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TRAPEZOPHORUS, TRAPEZOPHORUM (TFwaE~op Fov)-Les trapézophores sont, à proprement parler, des pieds de table [MENSA]. 11s constituaient l'élément artistique du meuble. A l'époque alexandrine, ils deviennent de vrais objets d'art et de luxe. On en fabriquait en bois rares, en marbre blanc ou de couleur, en céramique peinte, en ivoire, en bronze souvent incrusté ou plaqué d'argent, en argent massif, en or'. Ce fut au triomphe de Manlius en l'an 567/187, après sa campagne d'Anatolie contre les Galates, que l'on en vit à Rome pour la première fois Moins d'un siècle après, ces produits de l'art hellénistique avaient envahi la maison romaine. Au temps de Cicéron, les riches Romains se disputent les plus belles pièces 3. La Sicile, Délos, l'Asie Mineure, sans doute Alexandrie, sont alors les principaux centres d'exportation;. Dans les ateliers italiens, on se contente de copier les modèles grecs.
Les types usuels, connus surtout par les fouilles de Pompéi,sontpassésenrevue àl'arlicleMENsA. Il suffitdonc d'en compléter la liste. Un curieux monopode en bronze, avec plateau rectangulaire en marbre, provient d'un triclinium pompéien ; la forme en était, ce semble, inédite (fig. 7011) °. Sur un socle reposent deux pilastres, qui supportent un arc en fer à cheval. Des incrustations d'argent, méandres et volutes sur les piédroits, rinceaux de lierre sur l'arcature, en décorent la face antérieure. Sous cette arcade un sphinx est allongé, les mains tendues en avant, la tête coiffée du klaft; sur la clef de voûte se dresse une fleur de lotus, en argent, devant laquelle on fitappliquer plus tard uneprolomèdeMinerve.L'ensemble est d'un aspect un peu étrange, mais d'un exotisme qui ne manque pas d'élégance. Ce sontles supports à jambes de fauves qui
sont les plus fréquents «fig. 4908-4912). Parmi les motifs animaux qui les terminent, il faut ajouter des têtes de chiens 7 et des avant-corps de chiennes', issant de bouquets d'acanthe ou de calices de fleurs. Parmi les motifs mythologiques, sur des supports de même type, figurent aussi des bustes d'Apollon 9, des Éros
ailés qui tiennent une grappe de raisin 10 ou font le geste du verseur"; leurs ailes sont parfois recoquillées "-, comme sur les terres cuites de Tarse et de Myrina. Il y a deux catégories d'hermès: tantôt le buste seul 13, tantôt le buste et les pieds 14 sortent de la gaine rigide. L'un de ceux qui furent trouvés à Pompéi, dans ces dernières années, représente un Hermaphrodite phallique ; il est en marbre blanc, avec traces de couleur '°. Souvent enfin c'est une véritable statue, isolée ou adossée à un pilier, qui fait fonction de trapézophore. Pour les petites tables, un modèle courant
est celui de la iE)dfavl; tioz~rs~u 16
(fig. 579), dont l'abaque repose sur un ou plusieurs dauphins. Un corps entier d'animal, sphinx (fig. 4913) ", lion cornu (fig. 4312), lion ou lionne aux crocs menaçants (fig. 4911) ", supporte l'abaque d'un CARTIBULUM. On voit également des Centaures, des monstres marins '6. L'architecture fournit les types du Télamon et de la Cariatide: on trouve des Atlas agenouillés, des Victoires tenant un tropltée20. L'art décoratif emprunte des sujets à l'art religieux. Vers le milieu du fer siècle de notre ère, on reconnaît l'influence de l'Asie Mineure et des cultes orien
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taux dans la vogue du type figuré d'Attis'. Déjà mis à la mode par la toreutique alexandrine', il devient un motif de trapézophore pour lnonopodium en marbre. C'est ici l'Attis funéraire qui sert de modèle. La statuette, adossée contre un pilier oit s'encastre l'abaque, en reproduit le costume phrygien et l'attitude recueillie, jambes croisées, tête légèrement inclinée, main sous le menton 3. Mais l'absence de tout attribut généralise l'image, qui perd ainsi son caractère pieux, et la distingue de celles qui protègent les tombes d'initiés.
Les grandes tables oblongues, telles que le cartibulum, n'étaient pas toujours soutenues par quatre pieds. La plupart du temps, les deux pieds d'un même petit côté se trouvaient reliés par des sculptures et ne formaient qu'une seule pièce'` (fig. 491e). La plus belle paire de ces doubles trapézophores est au Musée du Vatican et provient du Viminal Chacun d'eux mesure 2 m. 32 de largeur sur un mètre de hauteur. Un griffon est accroupi à chaque extrémité. Dans le champ, entre les deux griffons, deux jeunes et riants Satyres se penchent sur un cratère, tout en saisissant d'une main la grappe de raisin qui pend au-dessus de leurs tètes; ce gracieux motif nous est déjà connu par des reliefs attiques'. Sur un trapézophore du Musée de Naples, se groupent un jeune Centaure et Scylla ' : le premier Lient une syrinx et porte un Amour sur sa croupe 8; l'autre est un monstre, moitié femme et moitié poisson, entouré de têtes de chiens,et qui enlace dans les replis de sa queue un corps humain. Cette oeuvre est un bon travail de sculpture romaine, d'après un modèle hellénistique.
Le trapézophore, comme l'abaque, a fini par donner son nom à la table entière 9. Cicéron, dans une lettre à son ami Fadius Gallus, qu'il avait chargé d'acheter des oeuvres d'art, signale un trape.oplloron'0. Il entend évidemment par ce mot une table de luxe, dont tout le prix était dans la richesse ou la beauté du support. Un inventaire de mobilier, dans le Digeste", indique trois catégories de tables: la mensa, qui est la table à manger, tout d'abord carrée ou oblongue; la delphica, qui est un guéridon à trois pieds, et le traperophorum, dont le nom n'implique ni destination précise, ni forme déterminée. On désigne plus spécialement ainsi, d'après Pollux', les
tables où sont posés les vases à boire, ix o'qr rr (fig. 5 et 'i). Mais elles peuvent être, dit-il, à un seul pied ou à quatre pieds; sans doute en fabriquait-on aussi à deux supports, comme celles dont nous avons parlé. Il y avait dans les triclinia beaucoup de ces trapézophores, à plateau généralement oblong. Souvent ils s'appuient contre la paroi, comme des consoles ; et leur support n'est ouvragé que sur la face antérieure'. Juvénal
en décrit un qui représente le Centaure Chiron, accroupi ou couché 14. Sur l'abaque en marbre étaient groupés six urcéoles. Le petit canthare placé dessous, parvulus infra cantharus, se trouvait-il posé sur le socle du Chiron ou sur une étagère? Avec ce genre de support on ne con
çoit guère la superposition de plusieurs plateaux ; plais on pouvait varier les dimensions du socle et le transformer en plateau bas. Aussi la figure ci-jointe (fig. 7042), empruntée à une lampe d'argile, me paraît-elle être la meilleure illustration de ce texte'. La Bu)ptvt; tipzat,x, dont parle Lucien, était de même un trapézophore de salle à manger '6. On y avait accumulé toutes sortes de verres à boire (7roTr,ptx) : grande coupe qui cache le visage du buveur, trulle, bombylios, vase à long col, vases à grosse panse, vases à larges bords, kylikes décorées de peintures ou d'inscriptions, kymbia et petites pltiales. A en juger par cette énumération, il s'agirait moins d'une simple table que d'une table à étagères ou d'un dressoir. Dressoirs et crédences avaient revu le nom d'abaei [ABACCS, fig. 5, 6, 71, parce que les tablettes des étagères ou des cases fermantes y prennent plus d'importance que les supports. Mais, d'après la classification du Digeste, les abaques rentraient dans la catégorie plus générale des trapézophores ii Pour qualifier toutes ces tables avec ou sans étagère, on se servait également d'un mot qui rappelait leur destination. En grec on les nommait xu),txcïx'", en latin caliclaria L3.C'est le terme de kylikeion qu'emploie Lucien, pour désigner la table aux dauphins. Il était plus clair et semble avoir été plus répandu, même en Grèce,
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que celui de trapéZophoron. Pollux déclare que trapé:ophoron, ainsi détourné de son véritable sens, est encore de son temps une expression rare et recherchée'.