TABULARIUM ('Aoyaïov 1 tpx xteïov, jpaf.f.aTOyu),âxtov, OEail.01pUX5xtov, /oEÜ09U),j2/.toi, T1[,a5 toi). Dépôt d'ar
chives, où on conservait les documents qui furent d'abord tracés sur des tables ou tablettes de bois [TABELLA, TABULA!, sur papyrus, parchemin, etc. 2.
1. Les Grecs ne se préoccupèrent qu'assez tard de mettre à l'abri de la destruction, par des services régulièrement organisés, les textes des actes publics : les plus importants étaient gravés sur la pierre ou le bronze, ou copiés au pinceau sur de grandes planches, qu'on fixait en divers lieux pour que chacun pùt en prendre connaissance; mais une fois qu'ils avaient été publiés sous cette forme, il ne paraît pas que les originaux fussent régulièrement centralisés dans un local unique, de telle sorte qu'on pût toujours les retrouver, quand ils avaient été remplacés par d'autres ; les anciens eux-mêmes ont vu dans cette négligence une des principales causes qui rendaient si obscure l'histoire des premiers siècles
Cependant certaines administrations prirent l'habitude de garder les tablettes et les papyrus dont les textes avaient été reproduits par les lapicides 4. Ce fut là sans doute, à l'origine, chez les Athéniens, au moins pour les lois et les décrets, une des attributions de l'Aréopage On fait en général honneur à Éphialte d'avoir le premier (vers 4460 av. J.-C.) institué des archives d'État ; elles formaient, au sud de l'Agora, une des dépendances du Sénat ((lou),auTstov), où elles étaient peut-être sous la surveillance particulière des SOMOPUYLAKES ''. Ce ne fut guère que vers l'an 350 que l'on centralisa les écritures publiques d'Athènes (Tâ ar,i.t,osta ou rote -tpâu.u.aTat)' dans un seul et même édifice, le temple de la Mère des dieux, le Mr,TpTiov ; les raisons de ce choix
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n'apparaissent pas très nettement; comme le temple était contigu au Sénat, il se pourrait qu'on eût simplement cherché de son côté un agrandissement 1. Là étaient déposés les lois et les décrets, les procèsverbaux des séances du Sénat et du peuple, les arrêts des cours criminelles, les états des finances, les inventaires, les listes d'éphèbes, etc. C'est là aussi très probablement que se trouvait l'exemplaire officiel de l'oeuvre des trois grands tragiques 2 ; on y avait même recueilli quelques documents privés, d'un intérêt tout à fait exceptionnel, tels que le testament d'Épicure 3. Ce dépôt, placé sous la protection d'une divinité, était considéré comme sacré et on ne pouvait, sans s'exposer aux peines les plus graves, en altérer ou en détourner une seule pièce'. Les présidents des prytanes avaient, chacun à son tour, la haute administration de l'établissement ; en réalité elle appartenait au secrétaire du Sénat, ,lpxi.µx-roéÿ a~ç pouafi,ç, lequel était aidé par un sous-secrétaire, by-o'lpauu.atieûç, et par des esclaves publics, ôru.alo;
Tous les citoyens pouvaient venir y prendre copie des documents dont ils avaient besoin, comme nous le voyons par l'exemple des orateurs et de certains historiens '. Après la conquête macédonienne, le Métrôon subit parfois des déprédations dans des moments de crise 7; mais jusque sous l'Empire il conservait encore la plus grande partie des richesses qu'on y avait amassées depuis sa fondation. Il est probable que les magistrats athéniens avaient aussi leurs archives particulières dans les locaux où ils tenaient leurs séances ; mais beaucoup de documents rédigés par leurs soins ont dû être régulièrement communiqués au Métrôon, de telle sorte que ce grand dépôt central, outre les originaux (a' ?pa?a) des actes énumérés plus haut, contenait aussi les copies (xv7:fypxcwa) des décisions de tout genre prises par les plus hautes autorités de l'État D'autres villes de la Grèce ont eu, comme Athènes, leurs archives civiles, et sans doute aussi des archives sacrées dans beaucoup de temples, avant la conquête romaine [ARC11EIOI\]
II. Les Romains avaient trop le respect de la tradition et le goût de l'ordre pour ne pas sentir tous les avantages que présentent des archives bien tenues. Cependant il en fut d'abord à Itome comme à Athènes : les grandes tables de pierre, de bois ou de métal, qui avaient servi à la publication des documents, les tabulae publicae, restaient exposées dans les lieux où on les avait fixées et formaient ainsi en plusieurs endroits de la ville des séries distinctes ; l'autorité n'était point chargée d'en prendre et d'en garder officiellement des copies. Quand le temple du Capitole brûla, en l'an 70 de notre ère, l'incendie dévora trois mille tables de bronze, oit étaient gravés les plus anciens traités conclus avec les nations
étrangères ; Vespasien, ayant voulu en reconstituer le texte, dut faire rechercher « de tous côtés » les copies qui pouvaient subsister 1C. Beaucoup de documents aussi précieux couvraient les parois des autres édifices sacrés, tels que le temple de Diane sur l'Aventin, le temple de Dius Fidius, le temple de Moneta, etc.11. Certaines pièces étaient confiées à la garde des grands collèges religieux 12; d'autres avaient été, dans les anciens temps, remises, après la publication, à de hauts magistrats, qui les avaient classées dans leurs archives privées, si bien qu'à l'époque classique on ne pouvait, plus les trouver que chez leurs descendants. Les grandes familles aristocratiques avaient en général auprès de leur atrium une salle spécialement destinée à abriter leurs tablettes, c'est-à-dire leurs documents d'affaires et leurs titres de noblesse, on l'appelait le tablinnm ; beaucoup de pièces officielles, dans les premiers siècles de Rome, avaient pris ce chemin, sans parler de toutes celles qui furent irrémédiablement perdues 13. Cependant il y eut, à partir du ve siècle, un édifice oit on déposait les text'es des lois, des sénatus-consultes et des plébiscites: c'était le Trésor du temple de Saturne, situé à l'extrémité du Forum [AERARIUM, FORUM, p. 1284 ; on en a fait remonter la fondation jusqu'à Valerius Publicola, consul en 509
av. J.-C.1'. Il est certain en tout cas que ce dépôt, placé
dans la dépendance du Sénat, doit être considéré comme le premier noyau des archives de Rome ; son importance s'est accrue d'un siècle à l'autre pendant toute la durée de la République, jusqu'à ce qu'il fût devenu le centre d'un service régulièrement organisé 10. A côté des lois et décrets, émanés des grandes assemblées politiques, vinrentprendre place d'autres séries de tabulaepublicae, non moins étroitement liées à la vie nationale; parmi ces documents (acta, instrumenta, tnonumenta publica) on cite notamment les procès-verbaux du Sénat [ACTA 5ExATUS], les listes de recensement [CEVSOR, ccNSUS], les rapports des magistrats sur leur gestion dans les provinces sénatoriales, les registres des finances, et, sous l'Empire, les édits et les décrets promulgués par le chef de l'État16. Le Tabularium, section de l'Aerarium, fut administré au début, depuis l'an 444, par les censeurs [CENSOR] ", plus tard par les deux questeurs de la ville, quaestores urbani [QUAESTOR] 1S. Leur service fut, au début de l'Empire, plusieurs fois remanié. Tibère, en l'an 16, les remplaca par trois curatores tabularum publicarum [CURATOR1, qui à leur tour, sous Néron, en l'an 56, cédèrent leurs fonctions à deux praefecti, anciens préteurs". Pour ce qui estdes sénatus-consultes, ils n'étaient valables qu'à partir du moment où ils avaient été déposés et enregistrés parmi les actes publics (delatio et relatio in tabulas publicas); on peut
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voir à l'article SENATUS CONSULTUM de quelles précautions la loi avait entouré cet enregistrement', effectué avec l'aide des employés subalternes, les scribae, les apparitores, affranchis ou esclaves publics (servi publici) 2. Les tables de bois étaient, quand le document le comportait, réunies les unes aux autres sous la forme de codices 3. Tous les codices d'une même série étaient classés dans l'ordre chronologique par années ; les tables de chaque codex et les paragraphes (capita de chaque table étaient numérotés On pouvait, moyennant une autorisation des conservateurs, prendre des copies, dont sept témoins au minimum certifiaient
certifiée conforme par onze témoins, dont les noms au génitif étaient apposés, en regard de leurs cachets, sur le scellement de la tablette écrite à Rome [TAPELLA] 6.
Le Tabularium, installé dans les dépendances du temple de Saturne, brûla avec le Capitole en83 av. J.-C.; il fut reconstruit, et probablement agrandi, entre les années 78 et 60, par Q. Lutatius Catulus; on s'accorde généralement à penser que nous en avons un reste dans l'énorme mur de soutènement (substructio) 7 qui barre l'extrémité du forum du côté de l'ouest, derrière le temple de Saturne; sa masse imposante, adossée au flanc du Capitole, supporte depuis le xivr siècle l'hôtel
l'authenticité en y imprimant leurs sceaux 6. Une de ces copies a été retrouvée en Sardaigne ; elle avait été prise au Tabularium du Sénat, sur la demande des intéressés, le 18 mars de l'an 69 après J.-C.; elle reproduit un arrêt d'un ancien proconsul de la province, L. IIelvius Agrippa, rendu le 13 mars de l'année précédente. Tous les actes de son administration formaient, aux Archives, un codex inscrit sous son nom dans la série des proconsuls de la même année ; ce codex de bois, évidemment très volumineux, était muni d'une poignée (ansatus), pour pouvoir être transporté plus commodément [TABELLA]. On indique même le nom de l'employé des archives qui a fait la communication sous sa responsabilité, Cn. Egnatius Fuscus, secrétaire des questeurs. Le texte a été copié et collationné (descriptum et recognitum) sur la table V du codex, § vui, ix et x: Imp(eratore) Othone A ug(usto) co(n)s(ule), XV K(alendas) Apriles, descriptum et recognitum ex codice ansato L. Ilelvi Agrippae procons(ulis), quem protulit Cn. Egnatius ! Fuscus scriba quaestorius, in quo scriptum fuit idquod infra scriptum est, fabula V, (capitibus) VIII 1 et VIIII et X. Suit le document, long de 27 lignes, qui a dû tenir tout entier, peut-être même avec d'autres, sur la table V. La copie est
de ville de Rome. Ce mur était percé d'une porte, où aboutissait un escalier, mettant le Forum en communication avec l'intérieur de l'édifice et avec la place appelée Intermontium, entre les deux sommets du Capitole. Au-dessus du mur s'élevaient deux étages de constructions, renfermant les archives et les bureaux. Chaque étage s'ouvrait, du côté du forum, sur une galerie d'arcades à colonnes doriques. On pourra juger de l'aspect actuel du monument en se reportant à l'article FORUM (fig. 3250, n° 1). On voit dans la fig. 6731, d'après un bas-relief trouvé au Forum, où il servait à l'ornement des Rostres, une représentation des tabulae publicae : Trajan, ayant fait remise des impôts arriérés sur les successions, on apporte au Forum en sa présence, pour y mettre le feu, les énormes codices. où étaient inscrits les noms des débiteurs insolvables, avec le montant de leurs dettes ; il est évident qu'on les a tirés du Tabularium, dont une arcade se voit au fond et à droite de la scène, entre le temple de Vespasien et la basilique Julia.
Il y a eu dans la ville de home d'autres archives publiques et civiles que celles du Sénat, par exemple celles du temple de Cérès, placées sous la garde des tribuns et des édiles de la plèbe. D'autres, installées dans l'Atrium Libertatis, près du Forum, étaient admi
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nistrées par les censeurs Nous savons que les registres du cens ont été conservés par les soins des mêmes magistrats dans le temple des Nymphes, au Champ de Mars Mais il est fort possible que ces dépôts n'aient été que temporaires et qu'on les ait refondus et versés ailleurs à une époque indéterminée. Chaque corps de magistrats a eu aussi ses archives dans le local ordinaire de ses séances. Mais sous l'Empire le dépôt le plus important de la ville de Rome fut celui de l'empereur, tabularium, scrinium ou sanctuarium Caesaris l• Il y a lieu, sans aucun doute, d'en distinguer le portefeuille personnel du prince, contenant sa correspondance privée, ses papiers de famille, ses brouillons, ses oeuvres littéraires, etc., bref, tout ce qui constituait ses secreta ; il y avait là des documents précieux, mais compromettants pour beaucoup de personnes ; aussi arriva-t-il souvent qu'un nouvel empereur, en prenant le pouvoir, brûlât les papiers
secrets de son prédécesseur Les archives impériales, où étaient conservés les documents d'État, formaient au contraire l'annexe naturelle de la chancellerie et chaque empereur pouvait y trouver à sa disposition tout ce qu'on y avait fait entrer avant lui 5. Or, comme il était fatal, tout aboutissait là, même les documents émanés du Sénat, au moins sous forme de copies ; car le prince devait tout avoir sous la main ; on y trouvait même des décrets de l'époque républicaine 7 ; de telle sorte que ce dépôt finit par l'emporter de beaucoup en intérêt sur le tabularium senatus. Nous savons par quelques témoignages positifs8 quelle était la nature des pièces qu'il renfermait; d'une façon générale, on peut dire qu'il absorbait tout ce que les bureaux de la chancellerie y versaient jour par jour, les comptes d'administration des provinces impériales, les rapports et les édits de leurs gouverneurs, la correspondance militaire et diplomatique, la minute des « constitutions » de chaque prince, du journal officiel [ACTA D1uRNA], le registre des
actes du souverain [COAIS1ENTARILSI, VIII], etc. 0. Nous
ne savons pas bien par qui était administré le tabularium Caesaris ; il paraît assez probable qu'il était divisé en autant de sections qu'il y avait de bureaux dans la chancellerie; car celui des finances, par exemple, a ralionibus [BAT1o1, comptait dans son personnel des archivistes et des sous-archivistes (ad julores labulariorum)1G. Cependant on a supposé, non sans vraisemblance, que les archives de l'empereur, dans leur ensemble, étaient sous la haute direction des quaestores candidati Augusti, comme celles du sénat sous la direction des questeurs urbains [euAEsroR] Il; mais ce n'est là qu'une hypothèse. Les documents
pouvaient être communiqués et copiés, sous la condition expresse que l'autorisation en fût demandée à l'empereur et accordée par écrit 12, Ainsi en Tan 139, sous Antonin, la ville de Smyrne veut avoir, dans l'intérêt de certaines fêtes locales, le texte d'un décret rendu quelques années auparavant par lladrien : le copseil' municipal rédige une demande, que porte à Rome le defensor civitatis (ap'2ereç), C. Sextilius Acutianus ; celui-ci l'apostille et la fait parvenir à l'empereur. Le 8 avril, Antonin répond qu'il accorde l'autorisation ; une expédition de sa lettre, « collationnée par l'employé n° 19 », est délivrée à Acutianus. Le b mai, après un intervalle de près d'un mois, le registre des cominenlarii, contenant la constitution d'Hadrien, est communiqué à Acutianus par deux employés des archives, esclaves ou affranchis impériaux, et copie en est prise sur un codicilles, en présence de sept témoins, qui apposent leurs cachets 10. Le labularium Caesaris occupait sans aucun doute un des bâtiments du Palatin ; mais on en ignore l'emplacement exact Il fut presque entièrement brûlé sous Commode 16.
Archives dans les provinces.Chaque province avait sors tabularium dans la ville qui en était le chef-lieu. On y conservait notamment les documents du cadastre cAPiTASTRLJM] et les listes de recensement [A CENSIDCS, CCxSUsj ; depuis Marc-Aurèle, on y enregistrait aussi les naissances régulièrement, par ordre du prince e; Les archives de l'Afrique semblent avoir été particulièrement riches 16. Il est fort probable qu'une partie au moins de ces documents était communiquée à Rome ; mais nous ne savons pas où se trouvaient les originaux, où les copies 17. Le dépôt placé sous la main du gouverneur comprenait, comme à Rome même, un certain nombre de sections, dont chacune était en rapport étroit avec les bureaux du fisc 18. Quant à l'Italie, il est possible qu'elle ait eu un tabularium par région 1v. Même en dehors des chefs-lieux, partout où l'administration impériale est représentée par un bureau, partout où le fisc a établi une comptabilité, les registres viennent, d'année en année, s'accumuler dans un tabularium, ; qu'il s'agisse de l'annone [Axxoxc], des douanes PORTORI Ou], deS Carrières [31.XluioRA des mines :MET ALLAI,
ou des exploitations agricoles comprises dans le domaine
occupe des employés aux écritures, et parmi eux des archivistes 20 ; c'est ainsi que nous voyons des colons africains invoquer, dans une supplique adressée à Commode pour défendre leurs droits, une loi d'Hadrien et des lettres des procurateurs, conservées, disent-ils, in tabulario tuo tractus Karthaginiensis 21.
Archives municipales. Toute commune qui s'admi
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nistrait elle-même conservait soigneusement, sous l'Empire, la minute des actes publics ; nous connaissons grâce aux inscriptions un nombre considérable de ces dépôts'. Ils recevaient, année par année, les procèsverbaux du conseil municipal (acta ordinis) et tous les états financiers des différentes magistratures. Là où il y avait un questeur, la direction du tabularium rentrait dans ses attributions; le chef du personnel prenait quelquefois le titre de curator, soit qu'on l'ajoutât à celui de questeur, soit qu'on désignât par là un fonctionnaire particulier2. Une inscription de Caeré (Étrurie) nous fournit les renseignements les plus précis sur l'organisation du service. Le tabularium de cette ville était installé sous le portique du temple de Mars ; on y déposait à la fin de chaque année le Commentarius cottidianus des actes de la municipalité, qui avait ici la forme d'un rouleau de papyrus. Le 13 juin de l'an 11i, un personnage, qui ne peut être que le quaestor ou le curator, a donné l'ordre de communiquer (jussit proTerri) le volumen de l'année précédente, par les soins de son secrétaire (per scribans). On délivre aux intéressés une copie de trois documents qui y sont, contenus, savoir : page (pagina) `27, alinéa (kaput) du 13 avril 113, procès-verbal d'une délibération des décurions ; page '29, alinéa I, du 13 août, lettre des décurions au curator de la cité ; page 37, alinéa I, du 1'2 septembre, réponse du curator. On peut inférer de là que le rouleau comptait environ 50 à 60 paginae, ou colonnes d'écriture '. A côté des actes publics les archives municipales abritaient beaucoup d'actes privés, titres de créance, d'adoption, de propriété, etc., déposés en doubles ou en copies (âvT(Yoapa, âvxypxLat, proscriptiones) ; le ypewpuÀâxtov jouait donc un grand rôle dans les affaires des simples particuliers,comme dans celles de la commune'.
Archives militaires. -Considéré comme chef suprême de l'armée, l'empereur a près de lui, même à Rome, un tabularium castrense 6, dépendance du fisc-us castrensis, qui administre en réalité les finances particulières de la cour RATIO, ch. IX]. Mais il est bien vrai, en dépit de cette fiction, qu'un local a toujours été aménagé dans les camps, à côté du praetorium, pour la conservation des actes de tout genre qui émanent du commandement, ou qui lui sont adressés, sans parler des multiples écritures de l'intendance 3. On peut voir à l'article PRAETORIUM, fig. 5791, n° 1, l'emplacement qu'occupait le tabularium legionis dans le grand camp de la 11Ie légion, à Lambèse ; des fouilles plus récentes ont entièrement dégagé le praetorium et complété nos informations 6. Les archives de la légion occupaient au fond de la cour d'honneur, à gauche de la chapelle des enseignes, une salle de 10 mètres de long sur 8 mètres de large ; elle servait en même temps de lieu de réunion pour les commis aux écritures, qui formaient
une association °. A l'autre angle de la cour, à droite, lui faisant pendant, s'ouvrait le tabularium principis (5m X 8m), c'est-à-dire du centurion princeps praetorii'0, officier d'état-major, chargé de fonctions administratives. Les deux salles avaient été ornées également des images de la famille impériale.
Archives religieuses et autres. Nous ne pouvons que rappeler ici les archives des grands collèges sacerdotaux [AUGURES, PONTIFICES-i ; leurs Livres et leurs Commentaires doivent être comptés parmi les plus anciennes sources
LIDRI] ; on suppose que les précieux documents accumulés par les pontifes étaient conservés au Forum dans la Regia, siège de l'administration du Pontifex lnaximus [ronusi] ; un grand nombre étaient écrits sûr toile et sur papyrus ; mais les tabulae devaient y occuper aussi une large place, le collège ayant entretenu une correspondance active avec les particuliers, surtout au sujet des sépultures dont il avait la surveillance (jus uranium) ". D'une façon générale on peut, sans crainte d'erreur, affirmer que tout collège religieux, quel qu'il soit, a eu son tabularium l2 ; les procès-verbaux des ARVALES, gravés sur le marbre, peuvent nous donner une idée du soin et de l'ordre avec lesquels cette confrérie tenait ses écritures. Il en est de même de toutes les associations, religieuses ou non ; un de leurs principaux dignitaires est toujours le scriba, chargé, en outre de la rédaction, du classement et de la conservation de toutes les pièces relatives à leurs affaires' 3.
Les Romains avaient pris des mesures très rigoureuses pour préserver de toute altération et de tout détournement les documents déposés dans les archives, surtout dans celles de l'État. Au milieu des luttes politiques qui amenèrent la chute de la République, les différents partis se sont mutuellement accusés de ce crime à tour de rôle; les coupables auraient, avec la complicité du personnel de service, pénétré sans autorisation dans le tabularium du Sénat et pris copie de pièces secrètes; d'autres auraient supprimé des sénatus-consultes avant même qu'ils ne fussent enregistrés, leur enlevant ainsi toute valeur légale ; d'autres auraient falsifié les textes ou en auraient introduit d'apocryphes au milieu de séries authentiques'". Il est certain en effet que les quaestores urbani, jeunes magistrats au début de leur carrière, n'avaient pas toujours l'expérience ou l'autorité nécessaires pour prévenir ces manoeuvres frauduleuses, que facilitaient la négligence ou la corruption des agents subalternes placés sous' leurs ordres; la passion et l'argent ont pu, dans les temps troublés, avoir raison des règlements les plus sévères" Les empereurs s'efforcèrent de remettre de l'ordre dans ce service; on a vu plus haut par quelles formalités il fallait passer avant d'obtenir la communication des
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pièces. Néron exigea pour chacune d'elles un nouveau mode de scellement;le fil, sur lequel étaient apposés les cachets des témoins, dut traverser les tables de bois, au lieu d'en faire le tour [TABELLA], garantie obligatoire pour tous les actes légaux, qui resta jusqu'au bout en usage'. Valens étendit l'obligation du scellement aux documents diplomatiques sur tables, apportés par les ambassadeurs des nations étrangères2. Sans parler des lois qui atteignaient le faux sous toutes ses formes [FALSITM], il y avait une lex, Julia peculatus, promulguée par César ou par Auguste, qui visait particulièrement les falsificateurs des tabulae publicae [LEX, p. 1150]. Ces mesures ne suffirent pas toujours à mettre les archives, surtout celles des provinces, à l'abri de coupables pratiques: Pline, ayant à prendre une décision comme gouverneur de la Bithynie, et voulant s'éclairer sur les origines de l'affaire, a commencé une enquête à Nicomédie; on lui a produit aussitôt un édit d'Auguste et des lettres des Flaviens, tirés probablement des archives municipales ; mais, comme il n'en a point trouvé d'exemplaires dans les archives de son proconsulat, avant de rien conclure, il en réfère à Trajan, quia et parure emendata et quaedam non certae Jidei videbantur ; l'empereur vérifiera lui-même les originaux de ces pièces dans les archives du Palatin, si toutefois elles ne sont pas apocryphes 3. Dans les bas temps, les hérétiques ont été plus d'une fois poussés par le souci de leur défense à fabriquer de faux rescrits impériaux, qui leur assuraient le libre exercice de leur culte 4. G. LAFAVE.