Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

OEDIPUS

OEDIPUS (Oio(xcouç)• OEdipe est mentionné deux fois dans Homère. Dans la Nekyia, Ulysse raconte' qu'il a vu « la belle Épicaste', mère d'OEdipe, qui, dans l'ignorance de son coeur, commit un crime épouvantable, en épousant son fils; celui-ci, qui avait tue son père, l'épousa; mais aussitôt les dieux révélèrent ces actions aux hommes. Lui, dans l'aimable Thèbes, régna sur les Cadméens, souffrant des maux par la volonté cruelle des dieux; mais elle descendit dans la demeure d'Hadès, dieu puissant, aux portes solidement fermées, après avoir attaché, dans sa douleur, un lacet fatal au plafond élevé, laissant à son fils tous les maux que peuvent causer les malédictions d'une mère3 ». Ainsi OEdipe, après la mort de Jocaste, aurait continué à régner sur Thèbes; d'après un passage de l'Iliade', il y aurait régné jusqu'à sa mort. Alors des jeux funèbres furent célébrés en son honneur Après Homère, la légende se développa ° ; dans le cycle le groupe thébain était, on peut dire, rempli d'OEdipe Le père d'OEdipe est Laïus, roi de Thèbes, premier auteur des malheurs de sa famille. Il est poursuivi par la colère d'Iléra, à cause de la violence faite à Chrysippe, fils de Pélops'. D'après une autre tradition, Laïus est averti par Apollon qu'il sauvera Thèbes s'il meurt sans enfants'. OEdipe naît; il le fait exposer sur le Cithéron, après lui avoir percé les pieds, afin que personne ne fût tenté de recueillir un enfant ainsi mutilé". Des ber_ gers recueillent OEdipe et le portent au roide Corinthe, Polybe ". D'après Sophocle, c'est Jocaste qui aurait donné son fils à un berger pour être exposé ; celui-ci le re met à un autre berger appartenant à Polybe, qui, n'ayant pas d'enfant de sa femme Méropé, l'adopte72. Euripide, dans les Phéniciennes", imagine que Méropé, par une supposition d'enfant, a fait accepter OEdipe comme fils par son mari. Un fragment de vase à reliefs (fig. 5377), trouvé à Tanagra14, montre en deux décors, d'une part, à droite, la femme de Polybe, qui s'appelle ici Periboia", recueillant au bord de la mer l'enfant que lui confient Hermès et la Nymphe Euboea, de qui Polybe était fils; d'autre part, la même Periboia remettant OEdipe à Polybe. Ce monument confirme la tradition d'après laquelle Laïus aurait enfermé OEdipe dans un coffre qu'il aurait jeté dans la mer : le coffre serait arrivé à Sicyone, où la femme de Polybe l'aurait recueilli"G. On a supposé que Sicyone, et non Corinthe, était, dans la légende primitive, le séjour de Polybe : la question est douteuse 17. OEdipe, devenu grand, a des doutes sur sa naissance et va consulter l'oracle de Delphes, qui ne lui répond que par d'horribles prédictions : il doit tuer son père et VII. 20 OF,D 1.54 --O[D épouser sa. mire. Il s'éloigne; à un endroit de Phocide oit deux routes se rencontrent, et appelé ciy a q bo-5; ', il rencontre 1_ aïus,qu'i1 ne connaitpas; une dispute s' engage ; OEdipe tue son père. Après la mort de Laïus OEdipe arrive à Thèbes. Le pays est ravagé par un monstre envoyé par Dionysos'` ou par Héra'. C'est le Sphinx t PnrNX'. Appartenait-il à la légende primitive? Les opinions varient sur ce point selon les systèmes'. La donnée romanesque, qui fait le fond de nombreuses légendes, e't qui montre un jeune héros vainqueur d'un monstre, épousant en récompense la fille d'un roi, a été compliquée ici d'une façon tragique par le mariage du fils avec se mère. La tradition varie sur la façon dont OEdipe tue le Sphins. La po itesee Corinne dit qu'OEdipe tua non seulement le Sphinx I .. is aussi le renard de Teumésos, combinant ainsi peut-être une donnée ancienne avec une donnée nouvelles. Un récit à tendances anthropomorphmsles fait du Sphinx une femme qui, à la tête d'une troupe de brigands, désole la contrée ; OEdipe rassemble, lui aussi, un corps de brigands et tue le Sphinx". Les représentations d'OEdipe tuant lui-même le sphinx sont nombreusest0. Mais, dans l'ar°t'1 comme dans la littérature, ce qui domine, c'est la légende d'OEdipe expliquant I'énigme proposée par le Sphinx (fig. 5378) : a Quel est l'être qui, doué d'une seule voix et, seul de tous les êtres, a successivement quatre pieds, deux pieds et trois pieds, et qui a. d'autant moins de force qu'il a plus de pieds? OEdipe répond que c'est l'homme qui, enfant, se traîne à quatre pattes; devenu grand, se sert de ses deux pieds, et, sur ses vieux jours, s'appuie sur un billon, comme troisième soutien de sa marche f2. Le monstre se tue. OEdipe devient roi de Thèbes, en épousant Jocaste. L'épopée homérique, on l'a vu, connaissait l'inceste, mais elle voulait ignorer que les enfants d'OEdipe fussent nés de l'inceste ". Diverses combinaisons furent imaginées dans le but de cacher ces naissances incestueuses; elles consistaient, pour la plupart, à attribuer les enfants d'OEdipe, ou même OEdipe lui-même, à une autre mère que Jocastei4. On a prétendu16 que la tragédie aurait introduit dans la légende d'OEdipe la naissance des enfants incestueux, avec toutes les conséquences qui suivirent. C'est là une explication qui n'a que la valeur d'une hypothèse". Homère dit que les dieux découvrirent l'inceste, sans expliquer comment; Pindare, Eschyle, Euripide font de même. Une explication avait déjà été donnée par l' E'dipodie17.OEdipe, allant avec Jocaste faire un sacrifice sur le Cithéron, et passant à l'endroit dit eytsi lIéç, lui aurait, raconté le meurtre de Laïus et montré Ia, ceinture qu'il lui avait prise. Jocaste reconnut aussitôt en lui son fils, mais d'abord ne dit rien ; peu de temps après vient de Sicyone un irr7roloux6Ào„ qui raconte à OEdipe comment i1 l'a trouvé exposé, et lui montre les langes dont il était enveloppé; tout le crime est révélés; Jocaste se tue; OEdipe se crève les yeux, puis il épouse Euryganéia. C'est de ce récit, auquel on peut ajouter une source reproduite par Hygin'', que semble s'être inspiré Sophocle dans l'Œdipe Roi2a, D'après Eschyle 2i, OEdipe aurait maudit ses fils, emporté par la douleur que lui causait la révélation de son inceste. Ces malédictions étaient déjà un des ressorts de l'action de la Thébaïde. L'auteur de ce poème avait d'ailleurs essayé de les motiver ; elles étaient la punition OEIL --15,`1 OFF d'outrages faits à OEdipe par ses deux fils'. Dans l'U dipe à Colone de Sophocle, OEdipe maudit ses fils parce qu'ils l'ont chassé de Thèbes. L'ancienne épopée faisait mourir OEdipe à Thèbes; c'est la tradition que Sophocle a suivie dans Antigone' ; dans les deux (dipe, il a adopté une tradition contraire. Euripide, dans les Phéniciennes, faisait mourir OEdipe et Jocaste après Étéocle et Polynice 3. Les traditions variaient sur le lieu de sépulture d'OEdipe'. Pausanias 3 dit qu'après bien des recherches il a trouvé qu'OEdipe était mort à Thèbes, mais que ses os avaient été portés dans Athènes et enterrés dans l'enceinte consacrée aux E(rvx), là où se trouve le iit.viv.x 0i8:rcolos'. Il cherche évidemment à concilier la donnée homérique de la Nekyia avec la tradition exposée par Sophocle dans Œdipe à Colone. Cette tradition paraît s'être développée en Attique au moment où Euripide écrivait les Phéniciennes, vers 415. Sophocle lui donna sa forme devenue la plus populaire : le vieil OEdipe, conduit par sa fille Antigone, arrive au bois des YEU.vxl de Colone ; à certains signes, il reconnaît l'endroit où il doit finir sa vie ; il résiste aux prières et aux menaces de Créon et de Polynice, et il disparaît après avoir béni ses deux filles et révélé à Thésée des secrets importants pour l'avenir d'Athènes; son corps sera une grande protection pour l'Attique' Quelle est la signification du mythe d'OEdipe? L'explication longtemps en faveur a consisté avoir dans OEdipe un héros solaire. L'histoire de son enfance est, à peu de chose près, celle de Télèphe, celle de Romulus ou de Cyrus Exposé sur le mont Cithéron, il serait l'image du soleil, qui, au moment où il se lève, semble reposer sur la montagne : son disque, à ce moment, parait un peu élargi par la hase : il a les pieds enflés °. Sorti des ténèbres, sorti de la nuit, il triomphe d'elle, il la tue, il tue l'être qui lui a donné la vie, il tue son père. Sa victoire sur le Sphinx n'est qu'une seconde forme de la même lutte '° ; le Sphinx, l'étrangleur, est analogue au serpent védique Ahi et, à d'autres monstres, qui personnifient le nuage obscur et orageux. Enfin le soleil, après avoir triomphé de tous ses ennemis, disparaît dans les nuages ardents du crépuscule; il s'unit à la brillante aurore du soir, Jocaste aux teintes violettes, qu'il ne reconnaît pas sous sa nouvelle forme : il est le mari de sa mère. Aujourd'hui on rapproche volontiers OEdipe des divinités infernales. On lui a trouvé des analogies avec 1 C'est la tradition suivie par plusieurs écrivains postérieurs, J. Malala, 51; Cedr. 1. i; My thol. Vatic. 2, 230. 3 Une coupe de Mégare (Robert, Home,. Becher, S9; Walters, Cala?. of the gr. and etrusc. nases in the Brit. Mus. IV, p. 245, n. 105, 1) représente Oedipe devant les cadavres de Jocaste cl, de ses deux fils; cf. Sehol. Phoen. 148i, 1693.3 Voir en particulier le récit de Lysimaque (Seh. oed.Col.91 -Frnejo,. hist. gr. III, 336), d'après lequel Oedipe aurait été enterré à Etéonos en Béotie. 8, 7. 3 Il y avait à Colone un sais., 0!S(xolos 'Ad ', 8(,àse o (Pais. I, ln, 30,4 ; voir encore Poli. vli, 132).G Vers 1345 de 1'(Ed. de Sophocle, sq. -1 A ndrol. E, egos. hist.gr. 1, fr. M.8 Decharme, Mythol. de la Gr. ait. p. 582.9 De là son nom o18o_u et cols. D'autres étymologies ont été proposées ; elles sont énumérées par Hoefer, col. 740 sq. Relevons celle que l'on dérivait du verbe oTSn; Oedipe serait le sage, celui qui explique les choses les plus difficiles; mais sa sagesse, comme toute sagesse humaine, cause son malheur (Schwenck, Ana z. d. Borner. Hymnen, p. 243).-i 1° C'est l'explication de M. Bréal, Le Mythe d'Oedipe, lien. a; ch. 1863, p. 193=Mélanges de myth, et de Ling. p. 174; elle a été combattue par D. Comparetti, Edipo e la site]. camp. : réponse de Bréal, lieu. crit. 22 janv. 1870. Une intéressante scholie Phoen. v. 26, dit qù Oedipe était fils du Soleil. 11 Kretscheoer, Op. Laud. 191; Hoefer, col. 741 sq. 12 Groppe, Griech. Myth. 503 sq. 13 Les rapports du Sphinx avec Typhon avaient déjà été indiqués par eaevme_ Voir surtout Bethe, Thcbanische Heldenlieder, Leipzig, 1891 ; M. Bréal, Melampus ; ils ont, l'un les pieds noirs, l'autre les pieds enflés ; c'est là une particularité qui caractérise les divinités chthoniennes à corps de serpent; par là aussi s'expliquent les rapports si fréquents d'OEdipe avec ics Erinnyes". Pour d'autres savants OEdipe et Jocaste sont d'anciens noms, qui ont disparu, d'Fléphaistos et de Héra. Du mythe d'Iléphaistos dérive 1 enflure des pieds, an des traits bien particuliers d'OEdipe. Quant au parricide et à l'inceste, il ne vient pas de la légende d'lléphaistos, mais très probablement du mythe égyptien de Typhon ", qui, d'après les prêtres d'Égypte, aurait lui aussi tué son père et épousé sa mère, comme ils le racontèrent à employés, les bureaux des fonctionnaires impériaux qui ont peu à peu remplacé les apparitores de l'époque républicaine, les licteurs, les scribes, les hérauts, les L''iiatores, les accensi, les nomenclatores APPARITORES, LICTOR, SCRIBA, PRAECO, VIATOR, ACCENSI, NOMENCLATOR,~.. L'origine des offices est assez obscure. Elle remonte aux services administratifs du haut empire, surtout de la chancellerie, aux dénominations des liberti Augesti, des procurateurs et de leurs subalternes. Ainsi, dès l'époque d'Hadrien, les sécretaires du prince, les a libellis, a studiis, a rationibus, a ntentoria, ont chacun leur o//'ciant. Les principales fonctions de ces bureaux sont indiquées officions, tabularius'. Il y a pour les caisses des dispen satores,desarcarii[PROCURATORI. En outre, de bonne heure, on assiste à l'introduction de soldats, avec leurs titres et leurs grades militaires, comme auxiliaires des fonctionnaïres impériaux de tous les ordres. Cette transformation a été achevée par Septime-Sévère, qui a donné aux bureaux un caractère tout à fait militaire, Dès le début de l'Empire, les gouverneurs sans légions ont eu à leur service de petits corps de troupe ; des soldats détachés de leur emploi ordinaire, des benef ciarii, ont été employés à la police, à l'exercice de la justice criminelle, à la garde des prisons par les gouverneurs, les procurateurs, les préfets de la ville, du prétoire, des vigiles. Auprès des préfets du prétoire en particulier, on trouve des exceptores, ap. J,-C. il y a des employés militaires, simples soldats, centurions, avec des titres divers, tels que r'ornicsarii, la mitologtis eomparatta, Pise, 1867; P. Decharme, Mythologie de ta Grèce t. part. Il du Manuel d'lwan Müller, Munich, le t. II est de 1002; H,ïfer, art o:oarus dans le Lextkon d. Myth. de Roselier; Hünemann, Poesie des 'f;rlipus sage, I, Progr. Strasbourg, 1880; Ilberg, Die Sphinx in der griot/'. Aluns,' d Sage, Prog. Leipzig, 1896; Klein, Die Mythologie des Sophoktes in .sein en 1 isc 4bragdien, Progr. 1 Ebersw. 1890; II, 1893; P. Kreisehmer, Die gri «oec,,inschriften ilrren Sprache nach untersucht, Giftersloh, 1894; Maass, Coma Italie Mythographica, Ind. Sch, Greifsw. 1894; J.-G. 4Velcker, Der epische t geins, Bonn, 1849; enfin les préfaces des éditions de l'CL'dipe Roi et do l'(Edipe a Colone, par R.-C. Jebb, Cambridge, 1897 et 1889; des Phéniciennes d'Euripide par Ni Wecktein, Leipzig, 1894. OFFICIALES, OFFICIUM. 1 Corp. roser. lat. 3, 348, 411; 6, 5305, 81t7-8529, 8450, 8616, 8626, 8627, 8637; 9, 2138; P. Anton. 8; Cod. Rist. 9, 51, 1. Voir Hirschfeld, Uutcrsuchnngen, p.277-278; Cuq, Le concilinus p' incipis ri'Augusteâ Dioclétien (Mena prés. par din. sou. Acad. Biser. X, 1, 1884, p. 314-504).2 Aston. in Verr. 2, i,p. 179; Eemig. Tohann. 18, 28; 19, 13 ; Euang. Match. 27, 27, 54 ;Acta aime. 1 0 , 1 ; 2 i , 31; 22, 2;23,16;24, 1; 25, 1; Dig. 1, 16, § 1, 7§1.-3Dig, 1, 18, G 0 3, 5; 4., 6, 10; 11, 12, 1 § 12; 43, 3, 10; 12, 14; 48, 3, 8; 48, 20, 0; 50, 6, 8; Paul. Sent. fi, 31, 1; Plin. Ad Trai. 32, 36, 94,97, 98; Tertolt. Apol. 2; Vit. Rade. 2; C. 1. 1. 3, 43:3, 1136; 6, 531, 2406; 9, 1617; II, 0343. Voir Mommsen, Slraf3 echl, p. 312-317. -4 C. i. 1. 11, 6168; 2, 2661; 8, 4325, 9368; 6, 1641, OFF --156OFF commentarienses,optiones, speculatores,strutores, adiutores, librarii, notarii, exceptoles, auprès de fonctionnaires purement civils, préfets del'annone, gouverneurs, procurateurs . Les offices, à demi militaires, à demi civils, paraissent ainsi constitués dans leurs traits essentiels au ni° siècle. Les onciales sont permanents, prennent part à l'exercice des justices civile et criminelle ; au civil, en particulier, ils reçoivent les libelli, les cautions, introduisent les parties, doivent assister à la lecture des jugements, font exécuter les sentences; leurs exactions excitent déjà des plaintes 2. Il n'est donc pas étonnant qu'on retrouve encore des dénominations militaires dans les offices du bas empire", par exemple presque partout, les cornicularii, les commentarienses, le princeps; dans l'office des préfets du prétoire les ducenarii, centenarii, biarchi4; chez les agentes in rebus, les grades de cavalerie, equites, circitores, biarchi, à côté des titres de centenarii, ducenarii" . C'est à Dioclétien qu'on peut attribuer l'organisation définitive des offices'. Ils s'appellent o fficium, cohors, apparitio, en grec Td,t, ; les employés officiales, apparie tores, cohortalini, en grec TzSECTz; ; après l'époque de Constance, le mot cohortalis, appliqué d'abord même aux offices des grands magistrats', se restreint de plus en plus à ceux des gouverneurs de province ; ce sont alors les mots apparitores, officiales, palatini, qui désignent surtout les offices importants 6. On trouve aussi des mots spéciaux pour les offices de différents magistrats : praefectianuspour les préfets du prétoire, urbanicianus pour les préfets de Rome, magistrianus pour le magister officiorum, ducianus pour les ducs, comitianus pour les différents comtes, largitionatis pour le cornes sacrarum largitionum, privatianus pour le cornes rei privatae". Les offices ont conservé certains traits, surtout extérieurs, de leur origine militaire ; les employés s'appellent milites, militia, cohortalis, cohortalina militia10 ; ils portent le ceinturon (cingulum militiae), reçoivent leur congé honesta missio, le titre de vétérans 11 ; mais ce caractère militaire n'est plus qu'une simple apparence, car, depuis le 1i° siècle 12, le mot militia désigne un service impérial quelconque, et les textes distinguent maintenant les services civils soit de l'administration, soit du palais, militia cohortalis ou palatina, des services proprement militaires, militia armata ; depuis la séparation complète des pouvoirs civil et militaire sous Constantin, il n'y eut plus de vrais soldats que dans les offices des fonctionnaires militaires13. L'office de chaque magistrat a un nombre fixe d'employés, selon son importance; on distingue en général les statuti et les supernumerarii, ces derniers n'ayant sans doute ni le traitement ni les privilèges des titulaires. Ce personnel parait avoir été nombreux ; ainsi un gouverneur de province, dans le diocèse d'Illyrie, a 100 employés, un vicaire 300, le vicaire d'Asie 200, le proconsul d'Afrique 4.00, le comte d'Orient 600, un maître de la milice 300, le cornes sacrarum largitionum d'Orient 221 statuti et 610 supernumerarii, le cornes sacrarum largitionum et le cornes rei privatae d'Occident 646 statuti et 300 supernumerarii ; avant Justinien, le préfet du prétoire d'Orient occupait plus de 1000 exceptores 14. Ces chiffres furent considérablement réduits en Orient par Justinien". On exclut du recrutement les colons, les esclaves, les gens attachés à une caste héréditaire (corporation, curie, etc.) 16 ; le nombre des affranchis paraît avoir aussi considérablement diminué; les employés se recrutent donc surtout dans leur caste, devenue également presque héréditaire, surtout pour les cohortales des simples gouverneurs" ; les employés des préfets du prétoire mêmes ne doivent pas aller dans un autre corps avant la fin de leur service. La nomination des employés émane théoriquement non du chef de service, mais de l'empereur lui-même, qui signe les brevets (probatoriae) rédigés par les bureaux (scrinia), moyennant un droit (sportulae); mais, en fait, elle a lieu sur la proposition du chef de service ; d'autre part, c'est le chef de l'office, le princeps, qui répartit les fonctions 18 ; les employés montentsuccessivement de rang en rang, et les principaux d'entre eux ont un certain droit sur leur charge, la vendent à leurs aides (adiutores)12 ; le choix de l'empereur est donc assez étroitement limité. L'avancement a lieu d'après l'âge; la faveur ne doit pas intervenir, mais en fait le suffragium joue un rôle considérable 20. On ne reste généralement qu'un an ou deux, trois au plus, dans chaque grade, sans passer deux fois de suite par la même fonction. Il y a une prestation de serment à l'entrée en charge 2L. Les employés ont en général comme juge au civil et au criminel leur chef de service, qui exerce sur eux un pouvoir disciplinaire sans appel et peut les renvoyer (missio ignominiosa) 22. Ils touchent un traitement en nature (annona, capitus) et, de la part des administrés, des droits casuels, des épices (cornmoda) 23. Ils ont droit OFF -157OFF à leur retraite (honesta missi()) au bout d'un certain temps de service, qui est resté de vingt-cinq ans pour les employés des gouverneurs, qui a été abaissé peu à peu à quinze etvingt ans pour ceux des grands fonctionnaires'. En outre, les simples cohortales ne peuvent quitter l'office avant d'avoir géré le postus primipili, fonction qui appartenait autrefois aux centurions, et qui consiste maintenant à por ter aux troupes les fournitures de vivres'. Pendant leur charge et après leur sortie de charge, les employés jouissent d'un grand nombre d'exemptions en matière d'impôts et de munera [n1LNUs, p. 2041.]. Sauf les cohortales des gouverneurs', les principaux employés des offices sont des personnages importants, qui obtiennent souvent à leur retraite des fonctions élevées ainsi les principes des ducs peuvent devenir protectores les employés des préfets du prétoire et des maîtres de la milice deviennent spectabileset son tassimilés aux tribuni et notarii 4 ; en charge, tous les chefs des offices, qui sont des principes des agentes in rebus, ont la dignité sénatoriale, ainsi que l'adiutor du maître des offices, le cornicularius du préfet du prétoire d'Orient, au début les primicerii des deux comtes des finances et, en tout temps, les proximi scriniorum 5. La liste des employés est à peu près la même dans tous les offices, sauf ceux de la cour. Il y a d'abord les trois primates officii,pourvus d'une compétence générale, à savoir le princeps, le cornicularius,1'adiutor : 1° Le princeps, dans tous les offices, sauf ceux de la cour' ; auprès du plus grand nombre des gouverneurs, il provient de l'office lui-même par avancement' ; auprès des préfets du prétoire et de Rome, des vicaires, de la plupart des ducs d'Orient, des proconsuls d'Achaïe et d'Afrique, c'est un ducenarius des agentes in rebus il relie ainsi ces magistrats à la cour, les surveille et, au bout d'un an, il obtient des fonctions plus élevées a auprès de plusieurs ducs et comtes, le princeps vient de l'office du maître de la milice'. Cet employé a la direction générale de l'office, tient la liste des membres, leur accorde les permissions, exécute lui-même les ordres importants du magistrat, touche une part importante des épices ; il a des aides officiels (adiutores) et possède seul le droit d'avoir des aides privés (domestici)10. 2° Le cornicularius n'a pas de fonctions particulières; il surveille toute la gestion de l'office, signe les actes judiciaires moyennant des droits considérables; auprès des gouverneurs et des comtes, il recueille les annonae qui leur sont destinées ". 3° L'adiutor, dont on connaît mal les fonctions, auprès des préfets du prétoire de Rome, des maitres de la milice, des comtes et des ducs ; dans l'office du préfet du prétoire, il est peut-être identique au primiscrinius ; il est surtout chargé de fournir des exsecutores pour faire exécuter les ordres et les jugements. Auprès du magisterofficiorum, il dirige l'office qui n'a ni princeps, ni cornicularius Puis viennent les employés attachés aux différents services : 1 ° Lecomnlelitariensis, chargé de tout ce qui touche à la justice criminelle' 3 ; son nom vient du mot comnlentarii,qui désignait le journal quotidien où étaient inscrits les actes du fonctionnaire'°.Il reçoit donc les accusations, arrête les accusés, fait exécuter les tortures, les peines, les sentences capitales, surveille les prisons. Outre son propre scrinium, il a de nombreux subalternes, un instrumentarius qui garde les procès-verbaux criminels, des applicitarii, des claricularii, des ducenarii'". 2° L'ab actis, dont nous connaissons mal les fonctions, parait avoir été l'aide principal du magistrat pour la juridiction civile et surtout financière, car il n'existe pas chez un certain nombre de chefs militaires. Il y en a deux auprès des préfets du prétoire, en Orient, à l'époque de Justinien, et, outre leur scrinium, ils ont sous eux six notaires, un instrumentarius, des chartularii et des nomenclatores, qui donnent les noms des avocats devant le tribunal". 3° L'a libellis, sans doute le libellensis d'un office d'une province africaine"; il rédige probablement les courtes réponses aux suppliques, et peut-être enregistret-il aussi les libelli fournis par les parties au magistrat. Dans la préfecture d'Afrique, sous Justinien, il dirige le scrinium libellorum ; auprès de plusieurs chefs militaires, il a aussi le titre de subscribendarius13. /L° Le regerendarius, chargé spécialement de la poste (cursus publicus) ; en Orient, on ne trouve ces employés, au nombre de deux, qu'auprès des préfets du prétoire; en Occident, ils figurent auprès de ces mêmes préfets, des maîtres de la milice, des comtes et des ducs'''. 5° Le cura epistolarum, qui rédige les lettres, surtout en matière d'impôts ; la Notitia dignitatum ne le signale que chez les préfets du prétoire et les vicaires 20. 6° Les numerarii, comptables surtout pour les impôts ; auprès des gouverneurs, il y en a deux, probablement un pour les recettes des sacrae largitiones et l'autre pour celles de la res privata ; il y en a probablement aussi deux auprès des vicaires, et un auprès de chacun des deux comtes des finances ; auprès des préfets du prétoire, il y en a un pour chaque diocèse avec un scrinium spécial21. Leurs concussions leur valurent des peines disci OFF dehors. Tout officions chargé d'un mandat spécial prend le titre d'exsecutor17. L'office des maîtres de la milice est militaire; celui de l'Orient, a, en outre, des mensores. L'office du magister offlciorum est constitué par des agentes in rebus et composé d'un adiutor, de subadiuvae, d'un curiosus résidant à la cour, de curiosi des provinces et d'interprètesi3. Le quaeslor palatii n'a pas d'office propre, mais prend ses aides dans les scrinia; il en est de mémo des quatre magistei scriniorum d'Orient; ces scrinia ont un personnel dont les principaux membres sont les proxiuai., les melloproximi, l'adiutor, les memoriales, les exceptores 14. Outre les employés qu'on a vus, le préfet de Rome ases censuales15. Le castrensis a un tabularius dominicus, un tabularius dominarum 4uguslarum, un adiutor, un ehartularius, chef d'un scrinium, et d'autres palatini. Le contes sacrarum iargitionum a un primicerius général, un primicerius pour chacun de ses neuf scrinia, un se,'undocerius, chef des exceptores, un tertiocerius chargé des bastagae et d'autres palatins. Il n'y a que quatre scrinia dans l'office du cornes rei privatae ". On ne tonnait pas le classement des cubicularii du praepositus sacri cubiculi ni des employés des nationales. On ne peut assimiler aux offices, quoiqu'elles y ressemblent à certains égards, les différentes milices du palais, telles que les agentes in rebus, les silentiarii, les domestici et protectores, les domestici et notarii, les adrnissionales, les mensores, les stratores. On comprend aisément quel rôle énorme ont dû jouer à côté des magistrats passagers ces offices permanents, dépositaires des traditions, gardiens des lois, des règlements, des archives, dans toutes les branches de l'administration et dans l'exercice de la justice. Ils correspondent à nos bureaux modernes. Les employés doivent connaître la langue latine et posséder sinon la science, au moins la pratique de la législation. Leur coopération est indispensable pour la plupart des actes du magistrat. Ils doivent le rappeler à l'observation des lois, corriger ses erreurs, ses négligences, même ses fautes volontaires, sous peine de grosses amendes, qui frappent tantôt l'office entier, tantôt les chefs [hmLTA, p. 201.71. D'innombrables lois ont pour but de réprimer leurs malversations, leurs exactions, leurs abus de pouvoir et témoignent ainsi de leur puissance 1''. Les offices des gouverneurs interviennent dans la, levée des impôts et sont soumis à une certaine responsabilité pécuniaire Pour la justice civile, la présence des membres compétents de l'office est nécessaire pour toute audience judiciaire f8; ils préparent les affaires, sans doute en remplissant toutes les formalités nécessaires, en faisant et en portant les citations, en recevant les pièces fournies par les parties 10 ; ils introduisent ces dernières ; OFF -15 8 - plinaires sous Constantin, Julien, Valentinien ; ils perdirent Ieur caractère militaire, et on leur imposa le nom de tabularii comptables municipaux); mais les numerarii des magistrats illustres et respectables gardèrent leur titre et plus tard ceux des préfets du prétoire recouvrèrent leur rang '. 7° Les subadiuvae, sans doute les aides de l'adiutor, auprès des préfets du prétoire et de Rome, du quaestor sacri palatii et du magister officiorunt. Ils paraissent surtout occupés aux actes judiciaires 2. 8° Le primiscrinius, ou primicerius, qui est à la tête de différents scrinia auprès des préfets du prétoire de Rome, des vicaires. du proconsul d'Afrique, des maîtres de la milice d'Orient ; il paraît surtout chargé d'envoyer des apparitores pour exécuter les ordres et les jugements'. Presque tous ces employés ont des aides, adiutores, qui forment un ou plusieurs bureaux scrinium, scriniarii), et qui, au bout d'un certain temps de service, peuvent succéder à leurs chefs". Ils proviennent régulièrement des scholae attachées aux offices. Les scholae se divisent en deux catégories, selon leur culture littéraire, les ministeria literata et les rninisteria illilerata. Dans la première catégorie, on trouve : I° La schola exceplorurn tia7uypxpos), qui existe à côté de presque tous les offices. Les exceptores, appelés aussi notarii et chargés de rédiger, de lire, de conserver les actes, sont les anciens scribes privés des magistrats qui ont, fini par former une corporation, rattachée aux offices, sans en faire absolument partie, sauf auprès des préfets du prétoire, oit ils ont la solde et le rang militaires'. Auprès du préfet du prétoire d'Orient, à l'époque de Justinien, ils forment 15 scholae, sous un primicerius, et, d'après une loi d'Arcadius, les plus habiles d'entre eux forment le collège des flugustales 6, `1,° La schola scriniarïorum, qu'on trouve dans la plupart des offices; les scriniarii sont les comptables répartis dans les différents scrinia En Orient, au moins depuis l'époque de Zénon, ils fournissent aussi des archivistes, chartulrn'ii 3° Les actuarii, comptables auprès des principaux chefs militaires9. Dans le second groupe, on trouve un très grand nombre de scholae, chargées surtout de l'exécution et du transport des ordres. Tels sont les singularii ou singulares des préfets du prétoire, messagers pourvus d'un cheval, mais diminués au profit des agentes In rebus ; les rnittendarii ; les ducenarii, centenarii, biarchi; les eursores; les stratores; les praetoriani, les draconarii, les turmant, les cistiferi, les nornenclatores : la plupart auprès des préfets du prétoirel0. On peut rattacher aux offices les hérauts (praecones), les gardiens des grilles du tribunal (cancellarii); vrais les assesseurs (eonsiliarii)'-1, quoique payés, restent en 01K Ib9 GIN ils rédigent les procès-verbaux des séances', et les jugements dont ils donnent copie aux parties, les appels qu'ils portent au juge supérieur ou à l'empereur 2, font exécuter les sentences par les eA'secutoees. Pour la justice criminelle, le commentariensis a, en outre, la surveillance générale des prisons 3 [ACLVTES IV BEBUS, .II'DIci.i PUBLu.A, p. fi[idj. Enfin signalons une des principales innovations du ive siècle : les empereurs chargèrent très souvent de missions temporelles ou annuelles, pour contrôler les services provinciaux, les palatin i, les employés des administrations centrales, surtout ceux des deux comtes des finances ". Ce fut là une nouvelle source d'abus et d'exactions. Les magistrats municipaux n'ont pas d'offices propres, mais se servent des officia m'inicipalia, des corporations d'employés subalternes, attachées au service de la ville tic 'si. s, p. 20!i2 . Ce sont : pour les impôts, les logographi, les censuales ; pour les archives et les comptes, les tabulal; pour la justice, les scribaeou eJ'ceptores; pour l'exécution des ordres, les apparitores''. Ca. LIILRIVAIN.