Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

Article TIRO

TIRO, TIROCINIUM. Il a été longuement parlé, à l'article DILECTUS, des opérations de la levée des troupes et de l'enrôlement des soldats. Une fois le conseil de révision passé, le conscrit prend le nom de tire. Il faut alors qu'il soit versé dans un corps quelconque (in numeros referri), où il aura à se rendre soit individuellement, soit en troupe. Naturellement son transport, en pareil cas, se fait aux frais de l'État'. Les conscrits pouvaient être affectés, dès qu'ils avaient été reconnus bons probati), à un corps déjà formé ; c'est ce qui arrivait, par exemple, pour les engagés levés dans le pays même où campait le corps dont ils allaient faire partie. Tel est, semble-t-il le cas de six tirones que le préfet d'Égypte de l'an 103 apr. J.-C. 2, C. Minicius Italus, envoie au préfet de la cohorte des Ityréens, pour y prendre place à partir du onzième jour avant les calendes de mars ; la pièce officielle qui donne leur nom et leur signalement arrive au corps le sixième jour desdites calendes; c'est le cas aussi des tirones inscrits en 156 dans la cohorte des Lusitaniens d'Égypte'. Mais lorsqu'on faisait des levées importantes pour combler les vides d'un corps d'armée, on groupait les tirones provisoirement en une vexillation, sous un chef spécial temporaire, qui conduisait le détachement à destination [VEXILLATIO]. Tacite parle d'un vexillum tironum in Syriam eunlium que Pison intercepte au passage`; et une inscription de Sestius mentionne un praefectus tironum Galliae Narbonensis s. Ces corps temporaires pouvaient naturellement être employés au besoin par leur chef ou par l'empereur : la route d'Aquilée à Concordia fut réparée sous Maximin par les tirones juventulis novae Italicae dilectus posterioris 6. On ne versait pas, d'ailleurs, définitivement les tirones dans le corps auquel ils étaient destinés; on ne les marquait, à la fin de l'empire, du signe distinctif (victuris in cule punctis) 7 réservé aux soldats, qu'après s'être assuré de leur aptitude par des exercices préalables ; on les mettait ainsi en surveillance pendant quatre mois et plus, et pendant ce temps on les rompait de mille facons à leur futur métier 8. Végèce a consacré toute la première moitié de son premier livre à énumérer ce que l'on exigeait d'eux': on les faisait marcher au pas, courir, sauter ; on leur apprenait à nager ; on les dressait à se battre contre un ennemi figuré par un pieu revêtu d'armes, à le frapper du tranchant et surtout de la pointe du glaive, à envoyer des traits et des flèches, à lancer des pierres avec la fronde, ou des balles de plomb, à monter à cheval. à porter des fardeaux. Ces épreuves terminées et l'aptitude militaire de l'homme une fois reconnue, le tire devenait miles; la distinction entre les deux mots est faite très nettement par les textes10. Mommsen a montré que, quelle que fût la date où l'engagement était conclu, l'entrée au service des soldats et leur droit à la solde partaient en règle du 1" mars, qui était le début de l'année militaire usquelà, et pendant le temps qui séparait ce jour de celui où avait eu lieu l'enrôlement du conscrit, il n'y avait que tirocinium, non militia, ni slipendium. On a expliqué à l'article DILECTLS que, depuis la réforme dioclétiano-constantinienne, un impôt spécial portait le nom d'Aumust TIRONICGM. II était payé par ceux qui, obligés de fournir des conscrits, étaient autorisés à s'acquitter en argent de la redevance. R. CAGNAT.