Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

Article PLAUSTRUM

PLAUSTRUM (et PLOSTRUM 1) "AN.aza, x7crlvrl.Chariot, charrette, tombereau. Les Grecs avaient déjà à l'époque homérique un véhicule propre au transport des bagages et des gros fardeaux ; ils l'appelaient oti,U ; c'est sur un chariot de ce genre que Priam emporte les présents destinés à Achille et qu'il rapporte le cadavre d'Hector' ; Nausicaa y empile les vêtements de sa famille qu'elle va laver à la rivière 3. On s'en sert pour charrier le bois et la pierre nécessaires aux travaux de construction 4 ; le cultivateur ne peut s'en passer pour l'exploitation de son champ 5. C'est encore avec ce chariot que l'on rentre les barques pendant la mauvaise saison', et il y en a à la suite des armées pour le transport du blé, du vin, des bagages, des machines et des blessés 7. Il résulte de plusieurs textes que les Grecs ne faisaient point de différence entre l' (a.tt a. et l' nt-v ; Homère emploie les deux termes comme synonymes ',Ce chariot lourd et massif pouvait être muni de deux ou de quatre roues s ; on y attelait ordinairement des boeufs et des mulets, plutôt que des chevaux. Pour ne rien dire ici de l'agencement du joug, qui occupe une place importante dans la description homérique [CURRUS, JuGuM] 10, nous noterons seulement que le véhicule comprend parmi ses éléments essentiels une plate-forme (u7ceptep(a, 7c)((ve(ov), c'est-à-dire tout simplement un assemblage de planches posées sur le train pour supporter la charge, lorsqu'il s'agit de charrier autre chose que des arbres ou des poutres". Si l'on y entasse des fardeaux qui ont besoin d'être contenus, on les enferme entre des ridelles pleines ou à claire-voie t2; ou dans une benne, grand panier d'osier tressé (neto(v6), fait spécialement pour cet usage" (cf. BENNA, fig. 820). On s'appliqua à diminuer le poids des gros chariots primitifs, quand on s'en servit pour le transport des personnes. Celui qu'on voit (fig. 5702) est fait de bois léger percé de trous, ou d'osier entrelacé 1`. Quand les relations furent plus faciles et plus sûres, on les mit à la disposition des femmes pour les trajets un peu longs qu'on ne pouvait accomplir sans fatigue ; l'à.ta;x, ou .7r r), devint le véhicule ordinaire dans les déplacements de famille (fig. 5702, 5703)13, on l'employait notamment dans les pèlerinages aux grands sanctuaires, objets de la dévotion commune de tous les Grecs. On pouvait le couvrir avec une tenture (nxr,v'',I), car au besoin on y dormait pendant la nuit ; les femmes y trouvaient aussi un abri contre l'indiscrétion des passants. Une loi de Solon défendait même aux femmes de sortir la nuit de leur demeure autrement qu'en chariot (N.l' ) et précédées d'une torche ". Le véhicule primitif fut, parla suite, orné avec un luxe que les lois somptuaires s'appliquèrent à réprimer [VÉHICULA]. Les hommes voyageaient surtout à cheval ; il semble que l'on vît avec une certaine défaveur PLA 505 PLA ceux qui se faisaient porter en char comme les femmes ; cependant il est certain qu'ils usaient aussi de ce mode de locomotion quand ils avaient avec leurs bagages de longs espaces à parcourir 1. Le véhicule appelé âfaaa ou ü7Cilvv1 avait encore chez les Grecs une autre destination : il paraissait souvent dans les processions et autres solennités religieuses, portant soit les ministres du culte, soit les images des dieux 2. La figure 5704 reproduit une monnaie d'Éphèse, où l'on voit un chariot à quatre roues attelé de deux mulets; sur la plate-forme s'élève une édicule, qui devait contenir la statue de Diane, la grande divinité protectrice de cette ville ; en exergue on lit la légende : 'Ees.cov, chariot sacré rles Éphésiens] 3. Les Perses et les nations barbares qui eurent des relations avec les Grecs faisaient un grand usage des chariots de transport ; ils en avaient de toutes sortes, depuis les plus somptueux, où les souverains asiatiques traînaient à leur suite leurs trésors et leurs harems [HARMAMAXAI, jusqu'aux plus grossiers, sur lesquels les Scythes et autres nomades passaient presque leur vie`. Tout ce qui précède s'applique exactement au plaustrum italique, bien qu'il y ait eu probablement des différences locales dans la construction et la forme de ce véhicule. Le plaustrum, c'est le chariot primitif et grossier, qui a servi avant toutes choses aux travaux des champs, à la moisson et à la vendange 5. On en peut voir de nombreux exemples sur les monuments. Tantôt, comme dans la figure 5705, il comporte une caisse ou cuve en bois plein' ; tantôt, comme dans la figure 5706, les côtés sont simplement garnis de barres et de taquets, probablement mobiles 7 [voir encore AMPHORA, fig. 286 coRBls, fig. 1942; VINLM]. Les roues sont souvent, surtout VII. pour les lourds fardiers, des roues pleines, d'un seul morceau (fig. 5705 à 5707) ; on les appelle tympana,à cause de leur ressemblance avec un tambour. Elles font corps avec l'essieu et tournent en même temps. Le frottement est par conséquent énorme, ce qui ajoute beaucoup à la lenteur de l'allure et produit un grincement caractérise tique; il suffit d'avoir entendu les chariots encore en usage dans le pays basque pour comprendre ce que veulent dire les auteurs anciens quand ils parlent des chariots stridents et gémissants 8. Ces lourds véhicules, le plus souvent attelés de boeufs, entrèrent de bonne heure dans les villes pour y porter les provisions, la pierre et les matériaux de construction °. Puis un jour vint où on les affecta aussi au transport des per sonnes, et particulièrement des femmes (fig. 570711°. I1 est probable qu'alors on y introduisit, comme chez les Grecs, les clayonnages qui les allègent, les nattes de jonc (scirpes) qui les tapissent et qui forment couverture au besoin", et tous les perfectionnements successifs qui en modifièrent plus ou moins la forme ; ainsi s'explique que l'on rencontre tant de noms différents pour désigner des voitures qui présentent en somme beaucoup d'analogies avec le plaustrum, tandis que ce mot est resté comme terme générique pour les désigner toutest° [cAR'ENTUM et CARRUS, fig. 11.99; vEHICOLA]. La lex Julia rtubnicipalis appelle plaustruén aussi bien le tombereau avec lequel on enlève les ordures, que la voiture qui porte les Vestales et les prêtres dans les processions 13. II 64 PLE --506 -PLE ne faut donc pas craindre de prendre le mot dans une acception très large, pourvu que l'on excepte le char de guerre et le char de coursé :mimes ; ainsi il convient certainement aux véhicules représentés dans l'article nui niaiSTA, quoique d'autres noms plus précis puissent aussi leur être appliqués. Naturellement on fabriquait des chariots de toutes les dimensions, depuis le plaustrum mains qu'on peut supposer pourvu de quatre roues ; dans une ferme d'importance moyenne Caton veut qu'il f ait trois de ces grands chars '. Les plus petits étaient appelés plostella. Le plostellum punicum était une machine agricole, inventée par les Carthaginois, avec laquelle on séparait Pt.EBISCITUM'. -Le plébiscite est la décision prise par la plèbe romaine dans son assemblée (concilium plebis) 2, sur la proposition (rogatio) d'un ou plusieurs de ses tribuns' j coxciLni i il porte le nom de fauteur unique ou d'un seul des auteurs de larogatio 4. Le sens du mot n'a jamais changé, depuis la date (260 = 4941 où la plèbe fut régulièrement organisée après la première sécession, ,jusqu'à l'époque où le principat la dépouilla comme le peuple du pouvoir législatif. Mais la portée du plébiscite e varié dans ce laps de temps. Au début, la plèbe légiférait à elle seule pour elle seule, c'est-à-dire que ses décisions prises sans intervention aucune des patriciens n'obligeaient qu'elle-même, et, quand elles concernaient des affaires d'intérêt général, n'étaient que des pétitions au peuple; plus tard elles équivalurent aux décisions du peuple ou lois proprement dites' et furent, elles aussi, des leges publicee s. 1.a loi Hortensia (465 à 468 = 289 à 286), qui ordonnait ut. quod ria (= plebes) iussisset, (»nnes Quirites teneret7, marque sans conteste le terme de cette évolution, dont les phases restent pour nous très obscures. D'après la tradition, deux lois antérieures avaient ordonné la même chose, une loi Valeria Horatia de 305 = 419 et une loi Publilia Philonis 0 de 415 =339. Pour résoudre ce désaccord des témoignages anciens, que les uns supposent incomplets, les autres à la fois erronés et incomplets, les interprètes modernes ont imaginé de multiples inpothèses90 ; ou doit se borner ici à t`noncer les principales sans les discuter. Selon Niebuhr", la loi Valeria Horatia exigeait l'approbillion de la rogatio par le Sénat (senatus auctoritas) )1 et la ratification du vote par les comices curiates (patrum auctoritas), deux conditions abolies ensuite, celle-ci par la loi Publilia, celle-là par la loi Hortensia. Selon Walter 1 3, les deux conditions étaient requises avant la loi Valeria Horatia; elle supprima la patrum auctoritas et la loi Publilia supprima la senatus auctoritas ; la loi Hortensia confirma l'équivalence absolue en ouvrant aux patriciens l'accès des concilia plebis. Selon Ptaschnik'", la loi Valeria Horatia imposait la senatus auctoritas préalable; puis, comme les patriciens contestaient la validité des plébiscites à cause du manque de la patrum auctoritas, la loi Publilia confirma cette validité ; enfin, la loi Hortensia abolit l'obligation de la senatus auctoritas. Selon Willems'', la patrum (= senatus) auctoritas était nécessaire, d'après la loi Valeria Horatia, sous la forme d'une ratification du vote de la plèbe, d'après la loi Publilia, sous la forme d'une approbation préalable de la rogatio ; la loi Hortensia la supprima. Selon Madvigt0, l'équivalence absolue fut établie par la loi Publilia; auparavant elle était subordonnée à une approbation de la rogatio ou du vote par le Sénat (senatus auctoritas) ou par une assemblée patricienne plus nombreuse (patrum auctoritas) ; la loi Hortensia ne fut que le rappel et la confirmation de la loi Publilia. Selon Langef7, les trois lois en question ne firent qu'élargir la compétence des concilia plebis ; l'équivalence fut absolue dès la première. Mommsen" est d'avis que les lois Valeria Horatia et Publilia concernaient, non les décisions des concilia plebis, mais celles des comitia tributa, et que la loi Hortensia affranchit les plébiscites de la senatus auctoritas jusque-là nécessaire. Ihne's estime que l'équivalence sans condition fut instituée par une loi Publilia Voleronis de 283 = 471, dont les lois Valeria Horatia et Hortensia ne furent que des confirmations appelées par les circonstances, et que la loi Publilia Philonis n'est qu'un doublet imaginaire de la loi Publilia Voleronis. Rennes20 croit, lui aussi, que la loi Publilia Philonis est apocryphe ; mais il affirme que la loi Valeria Horatia soumettait les plébiscites à la ratification des comices centuriates, condition abolie par la loi Hortensia. Quoi qu'il en soit, durant les trois derniers siècles de la république, les plébiscites furent la source la plus féconde de la législation romaine. Que l'activité des assemblées de la plèbe ait été plus grande en matière législative que celle des assemblées du peuple, dès l'instant où ces assemblées furent égales au point de vue de la capacité et de la compétence, cela s'explique aisément2'. Les tribuns avaient plus de loisirs pour la préparation des lois, la lutte contre le patriciat une fois terminée, que les autres magistrats absorbés par leurs fonctions administratives ou militaires. Ils se piquaient d'être les héritiers fidèles d'une tradition, c'est-à-dire les champions du progrès. Enfin ils exerçaient leur droit, non seulement pour satisfaire leur goût des réformes démocratiques et leur esprit d'opposition, mais souvent, aussi parce que le Sénat les utilisait comme instruments P LE 507 PLE des innovations qu'il jugeait avantageuses. La réaction de Sylla ralentit momentanément cette activité, le dictaLeur ayant enlevé aux tribuns ()mine fus ferendarunt legunt sans l'autorisation du Sénat' ; aussi la rogatio qui devint la lex Antonio de Termessibus fut-elle proposée à la plèbe ex s(enatus) s(ententia)'. Mais l'année même de ce plébiscite (683 = 71), ou l'année suivante, Pompée restituait aux tribuns leur droit, d'initiative dans son intégrité ; ils le gardèrent jusqu'à l'établissement du principat. La loi Falcidia de 711 = 40 passe pour être le plus récent plébiscite connu'. Pnlrlpre Fsios. PLERS. Le mot plebs ou plebe.s (d'où plebeius, plebitas 1), dont la racine se retrouve dans plenus, 7tkï tios, désigne une des classes de la population romaine, la plèbe, par opposition à l'autre classe, au patriciat. Elle apparaît dès les origines de Rome, étroitement liée aux clients. Quels sont les rapports, les origines de ces deux classes inférieures, clients et plébéiens? C'est un des problèmes les plus obscurs et qui a suscité, taret chez les anciens que chez les modernes, les plus nombreuses hypothèses. La tradition latine, très confuse, fait de la plèbe une multitude, tantôt d'origine inconnue, tantôt composée de clients, augmentée peu à peu par les conquêtes et l'afflux des réfugiés dans l'asile de Romulus'. La tradition grecque attribue à Romulus la division de la population en deux groupes, les patriciens et les plébéiens, ces derniers assujettis à la condition de clients des premiers'. Aux yeux des modernes, les plébéiens sont tantôt des clients attribués aux gentes; tantôt des habitants des cités voisines, surtout de la campagne, soumis par le patriciat urbain, différents des clients, transportés à Rome ou laissés dans leurs pays, et pourvus de la !quittas sine suffragio°; tantôt des familles exclues de l'État religieux comme dépourvues des cultes domestique et gentilice ° tantôt à la fois des clients affranchis du patronage par l'extinction des gentes patriciennes et des étrangers venus librement des villes fédérées 6 ; tantôt les représentants d'une race primitive, soit de Sicules, soit de Ligures, qui habitait les cavernes de l'époque néolithique et qui aurait été réduite à une condition inférieure par des conquérants italiotes, en gardant cependant sa liberté, ses cultes, son droit propre 7. Ces différents systèmes renferment chacun une part de vérité. La plèbe a dù comprendre des éléments divers dont quelques-uns antérieurs à l'établissement des Italiotes mais elle a été d'abord surtout une dérivation de la clientèle, puis elle a détourné à son profit les sources qui avaient alimenté cette dernière [CLLENS; . Nous retrouvons en effet les mêmes théories sur les origines de la clientèle. On voit dans les clients soit d'anciens habi taras du Latium réduits par traité à cette condition, soit des réfugiés et des émigrés placés chacun par applicatio sous la protection d'un patricien, soit des affranchis de l'époque patriarcale et royale qui n'obtenaient encore par l'affranchissement qu'une demi-liberté 8, soit des fils émancipés. C'est la rupture du lien de dépendance personnelle qui a fait passer les clients au rang de plébéiens libres. Elle a eu lieu de plusieurs manières : soit par un relâchement naturel dans les grandes maisons patriciennes qui avaient un nombre considérable de clients' et surtout à l'égard des clients issus de la conquête, dont la clientèle avait toujours dû être purement nominale10; soit par l'extinction ou l'expulsion de gentes patriciennes. Il faut tenir compte en outre de l'influence des transformations politiques et sociales : le client devenu soldat à côté du patricien n'était plus en réalité un client, mais un plébéien. La clientèle a donc perdu constamment du terrain au profit du plébéiat, et pendant longtemps, dans la période de transition, il a dù y avoir un mélange des deux conditions. C'est ce qui explique ces nombreux passages de TiteLive qui montrent la distinction des clients et des plébéiens, et où les plébéiens se plaignent de l'appui donné aux patriciens par leurs clients dans les comices '. Mais le passage de la clientèle au plébéiat n'est pas resté la seule source du recrutement de la plèbe. A mesure que le droit de l'État l'emporte sur celui des gentes, des clans, les vaincus ne sont sans doute plus répartis entre les patriciens, mais deviennent des clients publics, des plébéiens". Joignons-y les réfugiés de toutes sortes, les étrangers protégés par l'État, peut-être les forctes et savates de la loi des Douze-Tables ". On a ainsi 1a plèbe déjà constituée à l'époque royale; à partir de la République elle s'augmente des affranchis qui acquièrent immédiatement le droit de cité réduit au minimum, mais garanti par l'État [LIBERTLSI. La plèbe de l'époque primitive a donc la liberté personnelle, le droit de propriété dans une mesure que nous ne connaissons pas; elle est exclue des droits politiques des citoyens, de l'armée''"; si elle fait partie des curies'', elle y est certainement dans une situation inférieure, sans droit de vote [coMiTZA]. A une époque inconnue, tes plébéiens reçoivent peut-être une première satisfaction par l'introduction dans le patricial, des minores gentes, s'il faut y voir soit la population du Quirinal et du Viminal, soit les familles nobles de villes voisines, incorporées à Rome GENS, p. 13141. Puis une lente évolution, dont nous ignorons les dates, donne le droit de cité complet aux plébéiens et transforme l'État patricien en un État patricio-plébéien où le populus comprend les patriciens et la plèbe 16. Cette transfor PLE -508 PLE mation est impliquée dans l'organisation de l'assemblée centuriate que la légende attribue à Servius Tullius et qu'on peut en tout cas mettre encore à l'époque royale [COMITIA] ; puis le Sénat est probablement ouvert aux plébéiens au moment de la fondation de la République ' 1 SENATUS]. Ils ont sans doute acquis en même temps dans cette période l'égalité civile avec les patriciens, la pleine capacité juridique; il leur manque cependant, à ce point de vue, le droit d'adrogation, acquis postérieurement, le connubium avec les patriciens qu'ils n'acquerront que par la loi Canuleia [CONNUBICJI] ; le testament comitial, subordonné au droit de vote dans les curies, mais sans doute remplacé de très bonne heure en leur faveur par le testament sous la forme de mancipation [TESTAMENTUM] ; le mariage par confarreatio ,_MATRIMONIUM]. La formation de la plèbe a eu pour conséquences la formation du concept de l'ingénuité plébéienne et de la pseudo-gentilité plébéienne : les plébéiens de naissance libre, les ingenui, se séparent en effet des plébéiens affranchis [LIBERTUS] ; d'autre part les familles de la noblesse plébéienne se donnent une organisation analogue à celle des gentes patriciennes, en constituant des pseudogentes, des stirpes, pour réclamer des droits de tutelle, de succession 2, et peut-être aussi établir des sacra gentilicia ; mais beaucoup de plébéiens restent sans gentilité Au point de vue économique, les plébéiens sont pendant longtemps exclus en fait, mais non en droit, par les patriciens de la possession des terres pu bliques AGRARIAE LEGES]. Au point de vue politique les plébéiens réclament le droit d'arriver aux magistratures [MAGISTPATUS], la codification du droit civil, l'adoucissement de la législation en matière de dettes. Le tableau de la lutte entre les patriciens et les plébéiens, qui remplit l'histoire romaine depuis la fondation de la République jusque vers l'époque de la loi Hortensia entre 289 et 284 av. J.-C., a été tracé aux articles coMITIA, PATRICII. Après cette date la noblesse plébéienne se confond avec la noblesse patricienne et son histoire rentre dans celle du Sénat [NOBILITAS, SENATUS], comme l'histoire des plébéiens en général rentre dans celle des citoyens romains. Jusqu'à la fin le plébéiat reste incompatible avec le patriciat; à l'époque historique la qualité de plébéien s'acquiert d'abord comme celle de citoyen en général : par la naissance, pour laquelle on applique les règles habituelles du droit s ; par l'adoption qui peut s'appliquer à un enfant plébéien, patricien ou latin ; par l'affranchissement [LIBERTCS] ; par la concession du droit de cité en vertu d'une loi spéciale et par l'émigration des Latins à Rome [CIVITAS]. Il y a en outre deux modes spéciaux d'acquisition, l'adrogation d'un patricien par un plébéien 6, et la transitio ad plebem [GENS, p. 1509]. Par opposition aux patriciens et au populus, la plèbe ', depuis une date inconnue, que la légende place en 494 av. J.-C, après la première retraite sur le mont Sacré, forme une communauté distincte qui n'a cependant ni finances ni terres publiques, ni représentation extérieure, ni sénat. Elle a pour magistrats les tribuns et les édiles de la plèbe [AEDILES, TRIBUNI PLEBIS]. Elle a une assemblée composée uniquement de plébéiens à l'exclusion des patriciens, le consilium plebis qu'il ne faut pas confondre avec les comices par tribus patricio-plébéiens. Le consilium plebis ou simplement consilium a pu être au début une assemblée par curies pour la nomination des tribuns ; puis le vote y eut lieu par tribus à une date inconnue que la légende fixe en 471 av. J.-C, sur la proposition du tribun Volero Publilius ICOMrr1A]. Cette assemblée vote, par opposition à la tex votée par le populos, le plebiscitum le [PLEBISCITUM] qui, par abus, s'appelle aussi lex". Les plébiscites ne paraissent pas avoir eu besoin légalement de la confirmation du Sénat fAUCiOR1'IAS PATRUM[; mais en fait plusieurs plébiscites importants, donnés par la tradition, tels que la loi Terentilia placée en 462 av. J.-C., la loi Canuleia en 445, les lois licinio-sextiennes de 367, la loi Ogulnia de 300, ont pu être votés avec l'assentiment du Sénat et obliger ainsi tous les citoyens ; puis la loi Hortensia reconnaît entre 289 et 284 la validité inconditionnelle des plébiscites t2 [COMITIA, PATRICII], et ils ont désormais la même valeur que les lois propres' Sylla,en 88, remet pendant quelque temps en vigueur le système antérieur à la loi Hortensia eu demandant l'assentiment préalable du Sénat pour toute rogatio faite à la plèbe''` ; mais Pompée rend en 71 leurs pouvoirs législatifs aux tribuns et au concile de la plèbe [COMITIA, p. 1383]. A l'époque historique, cette assemblée, réunie sans édit, sur une simple convocation orale faite par un héraut, sans auspices, quoique soumise vers 158 à l'obnuntiatio'° par les plébiscites Aelien et Fufien, pré sidée par les tribuns ou les édiles plébéiens, jouit à peu près de la même compétence que les comices centuriates et les comices par tribus patricio-plébéiens. Elle élit ses tribuns, ses édiles, généralement aussi les commissaires a une compétence judiciaire pour laquelle nous renvoyons à l'article JUDICIA PUBLICA, p. 646-649. Au point de vue législatif, les tribuns ayant eu ici beaucoup plus d'activité que les consuls et les préteurs, les plébiscites ont été beaucoup plus nombreux sous la République que les lois consulaires et prétoriennes, soit pour le droit civil, soit pour l'administration ; quelques traités de paix ont été aussi votés par plébiscite Le; au début, les assignations de terres et de colonies étaient généralement votées par la plèbe avec l'assentiment du Sénat, mais depuis les Gracques, la plèbe s'en passe ordinairement f 7, et choisit même aussi le magistrat chargé de l'opération f e. Pour la politique générale, la plèbe prend de plus en plus l'habitude de conférer des pouvoirs extraordinaires (imperia extraordinaria) aux magis PLE bOb trats et aux promagistrats PROPRAETOR, l'ROVINCIA] par exemple les lois Manilia, Gabinia, qui accordent à Pompée une véritable royauté sont des plébiscites. Rien ne contribuera plus que ces empiétements à la chute de la République. Quant à la prorogatio, au début la proposition vient du Sénat et la plèbe confirme ' ; mais dès le ne siècle av. J.-C. le Sénat seul est compétent (COTiITIA, p. 1382-83]. Pour l'histoire particulière du groupe de citoyens qui compose en grande partie la population de Rome et qu'on appelle au sens étroit la plèbe romaine, nous dès Auguste et Tibère le classement des citoyens en deux groupes : le premier qui comprend les honestiore.s, les sénateurs, les chevaliers et les décurions; le second qui comprend les classes inférieures, les Tlumiliores, plebeii, tenuiores 2 HONESTIORES] ; les peines criminelles sont différentes pour ces deux classes ; il peut y avoir dégradation de l'une à l'autre En outre, dans chaque ville, à la classe des décurions, à l'ordo s'oppose la