 6° celui de Patrai, en Arcadie, que Pausanias déclare « le plus richement orné de tous les odéons grecs, après celui d'Hérode, àAthènes 13» ; 7° celui de Smyrne, où l'on voyait un tableau d'Apelle, représentant une des Charites" ; 8° celui de Patara, en Syrie "; J°-10°, ceux de Kanatha" et de Césarée17, en Palestine ; 11°-12°, ceux de Domitien" et de Trajan 10, à Rome; 13° celui de Carthage20. Mais, en dehors des édifices que nous venons d'énumérer =', beaucoup d'autres theatra testa (par exemple, ceux de Pompéi12, de Cnide22, etc.) étaient certainement des odéons. O. Nvvun.