PERGULA. Construction légère, ouverte sur un ou plusieurs côtés, et pouvant servir de dépendance à un corps de logis plus important : nous l'appellerions, suivant le cas, berceau, hangar, appentis, auvent, belvédère, galerie extérieure, etc. Le mot semble avoir désigné à l'origine un passage non clos (étym. pergere) mettant en communication diverses parties d'une même propriété, comme on le voit dans la figure 5567 tirée d'une peinture de la villa de Boscoreale près Pompei. De là vient qu'on l'a appliqué par exemple à une treille dont les arceaux se prolongent le long d'une allée [TRICIIILA]'. En Italie on a toujours aimé à faire grimper la vigne sur ces abris légers; ils portent encore en italien le nom de pergola. A Rome même on montrait au milieu des portiques de Livie, comme une curiosité, une tonnelle couverte par une seule vigne d'une grosseur prodigieuse 2. Il y avait une espèce de vigne particulièrement
propre à cette culture; on l'appelait vitis pergulana 3. On se plaisait aussi à former des berceaux avec des courges et autres plantes grimpantes'. La figure 5568 représente, d'après une peinture du tombeau des Nasons,
une allée ombragée par une treilles [voir encore fig. 1046; 3904 à 3906 et fig. 5243].
De ce premier sens on est probablement passé à celui de cabane, chaumière, la demeure des paysans pauvres
étant souvent échafaudée avec des matériaux de rencontre et couverte de chaume ou de roseaux 6; d'où l'expression nains in pergula pour désigner un homme de très humble condition 7. On voit fig. 5569 un hangar adossé à une ferme, qui répond assez bien à l'idée que l'on peut se faire de la pergula d'après les textes ;
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c'est une construction accessoire, largement ouverte, propre à abriter des outils ou des récoltes'.
Mais il y avait aussi des annexes du mêrne genre dans les habitations des villes, et les étages supérieurs en étaient souvent pourvus comme le rez-de-chaussée. Elles présentaient des avantages surtout pour les marchands ; elles leur servaient de dégagements et de salles d'exposition. Les changeurs et les banquiers [ARGENTARII], installés d'ordinaire autour des places publiques, recevaient leurs clients dans des pergulae2. Les artistes peintres y accrochaient les tableaux qu'ils voulaient vendre ; Apelle, à ce qu'on raconte, les exposait ainsi et, caché derrière son ouvrage, recueillait les observations des passants
Les lenones achalandaient leur commerce en y postant les filles qu'ils exploitaient 4. Les pergulae servaient
aussi, assez fréquemment, de salles d'école ; on en fermait les ouvertures du côté de la rue par des rideaux qui garantissaient les écoliers contre le soleil et les regards indiscrets et leur interdisaient à eux-mêmes les distractions du dehors ° [LUDUS, p. 1380]. Mais beaucoup de maîtres, avides d'argent et de réputation, laissaient volontiers tout ouverte leur pergula magistralis, pour s'offrir à l'admiration des passants ; on y plongeait de tous côtés; si bien que Théodose II dut prendre des mesures pour mettre un terme à ces parades'. Il résulte des témoignages des anciens que la pergula destinée au négoce communiquait immédiatement avec la boutique ; une annonce de Pompéi propose aux passants divers locaux à louer, parmi lesquels tabernae cum pergulis suis'. Comme les rues en général étaient
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étroites, cette annexe devait se trouver le plus souvent au-dessus de la boutique ; des poursuites pouvaient être exercées à raison de la chute d'un médaillon décoratif (clipeus) ou d'un tableau (tabula) suspendu par un peintre à la devanture de sa pergola 8. M. Mau croit avoir retrouvé la place de cette pièce dans un grand nombre de maisons de Pompéi; ce devait être une sorte de terrasse couverte par un toit, et ayant la même superficie que la boutique située au-dessous, mais, comme nos entresols, moins haute de plafond ; on y accédait par un escalier intérieur, dont la trace subsiste encore en beaucoup d'endroits ; la terrasse était dans toute sa largeur ouverte sur la rue, quoiqu'on pût la fermer par des tentures et par une balustrade formant balcon
Enfin il pouvait arriver que la pergula fût construite sur le faîte de la maison ; on sait combien sont encore communs aujourd'hui dans les pays chauds et à Rome même les belvédères et les terrasses couvertes. On raconte qu'Octave, encore tout jeune, s'étant retiré à Apollonie, sur la côte d'Illyrie, eut un jour l'idée d'aller demander son horoscope à un devin célèbre, nommé Théogène; pour le voir, il a monta à sa pergula o. On ne peut guère entendre par ce mot autre chose qu'un belvédère, d'où ce mathematicus observait les astres 1°. Il est naturel que ces pièces peu confortables aient aussi, comme nos mansardes, servi d'asile à de pauvres gens; avec un peu d'ingéniosité, ils pouvaient arriver à les clore de manière à ne pas trop souffrir du froid et de la chaleur ; suivant le mot d'un ancien, ad summas tegulas