Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

PHIALA

PHIALit (tItâî,r„ ei5i alov). Le mot latin n'est qu'une transcription littérale du mot grec, à l'époque où l'empire romain était tout imprégné des influences helléniques'. On trouvera à l'article ra'rERA ce qui concerne cet ustensile chez les Romains. Nous ne nous occuperons ici que de la phiale grecque. 1. -Dès les origines, ce vase apparait comme consacré à des usages religieux , c'est le vase à libation par excelIence.II existe en Égypte dès le règne de Thoutmosis I11'. On voit les monarques assyriens s'en servir pour rendre hommage à leurs dieux et une riche série de ces coupes e été découverte dans le palais de Khorsabad'. La Phénicie nous en a légué aussi de très beaux spécimens'. Dans les pays grecs l'usage en est également fort ancien. Chez Homère, ce mot est appliqué à un vase de grande capacité, à un chaudron pour l'eau ou à l'urne destinée à contenir les cendres d'un mort'. Pourtant la forme du gobelet en phiale existait pendant la période mycénienne, analogue à celle dei'Orient7, mais parfois munie d'une anse'. On peut d'ailleurs se rendre compte, en lisant le chapitre d'Athénée sur la tptjar1', que, suivant l'habitude des anciens, le meure mot a été appliqué à des vases de structures assez différentes, avec ou sans anse, avec ou sans pied. La forme la plus usitée dans la Grèce classique fut, comme en Orient, celle de l'écuelle ronde, sans anses et sans pied. souvent munie à l'intérieur d'une saillie centrale (i1gya),ôç, if,tpx),iF,v, (Imbilicus, ombo), ornement qui se voit déjà dans les spécimens assyriens et phéniciens'°. Il est vraisemblable que l 'Ionie la connut de bonne heure" et la transmit à la Grèce continentale, où elle était en usage dès le vi0 siècle'. Le nombre des personnages qui figurent sur les monuments, reliefs et peintures, tenant la phiale ou faisant une libation, est très considérable. On en trouvera dans le Dictionnaire beaucoup d'exemples (fig. 1959, 2043, 9254, 2425, 2571, 3831, 3928, 4164, 4166, 11232 16, 12451. Nous en ajoutons un qui est tiré du beau vase représentant Crésus sur son bûcher et s'offrant lui-même en holocauste solennel (fig. 56311'Dans tous les sacrifices, dans tous les banquets, dans les cérémonies funéraires, à l'occasion de toute fête ou de tout départ, on faisait une libation aux dieux avec la phiale. Les dieux eux-mêmes et les morts sont représentés tenant la phiale, emblème de leur propre félicité et souvenir des offrandes de vin, de lait ou d'eau miellée qu'on leur apportait (fig. 1959, 3831, 4164, 4166, 4232, 4.245). Le liquide était en général contenu clans un cratère où l'on puisait avec une mnochoé ou un cyathos (fig. 2041, 2047, 2237) ; on versait ensuite avec l'tenochoé dans la phiale (fig. 377, 2251, 4232); on pouvait aussi plonger directement la phiale elle-même dans le cratère''. Ce vase était un accessoire si essentiel du sacrifice religieux [sACRIFIGlWr; cf. fig. 2633 et 26381 que l'usage s'était établi pour tout pèlerin riche, qui venait faire ses dévotions dans un sanctuaire, de laisser en partant une phiale d'argent ou d'or en hommage [DONARIL'br, p. 3731. Les fondations perpétuelles prévoient presque toujours, à côté des frais annuels pour les sacrifices, la dépense pour la fabrication ou l'achat d'une phiale16. De grands personnages, des associations, des députations, laissaient ainsi des témoignages de leur piété qui restaient catalogués dans le temple et inscrits sous leur nom 17. On a calculé que dans les sanctuaires de Délos entraient chaque année environ vingt-deux phiales de ce genre10, Sur les Inventaires d'A thènes prend souvent place l'offrande d'une phiale d'argent, faite par l'esclave affranchi, au moment où il entre dans la vie civile 19. Le temple d'Apollon Délien, au commencement du rie siècle av. J.-C., en possédait près de seize cents, qui présentaient une grande variété de formes et de décors : unies (aaïx0, cannelées (ôGeo z(, avec godrons en fers de lances (aoy/cTaO, ornées de feuillages, de fruits (xapuwTz(, (iaTi1xod), de reliefs avec des personnages ou des animaux (axTUIcol, â llayint). On décrit aussi des phiales dorées (ir:(Xpuaot, ôiâypuao() ou rehaussées de pierreries (ihOit0oi), etc. On note celles qui ont un ombilic ((zoadgtpaaoi, ôpcpaawTCs(), qui sont montées sur un pied (rtolg'e1'v) ou qui ont des anses (t11Ta). Nous apprenons que la ville de Rhodes fabriquait spécialement des coupes de ce genre (pofitaxai ; d'autres sont appelées yopyieiot, sans doute du nom d'un fabricant Gorgias. Le poids d'une phiale d'argent était généralement de PIII. /435 PliL 100 drachmes ; quelques phiales d'or pèsent jusqu'à 200 drachmes et plus'. Les fidèles qui ne pouvaient pas faire cette dépense payaient une légère redevance nommée sx tpti)er)ç, sorte de taxe due pour le prêt des ustensiles nécessaires au sacrifice2. La phiale qui contenait l'eau lustrale destinée aux aspersions portait le nom d'7copavi-iptov [LI'sTRATIO, p. 1.408,. Les belles phiales grecques, ciselées par de grands artistes comme Myron, Polyclète, Mys, Mentor, etc., étaient encore en circulation à l'époque romaine et recherchées par les riches amateurs4. II. Par assimilation, on donnait le nom de tptx.arl à la soucoupe de bronze, formant bobèche en haut de la tige d'un flambeau'. E. PoTTIER.