Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

Article SUPELLEX

SUPELLEX. Les opinions des jurisconsultes sur la signification du mot supellex sont réunies dans le Digeste (XXXIII, 10, de supellectile legata). D'après ce texte, la supellex comprend les meubles nécessaires au train ordinaire de la maison, lits, tables, sièges, appareils d'éclairage, armoires, la batterie de cuisine, la vaisselle'. Elle ne comprend pas les objets qui servent à l'exercice d'un métier déterminé, non plus que les livres et tablettes à écrire 2. La supellex est distincte de l'argentum et de la vestis 3 : entre elle et ces deux autres catégories d'objets la démarcation est difficile à préciser. Dans le langage courant il peut arriver que vestis se confonde avec supellex 4 : les jurisconsultes s'ingénient à être plus exacts. Il va de soi que la supellex ne comprend pas les vêtements'. La literie rentre dans la supellex, exception faite pour les couvertures (stragula), qui font partie de la vestis'. Les tapis des sièges sont compris dans la supellex, mais non les tapis employés dans les voitures'. Le progrès du luxe ne permit pas toujours de faire la même distinction entr la supellex et l'argentum : ce ne fut plus la matière, mais la forme et l'usage de l'objet qu'il fallut considérer e. Ainsi les meubles inscrustés d'argent, d'or et de pierres précieuses, furent compris dans la supellex, au même titre que les meubles de bois sans ornements de métal. L'objet ne cesse pas de faire partie de la supellex même quand il est tout entier en métal précieux 9. Les vases murrhins [MUBBIIINA] font partie de la supellex au même titre que la verrerie10. Il serait logique aussi que la vaisselle de métal précieux fût comprise dans la supellex au même titre que la vaisselle d'argile ou de bronze ; mais l'accord ne s'est pas fait sur ce point Tandis que la langue courante, suivant les progrès de la civilisation et du luxe, a étendu peu à peu le mot supellex des objets d'argile, de bois, de verre et de bronze, aux objets d'ivoire, d'écaille, d'argent et d'or", la langue juridique n'admet pas cette extension. Cepen dant la limite ne peul être qu'arbitraire : l'embarras des jurisconsultes, quand ils ont à la fixer, se traduit par le vague des critères qu'ils indiquent : Trebatius et Labéon excluent de la supellex « ce qui est fait pour le plaisir plutôt que pour l'utilité » 12 ; Servius veut qu'on ait égard dans une certaine mesure à l'intention du testateur f3. En définitive, l'opinion qui prévaut est celle qui exclut de la supellex l'argentum escarium vel potorium 14. Le serviteur, esclave ou affranchi, qui est chargé de la surveillance du mobilier ainsi défini, s'appelle a supellectile''. Le Digeste mentionne les supellecticarii servi" ; ce texte mis à part, l'existence de l'a supellectile ne nous est connu que par des inscriptions. Toutes celles qui nomment cette fonction se rapportent à des esclaves ou à des affranchis de la maison impériale". On trouve des a supellectile parmi les serviteurs de Livie, de Tibère, de Caligula, de Marcella Minor'"; on rencontre aussi un a supellectile domus aurige (sic) 19, un affranchi de l'empereur qui est e superlectile (sic) p(uerorum) Cue(saris) n(ostri)`20, un autre qui est a supell. castrensi 21, Enfin le titre de ad supellect. (sic) se lit sur l'épitaphe d'une femme". E. ALSEI;TINI. le langage des jurisconsultes romains, superficies, est une surface en hauteur, distincte de la surface horizontale ou soluni au-dessus de laquelle elle est élevée 2. A Rome la propriété du sol entraînait en principe celle de la superficie. Mais, de bonne heure, le propriétaire du sol a pu concéder à un tiers le droit d'y bàtir une maison dont il jouirait pendant un long terme ou à perpétuité comme un vrai propriétaire, en payant une redevance dite solarium, ou aussi pensio, merces 3. Dans un second cas moins fréquent, c'est le propriétaire du sol qui construit la maison et en concède la jouissance, moyennant le remboursement du prix et le paiement du solarium. Dans les deux cas la tex locationis sive conductionis peut sans doute prévoir que si la redevance cesse d'être payée pendant un certain temps, le propriétaire aura le droit de vendre l'immeuble Selon le droit civil le superficiarius n'avait aucun droit réel sur l'édifice élevé sur le sol d'autrui ; il ne pouvait qu'agir contre le concédant, comme locataire dans le premier cas (ex conducto), comme acheteur dans le second (ex ernpto), et obtenir des dommagesintérêts si le trouble venait du concédant ou la cession SUP 1565 SUP de ses actions, et interdits si le trouble venait d'un tiers'. Mais de bonne heure le préteur est venu à son secours en lui accordant d'abord un interdit spécial, à l'exemple de l'interdit uti possidetis et, probablement plus tard, des actions réelles utiles. L'interdit qui protège la jouissance (frui) est double et suppose l'absence des trois vices vi, clam, precario. L'action n'est accordée que cognita causa, probablement parce que dans l'intentio de la formule la location doit être de longue durée ou perpétuelle La reconnaissance au superficiaire de la propriété prétorienne de l'édifice lui a donné peu à peu tous les droits afférents à la propriété, droits d'aliéner, de transmettre, d'hypothéquer, de créer des servitudes, et toutes les actions qui les protègent'. L'origine du droit de superficies se trouve probablement dans le droit de bâtir sur un terrain public, concédé, moyennant redevance, par l'Etat ou les villes [soLARlusj'. Mais il y a toujours eu des différences entre ces deux droits.