Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

Article SOL

SOL. "H),toç. Le Soleil. Le seul nom d"'Mucor désigne à la fois, dans une inséparable unité de conception, naturelle à l'esprit grec, plus difficile à saisir pour nous, l'astre, la force dont il est l'apparence sensible et la personnification divine de cette force 1. C'est d'Hélios personne divine, de sa légende et de son culte à l'époque classique grecque que nous devons surtout nous occuper ici. Mais on n'aurait du dieu-soleil qu'une notion inexacte, à ne considérer que la place qu'il tient dans la religion littéraire et artistique de la Grèce classique. Elle est secondaire, et la figure d'Hélios est loin d'avoir pris, dans cette religion anthropomorphique, le relief de celle des grandes divinités de l'Olympe. Chez celles-ci, l'élément personnel, très développé par la littérature et par l'art, a tout à fait rejeté dans l'ombre l'élément impersonnel, la réalité naturelle qui leur sert de substrat ; la tendance anthropomorphique a pu se donner libre cours et tout un culte se constituer. Au contraire, pour le dieu "ll),toç, le substrat naturel était trop précis et. trop fortement représenté aux yeux et à l'esprit pour qu'une personnalité bien indépendante pût s'en séparer et se développer largement, à côté et au-dessus de lui ; c'est pourquoi le dieu Hélios n'a pas, dans le mythe, dans le culte, dans l'art de la Grèce du ve et du Iv' siècle, la place d'un Poseidôn ou d'une Athéna. Mais il a dû en être tout autrement à l'époque la plus ancienne de la religion grecque, antérieure à l'anthropomorphisme homérique et classique. Il ne se peut pas qu'à celte époque, la plus apparente et la plus puissante des forces naturelles n'ait joué un grand rôle dans la religion, et dans le culte les procédés par lesquels on pouvait entretenir et diriger son énergie. De fait le culte du soleil se retrouve dans toutes les religions de l'Europe primitive ; si l'école de Max Müller a eu le tort d'en vouloir tirer toute la reli SOL 1371, SOL pion et toute la mythologie grecques', l'importance du culte héliolatrique à l'époque préhistorique est un fait assuré'. Ou a retrouvé de nombreux monuments de ce culte, et tout d'abord des représentations du disque solaire. Nous devons nous borner ici aux pays grecs; en dehors d'eux, mentionnons seulement le mieux conservé de ces monuments, celui trouvé à Trundholm, dans file de Seeland ; c'est un chariot de bronze à six roues, portant un disque formé de deux plaques accolées, et recouvert d'un côté, en sa partie centrale, par une mince feuille d'or estampée et gravée, décorée de cercles et de spirales ; les roues sont disposées pour tourner librement autour de leurs axes et le char était relié au disque par un fil (fig. 6487). Cette disposition donne lieu de penser que ce char et les objets analogues n'étaient pas seulement des représentations du soleil, mais servaient à des pratiques cultuelles et magiques'. En pays grec, des monuments de l'époque prémycénienne et mycénienne offrent des représentations analogues. Sur un bandeau en argent historié, trouvé par M. Tsountas dans file de Syros°, sont figurées des rosaces précédées d'un cheval qui porte un collier. M. Déchelette interprète le monument de la façon la plus vraisemblable en y reconnaissant le disque solaire°. Il interprète de même, sur des fusaïoles d'Ilissarlik, associés ou non à des quadrupèdes, les svastikas ou croix gammées; ce symbole ne serait qu'un dérivé graphique de la roue à quatre rayons et du disque représentant le soleil. De fait, la croix gammée accompagne encore, à une époque très postérieure, sur un vase, la représentation anthropomorphique d'Hélios °. Le signe de la roue crucifère, fréquent sur les monuments égéens 8, serait également un symbole du culte héliaque ; ainsi s'expliqueraient et le décor d'urnes crétoises', et certains détails de l'amphore de Pitané 10, oh cercles radiés et représentations animales rappelleraient également le culte du soleil. Aussi bien l'astre lui-même, sous son aspect naturel, figure sur des gemmes ou des bagues mycéniennes : ainsi sur la grande bague d'or, aux sujets si diversement interprétés, trouvée sur l'acropole de Mycènes et sur une gemme crétoise, oit il apparait dans le champ, au-dessus de deux lions affrontés" ; il ne peut guère s'agir d'ornements de rem plissage, et la représentation ne peut être que religieuse. Ce n'est pas seulement Hélios et le char solaire, c'est. aussi le mythe classique de la barque du soleil dont on trouve, d'après M. Déchelette, de très nombreuses représentations à l'époque préhistorique, dans tous les pays de l'Europe, et particulièrement en Grèce et en Italie 13. C'est la barque solaire qui serait représentée sur des coupes à fond plat du temps prémycénien, découvertes à Chalandriani, dans file de Syros 14, sous la forme d'un bateau non monté, à double rang de rames, dont la proue élevée est surmontée d'un poisson qui semble guider le navire ; le poisson serait la représentation animale du dieu solaire, devenu plus tard, chez les Grecs, l'Apollon delphinien, identique à hélios''. Une autre forme du même dieu serait le cygne, qu'on retrouve en fait à l'époque classique, dans la légende apollinienne [APOLLO. Dans des pays très divers, en Scandinavie, en Germanie, en Hongrie, en Italie, on voit figurée, sur des saules de bronze, sur des bandeaux métalliques, sur des boucliers'°, la barque solaire encadrant le disque même du soleil dans sa partie inférieure, et pourvue à chaque extrémité d'une protomé de cygne; la représentation va des formes les plus nettes aux formes les plus stylisées ; la barque même disparaît, et le cygne seul rappelle le sens héliaque de la représentation. Tous ces symboles héliaques, cercles, disques radiés, croix gammées, chevaux, cygnes, M. Déchelette les retrouve encore sur les monuments de l'âge suivant, dipyliens et villanoviens. Qu'on se range ou non jusqu'au bout à toutes ces hypothèses qui restent des hypothèses l'importance et l'extension du culte du soleil dans le monde grécoégéen, comme dans toute l'Europe préhistorique, semble attestée suffisamment par les seuls monuments de Syros et de l'art mycéno-crétois que nous avons mentionnés; et il est constant qu'aux populations de la Grèce primitive Ilélios et son voyage à travers le ciel apparaissaient sous la même forme imaginative qu'aux Grecs de l'âge classique, sous les deux symboles du disque et du cheval, tous deux de même sens. L'assimilation du soleil à un cheval d'une blancheur éclatante est courante dans les hymnes védiques, et s'explique tout directement, sans qu'il soit nécessaire d'avoir recours à l'explication compliquée de Gruppe qui identifie le cheval avec le génie du vent, poussant dans le ciel le char d'Hélios. C'est déjà une conception dérivée que nous venons de trouver réalisée à l'époque prémycénienne: union du disque et du cheval, celui-ci séparé déjà du soleil lui-même et conçu comme traînant sur la route céleste le char héliaque. A l'âge classique, la dissociation sera complète : le cheval solaire aura perdu son sens propre, et. lui et ses compagnons ne seront plus que l'attelage d'un char, conduit par un Hélios à forme humaine. Hélios rz l'époque classique : caractère et attributions 18. Des pratiques en usage dans la Grèce classique, comme celle, mentionnée par Platon'9, de la prière SOL -4375SOL quotidienne au soleil, à son lever et à son coucher, sont des souvenirs de l'époque où le culte héliaque était très développé.Mais, quoi qu'il en soit de ces survivances, ni les lieux où est attesté un culte régulier d'Hélios ne sont très nombreux, ni non plus les monuments de l'art qui le rappellent. C'est que le dieu Hélios restait tout près de son substrat naturel et mal détaché de lui. Hélios est souvent désigné par des appellations qui se rapportent de très près à sa nature physique; c'est un feu', une flamme2, un disque brillanta. Dans les représentations aussi (on le verra plus loin), l'image du disque radié accompagne le plus souvent celle du dieu à forme humaine. Il y a sans doute une autre cause au relatif effacement de la figure d'Hélios dans le monde divin homérique et classique; c'est son identification avec Apollon. Nous renvoyons sur ce point à l'article APOLLO et présentons seulement ici quelques observations supplémentaires. Pour certains mythologues', la personnalité divine d Apollon tout entière a son point d'appui dans la conception solaire ; pour d'autres' l'Apollon solaire est une invention des stoïciens et des platoniciens. Les textes littéraires ne sont pas en faveur de la première hypothèse; la conception de l'Apollon solaire ne se rencontre pas chez Homère ni chez Hésiode; on n'en peut surprendre chez les poètes lyriques 6 et tragiques que des traces très vagues. La mention d'Hélios à côté d'Apollon dans les fêtes des TI6ARGELIA et de L'EIRÉSIONÉ ne se trouve que dans des textes de date tardive (v. plus loin). Mais, d'autre part, certaines associations de culte, au Ténare Hélios et Apollon Delphinios 8, à Apollonia culte d'Apollon' et les troupeaux d'Ilélios1', à Thalamai Hélios associé à InoLeukothéa ", compagne en d'autres lieux d'Apollon, donnent à penser que l'identification remonte assez haut. Elle remonterait aux origines helléniques mêmes si l'on admet avec M. Déchelette " que les symboles héliaques primitifs sont en même temps les symboles de l'Apollon delphinien des temps classiques. En tout cas, c'est un fait que l'assimilation d'Hélios à Apollon est commune dans la théologie orphique", et qu'elle doit s'appuyer sur des croyances populaires" : Apollon, comme Hélios, commande aux Heures'' ; comme Hélios il est le dieu à la chevelure d'or, 7puesoxdp.r,ç"6 ; l'un et l'autre sont des dieux-archers 77 ; Apollon a ses troupeaux comme Hélios les siens. Quoi qu'il en soit de la question d'origine, tous ces faits semblent démontrer que le grand développement dn culte d'Apollon a été pour rejeter dans l'ombre celui d'Hélios. Ainsi, objet physique autant que divinité, Hélios reste en arrière de la personnalité divine complète où atteignent les Olympiens. Son pouvoir, dans la théologie homérique, n'est pas identique à celui des dieux de l'Olympe; il ne séjourne pas avec eux 1B; il a recours à eux pour venger une injure à lui adressée". Dans l'hymne homérique à Hélios 20, il est qualifié d' « égal aux Hélios est marqué de traits physiques et moraux simples. C'est d'abord l'éclat et la chaleur, avec leurs conséquences naturelles : force nourricière et fécondante. De nombreuses épithètes, chez Homère, chez les lyriques et les tragiques22, rappellent l'éclat brillant du disque so nom du fils d'Hélios, est fréquemment aussi une épithète d'Hélios" lui-même. La chaleur est la force d'Hélios, p.évoq `HEa(oto24. Éclat et chaleur, Héliosles envoie jusqu'au monde par ses rayons. Tantôt ces rayons sont les flèches dont le dieu frappe les mortels27, comme Apollon fait des siennes; tantôt ce sont comme les regards mêmes d'Hélios28 ; Hélios est le dieu qui voit tout, 1vx9 cpxrç'-9, 7czyTx ),Etiaawv 30. Et ces rayons qui portent la lumière peuvent aveugler les yeux mortels ou au contraire leur rendre le jour; Ilélios frappe de la cécité" et en relève; à ce trait de sa puissance divine se rapporte l'histoire d'Orion aveuglé, guéri par Ilélios32, mythe qui traduit, selon Gruppe33, la disparition dans les feux du soleil, puis la réapparition de l'étoile Orion. Par la chaleur et la lumière, Hélios féconde et nourrit toutes choses sur la terre, 7rxvTa (idaxn v 3''; il est par ce côté dieu de la végétation, dieu maître des fruits de la terre, xc(,tip.oç3', Dieu qui voit tout, Hélios est le témoin de toutes les actions humaines 37 et celui à qui aucun acte criminel ne saurait échapper; il dévoile à Héphaistos la trahison d'Aphrodite2" ; il assiste au rapt de Perséphonet0. Aussi est-ce lui qu'on prend à témoin du bon droit Æ° et qu'on invoque pour le venger " ; c'est aussi le dieu du serment, avec Zeus et la Terre. Dieu pur dieu de la lumière qui purifie, il est souillé par la présence du criminel". Les textes poétiques sont nombreux qui contiennent des allusions à tous ces caractères de la personnalité d'Hélios. Nourricier et justicier, voyant tout et sachant tout, et aussi, par son action directe, maitre du temps et des saisons", Hélios prend, dès l'époque classique, sous l'influence, surtout des doctrines orphiques, figure de dieu tout puissant, dieu de vie et de sauvegarde ; il est yEpécgio; " dans un hymne orphique ; il est sauveur et OEd; "8, bienfaiteur des mortels, TEptit(,u.gpoTOç L°. On le voit : si dans le culte effectif, si dans la vie religieuse populaire, Hélios reste effacé derrière les Olympiens, il a une place à part, expression d'un sentirnent épuré du divin, dans l'imagination des poètes et des mystiques grecs. Sa personnalité, moins chargée de détails que celle des grands dieux de l'Olympe, est plus pure. A l'époque suivante le caractère universel d'Hélios s'affirme plus SOL 1376 SOL encore. D'abord le syncrétisme religieux l'identifie non plus seulement à Apollon, (v. plus haut) mais aux grands dieux d'alors, à un Zeus', à un Sarapis 2 ; ensuite, par lui-même, il est élevé, dans l'exégèse stoïcienne et néoplatonicienne,à la dignité de dieu suprême, de démiurge, xoQµoxp3.'rwp 3, comme disaient déjà les Orphiques. Et des témoignages épigraphiques, dédicaces à "Hntoç ü']ttczoç montrent qu'une telle conception ne resta pas confinée dans l'enseignement des écoles philosophiques, mais aussi, dans une certaine mesure, acquit droit de cité dans la croyance commune. Sur le développement ultérieur de ces idées, voir la deuxième partie de notre article. Le vouge d'Hélios. Hélios n'est que rarement représenté siégeant avec les autres dieux; son activité divine tient presque tout entière dans le voyage quotidien à travers le ciel, qu'il accomplit sans relâche; c'est le dieu bon courrier, rapide et infatigable, EUpoc.oç (11xÛç ,6 xazuaç 7, xTEtpP,ç 8. C'est sur un char qu'Hélios parcourt les chemins du ciel ; cependant les poèmes homériques n'en font pas mention expresse 9, et en pays d'ailleurs non purement grec, il y a tracé d'un Hélios cavalier 10. On a vu plus haut quelle parait être la signification originelle du char solaire, qui se retrouve dans la mythologie védique comme dans l'assyrienne, et comment le cheval, conçu d'abord comme le soleil lui-même, a pu devenir plus tard, dans la religion anthropomorphique, le simple instrument du voyage d'Hélios. Le char d'Hélios est d'or", et les rênes en sont d'or " ; il est mené par un attelage de quatre chevaux rapides 13 aux naseaux fumants'", Eôos, Aithiops, Brontè, Stéropè 1 ou Eôos, Aithôn, Pyroeis, Phlégon 16 ; d'autres textes donnent d'autres noms, parmi lesquels celui de Phaëthon doit être relevé'. Hélios les nourrit d'une plante enchantée, qui croit aux îles des Bienheureux 18, celle-là même qu'on retrouve dans la légende béotienne du pêcheur Glaukosi9. Chaque matin I-Iélios sort de l'Océan à l'Orient; chaque soir, à l'Occident, il se replonge dans l'Océan, sous la terre. Tous les moments du voyage sont, chez Homère et chez les poètes postérieurs, décrits et distingués avec une grande abondance d'expressions; nous n'y insisterons pas. L'imagination grecque s'est surtout arrêtée sur les lieux terminaux du parcours ; elle y a placé le palais d'Hélios, où le dieu et son attelage reprennent, chaque jour, les forces nécessaires à leur course pénible et accidentée. Il semble qu'il y ait eu quelque confusion sur la localisation, à l'Orient ou à l'Occident, du séjour d'Hélios. Dans la plupart des textes 20, c'est à l'Orient, à l'opposé des îles Hespérides, près de la mer Érythrée, qu'Hélios séjourne dans son palais, près de sa mère et de son épouse et de ses enfants chéris21, là où sont ses chevaux et son char 90sous la garde des Heures, là où le dieu et son attelage plongent Corp. roser. sentit. 4590, 4604 (Palmyre). Un exemple déjà de cette assimilation dès le ve siècle, à Amorgos: Bull. de coin., hell. VI, 191. -2 Sur les représentations prétendues d'Héliosérapis, cf. Perdriect, Bec. arch. 1903, I, p. 395 sq.-3 Orph. Hymn. 8, 11. 4 P. ex. à Pergame; cf. Insche. n. Perg. n. 330, où sont cités d'autres exemples. s Orph. Hymn. 86.6 Mimn rm. fr. II (Bergk). 7 Hom. Il. XVlll, 239 ; Hymn, in Sol. 8 Qu. Smyrn. 2.2. 9 Au contraire dans l'hymne homérique à Hélios. 10 "Hlisr in' les,, dans une inscription de Pergame; cf. Fraenkel, loschr. u. Perg. p.248, où sont cités d'autres exemples de cette conception. Il Hom. Hymn. in Sol. 15; Pur. E1.739. 12 Sept.. Ai. 847.13 Eur. Phoen. 3. 14 Pind. 01. 7. 71. 16 Hyg. Fah. 183. 16 Ov. Met. 2, 153. 17 Eue. Phoen. 3, sciait. Un cheval d'Eùs s'appelle également (baie.. sur un vase peint, Gerhard, Auserles. Vasenb. pl. ,.xx,x = Reinach, Hep. II, p. 46. -18 Ath. VII, p. 296 e. 19 Cf. Gruppe, Griech. exyth. p. 69.-20 Par exemple Mimn. fr. 12 (Bergk). 21 Stesich. dans les eaux tièdes leurs corps fatigués 23. Mais d'autres textes semblent placer à l'Occident le palais d'Hélios 24 ; c'est ce qui explique que le peuple mythique des Éthiopiens, en rapport avec le voyage quotidien d'Hélios, placé généralement à l'Orient extrême, soit quelquefois considéré comme habitant à l'Occident, ou même comme partagé entre l'Occident et l'0rient26. Comment Hélios, descendant le soir sous la terre, dans l'Océan, du côté de l'Occident, pouvait-il, le matin suivant, se trouver à l'Orient, au lieu de son lever? Ici intervient le mythe de la coupe ou de la barque du soleil ; Hélios accomplit son voyage nocturne sur une barque ou dans une coupe à fond plat. Le mythe répond peut-être à une conception primitive où l'Océan se confondait avec le ciel lui-même ". En tout cas il est très ancien et nous avons vu qu'on peut, au moins par hypothèse, lui rapporter de très nombreuses représentations figurées de l'époque préhistorique. A l'époque classique grecque, le mythe ne tient pas une très grande place dans les textes et les monuments figurés; les lyriques font cependant plusieurs fois allusion à la coupe d'Hélios, 'clir«ç œuvre d'Héphaistos, qu'emprunte Héraklès pour naviguer vers Érythrée, à la conquête des troupeaux de Géryon [HERCULES]; chez Mimnerme c'est sur une couche d'or creuse, oeuvre aussi d'Héphaistos, qu'Hélios, sur le courant du fleuve Océan, vogue des Hespérides au pays des Ethiopiens. Il convient, àpropos de la légende du voyage quotidien d'Hélios, de dire ici quelques mots du personnage de Phaêthon. La vulgate de l'histoire de Phaëthon, mis à part toutes variantes et tous détails dus à l'imagination des poètes, est la suivante 28 : Phaëthon, fils d'Hélios et de la nymphe Klyméné, à l'insu de son père ou après l'avoir obtenu de lui, monte sur le char du soleil et le conduit dans le ciel. Mais bientôt il n'est plus maître de son attelage; l'incendie allumé par les feux trop vifs de l'astre brûlant se propage et menace la terre entière ; alors Zeus précipite l'imprudent dans le fleuve Éridan et le frappe de sa foudre. Les soeurs de Phaëthon, qui lui ont prêté assistance et le pleurent, sont changées en peupliers noirs ; leurs larmes deviennent de l'ambre29 (sur l'Éridan et l'origine de l'ambre, voir ELECTRUM). Les deux versions principales de la légende sont celle d'Hésiode et l'alexandrine. La première peut être reconstituée surtout à l'aide du résumé d'Hygin 30; le texte a donné lieu d'ailleurs à beaucoup de discussionsJ1 ; il contient, en réalité, deux traditions du mythe, qu'il y ait un seul récit avec interpolations 32 ou, plus probablement, deux récits différents mal juxtaposés 33. L'un des deux rattache à l'histoire de Phaéthon celle du déluge universel et de Deucalion et Pyrrha ; Gruppe admet qu'ilyavaiten effet une tradition qui présentait le déluge comme une punition de l'entreprise impie de Phaëthon, et une autre où cette entreprise avait pour ap. Ath. XI, 469 e. 22 Mimn. Loc. cit. 23Aesch. fr. 67 (Didot). 24 Pur. Ale. 592; Stat. Theb. 3, 407. 25 Hom. Od. 1, 22. 26 Cf. Bclger, Myth. Rosm, d. Griech. p. 2. 27 Cf. Ath. Xl, p. 469, où sont cités les fragments. 28 Sur tout le détail des diverses versions, nous renvoyons à Roseher, Lexie. art. Pha91hou. 29 Une singularité de la légende est que l'ambre est ici rattachée au peuplier noir, ar;upo;, contrairement à toute réalité. Gruppe explique la confusion par l'origine sémitique du mythe: l'ambre aurait été rapproché à tort d'une essence analogue à l'encens, produit d'un arbre dont le nom sémitique se traduit en grec par Aauxq désignant le peuplier blanc, on aurait englobé dans le mythe l'autre espèce de peuplier, l'al'yripss. Cf. sur ce poins Philot. 1889, p. 430. 30 Hyg. Pub. 152 6-154. 31 Cf. surtout Gruppe, Philol. 1889, p. 328 sq. et VollgraIT, De Oeid. mylhopoieia, Berlin, 1901, p. 58 sq. 32 Opinion de Robert, Eratosth. catase. reliq. p. 214 sq. ; Herm. 1883, p. 434 sq.; et de Knaack, dans le Les, de Roseher, SOL 1377 SOL conséquence l'incendie du inonde, la mort de Phaéthon et la métamorphose des lléliades; on aurait relié les deux versions l'une à l'autre en présentant le déluge comme un moyen imaginé par Zeus d'éteindre la conflagration universelle allumée par l'imprudence de Phaëthon. L'autre version, qui remonte à l'époque alexandrine, peut être reconstituée à l'aide de tous les poètes grecs et latins qui s'en sont inspirés, et se distingue par l'abondance et le pittoresque des détails ; on en peut juger par la brillante narration d'Ovide'. Nous laissons de côté toute cette question, qui est d'ordre proprement littéraire2. Quel est le sens du mythe de Phaëthon? Se souvenant que La€Aw est une des plus fréquentes épithètes d'Iélios, Schwenck, Must etRohert3 voient dans Phaéthon une simple hypostase du dieu-soleil. La chute de Phaëthon serait, transportéedanslepassémythique, la chute même d'hélios tombant chaque soir à l'Occident, en un rougeoiement d'incendie, dans le fleuve Océan Pour d'autres mythologues °, Phaéthon est non pas Hélios, mais l'étoile du matin, Héosphoros ou Phosphoros. En fait il y a, nous le connaissons par la Théogonie d'llésiode°, un Mailthon fils de l'Aurore, Éos, et de Képhalos (la nuit?3), aimé d'Aphrodite, qui l'enlève et en fait le gardien de son temple; l'histoire de ce personnage semble avoir fait en partie le sujet du Phaéthon d'Euripide. Selon W ilamowitz, la légende de ce Phaèthon, qui n'est autre que l'étoile du matinetl'étoile du soir, astre unique,aété confondue avec celle, d'origine corinthienne et rhodienne, de Phaèthon fils d'Hélios; les deux mythes se relient d'ailleurs naturellement ; c'est l'imprudent fils d'Hélios, anéanti au début de sa course ambitieuse, qui reparaît chaque matin dans le ciel pour s'évanouir bientôt dans les feux du soleil". Pour Gruppe8 aussi, les deux légendes n'en font vraiment qu'une, qui serait d'origine sémitique; elle apour théâtre le pays et l'heure du soleil levant : le nom même de l'Eridan, le « matinal », où Phaèthon est précipité, en serait une preuve; c'est, pour lui comme pour Wilamowitz, la disparition de l'étoile du matin dans les feux de l'aurore qui explique le mythe de la chute de Phaëthon19, tous les autres détails de l'histoire étant secondaires et de date postérieure. A cette explication, qui àcoup sûr ne rend pas suffisamment compte de la formation de la légende, M. S. Reinach en oppose une toute différente 1t: le mythe de Phaëthon s'expliquerait par un rite sacrificiel. On offrait chaque année (v. p. 1378) sur différents points du monde grec des chevaux à Hélios. Dans la conception primitive, ces chevaux brûlés ou précipités à la mer étaient comme des offrandes « de renfort » destinées à accroître la force du cheval solaire. Mais avec le triomphe des idées anthropomorphiques on aurait oublié le sens de ce sacrifice, et estimé que les chevaux devaient être sacrifiés en expiation d'une faute; de cette faute il fallait un responsable : ce fut Phaëthon, fils d'Hélios, coupable d'avoir usurpé la place de son père divin. En fait, le sacrifice des chevaux à Hélios est attesté pour Rhodes, où il semble précisément qu'ait pris naissance, â côté VIII. d'une légende locale analogue, la légende grecque de Phaéthon. On parlera plus loin, en même lieu que de celles d'hélios, des représentations figurées du mythe de Phaëthon. Le voyage céleste constitue à lui seul tout l'essentiel du mythe du dieu-soleil; mais il faut mentionner aussi la légende des troupeaux d'hélios. Elle est développée dans l'Odyssée12. Sept troupeaux de boeufs et sept de brebis, de cinquante têtes chacun, paissent dans l'île de Thrinacie1M1, sous la garde des Iléliades Phaëthusa et Lampétié ; ils n'ont point de progéniture et ne meurent point. Ils sont la joie d'Hélios, qui demande aux dieux de venger cruellement leur rapt sur Ulysse et ses compagnons". D'après un autre texte, les boeufs d'hélios sont blancs et leurs cornes d'or''. Le sens du mythe est obscur : Aristote 16 identifiait les 350 boeufs et les 350 brebis aux 350 jours et aux 350 nuits de l'année lunaire. « La succession des, jours et des soleils avait donc été comparée sans doute à la procession d'un brillant troupeau dont. les animaux s'avancent l'un après l'autre dans les 'raturages célestes". Les légendes légendes de Géryon, d'Alkyoneus et de leurs combats avec Héraklès où le rapt de troupeaux joue un rôle, se rapporteraient dès lors peut-être à la disparition de la lumière, ramenée ensuite par le dieu-soleil 18 ; aussi bien les troupeaux de Géryon apparaissent quelquefois comme la propriété même d'Hélios"'. Grappe émet l'hypothèse que le taureau, dans la croyance grecque la plus ancienne, comme dans la mythologie védique, était considéré comme un génie du feu (légende des taureaux de bronze de l'lléliade Aiétès, légendes du type du taureau de Phalaris) 26. Les animaux sacrés d'Hélios conserveraient ainsi dans sa pureté l'essence même du dieu soleil. A l'époque historique encore, on gardait en plusieurs lieux du monde grec, on le verra, des troupeaux consacrés à Hélios. Culte d'Hélios. Nous n'avons que peu de renseignements sur les pratiques générales du culte d'Hélios. Quelques textes parlent d'une prière quotidienne adressée au soleil, à son lever et à son coucher 21 ; on peut croire, si la pratique en eût été vraiment effective, que ces textes seraient plus nombreux. Les offrandes à hélios étaient sanglantes ou non sanglantes ; les premières étaient des chevaux blancs 22, parce qu'Hélios est le dieu de l'éclatante lumière, ou plus précisément parce qu'à l'origine il était conçu comme un cheval blanc. Les offrandes non sanglantes sont de l'espèce des v-i,xÀia [sACHll?iCiUM[ et consistent non en vin, mais en miel23. Dans le détail, les pratiques du culte d'Hélios devaient différer suivant les lieux. Les textes et les inscriptions ne nous permettent d'établir, pour les cultes locaux d'Hélios, qu'une liste assez courte, si on la compare à celle qu'on peul, dresser pour telle divinité de l'Olympe. Distinguons de suite les quelques points du monde grec oit le culte d'hélios a eu plus d'importance. C'est avant tout Rhodes, File du Soleil2''. Le culte d'Hélios y remon 173 SOL 1378 SOL Lait aux origines mêmes' ; c'est le sens de la légende rappelée par Pindare, de l'attribution de File, dès sa sortie des flots de l'Océan, à Hélios'-. Le nom même de File, `Pdcos, se rattache directement à la légende d'Hélios et de Phaëthon. Rhodos, larouge aurore, d'après Gruppe, fille de Poseidon et d'Aphrodite, est l'épouse d'Hélios ; un de leurs sept fils, Ténagès, est un Phaëthon local, identifié plus tard avec le Phaëthon de la légende grecque3. La colonisation dorienne, au vu' siècle, introduit dans file d'autres mythes et d'autres cultes; mais Hélios reste la grande divinité protectrice de l'île et de la ville de Rhodes, fondée en 1di84. Il n'y a pas de traces dans les inscriptions d'un culte d'hélios particulier à chacune des trois cités rhodiennes, Camiros, Lindos, lalysos, comme c'est, le cas pour les autres cultes de File'. Sans doute, le sanctuaire d'Hélios était-il un sanctuaire collectif, commun aux trois groupements politiques, et situé près d'Ialysos 6, sur l'emplacement même où, à la fin du ve siècle, fut fondée la ville de Rhodes, à laquelle se rapportent les mentions postérieures du culte héliaque. Il y avait cependant un autre temple d'Hélios Phaéthon, associé aux Nymphes, à Loryma, dans la partie orientale de l'ile 7. Les inscriptions nous donnent quelques renseignements sur le sacerdoce et les fêtes d'Hélios'. Le sacerdoce parait n'avoir pas été héréditaire° ni à vie; il était attribué par le sort 10. La grande fête d'Hélios, les `A,.elx, était une fête importante", où des souverains étrangers même envoyaient des délégués 12, et qui attiraient un grand concours de peuple 11ALHLIA) t3. Elle comportait un cortège, un sacrifice, des jeux: c'étaient les âyôwuç habituels des fêtes grecques, luttes", courses de chevaux '° et de chars", course au flambeau ", pentatllle'8, etc.; la couronne du vainqueur était tressée de peuplier blanc (neûxil)'0, arbre consacré au soleil_ La fête avait lieu tous les ans, `A),(Eta 'r. la.ixp« "6, et plus magnifiquement tous les cinq ans, `AX(EtceTx €y«nx 21, comme les plus grandes fêtes du monde grec. Un rite important du culte héliaque à Rhodes est celui que rapporte Festus2' : chaque année on précipitait des quadriges à la mer, en offrande à Hélios. L'explication la plus plausible du rite est celle donnée plus haut, à propos de la légende de Phaëthon ; deux autres sont moins admissibles: rite du culte poseidonien transporté dans le culte héliaque, rite de caractère chthonien "3. Il n'est pas établi que la précipitation des quadriges faisait partie de la fête annuelle des `AÀiEta ; mais l'hypothèse est très vraisemblable''`. Une inscription de Rhodes enfin mentionne un sacrifice à Hélios certainement distinct de la fête des `An:Eta 25. L'autre point du monde grec où prédominait le culte d'Hélios est Corinthe 2e. Les noms légendaires de Corinthe et de sa citadelle, Ephyra, Epope, se rapportent à Hélios. L'Acrocorinthe était particulièrement consacrée au Soleil29 : d'après la légende, elle était devenue la propriété d'Hélios après sa lutte pour la possession du pays avec Poseidon26, à qui l'Isthme avait été attribué; puis Hélios l'avait cédée lui-même à Aphrodite, qu'on retrouve associée à Corinthe au culte d'Hélios-Phaëthon. Aiétès, roi de Corinthe, et Médée; ont de la race d'hélios; le fils d'Aiétès, Apsyrtos, porte le surnom de Phaethon'2e. Sur l'Acrocorinthe un autel d'Hélios 30, dans le temple d'Aphrodite une statue ", dans la ville même, aux propylées de l'agora, un quadrige avec statues d'Hélios et de Pha.ethon 32, à l'Isthme un temple et une statue 33 d'Hélios, tous ces monuments témoignaient encore sous l'empire romain de l'importance du culte corinthien du Soleil. A Athènes, au contraire, le culte d'Hélios semble avoir tenu fort peu de place 34 ; il en est fait mention à propos de la fête des PYANISPSIA et de celle des THAR est mentionné dans un texte d'époque tardive à propos de la procession des siitRornonis 30. Dans la Grèce du Nord, des mentions précises du culte d'hélios font défaut; nous savons seulement qu'à Apollonia d'1 pire on gardait, sous la surveillance des premiers citoyens. des troupeaux consacrés au Soleil". Dans le Péloponnèse le culte héliaque est attesté en plusieurs lieux : à Elis 36, associé à celui de Séléné; à Trézène, sous le vocable d''E),ca9é? v4 39 ; à Mantinée a0; près d'Argos"t ; à Mégalopolis, comme user' p 42. Il était répandu en Laconie: il y avait une statue d'Hélios dans te temple d'Ino, entre Oitylos et Thalamaib3 ; au Ténare étaient gardés des troupeaux d'Hélios44; enfin, sur la cime du Taleton, contrefort du Taygète, au-dessus de la ville de Rryseai 4'7, on sacrifiait, en même temps, qu'à leu; Ta),€T:rdç, à Hélios, peut-être sous le nom de Phoibos 46 : le nom même de TvXETrv se rattache peut-être à la même racine que le Tanoîç crétois, un synonyme d"'Hatoç 47; le Taleton serait la montagne du soleil". Dans la mer Egée, la Crête semble avoir été un centre du culte d'hélios, en même temps que de l'Apollon Delphinios. Pasiphaé, l'épouse de Minos, est une Héliade ; 'falos, le géant de bronze qui étouffait les étrangers de son étreinte brùiante, parait, d'après la synonymie que nous venons de mentionner, une hypostase d'hélios, d'un hélios sémitique"; à l'époque historique, la ville de Gortyne avait encore ses troupeaux d'Hélios S0 Représentations artistiques. Les monuments figurés de l'époque historique et classique qui représentent Hélios et sa légende sont assez peu nombreux. Cependant, l'idéal plastique d'Hélios était marqué de traits assez nets dans l'imagination grecque, témoin ces vers de l'hymne homérique à Hélios 6' : « Hélios l'infatigable, semblable 1379 SOL aux immortels.... ses yeux (lardent un terrible regard, sous le casque d'or, et les rayons en brillent, d'un éclat éblouissant.... brille aussi, autour de son corps, le fin manteau, la souple étoffe, aux souffles des vents. » C'est cet idéal que devaient traduire aux yeux les statues de culte d'hélios dont les textes font mention ; aucune ne nous a été conservée. De la période amimique et du ve siècle nous ne possédons, se rapportant il Ilélios et à sa légende, que (les peintures de vases'. Ilélios y est représenté sous la forme d'un éphèbe, guidant son char attelé de deux ou quatre chevaux. Il fait souvent pendant à Séléné, la représentation (les deux divinités tantôt valant par elleméme, comme sur une pyxis attique de la collection Sabouroff (fig. 4652) 2, tantôt servant à encadrer des scè nes mythologiques, comme sur un vase de Ruvo (fig 3560) dont le sujet est uneGigantomachie3.C'étaitaussison rôle dans les grands ensembles sculpturaux de la belle époque : fronton oriental du Parthénon, hase du Trône de Zeus à Olympie, base de la Parthénos. Quelquefois, la représentation est mieux précisée : le quadrige d'Hélios, figuré de face, s'élève des eaux de l'Océan sur un vase de la Bibliothèque Nationale `. Sur les peintures les plus anciennes, la ligure d'Hélios est encore séparée nettement de son substrat na SOL turel : le disque solaire, d'abord représenté comme un simple cercle e, puis entouré de rayons (pyxis Sabouroff), est figuré à côté ~'_ ou au-dessus de la figure d'hélios, (même vase).Dans des vases plus ré cents, l'image du disque solaire se réduit à n'étre plus que la cou ronne radiée, le nimbe qui entoure la figure du dieu (fig. 46333) ; sur un vase de Parme, la tête d'Hélios, re présentée seule, apparait ainsi au chmur des Satyres effrayés, comme dans un médaillon (fig. 6488) °. Un bel exemple de cette seconde série de vases est, le vase Blasas au British Museum, oit le départ d'Hélios, s'élevant avec son quadrige ailé derrière Los, Phosphoros el Séléné, est représenté de façon pil.l.oresque (fig. 6489). Un vase du Louvre rappelle le voyage d'Hélios sur le fleuve Océan; on l'y voit figuré sur son quadrige, avec Héméra(?), et sortant d'une barque 8. Les rapports du dieu avec Héraklès font aussi le sujet, de plusieurs peintures de vases, Héraklès étant représenté tantôt comme ennemi d'hélios et le menaçant (fig. (3490) ', tantôt. comme son allié, avec le geste de bonne entente et d'adoration (iutacuLEs,p.93:1a. L'histoire d'Iléraklès naviguant dans la coupe du Soleil vers le séjour de Géryon est naïvement figurée sur un beau vase à figures rouges du Vatican (fig. 3763)", et sur un vase plus ancien, à figures noires, récemment publié 1'. SOL 9380 SOL De l'époque suivante, en dehors de petits bronzes, l'un du Musée Britannique ', d'attitude et de type peutêtre praxitéliens, l'autre de Berlin', de type assez analogue au type convenu d'Alexandre, nous possédons plusieurs statues, torses ou têtes d'Hélios. Ces monuments reproduisent, diversement nuancé, un type de dieu jeune et fort, à l'allure et aux traits graves. Un torse du Vatican, portant un baudrier oit sont tracés les signes du Zodiaque «fig. 770), offre ce caractère de jeunesse énergique : c'est sans doute un hélios. Du même type est une statue du musée de Berlin, provenant d'Égypte, et portant une dédicace à Zni;"lUtoç Il y avait à Rhodes, au témoignage de Dion Chrysostome', un grand nombre de statues et de groupes d'Hélios. Les textes nous renseignent sur un quadrige, oeuvre de Lysippe et surtout sur le fameux Colosse, oeuvre de Charès de Lindos, élève de Lysippe i ; cette statue de bronze, d'énormes proportions, fut élevée vers 291 et renversée cinquante-six ans après par un tremblement de terre ; nous avons d'ailleurs plus de renseignements pittoresques sur l'énormité de la statue et sur la fabrication de l'oeuvre que sur son type artistique 3. Une statuette de bronze et deux têtes en marbre d'Hélios proviennent de Rhodes. L'une de ces têtes, qui est à Berlin, d'une très belle expression °, faisait partie d'un groupe d'une grandeur double de la grandeur naturelle, appuyé contre une paroi d'édifice, et représentant Hélios en mouvement vif vers la droite, conduisant son quadrige, la tête tournée de face et très détachée du fond : les trous subsistent qui servaient à fixer les grands rayons métalliques disposés en cercle. Le type semble être antérieur à l'art lysippéen. Une autre tète de petites dimensions, trouvée dans file à Trianta, se rattache, au contraire, d'après M. Hartwig, à l'école de Lysippe f0; elle portait une couronne de rayons; c'est une tête jeune, aux cheveux courts, le regard incliné vers la gauche et vers le haut ; peut-être faisait-elle partie d'un ensemble analogue au quadrige même de Lysippe. A la dernière époque de l'art grec apparaît, dans la plastique, un type d'Hélios différent, inspiré des tradi-' Lions pergaméniennes. Expression ardente, yeux profondément creusés, tête puissante, chevelure désordonnée, vêtement flottant largement au souffle du vent, tel a dû être l'Hélios de l'âge hellénistique.Nous en avons quelque idée d'abord par la métope trouvée sur l'emplacement de la Nouvelle-Ilion, qui représente Hélios et son quadrige (fig. 6491)11 ; et mieux encore par des tètes d'expression très caracté ristique sur les monnaies de Rhodes (fig. 6492) et parle masque colossal du Louvre (6493) ". Là le type est poussé au pathétique; c'est un Hélios presque oriental, bien éloigné de la sérénité des dieux grecs. La légende de Plfai3thon n'est qu'assez rarement représentée, et sur des monuments de date tardive. Sur un re lief de stuc d'une maison romaine1', imparfaitementconservé, M. Petersen a reconnu une représentation de Phaéthon, présentant sa requête à Hélios, et des Heures, auxiliaires de Phaéthon. Plusieurs sarcophages du 1l° et du tu° siècle après J.-C. figurent son histoire; elle y estreprésentée suivant la convention admise pour ce genre de reliefs [sARCO PuAGUS], les scènes étant juxtaposées suivant leur succession dans le temps. Sur l'exemplaire le plus complet de la de Phai'l on. série, trouvé à Ostie' 4, on voit à gau che Phaéthon faisant part à Hélios de son ambitieux désir; au milieu la chute de Phaéthon précipité à terre, Kyknos et les Iléliades ; à droite, hélios recevant d'Hermès la lugubre nouvelle. Une belle gemme, conservée à Florence, représente le même sujet dans un tableau concentré et d'un mouvement pathétique''. D'autres retracent les divers épisodes de la légende, la prière de Phaéthon (fig. 6494) et sa chute (fig. 6493), la métamorphose des Héliades. La re présentation du mythe la plus ancienne se trouve sur un moule d'argile de coupe à reliefs, conservé au musée de SOL 1381 SOL Boston. D'un côté, c'est la chute de Phaéthon, écrasé sur le sol; derrière lui, une roue du char; à sa droite Zeus lance sa foudre et Artémis ses flèches (fig. h496)'. Derrière les deux divinités une femme s'enfuit, tenanten main une autre roue du char solaire : un passage de Val. F1accus` cement destiné au culte du dieu qu'elle honorait} 5. Enfin parmi les douze divinités tutélaires des cultivateurs, le même Varron" donne la seconde place, immédiatement après Jupiter et Tellus, à Sol et Luna iJaoriun lelDpIortz ob.e7'L"'tldr clan quaedaai .Gerantur c/ ('oitdurllru'. permet de reconnaître en ce personnage Thétys. droite de Phaëthon accourt hélios à cheval, maîtrisant l'attelage emporté. De l'autre côté est figurée la métamorphose des péliades. Elle est en train de s'accomplir; l'une des jeunes filles est muée tout entière en un arbre; du corps des deux autres, qui se défendent en vain, sortent déjà des rameaux Détail singulier : trois jeunes gens, deux d'entre eux porteurs d'un couteau à ébrancher, semblent frapper sur les trois arbres femmes Il faut sans doute, d'après l'ingénieuse explication de M. Iiartwig, voir là, en figuration proleptique,la récolte cl e l 'am lit e, il es armes des Il (lia (les vo\ . l2Liii,TIGI M L'ambre est ici considérée comme une essence végétale, et la figuration de la récolte est copiée sur celle qui convient à l'encens et à l'arbre à encens e. Ce curieux relief est à peu près de l'époque même d'Ovide et il doit s'inspirer d'une oeuvre alexandrine ou hellénistique. ROMP. Les calendriers latins de l'époque d'Auguste indiquent, à la date du 9 août, un sacrifice public Soli indigiti in colle Quirinale7, et l'on en a conclu que Sol appartenait aux plus vieilles divinités indigènes de la religion romaine. Varron croyait savoir que Sol et Luna étaient d'origine sabine et que le roi Titus Tatius leur avait dressé des autels dans la ville de Romulus'. Suivant cet antiquaire, la gens sabine (les lurelii, proprement.1usclii, tirait son nom du mot ausel « soleil »" : le peuple lui aurait même concédé officiellement un empla Mais on a l'ait observer que, l'ait étrange, Sol est de tous les dieux indie/c(es le seul auquel. ce nom soit expressément donné, et l'on a conjecturé qu'il lui fun. accolé à l'époque d'Auguste pour distinguer cet antique divinité de celles venues d')rient, qui s'introduisaient alors dans la cité ". Peut, être aussi, bien que cette étymologie ne. nous soit pas transmise par les auteurs anciens, r-aitacha-ton ind.q _s à Ir d.care, le soleil passant à Rogne aussi bien qu'en Grèce pour dénoncer les crimes cachés Aux affirmations du Sabin Varron on a opposé cette remarque que le sanctuaire du Quirinal est appelé par Quintilien un pu/vinari4 expression qui implique l'usage du rite grec du/cet isterrlilurl'" It. III, p. 1007 ss, En outre, les plus anciennes représentations de Sol sur les monnaies de la République '' nous le montrent, comme sa compagne. Luna, sous une apparence purement grecque [t. III, p, 139t1. On en a conclu que le culte des deux luminaires célestes devait être à litorne d'importation hellénique Mais bien que les poètes se soient plu à le chanter et les artistes à le représenter, hélios occupe une si petite place dans le culte grec, que l'hypothèse d'un emprunt en devient fort invraisemblable. II paraît plus probable que l'adoration des astres qui servent de mesure au temps et ont une si grande influence sur l'agriculture, exista dès l'origine parmi les populations rustiques de l'Italie, comme dans les autres branches de la famille indo-européenne 18. Loin d'être favorisé par les SOL 1382 SOL influences helléniques, ce culte fut plutôt relégué dans l'oinliri par l'anthropomorphisme, qui lui substitua celai d'apollon. Toutefois, s'il occupe peu de place dans la religion officielle, il en garda davantage dans les superstitions populaires'. Ce que litorne dut à la Grèce ce furent les types plastiques de Sol et de laina. On représentait l'un monté sur un quadrige, où l'on voyait parfois un symbole des quatre saisons ou des quatre éléments, l'autre sur un char [rainé par deux chevaux, auxquels, depuis l'époque des Antonins, on substitua souvent deux taureaux', Dans les frontons du temple de Jupiter Capitolin, comme au Parthénon, une réunion de dieux était encadrée par les représentations de Sol et de Luna conduisant leurs attelages LL. 1, p. 901, fig. 11'10-°ai , el, ce groupe célèbre provoqua de nombreuses imitations'. Les deux astres rapides, qui sont. fréquemment associés', devinrent les divinités protectrices des courses de char'. Sol avait à proximité du cirque, sur l'Aventin ce semble, un temple dont le faîte était surmonté de son image dorée. Par suite des extensions données à l'édifice, ce temple se trouva plus tard au milieu des gradins des spectateurs°. Il est, désigné dans les descriptions topographiques de l'époque de Constantin sous le nom de Tenupfoni Solis et Lunae'. Cet ancien culte romain ou gréco-romain, déjà si obscur que la tradition est ir son égard pleine d'incertitudes, devait sous l'Empire être encore éclipsé davantage par celui de dieux solaires étrangers. Auguste lui-même, après la conquète de l'Égypte, fit apporter d'Héliopolis deux obélisques qu'en l'an 10 av. J.-C. il consacra à Sol, l'un dans le cirque, l'autre au Champ de Mars, on il servait de gnomon °. Sol et laina apparaissent en l'an 1 av. J.-C. à côté du Jupiter aelernus et d'Isis dans une dédicace en l'honneur d'Auguste due à un affranchi oriental', et. bientôt l'on voit se multiplier, en Occident, les dédicaces à ,Jupiter-Sol-Serajlis t0 qui, suivant la conception égyptienne, durant sa course diurne, fertilise la terre et qui la nuit règne sur le monde souterrain, à la fois maître de la fécondité et juge des morts". En même temps, les soldats qui tenaient garnison à Rome y introduisaient leurs dévotions nationales. C'est ainsi qu'en 126 un eques singuluris de Cologne fait une dédicace Soli die•ino12 et en 216 un prétorien du Vermandoisl.O.t1J .. etSoli dii.s petriensibus". Des divinités solaires gauloises et germaniques purent ainsi occasionnellement trouver des adorateurs dans la capitale. Mais beaucoup plus nombreux furent certainement ceux des Baals syriens qui, dès la période hellénistique, avaient été assimilés au Soleil". On trouve ainsi des consécrations à Sol faites par des prêtres ou des fidèles du Jupiterpolichenus de Commagène '5, du Malachbe] palmvrénien" de l'l+lagabal d'Lunèsef7. Tacite nous raconte qu'à la bataille de Bédriacum (69 ap. J.-C.) les soldats de la Ille légion saluèrent d'une grande clameur le soleil levant suivant la coutume syrienne 'a. Enfin, à partir du n" siècle, avec la diffusion des mystères de Mithra ft. III, p.1944 , se répandit de plus en plus l'adoration de l'astre a invincible r. Les inscriptions qui sont dédiées aux divinités solaires asiatiques, deviennent nombreuses dans toutes les provinces latines oit s'introduisirent les cultes orientaux ". Rome et l'Italie en ont fourni une quantité considérable; elles abondent aussi le long de la frontière romaine où les troupes étaient cantonnées, eu Dacie, en Pannonie, en Rhétie, et surtout en Germanie. Plus rares dans l'intérieur de la Gaule, où elles n'apparaissent guère que dans la vallée du Rhône, très ouverte au commerce du Levant, elles sont un peu plus fréquentes en Espagne et, en Afrique, où campaient des légions. Cette aire de dispersion suffirai t. à. prouver que la plupart de ces dédicaces à Sol s'adressent en réalité à ses congénères asiatiques. L'examen des monuments où le Soleil est reproduit, conduit à la même conclusion. A. la vérité, l'aspect extérieur du dieu y reste généralement conforme aux traditions de l'art hellénique. l'armi beaucoup d'autres nous choisirons, pour le reproduire (fig. 6197), un beau bas-relief découvert à Narbonne'', qui offre une composition intéressante : le Soleil, sortant des flots, élève une torche de la main droite. Au moment oit l'astre apparaît sur l'horizon, il chasse les ténèbres et frappe de ses rayons les démons qui les peuplent. Aussi l'Oriens est-il souvent figuré et l'aurore est-elle le moment oit l'on sacrifie de préférence à Sol 71. SOL 1383 -SOL Le type le plus ordinaire est celui qui montre Sol élevant la main droite pour bénir ou protéger ses serviteurs, et tenant de la gauche le fouet, avec lequel il mène son quadrige, et le globe, symbole de sa domination sur le Inonde (fig. 619811. Toutefois si le dieu apparaitainsi partis isolément"-, ou dans des compositions de scènes de la mythologie grecque. notamment sur les sarcophages', on le voit beaucoup plus souvent représenté sur les sculptures ins pirées par les cultes orientaux' et, en particulier, sur les bas-reliefs mitlu'iaques, dont il occupe régulièrement le coin gauche supérieur', ou bien il figure dans la série des planètes sur les pierre décorées des images des sept dieux de la semaine [DIES, fi g.2402. sq.]6. Parfois des types nouveaux répondent aux croyances nouvelles répandues par les religions étrangères. Ainsi nous voyons sur un autel du Musée du Capitole Sol sanctissiiIfus, c'est-à-dire Malachbel, porté par un aigle éployé, comme le sont souvent les bustes des empereurs qui ont obtenu l'apothéose (fig. 6499) 7. Un bas-relief décou vertrécemmentàCorstopitum (CorhridgesurlaTyne) nous montre un personnage portant une couronne radiée, probablement Sol, monté sur Pégase; des deux côtés se trouvaient les Dioscures symboles des deux hémisphères célestes (fig. 6500) 6. Dans la foule des textes épigraphiques qui mentionnent le nom latin de Sol, il est souvent difficile de reconnaitre à quelle divinité étrangère ou indigène chacun se rapporte, à moins que la nationalité même du consécrateur ne permette de le déterminer Cependant, certaines épithètes sont réservées presque exclusivement aux Baals ou à Mithra. Un Sol divinus sera très probablement syrien 10, de même Sol sanctissinius ", parce que les dieux sémitiques sont, par excellence, des ares « saints ou Sol aelerntts" parce que la constance perpétuelle des révolutions célestes avait conduit les Orientaux à concevoir les astres comme éternels' Mais la qualification qui appartient particulièrementà ces dieux étrangers est celle d'ineicles. Traduction du grec av:xrlro;, elle est appliquée en Orient aux puissances sidérales, sans doute parce qu'après avoir semblé disparaitre et périr, elles renaissent avec un éclat nouveau, constamment victorieuses des ténèbres''. En Syrie, les Baals, identifiés avec Hélios, sont invoqués comme âvlxÏI2ot 16. En Occident, cette appellation de Sol inLicifas ou deus invictus qui devient. de plus en plus fréquente depuis le ue siècle17, a surtout été usitée pour désigner Mithra, notamment sur les monuments consacrés dans ses temples, oh aucune confusion n'était possible, et le sigle D S 1 M (Deo Soli incic(o llilhrae) est bien connu de tous ceux qui ont feuilleté un Corpus épigraphique Mais on trouve, à côté du dieu perse, un Sol invictus ElagabalJ9, un .Sbl invictus !llalechbel211 et même un Sol invictus Serapis21, et Sabazius, transformé en génie héliaque, prend le nom de Sanctus invictus Saba0 i us 2~. Ainsi Sol invictus est une désignation générale qui embrasse toutes les divinités orientales considérées comme solaires par les théologiens de l'Empire. Cette expression très large, qui faisait abstraction de toutes les appellations locales, pouvait s'appliquer aux diverses puissances célestes oit les tendances monothéistes de l'époque voyaient des manifestations d'un seul Gare suprême. On a exposé ailleurs ' ELAC,vlal.i comment l'empereur Héliogabale voulut, en 218, faire du Baal d Émèse le dieu principal du Panthéon romain et concentrer dans SOL 1384 SOL son temple tous les cultes de l'État'. Cette tentative violente el. prématurée devait. échouer', mais elle fut reprise un demi-siècle plus lard avec plus de succès. En 2714, Aurélien, après sa victoire sur Zénobie, fonda à Rome, au Champ de Mars, un temple consacré au Soleil (Toie12lutn Snlis) 3, qu'if décora luxueusement et enrichit d'offrandes 9. l'aide du butin fait en Syrie`. On a retrouvé près de San Silveslrn in rapite des restes antiques importants, qui semblent bien avoir appartenu à cette construction. Précédée de vastes portiques, on l'on conservait le vin destiné aux distributions alimentaires', elle rappelait par son plan la disposition du temple de Baalbek On a beaucoup discuté la question de savoir quel dieu oriental Aurélien avait ainsi adopté et honoré. On a prétendu successivement y reconnaître Mithra', Élagabal', qui avait protégé l'Empereur durant sa compagne d'Orient., ou le dieu solaire de Palmyre'. 11 est encontestable que l'Empereur, dans le dessein de fonder une religion universelle, s'inspira de celle qui était enseignée dans les grands sanctuaires de la Syrie, et qu'il prit en particulier pour modèle celle de la capitale de Zénobie, oit, durant sa puissance éphémère, s'était constitué un culte officiel, nécessairement syncrétique 10. Lorsque Zosime nous dit qu'Aurélien plaça dans son temple romain les images `Il),.ou eu rai B'l(aou enlevées à PalInvre, on peut croire que ses hommages s'adressaient, conformément à la théologie syrienne de la lin du paganisrne1z, à la fois au dieu suprême, siégeant dans le ciel le plus élevé, et au Soleil, son image sensible et son intermédiaire. Mais le Sol invicius de l'empereur victorieux ne peut l'are assimilé à aucune divinité orientale préexistante. La tradition, suivant laquelle il se serait souvenu aussi d'un culte du Soleil dont sa mère aurait été prêtresse dans sa ville natale de Sirmium 1' ', ne doit pas titre absolument écartée" Son prédécesseur, Claude le Gothique, qui étaitaussi d'origine danubienne, vénérait pareillement, Sol comme son protecteur". Aurélien tendait donc à fonder une religion assez large pour que toutes les dévotions provinciales pussent y trouver satisfaction. Il voulait, grace au monothéisme solaire, restaurer humilie morale de l'Empire comme il en avait reconstitué l'unité politique7'. Il n'établit ni un culte local, comme Islagabal, ni même un culte purement oriental. Si la construction du temple et peut-être dès lors le rituel rappellent ceux de la Syrie, à d'autres égards on resta fidèle à la tradition romaine. Le 23 Décembre qu'on regardait comme le jour de la renaissance I du Soleil, dont la lumière recommençait à croître, le IValalis Invècti 17, fut célébré par des jeux du cirque tous ies ans (`llidu,cai8) et par un agon Solis quadriennal à l'imitation de Turion Capitolinus établi par Domitien'". Le service du temple auquel furent affectées des ressources spéciales 26, fut confié à un nouveau collège de prêtres, les ponti/ires dei Sortis ou dei inrirli Solis, qui furent mis sur le même pied que les antiques pontifes romains, appelés désormais ponti/ices L'estoc . Ils furent recrutés dans l'ordre sénatorial, mais on ne sait rien sur la présidence et l'organisation de ce clergé. Sol invictus était ainsi élevé au rang suprême dans la hiérarchie officielle des dieux ; il usurpait la place du vieux Jupiter Capitolin et devenait le protecteur attitré des empereurs et de l'État. Longtemps avant Aurélien, depuis le règne de Septime Sévère, le dieu solaire appas raitsurles monnaies impériales accompagné deslégendes Or iensou il eternarts Augusti2i, et celle de Sol invictus y figure depuis Gallien (260-268). Mais imageset légendes deviennent beaucoup plus explicites sous Aurélien 23. On voit par exemple le Soleil offrant au prince le globe, symbole de la domination du monde, tandis qu'à leurs pieds est couché un captif, et à côté des formules traditionnelles, d'autres proclament le Soleil conservator ou restitutor orbis et enfin dominas ivaperi romani2l. Il est remarquable que sur toutes ces monnaies le type du dieu, en dépit de son véritable caractère, reste conforme a celui de Part hellénique, dérivé de celui d'Apollon. Un jeune homme, por tant la couronne radiée, velu d'une simple chlamyde, le plus souvent flottant derrière le dos, lève la main droite tandis que la gauche tient le fouet ou le globe (fig. 6301). Nous avons parlé plus haut de ces attributs. Parfois on lui donne une palme, un trophée, un are, une ~~ lance, etc., ou bien ~~ on le montre debout sur son quadrige (fig. 6302) ". La numismatique des successeurs d'Aurélie❑ continue à manifester leur dévotion envers l'astre divin". Sous Probus, la relation intime du souverain et du dieu est affirmée par SOL 1385 -SOL la légende Soli inriclo coiniti Augu.cti' fig. G503 ) ef, la réorganisation de l'Empire par Dioclétien ne modifia pas sur les monnaies l'usage, devenu traditionnel, de types et d'inscriptions relatifs à la religion solaire C'est sous la protection de celle-ci que les armées de Licinius marchèrent contre Constantin, et un texte curieux nous ap prend que cet empereur établit dans le camp de Salvosia en Mésie un sacrifice annuel en l'honneur de Sol, le 18 Novembre, qui était le premier jour de l'année suivant le calendrier d'Antioche'. Constantin lui-même, durant la première partie de son règne jusqu'à sa victoire sur son rivai, fit frapper un grand nombre de pièces au type de Sol avec les légendes Sol ineictus, Soli invicto cotrtëli A(iqustinestri, etc. et dans son armée les soldats durent tous réciter le Dimanche, « jour de la lumière et du soleil », une prière au dieu qui donne la victoire'. La force de la tradition maintint encore les images de Sol sur les monnaies de Constantin II, mais Constance n'y toléra plus de dieux païens. Cette prédominance accordée au Soleil sur les autres divinités, au moins pendant un demi siècle f 274-323), ce patronage que les souverains lui reconnaissent sur leur personne, ne fontine donner une consécration officielle, de la part des Césars, à des croyances qui bien antérieurement s'étaient développées dans l'Orient hellénistique. Le monothéisme solaire se fonde à la fois sur des idées politiques et sur des doctrines théologiques. Depuis une fiante antiquité, le Soleil était, en Égypte comme en Babylonie, la divinité protectrice des rois$; et dans la vallée du Nil, les Pharaons passaient même pour des incarnations successives de Rit. Ces théories furent plus ou moins ouvertement adoptées par les empereurs romains, selon que s'affirmaient plus ou moins nettement, leurs prétentions a un absolutisme théocratique. Dès le Pt' siècle, on voit parfois les Césars considérés comme des épiphanies terrestres dhélios e. A partir du ne siècle, la titulatere officielle des souverains exprime cette relation qu'on établissait entre eux et l'astre du jour. Commode prend le premier le titre d'inviclus, auquel vient bientôt s'ajouter celui d'uelernus. Ces épithètes, que les princes partagent avec les dieux solaires de l'Orient (supra, p. 1383), leur appartiennent parce qu'ils sont unis à lui par une identité de nature et qu'ils restent constamment en communion intime avec lui t0. Suivant les croyances astrologiques qui règnent à cette époque, le Soleil, planète royale, est le créateur des finies et i1 donne en particulier aux princes, au moment de leur I. naissance, Ies qualités qui leur font dominer les hommes elles égalent à la divinité". Aurélien, qui institua, le culte ot'liciel de Soi invitants, est aussi les premier qui se déclare sur ses monnaies deas et dominas nous". Ce que Sol est parmi l_'t, astres dont il règle l'harmonie, le monarque l'est sur la terre qu'il gouverne, La religion d'État, établie par le 'vainqueur de l'Orient, devait donc, dans la pensée de son fondateur, servir de justification et de soutien à l'autocratie impériale. L'établissement de cette religion universelle, dont l'adoration du Soleil était le centre, avait été préparée aussi par la constitution d'une théologie astrologique, qui s'était imposée aux clergés orientaux. Elle a pour premiers auteurs les prclres-a,tronornes de l'époque hellénistique, auxquels les firec conservèrent le vieux nom de. e. Chaldéens" ». Suivant leurs doctrines le Soleil, qui occupe le quatrième rang parmi les sept planètes, est placé au milieu. de ces astres errants, comme un roi entouré le ses satelhtes, et on icii applique par suite le nom de "Iliiierd; 1". Ces savants enseignaient que son globe incandescent, doué d'un pouvoir alternatif d'attraction et de répulsion, déterir naii, la marelle des autres corps sidéraux, qui lu, luisaient escorte. Il était le coeur du monde (.i G t! ;,Aor,u) et par sa chaleur animait tout ce ,,rand organisme. Cette théorie mécanique, où il y a comme un pressentiment de la gravitation universelle et du système hélio centrique, devait néeessairersteut conduire le reg.-eau l'astre éclatant du jour comme le (Min suprérne de l'unis vers. En effet, pour les astrologues le mouvement des étoiles provoquant tolus les phénomènes physiques et moraux, celui qui règle le jeu compliqué de leurs révolutions deviendra l'arbitre des dt stins et I' rs.aïtr e de la nature entière. Déjà Pline le proclamait principale Mais ce i out, si bien ordonné, ne pouvait, pensait-on, élire conduitpartureforce aveugle. LeSole il,? uaièreïntei ligente (ues,ç vossea)'g, sera donc concu comme la pinson directrice du monde, mens,nuadi 't ' comptai() et par une conséquence ultérieure cette, raise,t universelle deviendra le créatrice du la raison humaine, étincelle détachée des ,.'c x cosmiques. De même que 1 ratte, Pet'lairt écartait et ramenait à lui alternativement les planètes, de mérite il envoyait, croyait-on, à la naissance l amer dans les corps qu'elles animaient et après sa mort il les faisait remonter dans son sein. De spéculations astronomiques combinée s e ec de vieilles ctoyanct.s sémitiqu. le les fiféero„iens _ aaens avaient ainsi déduit toute une dogmatique religieuse panthéisme astrol ogique se répandit dans le monde latin vers le début de notre ère. Une propagande .littéraire, q€ii se rattache it Posidonius prépara les esprits à accepter SOL 1386 SOL la foi que priu;haient les prêtres asiatiques, et l'action combinée des systèmes philosophiques et des mystères orientaux, secondant la politique des Césars, tendit à assurer la domination incontestée de Sol inrictus. Sol, nous l'avons dit, n'avait dans la vieille mythologie romaine qu'une position modeste qui était en désaccord avec la toute-puissance que les théories nouvelles lui accordaient', A l'exemple des Orientaux, qui avaient transformé en divinités héliaques, non seulement les Mals de Syrie, mais Sérapis, Attis et Sabazius (t. IV, p. 9.9), les théologiens romains entreprirent de démontrer que les principaux dieux n'étaient que des l'ormes diverses sous lesquelles on adorait le Soleil. Toutes les puissances célestes n'étaient, pour ainsi dire, que des réfractions ou irradiations de sa splendeur. Le syncrétisme de l'époque impériale favorisail ces interprétations complaisantes'. Les poètes se plaisent à énumérer la série des noms sous lesquels on adore l'astre qui nous éclaire', et les théoriciens du paganis ne démontrent doctement leur identité. On voit appliquer ce système par Porphyre dans le llepi «laaµâ7mv 4, mais il est surtout développé à Rome par Cornélius Labéon, qui s'inspire de Jamblique". C'est à lui que Macrobe emprunte la dissertation érudite où il prouve qu'Apollon, Mars, Mercure, Esculape, Hercule, Sérapis, Adonis, Attis, Osiris ne sont que des appellations variées du dieu solaire. Lorsque le paganisme plaça l'l.tre suprême hors des limites du monde sensible et le fit siéger au delà des sphères planétaires au plus haut des cieux ', l'ancienne omnipotence (lu Soleil en fut amoindrie. Mais on continua à voir dans le disque radieux, qui éclaire les hommes, l'intermédiaire entre la puissance extra-mondaine elles mortels. On supposa mélne l'existence d'un second soleil, purement spirituel, qui brillait dans le monde de l'intelligence (vospc; xocp.os), et l'on en fit le siège de cette raison universelle qui semblait désormais incompatible avec la malières. Ce n'est pas le lieu d'exposer ici en détail les transformations que le néoplatonisme fit subir à l'ancien panthéisme solaire, ni d'insister sur la théologie de J ulien qui, dans son discours Ei; fiaetn€a "IDuov, expose les spéculations de Jamblique sur le dieu que l'empereur regardait comme son père spirituel'. Cette vénération générale pour le Soleil qui caractérise le paganisme à son déclin, ne devait pas périr tout entière avec lui. Reprenant une expression du prophète Malachie 10, les chrétiens appliquèrent au Christ le nom de Sol jusliliae, et opposèrent celui-ci au dieu matériel qu'adoraient les idohitres. L'astre qui illumine la terre fut ainsi considéré comme un symbole sensible du Verbe qui avait lui dans les ténèbres du monde". Il sembla ainsi participer en quelque mesure à sa divinilé, non seulement aux yeux des gnostiques et des manichéens'', mais même des catholiques, et il resta longtemps l'objet d'une adoration superstitieuse contre laquelle s'élèvent les écrivains ecclésiastiques j4. Le résultat le plus durable de ce rapprochement du « Soleil de justice » avec le « Soleil invincible » fut que l'Église adopta au ive siècle à Rome entre 351 et 360 pour commémorer la nativité de Jésus la date du Natalis invicti. Celle-ci était universellement marquée par des réjouissances sacrées'', dont on garda ce qu'on put: les anciennes courses de chars même furent conservées' 3. Cette substitution d'une solennité chrétienne à une vieille fête du paganisme fut adoptée dans tout l'empire, et c'est pourquoi aujourd'hui encore nous célébrons la Noël le 25 décembre. FBANz CL'MONT.