Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

Article PRIAPUS

PRIAPUS. Le mystère de la génération , comme celui de la mort, a souvent inspiré les religions primitives, et chez la plupart des peuples anciens on trouve le phallus adoré comme le siège ou le symbole d'une énergie divine Mais, aux origines, la notion d'une chose sacrée et celle d'une chose impure se confondent fréquemment, l'une et l'autre impliquant l'idée de crainte et de prohibition. Aussi le phallus, qui dans de nombreux rites était vénéré comme Aul. Gei!. VI, 29 ; Labeo ap. Paul de jud. pub]. Dig. X1V, III, 13, 10. l'article ,usoatn, t. HI, 1, 522, n. 17, 3 Surtout de la part des tribuns de la plèbe. Plut. Marius, 4; Quaest. Boni. 50; Val. Max. IX, 5, 2 ; CM. Ad Att. e Plut. Cat. min. 33. 9 Ulp. 5 ad Ed. Big. H, 4, 2 ; Pompon. Encbir. off. proc. Big. XLVIII, 3, 1. 12 Tit. Liv. XXV, 4. Voir des exemples de ces engagements dans les papyrus gréco-égyptiens s Aegypiische Urk. aise den Museen au Berlin, 581; Grenfell et Hunt, Greek papyri, 11, fit et 79; Kenyon, tung des rem. Staates, 1881, t. h', p. 347 ; Mommsen, Rdmisches Staatsrecht, 1885, p. 170 ; Bouché .Leclercq, Mavauel des Institutions romaines, 1886, p. 36 et PRIAPUS, I Jamblich., De Mysteriis, 1, t t, etc. 2 Theocr. Id. 1, 21 ; Epig. 3, . 3 La plus connue est Orthanés adoré en Attique, mais qui n'eut lui-même qu'une importance toute locale; cf. Roscher, Lextkon, s. v. 40n disait np(aros, 1139, Priepo. La dernière étymologie proposée est e u s devant +, et S.-o; = phallus (Osthofî, Arch. fier Beligionswiss. Vll, 1984, p. 416 sq.). Wroth, Cat. coins Brit. Trist, 1, 10, 26; Servius ad Georg. IV, i lt. Priape est dit Aaµtaxr.up dans l'iriser, de Théca (infra), Sur sa statue 11hyphal"olcv cf. Sehol. Lucian. Dial. d'or. 3 . loup un emblème de la puissance génératrice', litait, d'autre part, comme beaucoup d'images obscènes, employé comme talisman et détournait, croyait-on, les maléfices FASCINLM, p. 986'. C'est sous ce double aspect que s'offre aussi à nous le culte de Priape, qui n'est autre chose qu'un phallus an thropomorphisè. La Grèce primitive a connu des idoles purement phalliques, mais l'impudeur de ces figures fut de bonne heure atténuée et il n'en subsista qu'un souvenir adouci dans les Hermès à demi humains IIER7,iAE p. 1301, Seulement on adopta à l'époque historique Théocrite semble être le premier écrivain qui le mentionne' un dieu asiatique dont les statues exprimaient très crûment l'idée de la force génératrice, Priape, qui éclipsa ou absorba toutes les autres déités analogues'. Priape (Ilp:àaroç), dont le nom barbare a été expliqué par des étymologies diverses°, était une ancienne divinité des Bébryces établis au sud de l'Hellespont. Le centre principal de son culte resta toujours Lampsaque, (lui reproduit son image monstrueuse sur ses monnaies"'. C'est là que sont localisées la plupart des fables dont il est le héros'. il était honoré aussi dans les colonies voisines fondées sur la cèle de Propontide, Parium, Cyzique et Priapos qui lui emprunta son nom', et il conserva toujours, même à Rome, le surnom d'fellespoéttioe'us'. Dans ces villes maritimes il était adoré comme le héros protecteur de la navigation et de la pêche', et leurs marins propagèrent son culte dans les lies de la nier Égée, 'Masos, Lesbos", Théra". Il gagna aussi t'intérieur de la Lvdief2 et fut bientôt accueilli en Grèce où il fui souvent confondu avec les hermès ithyphalliques''' ou avec Pan, ce syncrétisme se manifeste dans certaines images qui nous sont parvenues''. D'autre part, Priape s'introduisit dans les mystères de Dionysos" )on en fit t Lampsaque n erne un fils de Dionysos et d'Aphrodite l') et il pénétra, grâce à ces mystères où les phallophories avaient de tout temps été usitées, dans les parties les plus lointaines du monde hellénique. C'est probablement avec eux aussï qu'il arriva en Italie". II parait avoir pris à Home la place d'une déité phallique indigène, dlutunus Tet7.enus, dont il est fait souvent mention à propos d'un vieux rite des épou Sat. 1. c. ; Arrien parlait de Priape dan ses Blaov,a,a (fr. 32, Fr. hist. gr., III, 592). Pausanias, IX, 31, 2, 14 Certains. types aucicns d'Hermès se rapprochent de celui de Priape ; cf. un vase é figures rouges de Camarina, Monum. antirhi Acad. Lince'i XIV, 1905, p. 888 et pl. €.v,. 13 P. ex. un brome inédit trouvé à Willemeau [Hainaut] (Musée de Brucellos) : La coiffure est celle d'un liermes, les jambes velues sont celles d'un Fan, le geste est celui de certains Priapes. Priape est dit fils de Mercure : Hygin. Fab. 160 ; cf. Kaibel, Epigr. 817. Identification avec Pan : Cornet. c. 27 ; cf. infra. 18 Diod, IV, 6; Theodoret. Se€rm. 1 de file, p. 620, CSligne; cf. infra. 17 Stoph. Byz. s. u. Aa,2uas et "A6o.poos; Pans. L. c.; Strab. L. c.; Theodoret. L. c.; Soho! Apotl. Argon 1, 392, La scène de sa naissance est figurée sur un autel publié par Micl,aelis, Arch, epigr. Mitt. 1, 84 sq. pl. v. Selon d'autres mythe graphes, Priape aurait été Dionysos lui-mime; et. Preller-Robert, Griech, Mylh. sont indiquées par ,Preller-Robert, L. c. 16 Cf. Corp. 6,oscr. lat. IX, 2197 : Siyaum Liberi et Priepisci; VI, 564: Sigill(um) (plutôt que si,gilla) Priapi PHI 646 --PRI sailles', Il y était populaire depuis la fin de la République', et les poètes du siècle d'Auguste, à l'imitation des lexandrins, témoignent une dévotion parfois narquoise envers ce dieu puissant et secourable, mais quelque peu ridicule 3. Le recueil des Priapées, qui remonte à peu près à la même époque, célèbre ses vertus dans un langage qui a plus de verdeur que de vergogne`, et des inscriptions latines, parfois en vers humoristiques, lui furent consacrées sous l'Empire en Italie comme en province En Grèce comme à Rome, Priape est surtout un dieu rustique qui donne la fertilité aux champs et la fécondité aux troupeaux. Il est honoré spécialement par les pâtres, les chevriers et les apiculteurs'. Ses images, placées tantôt en plein air', tantôt dans des chapelles', s'élelmient au milieu des jardins, des vergers et des vignes', car il faisait croître en abondance les fruits des quatre saisons 10. Il apportait à ses serviteurs la richesse et la prospérité" et satisfaisai t aussi tous les désirs des époux 12. Comme le phallus détourne la fascination qui frappe de stérilité la terre et le bétail FASCLVOx, p. 986j, Priape écarte aussi toutes les influences néfastes et punit les auteurs du maléfice13. Gardien des jardins et des cam pagnes (cutstos /lortoruni, reris), il protège les cultures et les chaumières du paysan16, assure comme Pan la sécurité des bois et veille avec les Nymphes à la pureté des sources'". Il réserve surtout un chàtiment honteux aux voleurs et aux maraudeurs de tout genre ' 0, Il devait s'opposer avec plus de succès aux entreprises des oiseaux' Ses idoles rustiques avaient l'apparence d'épouvantails : un tronc d'arbre grossièrement taillé à coups de hache, où l'on enfonçait, cornmeattribut caractéristique, un gros pieu rougi, et qui portait dans la main une faux de bois et sur la tête un ro seau qui s'agitait au vent"; voilà comment on nous dépeint celui qu'on appelait plaisamment« le gardien des citrouilles »". Mais dans les temples de l'Hellespont on lui prêtait une apparence plus noble, et c'est sans doute à un sculpteur asiatique de l'époque alexandrine que remonte le type de Priape le plus fréquemment reproduit : un personnage debout, portant au menton une barbe clairsemée, la tête entourée d'un linge, comme une femme, vêtu d'une longue robe orientale, qui, retroussée par devant, contient dans ses plis une masse débordante de fleurs et de fruits, et découvre audessous le signe distinctif du dieu (fig. 3797) °°-0. Ailleurs cette robe tombe jusqu'aux pieds et le priapisme n'est qu'indiqué sous les plis du vêtement ou par la curiosité d'enfants qui soulèvent c'eluici. On trouve ce motif reproduit aussi bien par la peinture (fig. 377?1 que par la sculpture (fig. 3798) 21. Nous ne pouvons insister sur l'évolution d'un tope, au s nombreuses variétés, où la franche obscénité des origines fit place à une grivoiserie parfois pire 22. Priape ne resta pas toujours un dieu sans conséquence, qu'on plaisantaitfamilièrement dans des vers égrillards, qui figurait comme personnage grotesque dans les pièces populaires o3 et qui, même dans les cérémonies religieuses, prêtait à rire" Il avait été adopté, nous l'as eus dit, dans les mystères grecs, par les Orphiques 2' comme par les Diony'siastes2G, et l'on dissimula son caractère un peu équivoque à l'aide d'interprétations philosophiques. Dans tous les mystères orientaux la mort est conçue comme une renaissance à une vie nouvelle: Priape, la force génératrice, fut regardé comme celui qui assure aux fidèles l'immortalité21, et ses statues turent placées sur les tombeaux'8. Confondu avec l'an. c'est-à-dire flzv, le grand Tout, il devint la personnification de la puissance fécondante de l'univers ; il fut identifié bientôt avec la Nature elle-même29 et ou l'adora comme une divinité panthée30 [PA5TUEA]. Il pénétra même dans une secte gnostique : Justin vénère sous le nom de Priape le principe du Bien, qu'il place à la tête de la triade suprême". PRI 64. -PRI Cette tentative audacieuse pour assigner au dieu it11y'phallique une place dans la théologie chrétienne fut isolée et éphémère, mais son culte rural se maintint avec beaucoup plus de ténacité dans la superstition populaire et dans les pratiques bizarres de certaines dévotions locales. FR. Ci MONT.