Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

TOGA

TOGA (T'ijeevvx, 'r-/ avvo.). I. La toge était une pièce essentiellement nationale du costume des Romains. Le port en était interdit aux étrangers et aux bannis 2. En réalité toutefois, il semble que l'usage en ait été plus étendu que ne le comportait la loi romaine. Une partie des Gaules Cisalpine et Transalpine avait reçu le nom de Gallia togata parce que, nous dit Dion Cassius 3, T?, ~sG~Tt T~ iuuaïxïj Trl éuartx?il É./ri71vro ,-aA (c'est-à-dire avant l'obtention du droit de cité). S'il faut en croire une tradition conservée par Pho TOG 318 '[0G tins', la toge aurait été d'origine étrusque. De fait, nous connaissons, par un certain nombre de monuments étrusques2 (fig. 6998), un manteau qui parait plus voisin de la toge que de l'himation grec. Mais point n'est besoin de cette hypothèse pour expliquer l'adoption de la toge par les Romains. Il est vraisemblable, en effet, que la toge, comme l'indique son étymologie (tego) 3, était à l'origine une pièce d'étoffe toute simple et de petites dimensions que l'on portait avec ou sans tunique 4 et que, semble-t-il, on fixait au moyen d'une fibule 6. Les femmes en usaient tout aussi bien que les hommes 6. Elle servait aux soldats' comme aux ci toyens. Elle remplissait aussi l'office de couverture 8. Mais peu à peu la forme de la Loge se compliqua; et,' par une conséquence naturelle, l'usage s'en restrei gnit. Les femmes à l'exception de certaines (voir ci-dessous) la remplacèrent par la stola [siOLA1,. Les soldats l'échangèrent contre un manteau plus commode, le sagum [sAGUM] ; toutefois, jusqu'à la fin de la République, et même sous l'Empire, il arriva exceptionnellement qu'on en fournit aux armées dans leurs quartiers d'hiver le fait se produisit pendant les guerres l'uniques pour les troupes d'Espagnes et d'Afrique 10; plus tard, lors de la campagne de Macédoine ", Marc-Aurèle, au dire d'un de ses historiens '2, aurait même ordonné le port de la toge pour l'armée d'Italie. Mais d'une façon générale, la toge devint un vêtement pacifique 13, symnole des occupations civiles et insigne du citoyen les enfants, au sortir de l'adolescence, offraient leur toge prétexte à Hercule ou aux Lares familiares pour revêtir la toge virile (toga para); cette cérémonie dura jusqu'au Ive siècle [BOLLA (voir plus loin II)1 Cependant peu à peu on abandonna l'usage d'un -t êternent coûteux et mal commode. On s'en passait à la maison ou à la campagne ' 6 ; on le portait très peu hors de Rome 17. C'est à Rome seulement qu'il était malséant de sortir en tunique, et l'on ne pouvait paraître en public que togatus 1s ; Auguste 12 interdit l'accès du forum et du cirque aux gens sans toge. Mais à l'étranger, on adopta les modes étrangères : Rabirius à Alexandrie 20, Verrès en Sicile 21 portaient le pallium grec; Sylla 22 et Scipion l'Ancien 23 avaient pu, sans trop de scandale, revêtir dans leurs camps la chlamyde. La coutume d'autres vêtements, étrangers ou plus commodes, s'introduisit à Rome même : Auguste s'indignait d'avoir vu sur le forum toute une foule en lacerna [LACESNA]. Bientôt la toge fut réservée aux cérémonies officielles L3 et ne devint plus obligatoire que dans certains cas : aux jeux76, à la cour du prince 27, dans l'exercice des fonctions publiques 2s. De même, les clients ne manquaient pas de la revêtir pour aller saluer leurs patrons, et l'aspect de cette foule loqueteuse fit tourner la toge en dérision et en mépris L9. Virgile 30 avait pu parler avec fierté de la gens togata. Martial se moquera de la togula des clients 31, et plebs togata 32 deviendra synonyme de populace. A partir du Ive siècle, la toge semble au contraire réservée aux hauts dignitaires en fonctions officielles et à l'empereur 33 La toge était aussi un vêtement imposé aux femmes de moeurs irrégulières, soit aux meretrices de profession [MEUETmIX], soit aux femmes judicio publico danlnatae ou in adulterio deprehensae 3t [ADULTERIUM]. Aucun texte ne nous apprend si cette toge était semblable à la toge virile ; tout ce qu'on demandait sans doute, c'était qu'elle se distinguât nettement de la stola. La toge était en laine ; l'été, on usait d'une étoffe légère (toges rasa)", dont les élégants exagéraient la finesse et la transparence 36, l'hiver d'une laine pelucheuse (toga pexa37, pinguis30). Elle était blanche 33; cette blancheur, qui en faisait tout le luxe, était parfois renforcée avec de la craie 60 ; c'était, en particulier, la coutume pour ceux qui briguaient une charge [CANDIDATES]. On prenait en signe de deuil la toge pelle ", ou toge sombre [T.ucrus] 42. La toge de pourpre et d'écarlate, que portaient certains magistrats dans des cas déterminés, était dite trabea [T1IABEA). Les dimensions de la toge variaient beaucoup : les uns, comme Caton d'Utique, se contentaient d'une toge exigua"3 ; d'autres tombaient dans l'excès contraire " ; mais on usait à l'ordinaire de Loges neque restrictae neque fusae ". C'était le cas pour Auguste, comme on peut le constater dans la belle statue du Louvre ". u iïec strangulet, nec fluet», dit Quintilien". La toge pouvait recevoir divers ornements. Celui de la TOG -3419 TOG loges praetexta consistait, à ce qu'il semble, en une bande de laine pourpre tissée au bord (prae-texta) de l'étoffe [cLAVUS]. Nous avons vu qu'elle était portée par les enfants de naissance libre. Elle était aussi l'insigne des consuls, des préteurs, des magistratures curules2, des dictateurs3, du magister equitum des censeurs E, de certains magistrats municipaux et coloniaux °, des magistrats présidant les jeux, de certains prêtres tels que le Tlamen Dialis 7, les Ponti/ices et les Tresviri epulones les Augures °, les Quindecimviri 1 °, En outre, il arrivait qu'elle fût accordée à titre de récompense exceptionnelle : un centurion qui s'était distingué dans la campagne des Cimbres fut autorisé à sacrifier en prétexte ll La topa picta, d'après certaines traditions 12, aurait été introduite à Rome par les Étrusques [SEGIIENTUMj. Il semble tout au moins qu'elle remontait à un vêtement royal primitif, du genre de cette toga regia undulata 13, que Varron vit dans le temple de la Fortune et qu'on disait avoir appartenu à Servius Tullius. C'était une toge brodée, réservée sous la République aux triomphateurs'"; mais elle ne leur appartenait pas en propre ; on la gardait dans les trésors de Jupiter Capitolin'° d'où on ne la tirait que pour les triomphes [TRiosiPncs, ou pour en revêtir certains magistrats, à l'occasion de cérémonies exceptionnelles, par exemple les préteurs dans la pompa circensis 16 ou les tribuns du peuple à ]a fête des Augustales 17, voire pour la prêter, par une faveur insigne, aux rois en visite à Rome 1B. Le port de la toges pista était un droit acquis pour les triomphateurs, qui pouvaient en faire usage aux fêtes publiques '9. Auguste en fit son costume officiel". Cet usage fut adopté désormais par la plupart des empereurs 21 et respecté, à tout le moins, jusqu'au Ive siècle 22 [coNsua, p. 1413, fig. 1906 et sqj. Les consuls eurent droit à cet insigne à l'occasion du processus consularis ou pour recevoir les voeux 23, à partir du ne siècle après J.-C. environ 2Y, On rencontre aussi l'expression de topa palmala. Palmata caractérisait primitivement la tunique triomphale [TUNICA], qu'on revêtait toujours en même temps que la topa pista. Les deux épithètes désignaient donc apparemment deux sortes d'ornementation. Mais, soit par suite d'une confusion dans l'esprit des auteurs, soit plutôt parce que la broderie palmata fut transportée de la tunique à la toge, les deux termes de toga picta et de toga palmata furent employés l'un à côté de l'autre dès la fin du 1"r siècle après J.-C. 2°, Marquardt 26 pense que palmala désigne un dessin de feuillages, et pista un semis de menus motifs, points, cercles, croix, étoiles (fig. 6999) 27, brodés ou découpés dans des feuilles d'or On a beaucoup discuté sur la forme de la toge ; car les textes ne sont pas clairs à souhait. La seule chose certaine, c'est qu'elle s'opposait au TETOx qu'elle était, d'ordinaire 29 tout au moins, arrondie en totalité ou en partie. Denys d'Halicarnasse 3° la décrit : xvratov. Isidore 31 : est autem (topa) pallium purum forma rotundae//'usiore et quasi inundante sinu, et sub dextro veniens, supra /1umerum sinistrum ponitur. Quintilien 32 : lpsam togam rotundam esse et apte caesam velim. Les monuments figurés, malgré leur abondance, ne nous renseignent pas d'une manière plus précise, et laissent le champ libre aux hypothèses. Trois explications ont été proposées. D'après Weiss 33 la toge formait une ellipse. Avant de, la draper, on la repliait dans le sens du grand axe, un peu au-dessous de celui-ci". Cela fait, on la jetait sur l'épaule gauche, au tiers environ de la longueur, de manière que le premier tiers retombât en avant du corps jusqu'à terre, « On passe 35 ensuite sous le bras droit la longueur en excès, on la ramène vers le haut et on la rejette sur l'épaule gauche, qui se trouve ainsi deux fois drapée. La pièce passée sous le bras et repliée, comme on le voit, de bas en haut, est dite repli, sinus... Une fois drapé, on tire un peu en avant le premier tiers de la toge qu'on avait tout d'abord ajusté et qui maintenant se trouve sous le sinus ; on l'amène au dehors et pardessus le sinus, de manière à consolider l'ensemble de la draperie, et le pan de la pièce intérieure qui est ainsi tiré à l'extérieur est dit umbo 36 ou nodus 31, » Cette explication résiste difficilement aux critiques que lui ont adressées von der Launitz 38 et A. Müller 33. Ceux-ci à leur tour font une autre supposition : la toge aurait eu la forme d'un segment de cercle pourvu, au j TOG TOG milieu du côté rectiligne, d'une pièce à bord arrondi Mais ce dernier essai nous emmène loin de l'v,la.txtSx.).tcv dont parle Denys d'Halicarnasse. Si l'hypothèse de Weiss explique mal certains agencements d'aspect un peu compliqué, l'hypothèse proposée par von der Launitz est inutile pour rendre compte des cas plus simples. Faut-il supposer qu'il existait des toges de deux catégories ? Cela parait bien invraisemblable. La solution la plus simple et la plus complète a été donnée par M. L. Ileuzey, dans son article sur La toge romaine, à la suite d'expériences faites avec des étoffes drapées sur le modèle vivant" Primitivement la toge garda sans doute la forme rectangulaire qu'elle avait au sortir du métier 3, mais elle C reçut. dans la suite une coupe demi-circulaire. M. Ileuzey s'est servi pour ses études d'une grande pièce, taillée en un segment de cercle (fig. 7000), de 5 m. 60 de longueur sur t? mètres de largeur 4. Il a conservé «la rayure rouge, tissée dans l'étoffe abyssine » dont il a fait usage ; « elle nous représente la bande de pourpre, tissée à même, qui décorait la toge des magistrats romains (topa praetexta). D'après les lois ordinaires du tissage, cette bande ne peut facilement régner que sur l'un des deux bords de la toge, sur le bord rectiligne, et non sur l'autre, où la toge était taillée (apte caesam, dit Quintilien) et recevait une coupe demi-circulaire... A plus forte raison, ne faut-il pas découper ce même bord en un second arc de cercle ». Cette dernière observation est en effet des plus importantes: si l'adjectif praetexta implique l'idée d'une bande tissée il est impossible que cette bande ait régné sur un bord arrondi. M. Ileuzey a toutefois prévenu les objections que paraissent fournir contre sa théorie deux monuments. Le premier est un petit bronze de la Bibliothèque nationale° qui représente un jeune guerrier se drapant dans une sorte de trabea : au bas de celle-ci, sur le bord arrondi par conséquent, court une bande indiquée par des incisions (fig. 7037). L'autre est I« ç orateur étrusque » de Florence (fig. 7001), dont la toge est également ornée d'une bande au bas. Mais dans ce second cas, un liseré saillant indique que la bande était appliquée et cousue. La même explication convient pour le guerrier. Car le fait que le bord orné est curviligne écarte l'hypothèse d'un tissage. Par contre, M. lleuzey a découvert des monuments qui confirment pleinement son opinion : des peintures étrusques de la nécropole de Vulci 7, et des images du Genius falniliaris provenant de Pompéi'. La bande de pourpre y suit exactement la même ligne que la bordure de l'étoffe abyssine une fois drapée. Avec cette seule pièce d'étoffe, on peut obtenir toutes les combinaisons qui nous sont connues par les monuments. 10 Voici la disposition la plus simple; elle est connue par la statue de 1' « orateur étrusque » de Florence «fig. 7001). La toge est jetée sur l'épaule gauche, ramenée en travers du dos sous le bras droit et rejetée obliquement sur l'épaule gauche. (Fig. 7002. Statue du soi-disant «Sénèque », Musée du Louvre) !0. La seule différence avec la disposition précédente, c'est que les deux vertes ; la toge forme une sorte de gaine serrée d'où les mains seules dépassent 11. A l'exception du pan inférieur, toute cette draperie rapelle l'himation du célèbre « Sophocle» du La tran 12. (Fig. 7003. Statue de Tibère, Musée du Louvre"). C'était la façon la plus ordinaire de porter la toge, ainsi qu'en témoignent la plupart des monuments ". C'est évidemmentàcette mode que Quintilien fait allusion dans un passage 13 dont il est bon de traduire les parties essentielles : « Je voudrais que la toge fuit arrondie et exactement coupée ; car sans cela elle grimacera de toutes parts... Le sinus le plus élégant se porte un peu eudessus de la partie inférieure de la toge (aliquanto supra imam Toge de transition. togaut) ; en tout cas il ne doit jamais tomber au-dessous. Que cette sorte de baudrier (balleus), qui va obliquement de dessous l'épaule droite TOG 361 TOG sur l'épaule gauche, ne soit ni étriqué ni trop lâche... Ensuite on doit jeter le sinus sur l'épaule ; mais on peut aussi en tirer le pan en arrière (le faire retomber sur le dos; cujus extremum oram rejecisse non dedecet). » Voici, d'après M. Heuzey, de quelle façon l'on procédait t : « On commence par prendre dans les deux mains le bord rectiligne de la draperie, vers le tiers environ de sa longueur et par le masser en un paquet de plis, que l'on place sur l'épaule gauche du modèle. L'une des extrémités de la toge, laissée par devant, cou-1-1 vre le bras gauche et tombe jusque sur les pieds, en traînant même à terre d'une certaine longueur. 11 suffit alors de poser le bord de l'étoffe sur l'autre épaule; et le dos se trouve complètement enveloppé. » La partie AB (fig. 7000 et 7003) tombe donc par devant; la pointe A constitue la lacinia antérieure (fig. 7003), qu'il était de bon ton de laisser un peu traînante a. L'étoffe repose suivant la ligne CD (fig. 7000) sur l'épaule et le bras gauche. La partie EE (fig. 7000) recouvre le dos. C'est en h (fig. 7000 et 7003) que la Loge est ramenée sur l'épaule droite. « Ensuite, pour ramener la toge par devant, on reprend l'étoffe sous le bras droit, non pas au bord, mais au tiers environ de sa largeur » (suivant la ligne FG, fig. 7000). « On forme à ce point, vers la hauteur de la hanche, un nouveau paquet de plis, que l'on fait passer obliquement sur la poitrine et que l'on rejette derrière l'épaule gauche. » La partie If II (fig. 7000 et 7003) est 1'ima topa. Pour le moment elle est cachée par Il (fig. 7000 et 7003) qui retombe en avant. C'est avec cette partie II que l'on va maintenant former le demi-cercle de plis, soigneusement étagés, que les anciens appelaient le sinus de la toge. Après l'avoir laissé s'arrondir jusqu'au-dessous du genou, on eu relève l'extrémité II (fig. 7000 et 7003) que l'on rejette encore sur l'épaule gauche. Il reste enfin à tirer en avant au-dessus du sinus II un paquet de plis (K, fig. 7003), qui constitue l'ambo 3, puis à aplatir, en le régularisant, le large pli qui traverse obliquement la poitrine et que pour cette raison on appelle baudrier, balteus (1.L fig. 7003). On conçoit que, pour établir un pareil édifice (sarcina, dit Tertullien), le secours d'autrui était nécessaire. II existait même des esclaves (vestiplici restiplicae) chargés d'entretenir les plis et de les préparer la veille en les serrant dans des pinces'. La beauté savante des plis était une suprême élégances. Voici maintenant quelques variantes à l'ajustement dont il vient d'être question. L'ensemble reste le même : toutes les différences proviennent d'un déplacement de l'umbo ou du sinus. 1° Sur plusieurs bustes ou médaillons (fig. 1873), et sur quelques statues (fig. 7004)7, il semble que l'umbo ait été remplacé par une sorte de large bande qui, partie du milieu de la poitrine, contourne le bras gauche un peu au-dessus de l'épaule'. On a supposé parfois qu'il s'agissait là d'une pièce d'étoffe séparée. M. IIeuzey a pu obtenir la même disposition par « un déplacement de l'umbo », que l'on tire hors du sinus au-dessous de l'épaule et dont on ajuste les plis à plat, en les doublant pour leur donner plus de rigidité. On remarquera que cet arrangement eût été impossible, si le bord supérieur de la toge, qui en fournit la matière, n'avait pas été rectiligne. 2° Dans les sacrifices offerts suivant le ritus romanus, l'officiant avait la tête voilée. Nombreux sont les monuments qui reproduisent ce détail (fig. 6004 à 6006)9. Dans ce cas, c'est le sinus qui fournissait l'étoffe nécessaire au voile ". 3° Il est fréquemment fait mention dans les auteurs d'un arrangement dit cinctus Gabinus. Cette appellation, d'après Mommsen, serait un souvenir des nombreuses luttes entre Rome et Gabies. Quoi qu'il en soit, il semble bien, d'après les textes, que l'origine en remonte aux temps où la toge était aussi un costume militaire 19. Le pan que, dans la suite, on prit l'habitude de rejeter sur l'épaule gauche, était serré et noué (cinctus) autour de la taille, afin que les bras restassent libres 12 L'adoption du sagum ne fit pas entièrement abandonner cet usage ; le cinctus Gabinus persista dans certains rites, d'origine militaire 13 : fondations de colonies ou de villes [coLONIA, fig. 1724), sacra Ambarvalia'', ouverture du temple de Janus'', anéantissement de certaines parties du butin'', etc... Mais le caractère religieux était alors marqué par un agencement, évidemment étranger au cinctus primitif: la tête de l'officiant était voilée. La fig. 7005 ", qui représente l'ombre d'An TOG chise, d'après un manuscrit de Virgile au Vatican, nous montre bien le double détail du cinctus et du velatum caput. A l'époque postérieure, à partir du Ive siècle tout au moins,l'expression cinctus Gabinus ne corres pond plus à aucune réalité ; elle est devenue une expression poétique, vide de sens'. La toge pouvait servir d'arme défensive dans les luttes politiques. Bien qu'aucun monument ne reproduise cette attitude, nous savons par les textes que les adversaires, avant d'en venir aux mains, se ceignaient de leurs toges, après en avoir enroulé un pan autour du bras gauche2. 50 Nous avons vu plus haut que les consuls revêtaient la logez picta, lors de leur inauguration, c'est-à-dire au processus consularis. Un certain nombre de monnaies impériales représentent cette cérémonie 3. Autant qu'on peut en juger, la toge du triom phateur ne diffère en rien d'une toge ordinaire. Mais cette remarque n'est exacte que pour les premiers siècles de l'Empire ; à partir des premières années du Ive siècle au plus tard, l'arrangement de la toge picta devient plus compliqué. C'est ce que nous apprennent les diptyques consulaires CONSUL, p. 14'74 sqq. ; DIPTYCnoN] : ils représentent d'or dinaire le consul en costume d'apparat, soit debout, soit présidant aux courses du cirque. Voici d'abord le type le plus simple (fig. 1906) : la toge a été jetée sur deux tuniques superposées. M. Meyer' considère comme indépendante de la toge la bande qui tombe verticalement en avant, et il en donne comme preuves deux figures vues de dos Ifig. 1914 et 1915) tirées, l'une des bas-reliefs de l'arc de Constantin, l'autre du diptyque de Probianus. Pour M. G. Wilpert', c'est à cette bande même qu'a fini par être réduite la topa gicla : elle n'était plus qu'un accessoire ornemental, ajusté sur la tunique et la dalmatique. Le reproche commun que l'on peut adresser à ces deux opinions, c'est qu'elles ne respectent plus l'intégrité de la toge. Si l'on examine, par exemple, le costume du consul Boethius fig. 1913 et que, faisant abstraction de la raideur de l'image, on le compare à la toge classique, on constate qu'il n'existe aucune différence essentielle d'une époque à l'autre. Transportée à la toge classique, l'interprétation de MM. Meyer et Wilpert reviendrait à faire deux pièces distinctes, d'une part du sinus, du nodus et de la lacinia antérieure, d'autre part de l'ima topa et du reste de la toge. Mais, de plus, on peut faire les remarques suivantes : pour l'ornementation, ce que M. Meyer appelle une bande, ce qui constitue pour M. Wilpert la toge même, ne diffère en rien de la draperie qui, traversant la poitrine, passe sur l'épaule gauche, puis de là sur l'épaule droite .352 TOG et retombe par devant en un sinus rejeté sur l'avantbras gauche ; si cette bande, dans sa partie inférieure, se distingue de la tunique, elle paraît au contraire toujours liée à la toge et toujours du même côté, sur la jambe gauche (remarque qui se vérifie sur tous les diptyques); la liaison de la bande et de la toge apparaît non moins nettement sur la fig. 191h. Il n'est donc pas besoin de chercher, pour désigner cette bande, des mots comme superhumerale, omophorion, pallium, contabulatum, qui n'ont jamais été appliqués à un détail de la toge romaine. Au reste, M. lleuzey a prouvé que l'on pouvait s'en passer : avec la même draperie demicirculaire qui servait à ses autres expériences, il a reconstitué entièrement cette disposition en lui rendant une souplesse qu'on ne retrouve pas sur les diptyques'. De même, il a pu, dans les moindres détails, reproduire un agencement plus compliqué encore (fig. 1909). La façon de procéder est des plus simples : « Dans l'un et l'autre cas, on commence par ceindre la toge autour de la taille;... puis on la croise à deux reprises autour du corps, en repliant symétriquement les bordures de pourpre ;... on complète la décoration par un entre-croisement recherché des extrémités tombantes de la draperie, dont l'une reste suspendue de manière à former jusqu'aux pieds une chute verticale, tandis que l'autre est rejetée horizontalement sur le bras gauche comme une ceinture flottante. » Selon M. lleuzey, un arrangement aussi savant ne saurait dater d'une époque « qui avait perdu le secret de la draperie antique ». De fait, on peut reconnaître un costume identique à celui que représente la figure 1906 dans un bas-relief romain du Louvre'. Sa complication n'a pas été sans doute une des moindres raisons qui l'ont fait adopter par les consuls du Bas-Empire, ainsi que par certains personnages de haute condition, quand leurs fonctions les astreignaient au port de la toges. A l'époque byzantine, la toge a entièrement disparu, pour être remplacée par le pallium grec [PALLIUSI]. II. PRISE DE LA TOGE VInILE (dies virilis togae)10. Chez les Romains, la sortie de l'enfance et l'entrée dans la vie publique étaient célébrées par une fête. A cette occasion le jeune homme changeait la toge praete,xta, qui était bordée d'une bande de pourpre comme celle des magistrats, contre la toge virile qui était toute blanche 11 • La prétexte, que le jeune homme avait portée jusqu'ici, était en quelque sorte la sauvegarde de l'enfance et elle indiquait que la personne des enfants ne devait pas être moins respectée que celle des premiers magistrats de la république12. Anciennement on prenait la toge virile à l'àge de seize ansPlus tard on la prit souvent à la fin de la quinzième année, comme nous le savons de Cicéron, de Virgile, de Perse, d'Auguste, de Marc-Aurèle", etc. Cela dépendait jusqu'à un certain point de la volonté du père ou du parent qui le remplaçait'''. Tibère ne laissa prendre la toge virile au fils de Germanicus, Caligula, qu'à la vingtième année 'S. Les exemples où l'on a devancé la quinzième année sont très rares : Néron fut déclaré majeur à Page de quatorze ans". TOL 353 TOL La cérémonie avait ordinairement lieu au jour des LIBERALIA ou fête de Bacchus, qui tombait au 16 mars Ce jour-là, Rome offrait un aspect tout particulier 2. Dans les rues on rencontrait à chaque pas des processions de familles, qui conduisaient leurs enfants au forum, après que ceux-ci avaient revêtu la toge blanche [LIBER PATER, p. 1.189]. La cérémonie commençait le matin par un sacrifice offert aux Lares. A ce moment le jeune homme changeait la toge et déposait les insignia pueritiae, la bulle d'or, etc. qu'il dédiait aux Lares [BVLLA] a, Il portait aussi une tunique blanche, appellée recta ou regilla [ruNICA], qu'il avait déjà mise la veille, en signe de bon présage, et il couchait avec ce costume'. La toge virile, parce qu'elle était toute blanche, s'appellait aussi pura', ou libera, parce qu'il inaugurait la vie libre G. Le jeune homme vêtu de la toge virile (vesticeps puer') était solennellement conduit au forum (deduci in forum 8), comme pour le présenter au peuple, à la cité qui désormais devait le compter parmi ses membres. Toute la famille et les amis l'accompagnaient 9 et on tenait beaucoup à avoir un nombreux cortège à cette occasion 10. Après que le jeune homme s'était présenté sur le forum, il allait au Capitole offrir un sacrifice aux dieux de l'Étatf1. Quoique cette cérémonie eût lieu le plus souvent à [tome, rien n'empêchait de choisir un autre endroit, dans la province, à l'étranger, au gré des circonstances12 La prise de la toge virile était, pour le jeune homme, le moment où il fallait choisir une carrière. Alors commençait le tirocinium fori, c'est-à-dire les quelques années pendant lesquelles le jeune homme suit les affaires publiques sans y prendre encore une part active' 3. élever lesfardeaux. Elle servait notamment à tirer l'eau des puits [sIACmNA, p. 1468, fig. 4756, 4757] ; elle devait être d'un emploi commun sur tous les chantiers, quoique les anciens n'en aient fait mention qu'à propos des travaux militaires, où elle rendit, grâce à certains perfectionnements, des services particuliers. Ainsi on admira beaucoup l'ingéniosité avec laquelle Archimède sut la faire concourir à la défense de Syracuse, assiégée par les troupes de Marcellus (214-212 av. J.-C.). Comme les vaisseaux romains venaient battre la partie du rempart qui regardait la mer, il fit dresser sur les créneaux une grue à laquelle il adapta un grappin de fer (ye p atô ,pâ, minus ferrea; cf. 1ARPAGO), manoeuvré au moyen d'une chaîne (:),u(n;, catena) et d'une poulie (a/aarrip(«). On abaissait le bec (r.epatx) de la machine sur le vaisseau IX. ennemi ; puis, lorsque le grappin l'avait saisi, on exerçait une énorme pesée sur le talon (7rripva) de la poutre transversale ; en basculant elle enlevait par la proue le vaisseau qui semblait se dresser sur sa poupe ; et brusquement elle le laissait retomber; il frappait alors la mer avec tant de force que, même s'il tombait droit, l'eau y pénétrait toujours3. Plus tard, la grue fut encore employée dans la défense des places, par exemple pour jeter des masses de plomb, des quartiers de roche ou des troncs d'arbres sur les béliers et les tortues (le l'assiégeant [oPPUGNATIo] 4; parfois même elle lui prenait un ou plusieurs hommes, qu'elle accrochait au passage, les enlevait en l'air, puis, tournant sur un pivot, elle les déposait à l'intérieur du rempart'. Mais la grue pouvait aussi rendre des services à l'assiégeant pour l'at taque de la place. A un bout (caput) de la poutre transversale il suspendait une nacelle en osier ou en planches, dans laquelle il logeait quelques soldats, et en abaissant l'autre bout, il les transportait sur les créneaux 9. Les ingénieurs grecs citent encore sous le nom de grue un appareil d'es d'après le même prin cipe, mais sensiblement différent: la pièce principale en était une passerelle en plan incliné, basculant sur un axe, et garnie d'échelons (fig. 7006). Voici comment en parle l'ingénieur Athénée, auteur d'un Traité sur les machines 7 : « Ces machines seront en bois de frêne, revêtues de lames de fer travaillées à froid, et embrasseront l'axe (z,(ov) dans des coussinets de bronze; elles auront chacune un poids d'un talent (26 kilogr.) Entre les mâchoires passe l'axe, qui est de fer et pèse quatre talents (105 kilogr.). On y fixe la machine connue sous le nom de grue (ypavo;), de telle manière qu'elle atteigne le sommet du mur assiégé, autant qu'on en peut juger à l'ceil. On clouera par-dessus des arceaux et on disposera à l'intérieur une espèce d'escalier. Au sommet (de cet escalier couvert 8) on fixera une échelle (,atm':[;) renforcée, munie à sa partie inférieure de grappins (xôoxxs;) de fer, de telle sorte que, TON 31!1 TON lorsque la machine aura été approchée des créneaux et que, grâce à des tendeurs, l'échelle aura pris la position convenable, les grappins accrochent fortement les créneaux par-dessus. La grue se protège et se recouvre avec des cuirs. On place sur la hase un contrepoids de mille talents (26 tonnes). Les axes n'exigent pas moins que le poids de quatre talents, à cause des différentes positions qu'il faut pouvoir donner; cette machine a en effet les six mouvements'. n Sous le nom de grue (yspavoç) ou de corbeau (xdpa;, cornus), les ingénieurs anciens mentionnent encore d'autres machines d'escalade, dont le type se rapprochait plus ou moins du précédent; mais nous ne sommes pas en mesure de les définir avec précision, et d'ailleurs elles ne semblent avoir été ni très usitées, ni très appréciées2. GEORGES LAFAYE. TONAL1 (TrIvata). D'après l'historien Ménodotos de Samos', à certain jour de l'année on transportait sur le rivage la statue de culte de l'Iléra samienne ; on la baignait et la purifiait; on lui offrait des gâteaux sacrés; le rite s'expliquait par la légende d'un rapt de l'idole par des pirates tyrrhéniens. Il semble bien que les Thvata ne fussent qu'un acte des fêtes d'liéra à Samos,