Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

Article ORGYIA

ORGYJA ('Opyutx), Mesure grecque de longueur valant six pieds ou quatre coudées'. C'est la brasse, c'est-à-dire l'étendue qui sépare les extrémités des deux bras étendus 2. ORICOILLCUM ou aurichaleum épe(uXxoç, orichalque. On a donné ce nom au nie siècle av. 3°-C. à un alliage de cuivre et de zinc, c'est-à-dire à une sorte de laiton, de tombac ou de chrysocale 2, Mais il serait téméraire de prétendre que l'ipe(yarxoç des Grecs, antérieurement au Ive siècle, désignait le même alliage. Si ce mot ne se lit pas dans les épopées homériques, il est dans un hymne' et chez Hésiode', ou il paraît signifier une matière métallique brillante et d'une grande valeur, Au v° siècle et vraisemblablement encore pendant une partie du Ive, l'orichalque n'était plus qu'un mot qui ne correspondait à aucune réalité connue. Platon en faisait un des métaux de son Atlantide s et le plaçait immédiatementaprès l'or; Aristote avait, dit-on, nié son existence ; il était donc regardé comme une matière fabuleuse, une fiction des poètes sur laquelle s'exerça l'ingéniosité des commentateurs ; quelques-uns voulurent faire remonter le nom de ce métal à un certain Oreios, qui en aurait été l'inventeur, ou à un artiste da même Do11i Cepen _ dant, au m° siècle, 1l semble que l'on aitecu de nouveau à l'existence de l'orichalque ; tout au moins ce nom fut appliqué à quelque chose de réel, c'est-à-dire à un ou plusieurs alliages de cuivre et de zinc, vraisemblablement inventés en Asie', Mais on n'en parle plus que comme d'une matière d'un bel aspect, et non d'un grand ORI 236 prix ; Callimaque ne parait pas le mettre au-dessus du cuivre'. Un fait certain, c'est que chez les prosateurs latins et chez Plaute l'orichalque, qu'ils écrivent aussi auricllalcum, peut-être trompés par une fausse étymologie 2, n'apparaît pas comme une matière précieuse 3, mais comme un corps plus dur que le cuivre ', qui, grâce à sa couleur et à son éclat, peut être confondu avec l'or et prêter à l'erreur 6 ou à la fraude ; n'a-t-on pas rapporté que Vitellius, pendant son édilité, avait remplacé dans les temples l'or et l'argent par de l'orichalque et de l'étain °. Bien que les anciens n'aient pas isolé le zinc et par conséquent ne l'aient pas connu en tant que métal particulier 7, ils ont néanmoins fabriqué des alliages de cuivre et de zinc, qui sont confondus dans les écrivains sous le nom général de 7aaxdç, aes 3, en fondant ensemble des minerais de ces deux métaux On trouve la première mention d'un alliage de ce genre chez Théophraste 10, à propos d'une terre particulière qui, mêlée et fondue avec le cuivre, avait la propriété de lui communiquer une belle couleur. Ce devait être encore un mélange de même nature qui se faisait avec ce cuivre de Démonèse extrait, disait-on, d'une mine sousmarine et dont on avait fabriqué des statues d'orichalque. La couleur de l'alliage tenant à la proportion plus ou moins forte du zinc, il a dû arriver que le laiton, suivant les lieux de fabrication et la richesse des minerais soit en cuivre, soit en zinc, présentât des teintes différentes ; ainsi, selon toute vraisemblance, le cuivre (xxnxdc) des Mossynèques, blanc sans mélange d'étain, mais fondu avec une certaine terre, qui n'est ni nommée ni décrite, était un laiton où la proportion du zinc était très forte 12. Elle devait être plus faible dans ce cuivre des Indes qui ne pouvait se distinguer de l'or que par l'odeur 13. Mais ce n'est qu'aux environs de l'ère chrétienne qu'on trouve pour la première fois une mention précise de la fabrication de l'orichalque, sans aucun détail d'ailleurs, de sorte que nous ne savons rien de la technique de cette fabrication, si ce n'est qu'on l'obtenait en fondant ensemble à grand feu un minerai de cuivre (aerarius lapis)" et la cadmie naturelle (calamine ou blende) ou la chalcitis 15 ORI Il est possible qu'il y eut plusieurs espèces d'orichalque, puisque ce corps a été qualifié de blanc par Virgile 16; cela tient, comme il a été dit plus haut, à la proportion du zinc qui dans les alliages variait, comme les analyses l'ont démontré, de 1,24 à 28,10 pour 10017. Il suit de là que ce qu'on a appelé cuivre blanc O,ssxbç yaaxdç, aes album) est probable ment du laiton". Pline semble croire à l'existence d'un orichalque natif qui aurait été fort en vogue, mais dont les filons étaient épuisés depuis longtemps". Il a peut-être voulu concilier par là ce qu'il savait de l'aurichalcum moderne et ce qu'il avait entendu dire de l'orichalque antique; mais il a pu arriver aussi que l'on ait considéré comme un métal unique le produit de la fusion de divers minerais mal distingués les uns des autres à cause de l'analogie de leurs caractères extérieurs. Usages. L'orichalque antique nous est montré comme associé à l'or dans les pendants d'oreilles d'Aphrodite" ; il est employé par Vulcain pour faire les jambières d'Hercule2'. Lorsque les poètes postérieurs font de l'orichalque l'ornement de l'armure d'un héros°5, la matière des armes d'une déesse23 ou celle de la houlette que porte une fille du soleil il est probable qu'ils songent plus à la substance merveilleuse qu'à l'alliage qui se fabrique de leur temps V5. Pausanias avait vu à Lerne un coeur d'orichalque dont la haute antiquité avait paru contestable 26. Les descriptions donnent place à la même matière dans nombre d'ornements réels ou fictifs, associée souvent à l'or, à l'argent et au cuivre noir". On en coula des statues" ; une plaque d'orichalque avec inscription, placée jadis à la base de l'une d'elles, a été trouvée en Suisse, à Basel-Augst (Augusta Rauracorurrt ) 29. Il servit pour faire des miroirs 39, des cymbales, des cloches, des stèles 31, des ustensiles divers 32, des flûtes ou des garnitures de flûtes", des pièces de monnaie°'. En joaillerie, de minces feuilles d'orichalque, appliquées sous les chrysolithes [GEMMAS] les moins belles, servaient à leur donner la teinte qui leur manquait". ALFRED JACOB.