SPONGIA, E726yyvç. L'éponge -Les anciens n'avaient que des connaissances vagues et imparfaites sur la nature des éponges. Elles ont été exposées pour la première fois par Aristote' ; c'est de celui-ci que s'inspirent encore Dioscoride 2, Pline 3, l;lien ', qui n'ajoutent que fort peu de choses à ses observations. On savait que les éponges étaient des êtres vivants, intermédiaires entre le règne végétal et le règne animal, doués de la faculté de sentir et de se contracter, adhérant fortement aux rochers du fond de la mer. On croyait à tort qu'elles se nourrissaient de vase, de petits poissons et de coquillages, et l'on alléguait comme preuve la présence de débris de coquillages dans leurs pores. Tous les auteurs distinguent trois variétés principales, qui portent des noms grecs : le Tpxroç, épais et rude, percé de trous nombreux et petits ; le [zavôc, plus mou ; l';iyQJ,Etoç, très fin et très serré. Les deux premières sortes servaient aux usages domestiques et communs, la troisième aux usages plus délicats. Pour les employer il était nécessaire de leur faire subir une préparation ; noirâtres et chargées d'impuretés au moment de leur capture, on devait les nettoyer soigneusement et les exposer à l'air pour les dessécher et les blanchir, en ayant soin de tourner au dehors la partie par laquelle elles adhéraient aux rochers. On appelait â72nua(aç une espèce d'éponge grossière et peu estimée, d'un jaune sale, qu'il était impossible de purifier et d'utiliser.
Beaucoup de régions du pourtour de la mer Méditerranée produisaient des éponges, notamment les Syrtes, en Grèce les environs de Toron et du cap Malée, les rives de l'Hellespont, d'oà venaient les plus dures, Rhodes et la Lycie, aux environs d'Antiphellus, d'oit venaient les plus douces. Les meilleures se rencontraient aux plus grandes profondeurs età l'abri des vents 5.
Les Grecs avaient plusieurs noms différents pour dési
respondait chez les Romains à ces termes ; les pêcheurs d'éponges étaient rangés dans la catégorie géné
raie des plongeurs [UH!NAI'oR]. Oppien a décrit leurs plongées pénibles et périlleuses'°.
De très bonne heure, les anciens pour les soins de la toilette et le nettoyage des maisons ou du mobilier, ont tiré parti de la propriété qu'ont les éponges de s'imbiber de liquide et de l'exprimer ensuite quand on les serre fortement". Il est déjà question des éponges, à plusieurs reprises, dans l'Iliade et l'Odyssée ; les contemporains d'llomère les employaient pour se laver le visage et les mains et pour nettoyer à grande eau le sol de leurs demeures et leurs tables12. Aux époques suivantes de nombreux textes font allusion à la persistance toute naturelle de ces usages domestiques [LAVATIO, p. 999]13 En Grèce, pour noircir les chaussures, on les enduisait de poix avec une éponge 14. A Rome, les peniculi15 ou penicilli 16 qui servaient à enlever la saleté des rnurs 17 et des souliers" étaient, d'après Festus, des éponges longues, spongiae longae19, c'est-à-dire sans doute fixées à l'extrémité de baguettes ou à des poignées de bois. De même, c'est avec un bâton muni d'une éponge que l'on nettoyait les latrines "o.
L'éponge jouait un certain rôle dans les bains", quoique les gens bien portants aimassent mieux, au sortir de l'eau, se frotter avec le strigile et s'oindre d'huile avec le guttus. Cependant strigile, gutlus et éponge sont souvent réunis sur les monuments qui représentent des scènes du bain ou de la palestre" (fig. 655'2 et 5891). On renfermait l'éponge dans un petit sac ou filet [RETICULUM, fig. 5936] 2'. Les malades et les personnes délicates s'épongeaient après le bain, sans se frotter 2L.
L'éponge avait sa place marquée dans l'écritoire des anciens, à côté du calame ; quand on écrivait à l'encre sur papyrus ou sur parchemin, elle était indispensable pour laver la plume 25 et surtout pour faire disparaître les caractères fautifs ou inutiles26. Les auteurs scrupuleux et difficiles prodiguaient les coups d'éponge, lilurae27, qui équivalaient aux ratures des modernes. L'empereur Auguste avait passé l'éponge sur tout le texte de sa tragédie d'A jas, dont il n'était pas satisfait".
Elle faisait partie également du matériel habituel des peintres [PICTURA. p. 464]. Elle servait à laver les pinceaux99, à corriger les fautes de dessin et de coloration : un coup d'éponge détruisait tout le travail incorrect". C'est en jetant avec colère sur son tableau une éponge
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imbibée de différentes couleurs que Protogène avait trouvé, disait-on, la manière de représenter l'écume de la mer; on racontait la même anecdote du peintre Néarque, à propos de l'écume des chevaux rongeant leur mors
Avec les petites éponges très fines de l'espèce dite Ü.x(aaEtoç on fabriquait, d'après Pline, une sorte de pinceaux, penicilli ou penicilla, que l'on employait en même temps que les pinceaux de poils.
Il suffira d'indiquer un certain nombre d'autres usages, moins importants ou moins connus. On employait parfois des éponges en guise de bouchons pour fermer les vases Les voleurs s'entouraient les pieds avec des éponges, pour qu'on ne les entendît pas marcher'. L'zz(aastoç servait à rembourrer les casques et les cnémides5; les soldats samnites s'appliquaient des éponges sur la poitrine pour amortir les coups qu'ils pouvaient recevoir'. L'éponge était l'un des accessoires des rétiaires dans les combats de gladiateurs .
Elle figurait enfin parmi les objets le plus couramment usités dans la thérapeutique des anciens. Un personnage d'Aristophane, prêt à s'évanouir, demande qu'on lui mette une éponge sur le coeur, pour le ranimer 8. L'éponge, imbibée, selon les cas, d'eau froide, de vin au miel ou de vinaigre chaud, calmait les maux de tête et les maux d'yeux, séchait les ulcères humides, étanchait le sang dans les opérations, adoucissait l'inflammation des plaies. Non content de l'utiliser en compresses et dans les pansements, on la faisait brûler et l'on prescrivait d'absorber sa cendre pour arrêter la fièvre, les crachements de sang et les hémorragies Les oculistes employaient un collyre appelé citsyys)ptov "n, spongarium ", dans lequel devait entrer de la cendre d'éponges.