Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

Article SCYPHUS

ment, en archéologie, le nom de slcyphos à un vase à boire, en forme de tronc de cône renversé, à hase plate et solidement établie, à large embouchure, muni de deux courtes anses horizontales et attachées près du rebord (fig. 6250) ". On le distingue ainsi d'autres vases à boire usuels comme le cantharus, le carchesiunl, le ciborium, la cotylè (fig. 1128, 1185, 1460, 21)35), caractérisés par un pied mince ou par des anses longues et verticales. Mais, comme nous l'avons fait remarquer bien des fois en étudiant les noms de vases les descriptions antiques n'ont pas la même précision, ni la même fixité que nos dénominations modernes, qui restent le plus souvent conventionnelles Dans Homère. Eumée prépare pour son hôte Ulysse un cyssibium rempli de vin que le héros boit pendant le repas et, quand il s'est rassasié, Eumée lui offre le vase dont, il se sert lui-même, son cx,lfoç ° ; on peut penser qu'il s'agit d'une simple écuelle de berger. De même, dans le Cyclope d'Euripide Ulysse fait boire Polyphème dans un exéipoç Aussi quelques archéologues ont assimilé ce slcyphos à une écuelle, à un bol rond, le µaeTdç [MAsTos, cvmtk] 8. Mais, d'autre part, Homère décrit sous le nom de U702ç µ(ptxuaEÀ),ov un vase à boire célèbre, que Nestor avait, rapporté de Pylos ° et que, plus Lard, les auteurs désignent sous le nom de axé(poç NECTOque M. Helbig a consacrée à ce vase [nÉ:PAS, p. 103], il résulte qu'il avait la forme de ce que nous appellerions plutôt un canthare ou une cotylè, ayant un pied élevé et de, longues anses verticales 11. Stésichore dit aussi sxun(pEtov ôs;raç 12, en parlant du vase à boire d'Hercule, ce qui lie encore le terme cxr( oç à celui de 'dé7r«ç, applicable à toute sorte de vases à deux anses. Pollux l'assimile au xé oç [CAnus[ 13. Les renseignements plus détaillés que nous devons à Athénée ne sont pas beaucoup plus clairs pour la détermination de la forme u. Il décrit leskyphos comme un vase à boire le vin, muni d'anses (4iŒ doiç), en bois (ôoueiTEoç) ou en argile (xEp y.ooç), en matière précieuse, argent, or, ou même onyx. Ce vase peut être grand, large (u«s éç, SCY 1160 SCY e3piçç). Les :vuztvot ax4aot atteignaient une capacité de deux cotyles, et le skyphos d'Hercule contenait ,jusqu'à trois bouteilles de vin (-?t)éyu•roç). C'est sans doute en raison de leur grande capacité que certains skyphoi étaient nommés Ÿipox),emrtxo( ; mais d'autres y voient un ethnique désignant une ville d'Héraclée 2. Athénée ajoute pourtant que ces vases se distinguent des autres par la prreence d'un ornement, en forme de noeud, placé sur les anses, dans lequel il reconnaît le fameux ôeap.ôs d'amulette contre les maléfices 'senus, fig. 53241 et nous avons, en effet, gardé d'assez nombreux vases, pourvus d'anses de ce genre (fig. 6231) 3. Certaines fabriques, en Béotie, à Rhodes; à Syracuse, étaient renommées polir ce genre de fabrication'. Le même auteur mentionne encore des skyphoi de métal ornés de reliefs ; l'habile orfèvre Mys avait exécuté un axé'. eç `11xi r(7_uTIX,Zç d'après un dessin de Parrhasios représentant la Prise (le Troie'. Ce sont des vases du même genre que les agents de Verrès pourchassèrent plus tard chez les riches particuliers de Sicile, pour enrichir la collection du peu scrupuleux préteur'. Les scyphi honierici de Néron appartenaient à la même catégorie, et certains vases d'argile, à reliefs, peuvent nous en donner une idée (fig. 268); mais, d'après Pline, ces pièces précieuses étaient en cristal'. Les inscriptions grecques mentionnent aussi parmi les skyphoi dédiés dans les temples des oeuvres de grand prix, ornées de ciselures et d'ornements en relief'. Quelques auteurs modernes ont étudié et décrit une forme de skyphos appelé 7avx8rvatxrî;, mais nous croyons que cette opinion repose sur une fausse interprétation du texte d'Athénées. En latin, le mot scyphus désignait, par métaphore, les plaisirs de la table; on disait inter scyphos comme inter poculu 10Virgile en fait un vase religieux, destiné aux libations, en souvenir du scyphu.s herculaneus, apporté par le héros en Italie et dont on se servait dans les sacrifices". On mentionne des .seyphi en bois de hêtre, en argent 13, des seyphi urnales 1", c'est à-dire ayant la capacité d'une toua, une demi-amphore. De tous ces renseignements, on le voit, aucun ne concerne la structure particulière du vase, et c'est pourquoi la désignation du skyphos comme forme spéciale reste conventionnelle 11'. Il est probable que, dans l'antiquité, des vases différents pouvaient porter ce nom et que, d'une façon générale, le skyphos est apparenté au BROM1AS, peut dire aussi que le vase, auquel nous réservons le nom de skyphos, rentre bien dans cette série et qu'il correspond aux généralités contenues dans le texte des auteurs. On le voit très fréquemment entre les mains des buveurs sur les peintures de vases (fig.6252 ;voy. aussi fig. 4304, 4768) ; il est employé dans les libations religieuses (fig. 237); il est d'ordinaire de taille moyenne et très maniable, mais il peut être grand et atteindre une capacité considérable 14 ; enfin le nodu.s herculanelhs est parfois appliqué à la décoration des anses (fig. 6251)1". C'est aussi un attribut usité d'Hercule 19 (fig.972, 3786), comme le cantlrare est celui de Bacchus. Macrobe dit :.scyplcus Ileretllis poculum est, ul LiberiPatriscantharus20 Dans l'histoire céramique, le skyphos a des origines très anciennes. Depuis les gobelets d'Hissarlik et les écuelles mycéniennes ,jusqu'à la fin de la fabrication des vases grecs, on suit l'évolution de ses formes. C'est le vase à boire par excellence, le pot à deux anses le plus simple et le plus maniable. A l'époque préhellénique, il oscille entre des formes basses et ramassées et une structure élancée ; les anses sont tantôt verticales et tantôt horizontales 21. Dans la céramique chypriote, il SCY 1161 SCY donne lieu aussi à des essais divers qui annoncent la forme classique '. Enfin les Corinthiens 2, les Phéniciens et les Ioniens, et avec eux leurs imilateurs d'Étrurie, lui donnent, dans le courant du vue siècle, une structure bien équilibrée et stable (fig. 2784, 2827). Les Attiques l'adoptent, le perfectionnent et le décorent tantôt en figures noires tantôt en figures rouges (fig. 6250; cf. fig. 3025) puis ils le transmettent aux fabriques de l'Italie méridionale i'. Avec quelques modifications de détail, surtout dans les anses, il arrive à la période impériale ; de très beaux scyphi de métal ciselé, ornés de reliefs, font partie des trésors d'argenterie romaine trouvés à Bernay, à Hildesheim, à Bosco Reale On les a imités en terre cuite'. E. POTTIER.