Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

Article TRIBUNI

TRIBUN[ PLEBIS.I.Origines. -L'histoire primitive du tribunat de la plèbe à Rome est enveloppée de la même obscurité que la lutte des deux classes, des patriciens et des plébéiens, dont elle est un des épisodes essentiels [t'ATl1c11]. Une légende invraisemblable met l'établissement des tribuns et des édiles de la plèbe en 1194, après la retraite sur le mont Sacré, en mémo temps que l'organisation de la plèbe en communauté distincte [SUES sto nuits: 1. II y aurait eu alors soit deux soit cinq tribuns, dont trois, d'après plusieurs textes, cooptés par les deux premiers ; l'augmentation de deux à cinq est mise en 471', de cinq à dix soit en 471 5, soit en 1157, après la longue lutte entre les tribuns et Quinctius liaeso 6. Une tradition plus ancienne les fait créer seulement en 471 au nombre de quatre Puis le tribunat aurait été supprimé en 45! provisoirement, par l'accord qui créa le décemvirat et la législation des Douze Tables', et rétabli en 449 par les lois Valeria Jioratia, qui renforcèrent l'inviolabilité des tribuns et des édiles de la plèbe eu même temps que le plébiscite Duilien menaçait de la peine de mort quiconque laisserait la plèbe sans tribuns ". L'hypothèse la moins invraisemblable est la création en 171 de quatre tribuns, représentants des quatre tribus urbaines, protecteurs de la plèbe, sacrés et inviolables ; les noms des tribuns de 494, 471 et 449 paraissent apocryphes ; on peut admettre ensuite dans ses traits essentiels l'accord de 449, sorte de traité conclu avec serments solennels et imprécations entre les deux partis ", et qui a donné au tribunat toute son importance et son caractère sacrosaint. La plèbe a pu imiter des modèles grecs, par exemple les éphores doriens 12. Les tribuns n'ont eu TRI aucun rapport avec les cinq classes ' ; ils ne paraissent pas non plus avoir été pris d'abord parmi les tribuns militaires 2, car ils sont toujours restés magistrats civiques et urbains 3. Ils ont été probablement dès le début élus par la plèbe, réunie non en curies , mais, comme plus tard, en tribus 6. Les édiles de la plèbe sont peut-être un peu postérieurs aux tribuns 6, ainsi que les decemviri stlitibus judicandis 7. Il. Évolution politique. Depuis 449 c'est par une lente évolution que les tribuns, chefs révolutionnaires de la plèbe, acquièrent peu à peu leurs pouvoirs en dirigeant contre les patriciens cette longue lutte qui, terminée par la loi Hortensia (289-286], aboutit à l'admission des -plébéiens à toutes les magistratures, à la validité inconditionnelle des plébiscites, à l'adoucissement de la législation sur les dettes, à la constitution de la noblesse armes principales ont été le veto et les procès intentés aux magistrats et aux chefs patriciens. Us infligent en effet eux-mêmes les amendes de coercition, dont le maximum a été fixé depuis une certaine époque à 3020 as [MULCTA]. ils font infliger par les comices de grosses amendes ou des peines capitales 8. C'est peut-êl.re en vertu de la loi des Douze Tables, en tout cas certainement avant la loi Hortensia et dans le courant du Iv" siècle, que les grosses amendes sont portées par les tribuns et les édiles de la plèbe devant les comices plébéiens s, la peine capitale devant les comices centuriates Depuis 289-286 les tribuns perdent leur caractère révolutionnaire; considérés maintenant comme des magistrats de tout, le peuple, ils font des comices plébéiens la principale assernblée législative et le principal tribunal politique ; ils mettent souvent leurs armes au service du Sénat contre les désobéissances et les empiétements des magistrats patriciens. Mais, en général, fidèles à leur origine, ils favorisent, dès sa formation, contre la nobilitas et l'administration sénatoriale, le nouveau parti démocratique et les réformes politiques, judiciaires et agraires qu'il préconise. Ainsi, en 224 ou 228, la loi I'laminia, votée directement par la plèbe malgré le Sénat et considérée pour cette raison par Polybe comme le premier grand succès de la politique démagogique, ordonne le partage du Picenum et de 1'agerGallieus11 [AGRARIAE LEGES]. Vers 218 la loi Claudia défend aux sénateurs et à leurs fils d'affecter aux transports maritimes des navires d'un tonnage supérieur à 300 amphores'2; la loi Gincia de donis et muneribus de 204 a probablement entre autres buts celui de protéger les affranchis et les clients contre les patrons 13 [LEx, p. 1134] ; la loi Calpurnia de 149 atteint les exactions les gouverneurs de provinces et crée la première quaestio perpetua [Ju 419 TRI Avec les Gracques le tribunat dirigea plus énergiquequernent la lutte du parti démocratique contre l'aristocratie sénatoriale, dans l'intérêt non plus seulement de la plèbe romaine, mais des Latins, des Italiens et des provinciaux. En 133 Tiberius Gracchus fait voter sa loi agraire ; il se proposait de diminuer la durée du service militaire, d'étendre le droit d'appel au peuple, d'enlever au Sénat le droit exclusif de fournir les juges jurés et d'admettre les alliés italiens au droit de cité [AGRARIAE LEGES ; LEX, p. 1163]". La loi agraire n'est plus qu'en seconde ligne dans l'oeuvre et les plans de Gains Gracchus (I23-121); la constitution de l'ordre équestre en un second ordre opposé au Sénat, la substitution au gouvernement sénatorial d'une sorte de monarchie populaire, appuyée à la fois sur la plèbe et sur les Italiens, en sont les traits essentiels. Mesures provisoires de vengeance, interdiction des magistratures à un magistrat déposé par le peuple, et peine de l'exil contre tous ceux qui .avaient fait condamner des citoyens romains au mépris du droit d'appel ; confirmation de ce droit pour l'avenir ; fondation des trois colonies, .I[inervia, i eptunia, Carthage; loi frumentaire; habillement des soldats aux frais du trésor, enrôlement seulement à l'âge de dix-sept ans et diminution du nombre des campagnes nécessaire polir le congé définitif ; élimination des sénateurs des centuries équestres et par suite incompatibilité entre la fonction équestre et le siège sénatorial; projet d'introduire au Sénat 300 ou 600 chevaliers ; obligation pour le Sénat de déterminer les provinces consulaires avant l'élection des consuls; recrutement des juges jurés dans l'ordre équestre et non plus dans l'ordre sénatorial; transformation du tribut fixe de la province d'Asie en une dîme affermée à Rome par adjudication totale, en faveur des publicains ; projet de donner le droit de cité aux Italiens, telles sont les principales réformes de ce précurseur de César, qui pendant deux ans concentre dans sa main et exerce lui-même presque tous les pouvoirs, fait du tribunat une dictature LEGES, p. 658; LEX, p. 1163-1161]. Après la chute des Gracques et la première restauration sénatoriale, le tribunat reste à la tête du parti populaire. En 100 le consul Marius et le préteur Glaucia forment une sorte de triumvirat avec le tribun L. Apuleius Saturninus, dont les lois agraire et frumentaire reprennent les idées essentielles des Gracques LEx, p. 1129-1130]. Le Sénat triomphe encore de cette tentative et abolit ces lois, ainsi que la loi agraire du tribun Sextus Titius en 9916 [AGlltllI : LEGES]. En 91, devant la rivalité de la plèbe romaine et des alliés, du Sénat et des chevaliers, le tribun M. Livius Drusus propose une transaction qui eût donné aux alliés le droit de cité, à la plèbe les colonies antérieurement votées en Campanie et en Sicile et l'augmentation des TRI 420 TRI distributions de blé, au Sénat renforcé de 300 chevaliers LEx, p. 1154]. La cassation de ces lois par le Sénat et l'assassinat de Livius Drusus sont les préliminaires de la guerre Sociale. C'est la loi Plautia Papiria, deA tribuns M. Plautius Silvanus et C. Papirius Carbo, qui, en 89, après la première année de la guerre Sociale, donne le droit de cité à la masse des alliés [soclt, p. 1369]. En 88, avec l'aide de Marius, le tribun P. Sulpicius Rufus reprend la tentative de Drusus, mais cette fois sans se préoccuper de l'ordre équestre et en s'appuyant sur les affranchis : exclusion du Sénat de tous les sénateurs ayant une dette de plus de 2000 deniers, rappel de tous les citoyens bannis en vertu de la lex Varia de rnajestate de 91 2, répartition dans les trente-cinq tribus des nouveaux citoyens et des affranchis, telles sont les lois Sulpiciennes, votées illégalement, puis cassées après l'entrée de l'armée de Sylla à Rome, par le Sénat, en 883. A partir de 88, l'intervention de l'armée dans les querelles politiques relègue le tribunat au second plan, derrière les chefs militaires. Il pouvait cependant encore servir utilement le parti démocratique. Aussi un des points essentiels de la constitution établie par Sylla en 88 et en 81 a été l'abaissement légal du tribunat'. Elle restreint le droit d'intercession dans des limites inconnues, sous la menace d'une amende énorme, équivalente en réalité à l'exil 5, en laissant subsister cependant le droit de prohibition 6 ; elle soumet les plébiscites à l'autorisation préalable du Sénat' et interdit aux tribuns de briguer ensuite d'autres charges, en rétablissant ainsi l'ancienne incompatibilité entre le tribunat et les charges curules, sauf la questure [LES, p. 1137-1141]. Après l'abdication de Sylla, le rétablissement des droits du tribunat est une des premières revendications du parti démocratique. Après les tentatives de Lepidus en 77, pour détruire la constitution de Sylla, des tribuns Cn. Sicinius en 76 et L. Quinctius en 74, Licinius Macer en 73', le Sénat supprime en 73 l'incompatibilité du tribunat et des autres magistratures'. En 70 la loi de Pompée rétablit tous les droits du tribunat 10. Mais le tribunat ne retrouve plus son ancienne importance; les tribuns, souvent du reste divisés selon leurs préférences individuelles, achetés par les deux partis, ne sont plus guère que les instruments des chefs militaires ou de vulgaires agitateurs. En 67 et 66 ce sont les plébiscistes Gabinien et Manilien en faveur de Pompée qui mettent fin en réalité au régime sénatorial fi [LEX, p. 1145-1155]. En 67 le tribun C. Cornelius fait voter malgré ses collègues plusieurs lois, pour réprimer les prêts usuraires dans les provinces, exiger au moins deux cents voix pour le vote de la dispense des lois par le Sénat et obliger les magistrats à juger d'après leur édit l2 [LEx, p. 1121-1142]. Le même esprit inspire la loi Itoscia de 67 en faveur des chevaliers 13 [Lux, p. 1162]. Le tribun Metellus Nepos harcèle Cicéron à la fin de son consulat et en 62 aide César dans sa préture'4. En 58 Clodius représente le type achevé du démagogue ; sa loi frumentaire rend absolument gratuites les distributions de blé; il interdit aux magistrats d'interrompre les comices par l'obnuntiatio, rétablit les associations électorales, dissoutes par le Sénat en 64 [COLLEGIA], diminue encore les pouvoirs de la censure, frappe Cicéron en faisant voter l'exil contre quiconque aurait fait périr un citoyen romain sans jugement, est pendant quelque temps le maître de Rome grâce à l'absence de César et à l'inaction de Pompée' °[LEx, p. 1135-1136]. En 59 c'est le plébiscite Vatinien qui donne pour cinq ans à César le gouvernement de la Gaule et de l'Illyrie 16; et inversement à la fin de 57 c'est le tribun Rutilius Lupus qui propose de casser sa loi agraire. En 55 c'est le tribun Trebonius qui, gagné par le triumvirat, fait donner, malgré l'opposition de ses collègues, à Pompée les Espagnes et l'Afrique, à Crassus la Syrie pour cinq ans 17. César a constamment pour lui des tribuns, en particulier Curio, qui en 52 le font autoriser à se présenter, absent, au consulat 13, qui en 51 et 50 empêchent l'application de la loi de Pompée sur les provinces, qui de 51 à 49 le soutiennent au Sénat dans les discussions relatives à son rappel 13. Naturellement, pendant la dictature de César, les tribuns ne sont que des instruments de sa poli tique 20, sauf P. Cornelius Dolabella qui, jouant au démagogue, essaie de faire voter une remise des dettes et des loyers 21. Iii. i Yom, nombre, élection. A l'époque historique, les tribuns de la plèbe, tribuni plebis 22, aussi plebi ou plebei 23, en grec ôYj.i.1pzo;20, sont au nombre de dix2o, nécessairement plébéiens de naissance ou par la procé dure de la TRANSITlC1 AD PLEBE3I 26, élus dans les comices plébéiens par tribus, qui n'ont jamais été soumis à la patrum auctoritas, et, vraisemblablement depuis l'origine, sous la présidence d'un des tribuns sortants, désigné par accord amiable ou par tirage au sort 2'. Il a pu y avoir à l'origine cooptation, quand le scrutin ne fournissait pas les dix tribuns; mais, d'après la tradition, tin plébiscite Trébonien 28 ordonna de compléter le 1 TRI 421 TRI collège par un second scrutin. En l'absence d'interregnum pour le tribunat, de nombreuses précautions ont été prises pour obtenir et maintenir le collège complet : pénalités du plébiscite Duilien, élection supplémentaire en cas de disparition d'un tribun, dispense d'auspices et suppression de l'intercession pour les élections, brièveté de l'intervalle entre le début et la sortie de charge. On a déjà exposé les conditions générales d'éligibilité, la date de l'élection, la désignation, l'entrée en charge au 10 décembre, la durée, la sortie de charge et la destitution, l'absence de prorogation, le cumul avec des charges spéciales, la place du tribunat dans la série des magistratures et au Sénat sous la République et l'Empire, la responsabilité [1MAGISTRATUS, p. 1331-133i ; SENATUS, p. 1188-1195]. Le collège, quoique souvent mené par un des membres, n'a pas de chef officiel; théoriquement, chaque tribun peut exercer tous les pouvoirs. IV. Pouvoirs. A. Comme magistrats de la plèbe, les tribuns ne sont pas magistrats du peuple romain'. Au lieu de faisceaux et de licteurs, ils n'ont que des scribes [sciunA], des viateurs [vIATOR] et des hérauts [PRAECO, p. 610] ; au lieu de chaise curule le banc, moins élevé, qui peut servir àplusieurs, subsellium (fig. 6680) 2. N'étant pas élus auspicato, ils n'ont pas les auspicia populi Romani 3, sauf peut-être quand ils leur sont prêtés par le préteur pour les comices centuriates; cependant, assistés d'augures, ils ont l'obnuntiatio pour les actes de la plèbe*. Ils n'ont jamais possédé ni' la juridiction civile à Rome 5, ni le commandement, militaire. Leur puissance (potestas) ne repose pas sur une loi (legitima), mais sur les deux traités conclus avec serments et imprécations entre les patriciens et les plébéiens et qui déclarent mis hors la loi, sacer, l'auteur de toute atteinte à la personne d'un tribun ° [sACRATIO CAPITIS] ; à ce titre, elle est et n'a jamais cessé d'être sa1•rosancta 7; elle lui confère une inviolabilité d'un caractère spécial : le tribun ne peut être ni contraint, ni arrêté, ni punis; tous les citoyens doivent se lever, s'écarter devant lui 9. Les tribuns ont comme droits positifs : 1° Le jus agendi cum plebe [cosrrIA, coNTlo]. Ils peuvent réunir la plèbe, lui faire toutes sortes de communications, présider les élections des tribuns et des édiles, sans être contrariés par aucun magistrat. C'est là un droit fondamental 70, issu des traités d'accord ", et dont la violation a entraîné de nombreux procès avec peine de mort ou confiscation des biens selon la gravité de l'atteinte12. Les tribuns ne peuvent sans doute pas légalement interrompre d'autres comices par la réunion de la plèbe. 20 Les droits d'intercession et de prohibition [INTERcEsslo] f3. Communs à tous les magistrats, ils ont probablement été acquis peu à peu par les tribuns qui les ont presque accaparés et en ont fait leur arme principale contre les autres pouvoirs et le Sénat. Il faut distinguer l'intercession et la prohibition, quoique le mot intercedere les désigne souvent à la fois. L'intercession tribunitienne peut s'exercer : 1° Contre toute rogation, rarement devant la plèbe, surtout devant le peuple, en matière électorale ou législative", depuis l'ouverture jusqu'à la fin du scrutin, mais non plus après la proclamation officielle du vote'. 2° Contre tout sénatus-consulte, même proposé par un tribun 1', mais non contre l'auctoritas patrum [INTERCESSIO ; SENATUS, p. 1131; SENATUS-CONSULTUM]. Le tribun peut aussi déclarer qu'il s'opposera à toute décision, tant qu'il n'aura pas obtenu satisfaction, et le Sénat ne peut que voter un blâme contre ce genre d'obstruction 17. 3° Contre tous les actes et décrets des magistrats en toute matière [1NTERCESSto, p. 519]. Il peut alors y avoir cumul de l'appel au peuple et de l'appel au tribun 18. Au début de l'Empire, l'intercession s'applique aussi à la juridiction criminelle du Sénatf9. Elle ne s'exerce jamais que sur un appel (appellatio) de la personne lésée, patricien ou plébéien 20, qui réclame l'auxilium tribunitien 21. Celle-ci peut s'adresser, dans des délais inconnus 22, soit à un seul tribun, soit à tous 23 : il y a lieu alors à un véritable jugement" (cognitio), généralement et même, depuis 56 ap. J.-C. 2', obligatoirement public, oit l'acte attaqué est défendu soit par le magistrat, soit par le défendeur ; le collège, après s'être retiré pour délibérer, rend à la majorité une sentence motivée; une seule voix suffit pour le maintien du veto 26. C'est pour faciliter l'auxilium que les tribuns ont un local spécial au Forum, près de la basilique Porcia etdela Curie Ilostilia, vers la fresque dite tabula Valeria 27, qu'ils doivent laisser leur porte ouverte la nuit, ne pas quitter Rome un jour entier, sauf pour les Fêtes Latines 28. Le droit de prohibition consiste à interdire pour l'avenir soit un acte isolé quelconque, par exemple un triomphe, une ovation, un départ pour l'armée 29, soit tout acte de la compétence d'un magistrat (vetare quicquam agere pro magistratu) 30, soit toute action de tous les magistrats ; ce dernier cas, où il faut généralement l'avis du TRI 422 TRI Sénat, e$t le JUSTITIUM. L'acte frappé d'intercession est légalement nul et la violation de l'intercession expose le magistrat à des poursuites criminelles' ou à la coercition du tribun. Au contraire un magistrat peut passer outre à la prohibition, en s'exposant, il est vrai, à une grave responsabilité après sa sortie de charge ou, immédiatement, à la coercition du tribun, di moins qu'il ne soit protégé par l'intervention d'un collègue', quelquefois par celle d'une Vestale L'intercession et la prohibition ont lieu contre tous les magistrats, sauf contre les dictateurs rarement contre les censeurs. Elles sont quelquefois interdites par des lois spéciales pour certains actes Elles ne s'exercent qu'à Rome et pas au delà du premier mille de Rome'; quand le Sénat adjoint à une députation auprès de généraux des tribuns ou des édiles, c'est probablement pour utiliser leur autorité morale 3° Le droit de coercition. Commun à tous les magistrats, il a eu sa plus énergique expression dans le tribunat pour la protection de la plèbe. Il défend spécialement contre toute injure, insulte, violence, contre toute atteinte à sa personne, à sa dignité, de la part d'un citoyen même patricien ou d'un magistrat, le plébéien, et surtout le tribun'. Il est également appliqué contre toute violation des ordres d'un tribun, contre toute atteinte aux intérêts de la plèbe, contre la négligence des tribuns qui ne font pas élire leurs successeurs, contre la violation par un magistrat du droit d'intercession et du droit d'appel au peuple 9. Les formes et les peines de la coercition ont été exposées à l'art. nAGISTRATUS, p. 1528-1529. Elle n'est limitée, dans son domaine territorial, que par la dictature, qui a disparu de bonne heure, par l'appel au peuple, sauf dans les cas de force majeure et l'intercession de collègues qui annule la prohibition 10 ; la résistance d'un tribun à ses collègues passe alors pour illégale B. Une fois assimilés aux magistrats du peuple romain, tout en continuant à représenter la plèbe et en gardant leurs anciens droits,les tribuns en ontacquis de nouveaux : 1° Le jus edicendi ". 2° La présidence des élections de quelques magistrats et généraux extraordinaires, même de dictateurs f3. 3° Communications au peuple, citation et interrogation devant le peuple de particuliers, d'ambassadeurs, de magistrats, surtout des consuls ". 4° Participation aux hêtes Latines ; introduction, à côté des autres magistrats, dans l'adresse des lettres du Sénat et au Sénat", dans le S. C. ultimum [JUDJCIA PUDLICA, p. 652-6531. 50 Rapports avec le Sénat. Assis pendant longtemps à la porte da Sénat pour en surveiller et, le cas échéant, en casser les décrets 18, ils acquièrent à une date inconnue ", peut-être par la loi hortensia ", le droit d'y entrer, d'y parler, d'y faire une relatio, et par le plébiscite Atinien entre 1252 et 102, dès leur sortie de charge, le jus sententiae dicendae19 [SENATUS, p. 1187]. Mais jusqu'à la fin la convocation du Sénat par les tribuns est extraordinaire ; c'est surtout quand le Sénat veut leur appui 2°, ou aux époques révolutionnaires, comme sous C. Gracchus 21. 6° Compétences spéciales. Les tribuns autorisent à la majorité des voix, à défaut du Sénat, la dédicace de temples ou d'autels 22, sont adjoints au préteur par la loi Aliliel de 186 pour donner des tuteurs°3 [LES, p. 1130], remplacent les magistrats compétents, à la fin de la République, pour la célébration des jeux et les déclarations des citoyens pour les distributions alimentaires 21, aident les grands magistrats à la police de la ville dans les crises politiques et économiques, et les édiles à la lutte contre les incendies, fournissent probablement en vertu d'une loi Visellia un curator viarum 2b. 70 Proposition des plébiscites. Depuis l'assimilation aux lois, par la loi hortensia de 289-286, des plébiscites appelés pour cette raison lois tribunitiennes[PLEBISCITCM, PLEBSI, les tribuns jouent un rôle prépondérant et original dans la législation civile et criminelle, dans l'administration et la politique générale de Rome [LUX, p. 1126-1171]. 8° Juridiction criminelle. Les quaestores parricidii et les duoviri perduellionis judicandae n'avaient eu qu'une juridiction très étroitement limitée et étaient tombés de bonne heure en désuétude. Les tribuns ont donc comblé la lacune qui existait dans l'administration de la justice et ont joué avec une activité infatigable, jusqu'à l'institution des quaesliones perpetuae, le rôle de ministère public 27, sauf à l'égard des meurtres, des infractions de droit commun, sauf aussi contre les femmes et les étrangers, surtout par conséquent en matière politique et contre les magistrats. Ils ont ainsi surveillé la marche régulière de la constitution et l'application des lois. Ils prononcent eux-mêmes les amendes au-dessous du maximum légal, font voter par les comices plébéiens les grosses amendes, soit fixes, soit variables 28, par les comices centuriates la peine capitale [.IUDICIA PUIILICA, p. 648]. Ils provoquent en outre plusieurs fois par des plébiscites la formation de tribunaux spéciaux, de quaestiones 29. Les magistrats TRI 423 TRI accusés pendant leur magistrature se défendent généralement par l'intercession d'un autre tribun ; aussi est-ce généralement après leur sortie de charge qu'ont lieu les poursuites'. Sylla transfère probablement cette juridiction des tribuns à la quaestio majestatis, qui la garde V. Époque impériale. Auguste fait rentrer le tribunat et l'édilité dans la carrière régulière ; mais on ne prend plus que l'une ou l'autre de ces charges 2; elles cessent probablement d'être obligatoires depuis Alexandre Sévère 3; le tribunat figure cependant encore parmi les magistratures au Bas-Empire l ; les tribuns sont peut-être alors nommés par l'empereur 3, mais on ignore leurs fonctions réelles. Pendant le Haut-Empire, les tribuns, nommés, comme les autres magistrats, depuis Tibère, par le Sénat, ont perdu tout pouvoir réel 6. Les derniers plébiscites tribunitiens connus sont de 40 et de 8 av. J.-C. 7 et ont sans doute été soumis par Auguste à l'autorisation du Sénat ; il n'y a plus ensuite que des plébiscites impériaux. Les tribuns gardent cependant le droit de convoquer le Sénat, surtout pour leurs jeux et les élections complémentaires des tribuns d'y exercer la police des séances °, d'y proposer des poursuites contre des magistrats'°, d'exercer l'intercession contre les sénatus-consultes " et contre les actes des magistrats, surtout en matière de procédure civile 'a. En 56 le Sénat leur défend d'usurper en première instance la juridiction les préteurs et des consuls, de juger dans leurs maisons, et soumet leurs amendes, dans les quatre mois, à l'appel des consuls'. Ils ont dirigé pendant quelque temps les jeux des t1ugustalia créés en 14 ap J.-C., participent à la surveillance des sépultures, assistent les consuls pour les exécutions capitales, les préteurs et les édiles pour le tirage au sort des chefs des quatorze régions de [-tome t`, et sont probablement appelés à examiner les engagements de citoyens romains comme gladiateurs'. p, 1h43]. VIL Puissance tribunitienne des empereurs [PRINCI TIt1BUNUS FORI SUA R11, FOR! VINARII. -'Ce mot désigne, au Bas-Empire, les deux inspecteurs du marché aux porcs et du marché aux vins, qui relèvent du Préfet de Rome' [PRAEFEC US URBI, p. 67.2]. Cu. L.