Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

Article PECTORALE

PECTORALE [LORICA, p. 1313 j. PECULATUS. Dans son acception première, le mot peculatus désigne un vol de bétail commis au préjudice de l'État', principalement le vol du bétail livré à un magistrat pour acquitter une amende, ou consigné dans un procès qui donnait lieu à I'actinn de la loi par serment [stinamnsrcu2. C'était le »meus Le péculat suppose ordinairement un détournement malhonnête. Certains textes le qualifient malus peculatus3, pour le distinguer du péculat fait dans une bonne intention : tel est le cas oit un propriétaire chasse le bétail d'autrui, lorsqu'il a pénétré dans son champ'. C'est une distinction analogue à celle du (lotus bonus et du Bolus malus 5. Sous la République, lorsque la monnaie devint un instrument général d'échange, le mot péculat désigna le plus souvent un vol d'argent commis au préjudice de l'État'. Le péculat, à la différence du vol commis au préjudice d'un particulier PL''RTUM),, n'est pas lui simple délit : c'est un crime. Il a été soumis d'assez bonne heure à une juridiction spéciale; puis il a été réglementé par une loi de César ou d'Auguste :LLX, p. 11501 qui est encore mentionnée dans les compilations de Justinien' : la loi Julia peculatus et de sacrilegiis. Cette loi a été complétée par des sénatus-consultes et des constitutions impériales. 1. Éléments constitutifs du péculat. t' Le péculat suppose d'abord un acte matériel (adtrectare) 9, commis sur une chose appartenant à l'État. Cet acte consiste ordinairement en un détournement (avertere)°, une soustraction (auferre, subripere)10. Il peut aussi, comme le furtura, consister en un abus de confiance : par exemple, lorsqu'un magistrat retient indûment" ou emploie à son usage personnel l'argent de l'État'", au lieu d'en rendre compte'. A côté de ces actes qui sont les plus simples et les plus fréquents dans la pratique, il en est d'autres qu'on a peu à peu fait rentrer dans la notion de péculat : altération frauduleuse des lingots d'or, d'argent, de cuivre dans les ateliers monétaires de l'État14; frappe illégale de PEC -366 --PEC monnaies par Ies employés des ateliers monétaires' ; destruction ou altération des registres publics constatant des créances de l'État '. Par exception, en vertu d'une clause spéciale de la loi Julia peeulatus, .la complicité suffit pour faire encourir la peine du péculat : le complice est traité comme l'auteur principal 1. Mais la simple tentative ne tombe pas en principe sous l'application de la loi dans quelques cas cependant les constitutions impériales ont dérogé à la règle et puni la tentative comme le crime consommé ?' Le péculat, connue le vol (/urtuln), s'applique uniquement aux objets mobiliers. Le vol d'argent était le cas normal d'application du péculat à la fin de la République' ut, sous l'Empire, alors que de nombreux magistrats ou fonctionnaires avaient le maniement ou la garde des deniers publics. C'est ainsi que le jurisconsulte IIlpieu donne la définition du péculat dans le livre de sain commentaire sur Sabinus où il traite des édiles curules'. Aux premiers siècles de la République, c'est le butin pris è l'ennemi qui donnait lieu à l'accusation de péculat . Bien qu'à cette époque; le crime de péculat fût très rare, d'après le témoignage de Polybe il y en e quelques exemples célèbres : en 363, le dictateur Camille fut accusé d'avoir gardé des portes de bronze provenant de la conquête de Véies 9; en 563, le consul Aciluis Glabrio fut accusé d'avoir retenu une partie du trésor d't;ntiocltus et du butin10; quelques années plus tard], Scipion l'Asiatique fut condamné pour n'avoir pas versé au Trésor public tout l'argent qu'il avait revu du roi :lntioebus1l. '1 L'acte constitutif du péculat doit causer un préju dice à l'État /èandure`,12 Le magistrat qui s'approprie 'argent de l'État ne commet pas un péculat, lorsque l'argentest n ses risques13 : dans ce cas, en elle! l'État ne subit aucun préjudice; il a un recours contre le magistral, pour le montant de la somme dont celui-ci est responsable. De même celui qui est créancier conjoint avec l'État ne commet pas de péculat en c iireant du débiteur commun ce (lui lui est dît persona r, le neutl'-. II éa péculat lorsqu'en se présentant fans e, créancier de l'État, on se fait remettre de ut du à l'État par un particulier : bien que cet ardent ne soit pas t'argent de l'EdeL, le Trésor public souffre un préjudice1". Ii Le péculat doit étire cormnis en vue d'en retirer un bénéfice ou d'en faire profiter un tiers, Celui par exemple qui, en etc (le vente ou de louage, consigne sur les registres publics une somme inférieure au prix d'adjudication, commet le crime de péculat". De même un sénatas-consulte a étendu l application de la loi Julia au cas oie, sans l'autorisation du magistrat compétent, un fonctjiiunaire subalterne a donné communication des registres publies ou a permis d'en prendre copie". Il.. J!u'ie/iction el procédure.flux premiers siècles de la République, le péculat., comme les autres crimes. fut soumis au jugement du peuple assemblé dans ses comices. C'est une question de savoir qui avait qualité pour se porter accusateur : les témoignages des auteurs anciens ne sont pas sur ce point concordants". Il est vraisemblable que le procès était intenté par les soins des questeurs. Les textes qui font, dès cette époque, intervenir les tribuns de la plèbe, contiennent sans doute une anticipation d'une règle admise à une date plus récente. Aux derniers siècles de la République et dès avant Sylla, le jugement du péculat fut confié à. une commission spéciale (quaestio) : Cicéron oppose la quaestio pec•ulatus àlaruaestio de testamentis introduite par une loi nouvelleut. On ignore si cette commission était alors présidée par un préteur. Depuis l'organisation des commissions permanentes, au temps de Sylla, le crime de péculat fut de la compétence d'une des quaesnones perpetuae. III. .Sanction. On n'a pas de renseignements précis sur la peine encourue primitivement en cas de péculat. Il est vraisemblable que c'était une peine capitale, comme pour le vol manifeste d'après le droit prisé". Cette conjecture s'appuie sur un passage de Diodore de Sicile" qui parait emprunté à Polybe. Dans la suite, on trouve la trace d'une amende infligée par les tribuns de la plèbe; mais il est très douteux que cet état du droit remonte au temps du dictateur Camille, comme le dit Tite-Lise". Ce qui est certain, c'est qu'aux derniers siècles de la République le péculat donne lieu à une action soumise aux formes ordinaires de la procédure et tendant à l'application d'une peine pécuniaire : cette peine est du quadruple de la valeur de l'objet volé. f ne transformation analogue s'est produite dans la pénalité infligée par le droit privé : la peine capitale édictée par la loi des Douze 'fables contre le voleur manifeste a fait place à une action pénale au quadruple consacrée par l'édit du Préteur'. L'existence d'une action au quadruple en matière de péculat est confirmée par la loi municipale de Tarente qui confère à tout magistrat la Faculté d'exercer cette action". Elle était vraisemrblabienrent admise 'i Rome dès le vue siècle, car en 51,2, un procès intenté contre des fournisseurs de farinée tut déféré à un préteur". C'est aussi une action de ce genre qui était soumise à la quaestio perpelua, car, d'après Cicéron, elle donnait lieu à une luis aestinaatio°' Li is tF.sTusiATtO, p. Er/01. L'action au quadruple a été consacrée par la loi Julia sur le péculat"; elle subsistait encore au commencement du ive siècle de notre ère28. L'action de péculat présente trois particularités qui la distinguent de l'action pénale donnée par le droit privé en matière de vol : En cas de pluralité de délinquants, la peine du quadruple se divise entre les coauteurs solvables; chacun est tenu pour sa part virile et non pour le tout" °31 L'action se donne contre les héritiers du PEC -367PUC délinquant 1. En 668, les héritiers de Cn. Pompeius Strabo furent, poursuivis en raison d'un péculat commis par leur auteur ; une action analogue fut exercée en 688 contre les héritiers de Sylla 3. La transmissibilité d'une action pénale est une dérogation au droit commun : en principe, les peines sont personnelles Mais il a paru inique que les héritiers profitent du détournement compris par leur auteur : on a admis qu'ils seraient tenus dans la mesure (le leur enrichissement ((eod ad nos peri'enit). Cette décision a été par la suite généralisée. On a soutenu à tort que l'action de péculat se donnait pour le tout contre l'héritier °. Cette opinion, fondée sur une décision exceptionnelle de la loi de Malaga (c. LVVIl), est contredite par Cicéron °. 3° L'action de péculat se prescrit par cinq ans 7. A. la peine pécuniaire on pouvait joindre une peine criminelle : l'interdiction de l'eau et du feu remplacée plus tard par la déportation pour les honestiores, par les travaux forcés pour les Irumiliores L Au BasEmpire, des peines rigoureuses furent établies en Orient par Valens 9, puis en Occident par Valentinien le Jeune 10. En 393, Théodose le Grand, par une constitution adressée au préfet du prétoire, résolut de mettre un terme à des abus intolérables : il édicta la peine capitale". En 's15, Théodose le Jeune appliqua aux recéleurs la peine encourue par l'auteur du péculat 12. IV. Extension cle la loi Julia peculatus. --Des constitutions de Trajan et d'Hadrien ont étendu aux cités la protection accordée par la loi Julia au Trésor publie. Mais elles ne paraissent pas avoir reçu tout d'abord une portée générale, car, à la fin du lé siècle, Papinien soutient, encore que l'action furti est seule possible et non l'action de péculat''. Marcien au contraire, qui écrivait peu de temps après Caracalla, déclare que ces constitutions sont observées à l'égal de la loi". Certaines lois municipales contenaient des règles spéciales en cette matière : on a déjà cité la loi de Tarente, de la seconde moitié du tiri' siècle; on peut également citer la loi de Malaga du r" siècle de l'Empire : dans son chapitre LXV II, elle crée une action au double qui peut être exercée. par tout citoyen (action populaire)! . De même qu'à Rome, on n'a pas protégé seulement les deniers municipaux : celui qui détruit ou altère une table de bronze contenant la loi municipale ou un plan cadastral tombe sous le coup de la loi Julia' On a pareillement étendu au fisc la protection accordée à l'argent de l'État : cela résulte de divers textes insérés au Digeste et interpolés par les compilateurs i7. Un édit d'Antonin le Pieux a également appliqué la peine de l'exil ou celle des travaux forcés à ceux qui volent, des lingots d'or ou d'argent dans les mines impériales, la peine du. quadruple à ceux qui d'une façon illicite se procurent des lingots d'or pour les fondra. Le complice encourt aussi la peine du quadruple'. ';t1 ;'nu,. PECULIUM C, S'I'PE\Sl'7. Le ,jur tl Macer définit ainsi le peculium caslrence : ' •lui que les parents ou les cognats ont donné au soldat faisant son service, ou celui que le fils de famille e acquis au service etqu'il n'a.uraitpoint acquis, s'il n'avait. pas servi 1 Il comprenait donc : la solde et les fournitures en nature faites, aux troupes, les bénéfices des soldats et en particulier les sommes d'argent que les empereurs leur distribuaient dans les occasions solennelles ras oriii ii,, les parts de butin qui leur revenaient, enfin les biens donnés aux fils de famille par les parents à l'occasion de leur enrôlement ou durant leur temps de milice. La création d'un pécule dit caste erse qui jouissait de privilèges spéciaux, refusés parlaloi aux autres genres de pécule, est une innovation de l'Empire" qui voulut favoriser par là les engagements dans l'armée impériale et offrir aux jeunes gens, en échange de, leurs services, une certaine indépendance pécuniaire à l"'lu père de Un titre entier du Digeste consacré an peculiuni castrensea ; on v voit que c'était la propriété absolue de celui qui le possédait, quelle que fitt sa situation; d'autre part, il l'administrait et en disposait librement'. Quand il venait à la succession paternelle avec des frères, il gardait son pécule par préciput' ; il pouvait le donner, le vendre, l'échanger, le trausm.ettro par testament, sans la permission de personnes; il en était le maitri et le Seul maître. Ii. CAGNA T.