Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

Article SPECULATOR

SPECULATOR. 11 a été parlé avec quelque détail à l'article PRAETORIAE COHORTES des speculatores attachés particulièrement, comme gardes du corps, à la personne de l'Empereur. Il existait ailleurs encore des speculatores. On les rencontre en province dans l'ofcium des généraux commandant les différents corps d'armée'. Chaque légion en fournissait dix'. Le grade existait encore après les réformes de Dioclétien'. R. CAINAT. I. La légende de Narcisse et celle de Persée prouveraient, si cela était nécessaire, que les Anciens savaient se servir du pouvoir réfléchissant de l'eau. Peut-être s'étaient-ils mirés aussi dans certaines pierres comme l'obsidienne ° ; des poteries primitives, même polies à la main, comme celles de Chypre, à plus forte raison des vases revêtus d'un enduit ou d'une glaçure, ont pu, par exception, servir à réfléter les images. Mais les premiers miroirs qui méritent ce nom sont les miroirs de métal. L'antiquité n'en a pas connu d'autres avant l'ère chrétienne. Les Mycéniens en ont sans doute emprunté l'usage aux Égyptiens pour le transmettre ensuite aux Grecs et aux Romains. La plupart sont de bronze, et la proportion d'étain parait y être plus forte 6 que dans les alliages antiques généralement usités; mais il y en eut en métaux précieux, peut-être en or', moins probablement en aurichalque 8, certainement en argent', dontquelquesuns10 sont venus jusqu'à nous. D'autres, en assez grand nombre, étaient argentés " ou dorés 12, ces derniers parfois sur fond d'argent' 3. Argenture ou dorure pouvaient se poser à chaud" ou, comme c'était, semble-t-il, le cas le plus fréquent, à la feuille battue. On augmentait ainsi la valeur vénale du miroir, mais non, ou guère, son pouvoir de réfléchir les objets, car le brunissage était parfaitement connu des Anciens et il n'est pas douteux que de simples disques de bronze, ainsi préparés, pouvaient l'aire d'excellent miroirs''. Leurs propriétaires en avaient d'ailleurs 'grand soin : pour les maintenir a brillants et propres n, ils les essuyaient avec des éponges 16, les enfermaient dans des boites" et les enveloppaient dans des sacs d'étoffe dont les traces sont fréquemment apparentesl". Nous ne savons quand on fit pour la première fois usage des miroirs' de verre, étamés ou, pour mieux dire, doublés. Seuls deux auteurs en parlent d'une manière précise, Pline l'Ancien, qui en attribue l'in vention aux Sidoniens 19 et Alexandre d'Aphrodisias 20, qui écrit vers 200 après J.-C.2f. Or le verre, d'après Kisa22, n'a commencé d'être soufflé que dans la première moitié du i siècle, ce qui s'accorderait bien avec la mention encore hésitante de Pline l'Ancien. L'étamage au mercure n'a jamais été connu des anciens ; ils plaçaient au revers de la lentille de verre, laquelle était soufflée et non coulée", une feuille d'or .24, d'étain 25 ou de plomb". Soixante-quatre miroirs en verre, doublés de plomb, sont aujourd'hui connus''; ils viennent surtout de l'Égypte 28 et de la Gaule 29; on en a découvert beaucoup à Reims '0; mais on en a aussi trouvé en Asie-Mineure 31, à 0lbiaj2, en Germanie25 et près de Sofia3''. La plupart sont tardifs et de très petites dimensions ; peut-être quelques-uns ont-ils servi d'amulettes, si bien que les miroirs antiques restent les miroirs métalliques. II. La forme usuelle des exemplaires anciens est la forme ronde. Il y en a qui sont carrés et rectangulaires, mais ils n'apparaissent que chez les Étrusques ou dans les temps romains et je n'en connais pas qui soit de la bonne époque grecque. Au contraire, textes" et monuments sont d'accord pour attester la persistance ou la grande fréquence de la forme circulaire. Le disque réfléchissant pouvait être posé à plat sur la paume de la main, être tenu à l'aide d'un manche ou être porté par un pied, d'où les trois divisions des miroirs grecs, divisions qui se retrouvent citez les Étrusques et à l'époque romaine, à cette différence près que les miroirs à pied disparaissent alors ou deviennent très rares. La surface réfléchissante était, dans tous ces exemplaires, soit légèrement concave, ce qui diminuait la grandeur des objets réfléchis, soit, et le plus souvent, quelque peu convexe, ce qui, au contraire, l'augmentait. Il est exceptionnel qu'un miroir antique soit parfaitement plat. Nous verrons d'ailleurs utiliser dans les miroirs à boîte les courbes inverses du fond et du couvercle : lorsqu'ils étaient ouverts, la femme qui s'en servait se regardait à volonté sur les deux surfaces réfléchissantes, dont l'éclat était, de plus, augmenté par le rapprochement. Enfin les miroirs antiques sont généralement très petits. Le diamètre est communément de 0m,15 à 0°1,20, et assez souvent inférieur au premier de ces chiffres. Il y eut sans doute de très grands miroirs 3fi, dont quelques-uns atteignaient la taille humaine, mais, soit chez les particuliers", soit même dans les temples38, il ne semble y en avoir eu que très peu. Le miroir légendaire de Démosthène ne devait pas être de très grandes dimensions 39 et ceux dont se servaient les barbiers" et les peintres" étaient sans doute dans le même cas. SPE 1423 SPE IIL Les miroirs pouvaient être fixés ou encastrés dans le rnur' ; mais ceux que l'on rencontre fréquemment dans le champ des vases peints 3 étaient simplement accrochés à un clou et ne jouaient pas le rôle de nos glaces modernes. De même la psyché paraît avoir été inconnue des Anciens ; seule une intaille d'époque romaine montre un coq qui regarde son image dans un disque à bord dentelé et porté par un pieu 3. Les miroirs à pied étaient naturellement posés sur une table, mais les miroirs à manche ou à boite devaient être tenus en main et c'est tout au plus si on les appuyait et si on les posait' sur les genoux. Nous voyons souvent (fig. 6524), sur les monuments une femme tenant d'une main un miroir et de l'autre se coiffant" ou se fardant'. Ailleurs (fig. 6525), une amie ou une esclave présente' ou apporte' un miroir. Quant aux femmes se mirant simplementf0 ou tenant à la main un miroir", les représentations en sont innombrables. Il va sans dire que les déesses, peut-être dès l'époque mycéniennef2, s'en servent également. Aphroditef3 en fait surtout usage et nous voyons souvent un Éros 14 le lui tendre, mais Hèra'° s'en sert également, ainsi qu'Artémis1e et Athèna" s'y regarde jouer de la flûte. Même les Néréides" et les Sirènes19 en tiennent à l'occasion. Les hommes et les dieux20, les hermaphrodites21 et Bacchus" exceptés, en usent moins fréquemment; s'ils les tiennent souvent en main sur les vases peints 23, c'est pour les apporter en cadeau; ils n'ont guère dû s'en servir que dans les boutiques des barbiers 24. IV. Les miroirs égyptiens n'ont pas à être étudiés ici; nous ne pouvons cependant nous dispenser d'en dire un mot, car il n'est pas douteux qu'il faut chercher en Égypte les antécédents des miroirs grecs". Sans doute, les disques y sont, tous légèrement ovales, mais ils se rapprochent parfois de très près du cercle parfait" et on en trouve de piriformes comme les exemplaires de Palestrina que nous étudierons plus loin. Le métal, cuivre, bronze, argent ou or 27, est le même qu'en Grèce et l'argenture,comme la dorure 2' sont connues Les types principaux sont fixés dès le Moyen-Empire 29 et comprennent toutes les variétés des miroirs à manches. La poignée se termine par un chapiteau campaniforme 30, par une fleur à volutes retombantes31, par une tête d'Hathor32 ou de Bès33, par un groupe de personnages divins3Y, par une attache accostée d'animaux 30, par un Bès debout 36 et par une femme nue, les mains au corps77 ou l'un des bras replié sur la poitrine 33. Les poignées sont en bois, en ivoire ou en bronze, et les disques sont plats, convexes ou légèrement concaves 39. Pour en protéger le poli, on les enfermait dans des étuis dont quelques-uns sont venus jusqu'à nous Y0. Tous ces traits se retrouvent dans la suite de cette étude. V. Les miroirs étaient certainement connus à l'époque mycénienne. On en a découvert, entre autres, à Ialysos", à Mycènes", à Vaphio 43, à Menidi" et à Thoricos 4'; et une bague d'or, souvent mentionnée '`f, montre une divinité assise, qui tient un miroir à manche. Dans les exemplaires conservés, le disque de bronze est parfaitement rond et a, en moyenne, O°',15 environ de diamètre"; tin manche de bois, d'os ou d'ivoire, fixé par deux larges clous à tête d'or u, servait de poignée au miroir. Deux manches d'ivoire (fig. 6526) ont été trouvés dans le dromos du tombeau dit de « Clytemnestre », où a été découverte une sépulture d'esclave b9 ; un troisième, du même type, mais qui n'appartient peut-être pas à un miroir, a été mis au jour dans une tombe de Mycènes qui était creusée SPE 1421 SPE dans le roc'. Le fût, que strient parfois des bandes obliques à décor conventionnel, imite le tronc d'un palmier et se termine à l'attache par deux volutes recourbées. A l'attache sont deux femmes affrontées, figurées dans les branches de l'arbre ou portées par le chapiteau, et tenant des fleurs, des colombes et des palmes. Elles sont vêtues de la robe à volants mycénienne, mais sur l'original, d'après M. Tsou ntas, leurs cheveux crépus et leurs visages aux traits lourds, au nez épaté et aux lèvres épaisses décèlent une origine asiatique. VI. Les premiers miroirs grecs que nous connaissions à l'époque archaïque sont du type ,' argivocorinthien ». Ce sont des miroirs à manche. La poignée, munie d'une attache de suspension, s'évase légèrement entre l'extrémité qui est ronde et l'attache qui est sensiblement rectangulaire (fig. 6527)1'. Les [rois surfaces ménagées entre l'anneau et le disque sont décorées de plaques au repoussé, d'inspiration ionienne. Aux quatre exemplaires relevés en 1896' s'ajoutent deux miroirs d'Athènes' et un miroir de Berline. Un aigle volant, des coqs et un Gorgoneion décorent le disque inférieur ; une longue figure, imberbe ou barbue, se profile sur la poignée proprement dite; des sphinx, des lions ou une scène mythologique, comme la rencontre de Priam et d'Achille, sont représentés sur la plaque d'attache. Ces miroirs servent de transition pour passer aux miroirs grecs archaïques ou de style libre, qu'on peut diviser en plusieurs catégories : les disques portés par un pied, les exemplaires à manche, enfin les miroirs à boîte, dont plusieurs sont munis de reliefs et dont quelques-uns, de plus, sont gravés. VII. Les miroirs à pied ont le plus souvent pour support une figurine féminine, parfois une statuette masculine, assez rarement un motif architectonique. M. Miction comptait en 1893 cinquante-deux exemplaires de la première catégorie' ; sans prétendre à être complet il faudrait aujourd'hui ajouter à la liste au moins vingtdeux monuments: six à Athènes', quatre à Boston', trois à Saint Péterbourgf0, deux au British Museum" et à Berlin ", un à Naples 13, en Angleterre ", à Munich", à Chicago" et à New-York". La femme n'est pas nécessairement une Aphrodite. car elle est nue dans cinq exemplaires (fig. 6328)"et vêtue, dans un bronze d'I gine, d'un court caleçon: on peut alors yvoir une simple hiérodoule, qui joue parfois des cymbales (fig. 2264). Les autres statuettes sont vêtues et leur costume montre toutes les variétés de la mode féminine, depuis le milieu du vie siècle, jusque vers la fin du Ve. C'est tantôt le chiton simple, tantôt la tunique de lin par dessus laquelle l'himation est jeté en écharpe, tantôt le diphoïdion ou l'hémidiphoïdion ionien ou dorien, en toile ou en laine (fig. 6529)1'. La base, qui aujourd'hui fait parfois défaut, mais qui était nécessaire à l'équilibre, est le plus souvent ronde et portée par trois griffes de lion ou par trois pieds de cheval : elle peut être plate et circulaire ou même carrée, supportée par quatre pieds de sphinx ou par quatre montants croisés, terminés par des sabots de cheval. Un animal, lion couché, grenouille ou tortue, remplace à l'occasion la plate-forme, et deux animaux l'accostent, tels que des lions et des chevaux ailés. La main droite est, souvent étendue à plat, tandis que la main gauche relève la robe   la hanche ; l'attribut est, alors, d'ordinaire une colombe, mais, parfois aussi, un gland, une grenade, un fruit, une fleur, une pomme de pin, voire une sirène. Ailleurs, la main droite s'appuie sur la hanche et la gauche porte l'attribut ou se plaque sous le rabat de la tunique. D'autres fois, les deux mains sont portées en avant ou relevées du mème mouvement vers la palmette ou vers le disque métallique. En fin, trois fois au moins, la déesse est représentée se coiffant. L'attache proprement dite, celle qui relie la tète à la SPE 1425 SPE surface mirante, est d'abord maladroite et brutale : elle se transforme par la suite, et la transition est ménagée par la courbe élégante d'une palmette accostée de demipalmettes ou de tiges fleuries. Pour remplir le vide laissé au-dessus des épaules, le plus souvent deux Eros volent vers l'Aphrodite, mais ils peuvent être remplacés par deux Nikès, par deux protomes de cheval ailé, par deux sphinx ou deux sirènes, même par deux chiens surmontés de deux lions dévorant une proie (fig. 6530)1. Le disque est décoré sur la tranche d'oves gravés et d'appliques telles que fleurons, rosaces, coqs, lièvres, chiens, renards ou sphinx; en haut se dresse souvent un sphinx, rarement une figurine féminine, parfois un fleuron ou bien un ou deux coqs. L'anneau qui se trouve à cet endroit ne servait pas à suspendre le miroir, mais simplement à faciliter le transporte. Les supports en forme d'homme nu sont plus rares, mais quelques beaux spécimens du ve siècle sont venus jusqu'à nous. Enfin des supports plus simples se composent de deux tiges flexibles entre-croisées 4, d'un pied octogonal élargi vers le bas avec une palmette à l'attache', de tigelles en bronze', d'un fût en bois ' ou d'une colonne que surmontaient un sphinx accroupi et une riche palmettes. VIII. Les miroirs à manche sont de formes et de natures très différentes, et nous ne pouvons songer à en distinguer toutes les variétés. La poignée est tantôt soudée avec le disque et tantôt rapportée : dans ce dernier cas une soie, qui servait d'attache, entrait dans un manchon de bois, d'os ou d'ivoire', lequel a parfois été conservé 10. L'exemplaire le plus ancien qui soit connu n'est pas ou n'est guère plus récent que les miroirs « argivo-corinthiens » : le manche, en forme de galette plate et travaillée d'un seul côté 11, représente (fig. 6531) une femme de profil, le chiton gravé au tracé et serré par une ceinture, le polos fendu pour insérer le disque; un anneau, placé au-dessous, servait à suspendre le miroir. Beaucoup plus récents et au plus tôt de la fin du ve siècle sont un certain nombre d'exemplaires, généralement à manche rapporté, dont l'attache se compose, outre les volutes et les palmettes ou les demi-palmettes classiques, d'une figu VIII. rine ou d'une protome, qui se présentent, le plus souvent, de face. C'est une Nikèf', un Eros agenouillé 13, un sphinx 11 ou un Gorgoneion 16. D'autres fois, surtout semble-t-il en Sicile et dans la Grande-Grèce, un rectangle ajouré s'intercale entre le manche et le bord du disque'", et les sujets s'encadrent dans un édicule, entre des arbres ou des piliers. Aphrodite enlève Adonis" ou est accompagnée d'Eros ", ce dernier est figuré courant" ou éten du 20 ; un héros chasseur 27, un Silène assis 22 deux joueurs de lnorra23, une pleureuse voilée 21 rappellent, en un style plus libre et avec un fond découpé, les personnages des plaquettes « argivo corinthiennes » ou même les femmes des miroirs mycéniens. Ailleurs, l'attache est formée d'un serpent qui mord une feuillee d'une tige d'acanthe stylisée26, d'un chapiteau à volutes ioniques 27, de deux coquilles reliées par des branches souples, où s'intercalent des têtes d'animaux28, d'une simple palmette 20 et même d'une tige de fer rapportée30. Les représentations de miroirs sur les vases peints nous apprennentàconnaitre d'autres formes encore, dont souvent aucun exemplaire n'est venu jusqu'à nous. Nous voyons que le disque était encadré comme le sont aujourd'hui nos glaces à main 31 ; la bordure devait être en bois et des clous l'ornaient de distance en distance 32. Des bélières 33 ou des palmettes 3'' accostent la surface mirante, et un fleuron 35 se dresse le plus souvent au sommet. Enfin les miroirs à manche étaient parfois gravés 36 ou décorés de reliefs 37 comme les miroirs à boite. Le fait a dù être assez rare, car les Grecs, au contraire des Etrusques, évitent toute surchage d'ornements inutiles ; il suffisait, à leur sens, que la poignée seule füt décorée, et ils paraissent avoir recherché le contraste que faisait avec le manche la surface nue et brillante du disque réfléchissant. IX. Les miroirs à boite O,0Eïov) 3S se composent essentiellement de deux pièces, un fond et un couvercle. Ce dernier est, assez souvent, d'un diamètre un peu supérieur et muni d'un rebord, de manière à pouvoir s'emboîter sur le fond (fig. 6532) 39. Une charnière, ainsi, n'était pas nécessaire à l'union des deux pièces, bien qu'elle soit 179 /' SPE 1426 SPE souvent conservée ou que sa présence ancienne puisse être constatée dans les exemplaires venus jusqu'à nous. Une bélière, fixée d'ordinaire à la tranche, servait à suspendre les miroirs fermés et un autre anneau, placé à l'opposé de la charnière, permettait de soulever le couvercle. Dans les exemplaires communs la décoration extérieure se composait de cercles concentriques sur les faces plates, et d'un motif courant tel qu'une suite d'oves sur la tranche. Un disque plat était parfois enfermé à l'intérieur de la boite' : lorsqu'il faisait défaut, les parois internes du fond et du couvercle, la première convexe et la seconde concave, servaient de surface réfléchissante. Unedisposition exceptionnelle peut ètre signalée dans deux miroirs d'Érétrie qui ont double face et double couvercle: le diamètre en est alors inférieur à celui du disque de support et un arrèt, formé d'une colombe mobile, assure la fermeture Un assez grand nombre de miroirs grecs à boite sont décorés extérieurement de reliefs : ceux-ci, dans quelques monuments tardifs et souvent suspects3, sont coulés, mais, dans la majorité des cas et dans tous les exemplaires de beau style, ils sont exécutés au repoussé. Un support intérieur qui pouvait être en plâtre ou en mastic, mais qui le plus souvent, était en plomb, protège et double d'ordinaire' la plaque métallique: comme la saillie est très forte et que le noyau a cédé en certains points, il arrive assez fréquemment que les reliefs soient mal conservés. En 1894 j'ai relevé 89 de ces miroirs'', auxquels s'ajouteraient aujourd'hui une vingtaine ou une trentaine d'exemplaires, récemment acquis par les musées d'Athènes', de Berlin', de Boston', de Dresde de Genève 10, de Kertcl411, par le Louvre 12 et par le British Museum73. La liste devrait d'ailleurs être revisée avecsoin, afin d'éliminer les doubles emplois et les monuments italiotes ou suspects; d'autres reliefs sont bien antiques, mais ont été arbitrairement attribués à des couvercles de miroirs et proviennent de la retombée d'une anse d'hydrie, d'un garde-joue de casque ou même d'une pièce d'harnachement. Ces réserves faites, les sujets des einblemala sont extrêmement variés, quoique beaucoup se rattachent aux cycles érotique ou dionysiaque. Aphrodite chevauche le bouc ou le cygne, est accompagnée d'Hermès, d'Adonis (fig. 2170), ou d'Eros, (fig. '2171) qu'elle Lient sur ses genoux, auquel elle tend un masque ou qu'elle fait tirer de l'arc. Eros est figuré seul ou avec un autre Eros, avec Psyché, avec Nikè, ou avec Phèdre, qu'il dévoile. Dionysos s'appuie sur Eros, sur un papposilène, sur un satyre ou sur une bacchante ; il lutte contre un géant ou converse avec Ariane. Les Ménades dansent seules ou par paires et, avec Pan et les Silènes, complètent le cortège bachique. Les scènes d'enlèvement, de Ganymède par l'aigle, d'Europe par le taureau, d'Orithye par Borée, d'une nymphe par un Centaure servent de pendant aux enlacements érotiques. Héraclès lutte contre les serpents, contre le Iion, avec l'Amazone et paraît avec les Hespérides et avec Iole. On voit plus rarement représentés Zeus, Athéna, Kybèle, Thétis, la chasse de Calydon, Ulysse et le palladion, des guerriers ou des femmes à cheval, voire de simples éphèbes, Par contre, une tête seule, de face, de trois quarts ou de profil occupe assez souvent le champ. La protome est un masque d'Athéna, de Zeus Ammon, peut-être d'Apollon, de Dionysos, de Ménade ou d'Aphrodite. Une très belle tète de Corinthe (fig. 6533) au Musée d'Athènes l" ne le cède guère à l'Aréthuse d'Evainétos, quoiqu'elle soit un peu plus récente. La date de ces reliefs est très variable. Si, d'une manière générale, les miroirs à boite succèdent aux miroirs à pied f3, on ne peut guère tracer entre eux une ligne de démarcation, et il est non moins malaisé de dire quand finit la fabrication des miroirs à relief ; aussi les dates extrêmes de 450 et de 3001' avant SPE H27 SPE notre ère ne peuvent être proposées que sous les réserves les plus expresses. Il peut être intéressant de signaler en terminant quelques miroirs en terre cuite qu'on a trouvés, non seulement en Italie, mais dans la Grèce propre, à Corinthe', à Myrina et à Thèbes2 : il ne faut pas y voir les modèles, mais, semble-t-il, l'imitation elle surmoulage des exemplaires métalliques. X. Le plus ancien miroir gravé que, je connaisse pour la série greque a été découvert récemment à Kelermès, dans un tumulus du Kouban. Il est en argent et doublé d'une feuille d'or qui a été pressée dans les creux. La décoration est de style ionien, et l'Artémis r,drvtx 09)pé)v y parait à côté de Silènes combattant des griffons, d'un lion terrassant un taureau, de sphinx, de bouquetins, de béliers et de sangliers'. Si l'on excepte le miroir à manche que nous avons signalé plus haut'', tous les autres exemplaires incisés sont des miroirs à boite, dont aucun ne parait antérieur à l'extrême fin du ve siècle. La gravure se trouve naturellement à l'intérieur et sur la paroi interne du couvercle, qui, étant légèrement concave, ne servait qu'accessoirement de surface réfléchissante, La silhouette opaque, à l'intérieur de laquelle de fines incisions venaient, comme dans certaines peintures à figures rouges, indiquer les détails intérieurs (fig. 653'x)', était, le plus souvent, argentée et s'enlevait sur tin fond d'or. II n'est pas impossible 6 qu'il faille appliquer à cette catégorie de miroirs le mot d'Élien parlant d'exemplaires dorés fabriqués à Corinthe 7; mais, nous sommes aujourd'hui hors d'état de vérifier ce point, tous les bronzes découverts à Corinthe ou qui passent pour en provenir ayant été; mis à jour dans des fouilles clandestines. Les miroirs à boîte gravés sont rares et ont dû sans doute l'être toujours, à cause de la délicatesse du travail et de la difficulté de bien fixer à la fois l'argenlure et la dorure. En 1894 je n'ai guère relevé qu'une vingtaine de ces monuments et la liste n'estpas aujourd'hui beaucoup plus longue, quoique quelques exemplaires aient été récemment acquis par les musées de Berlin 9, de Boston' o, du British Museum net duLouvre 12 Le répertoire du bronzier graveur est à peu près le même que celui du modeleur en relief. Il comprend Aphrodite, nue et au bain, ou qui se joue avec Pan ou avec Eros, un symplegma érotique, un hermaphrodite tenant une torche, Eros ou un génie analogue au dieu, chevauchant un dauphin, s'accompagnant d'une Ménade, couronnant un hermès, apportant des objets de toilette, tenant un coq de combat (fig. 581), des Ménades dansant seules ou par deux, une Nikè conduisant un quadrige, Athéna tenant la lance et le bouclier ; enfin, sur un très beau miroir du Louvre, la personnification de Leucade couronnant le majestueux Korinthos (fig. 6535) ". L'on peut encore signaler un griffon passant, une tète de profil et des ornements géométriques, tels qu'une rosace ou une étoile. X1. Les miroirs étrusques" se divisent, comme les grecs, en miroirs à boite, à pied et à manche, mais ces derniers sont de beaucoup les plus nombreux. De même les exemplaires gravés sont infiniment plus abondants que les miroirs àreliefs, dont, on ne connaît au plus qu'une centaine'', alors que les disques incisés se montent aujourd'hui à près de deux milliers. Les miroirs à boite n'ont rien de particulier, ni qui les distingue essentiellement des grecs, sauf qu'il y en eut des carrés en même temps que des ronds. La plupart des exemplaires à reliefs que nous avons cités plus haut sont des couvercles de miroirs à boite, mais quelques-uns, par exception, sont munis d'un manche 17. Certains pieds de miroirs imitent les modèles archaïques grecsi', avec lions ou sphinx sur les épaules et avec sphinx, fruit ou SPE 1'428 SPE colombe dans la main droite étendue, tandis que la main gauche relève à la hanche l'étoffe du vêtement. Mais d'autres « Aphrodites », plus récentes, ont les seins nus 1 ou le corps entièrement dévoilé 2, et certains supports sont virils, que l'homme lève les deux mains ou qu'il dresse simplement le bras droit comme s'il lançait le javelot'. Les miroirs à manche, les plus nombreux de beaucoup, se divisent chronologiquement en deux séries : ceux dont le disque est rond et ceux où il s'allonge en forme de poire. Les derniers ont été trouvés surtout à Palestrine` et il n'est pas impossible' qu'ils y aient été fabriqués. On peut, sous toutes réserves, les attribuer au nie et ne siècle avant notre ère, tandis que les premiers sont antérieurs. Les manches sont, ou bien fondus avec le disque réfléchissant, ou rapportés : dans ce dernier cas la soie qui formait la partie inférieure du miroir s'encastrait dans une poignée de bois, d'os ou d'ivoire, laquelle a parfois été conservée '. Les figurines servant de manche sont assez rares, mais sont plus nombreuses que les statuettes en forme de pieds. Les « Aphrodites o sont vêtues', demi-nues e ou dévoilées'. Assez souvent elles se mirent 16 et soutiennent le disque de l'une,' des mains ou des deux bras également levés". D'autres fois, elle tiennent une colombef3 ou un vase à parfum". L'éphèbe nu les remplace comme pour les miroirs à pied' . Les manches fondus avec le disque se terminent plus simplement par des têtes de bélier, de chien, de mulet ou de biche: certains sont formés de serpents enlacés 36 : d'autres n'ont qu'un décor purement géométrique. L'attache, infiniment variéese compose généralement d'un fl eu ron, d'une feuille d'acanthe ou d'une palmette, mais parfois aussi d'une tète humaine ou d'une protome de cygne ou de dauphin. Quand le disque était ovale et qu'il était nécessaire de relier à la poignée le motif du champ principal, le segment de forme irrégulière qui sert alors de transition est orné au trait des motifs les plus variés, tels qu'une étoile, un dauphin, un sphinx, des animaux divers, ou tels que Dionysos, Héraclès, les Lases, les Gorgones, des êtres fantastiques, des figures ailées, des Muses, des Moires et des Nikés16. La face du miroir qui était décorée au trait était le revers, donc la face concave; les Étrusques, comme les Grecs, regardant leur image du côté convexe de manière à l'agrandir. Nous ne pouvons songer à donner ici une idée même abrégée des sujets qu'ont traités les graveurs'"; il suffira de noter que tous ou presque tous les motifs sont grecs. Les sujets nationaux, tels la légende de Celes VibennaLO ou celle de la louve allaitant les jumeaux devant le dieu palatin et devant Rhea Silvia 21, même, chose plus surprenante, les divinités indigènes, sauf quelques dieux falisques 22, n'apparaissent qu'à titre exceptionnel. On en comprendra facilement la raison si l'on réfléchit à ce qu'ont pu être les modèles dont se sont servis les toreuticiens. Il est douteux qu'ils aient jamais eu des cahiers de calques, comme on l'a cru et comme tendrait à le faire penser la présence simultanée de reproductions directes et inversées'. Il est plus simple de supposer34 que les graveurs ont imité les vases peints, qu'ils fussent ioniens et attiques ou campaniens et italiotes. Ces derniers ont évidemment servi de modèles aux miroirs de Palestrine, tandis que les premiers ont inspiré les exemplaires archaïques et de beau style 26. Si la très grande majorité de ces gravures sont médiocres et témoignent de méprises ou d'une incurie trop évidentes, il y en a quelques-unes dont la composition est originale, et d'autres, d'un dessin très sûr, qui ne le cèdent guère aux miroirs grecs incisés. Rien ne nous autorise à croire que le graveur auquel nous devons le beau miroir de Dionysos et de Sémélé (fig. 688)26 ait été nécessairement un Grec expatrié, mais il n'est pas douteux qu'il s'est inspiré d'un modèle grec et qu'il a su, jusqu'à un certain point, en retrouver l'esprit. Il reste à dater ces miroirs ou à chercher, tout au moins, quand a pu en commencer la fabrication, laquelle, comme nous l'avons vu, s'est continuée très tard, peut-être jusqu'au ne siècle avant notre ère. M. Martha pensait qu'aucun miroir étrusque n'est antérieur au me siècle'-? ; j'estime, avec M. Kôrte 23, que certains exemplaires archaïques (fi g. 6536)2", évidemment copiés sur des peintures grecques ioniennes ou de style sévère, ne peuvent être postérieurs aux dernières années du vie siècle. XII. Les miroirs romains procèdent des grecs et des étrusques, dont ils reproduisent les dispositions SPE 1429 SPE essentielles, sauf des modifications de détail'. Les formes communes, telles quo les boîtes à décor géométrique et les disques unis, qui ne méritent pas d'être autrement mentionnés, ne cessèrent jamais d'être en usage. Il faut seulement signaler une prédilection, générale à l'époque romaine, pour les miroirs rectangulaires ou carrés avec ou sans manche, dont nous avons déjà constaté la présence chez les Étrusques ; aux environs de l'ère chrétienne, on les re trouve aussi bien en Asie-Mi neure 2 et à Carthage qu'en Italie (fig. 6537) et dans tout le monde antique 6. A côté de ces exemplaires de fabrication courante, les miroirs de luxe re çoivent un support ou un manche, de forme plus ou moins compli quée. Les supports en forme de figurines reparaissent à Pompéi 6 comme en Syrie'; seulement les statuettes sont naturellement de travail libre, que les éphèbes lèvent les deux bras ou que l'une des mains soutienne le disque, tandis que l'autre se pose sur la hanche, du côté de la jambe d'appui. Les scènes gravées disparaissent dans les miroirs à manche et les cercles concentriques sont à peu près le seul ornement de la partie médiane. En revanche, le pourtour est, assez fréquemment, percé de trous qui se suivent en série régulière"; il est probable que les femmes y piquaient, comme dans une pelote, les aiguilles dont elles se servaient pour leur toilette. Le bord méme, parfois uni' 0, est souvent découpé: les dents, séparées par des courbes concaves, sont tantôt mousses" ou arrondies comme des boules'', tantôt formées d'une double volute" et pareilles à des fleurons 'b. La disposition n'est d'ailleurs pas nouvelle, et M. Héron de Villefosse remarque avec raison''' que nous la retrouvons sur des peintures de vases exécutées dans l'Italie Méridionale. Les miroirs d'argent, s'il fallait en croire Pline'", auraient remplacé vers l'époque de Pompée, c'est-à-dire dans la première moitié du Ire siècle avant notre ère, les miroirs de bronze fabriqués à Brindes, grande ville industrielle où il y avait beaucoup de bronziers, d'où le nom que porte, aujourd'hui encore, l'alliage de cuivre et d'étain. Pasitélès, le sculpteur et le toreuticien célèbre, aurait été le premier à en ciseler et ils seraient devenus si communs que les servantes mêmes en auraient possédé17. Il faut l'aire ici sa part à la rhétorique déclamatoire de l'époque impériale. Les miroirs de bronze ne cessèrent jamais d'être en usage et les miroirs d'argent étaient connus, nous l'avons vu, bien avant Pasitélès": l'innovation, qu'on relève à la gloire de l'artiste, a pu consister dans un cadre richement travaillé dont il aurait entouré le disque, ou dans les emblenzata, semblables à ceux qu'on a découverts à Boscoreale, dont il aurait orné le revers de la face réfléchissante. Tout au plus peut-on admettre que, les progrès du luxe aidant, les miroirs d'argent furent relativement plus nombreux 10 par rapport aux exemplaires de bronze. Mais ils restèrent toujours assez rares. De fait, on en a découvert très peu, et M. de Villefosse, en dehors des deux miroirs de Boscoreale'd0, n'en trouvait que dix à citer en 1.89921, dont un à Athènes et huit au musée de Naples. Le manche se compose soit d'un simple balustre soit d'une massue, accompagnée23, ou non, de la peau de lion, soit de deux tiges de saule élégamment entrelacées74. L'attache est formée d'un fleuron2K ou d'une feuille entre deux chénisquesd0 Le disque est, le plus souvent, découpé sur le pourtour comme nous l'avons indiqué plus haut; au revers, 1'emhlèma, qui est conservé dans trois exemplaires, montre un Eros 27, un buste de Bacchante 2" ou le cygne de Léda 2''. Parmi les miroirs à boîte d'époque romaine, l'on peut citer les miroirs « monétaires », dont le couvercle est orné d'un relief surmoulé sur une monnaie impériale. La mode s'en est surtout répandue à l'époque de Néron, car on ne connaît pas moins d'une douzaine de miroirs que décore la reproduction d'un grand ou d'un moyen bronze de cet empereurS0. L'un d'eux a récemment été découvert près de Corinthe, sur la route du Lecha'on71, ,le signalerai de même un couvercle de miroir en argent au musée d'Athènes, qui est orné d'incrustations d'or d'époque tardive, mais d'un curieux travail. Le centre est décoré de motifs floraux, tandis que le pourtour est divisé en tableaux séparés représentant les travaux d'HéraclèsJ2. Un autre disque, venant d'Iléraclée et conservé au même endroit, est orné des signes du zodiaque 31.-En terminant, je reviendrai sur les petits miroirs de plomb doublés de verre, qui, eux non plus, n'apparaissent pas avant l'époque impériale 3:. La forme en est très variée et la décoration souvent très riche. le signalerai particulièrement un exemplaire (fig. 6538) découvert à Antinoé 36. Une couronne, bordée de petites roses saillantes et décorée de deux filets perlés, entoure le disque3"; en haut, l'anneau de suspension est relié au pourtour par deux contreforts obliques J7; en SPE -1430SPE bas une queue d'attache de forme trapézoïdale. Au revers de ces disques se lit souvent une inscription signiticative telle que xâotç Fies ou T?, xxÀ=r) -crb ôlûpov 3. A. DE RIDDER.