Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

Article TURIBULUM

TURIBULUM euutarr'lptov . Brûle-parfums. Le mot dont les Grecs se servaient le plus souvent pour qualifier les vases dans lesquels ils faisaient brûler les parfums offerts aux dieux est celui de Ouu.txzsistsv', dérivé du verbe Ouutzv, encenser. Cependant d'autres termes à peu près synonymes étaient aussi employés à l'occasion, par exemple celui de ),exvorriç 2 ou ),texvt,rtp(ç qui désignait un vase destiné spécialement à recevoir de l'encens TLS , ),(";vo;, et celui d :cyxox, icyrst' ou ieyxcwv4, qui désignait un objet en forme de petit autel ou de réchaud. Les ttuu.txt-ilstx étaient faits soit en terre cuite, soit en métal; quelques-uns, entièrement en argents, ou tout au moins eu bronzç recouvert d'argent plaqués, étaient de véritables oeuvres d'art; on les conservait avec soin dans les trésors des temples, à Athènes', au Pirée 8, à Delphes 2, à Épidaure", à Smyrne ", au mont Éryx 72, à Ostie 13. Les comptes et inventaires de Délos mentionnent, à maintes reprises, des brûle-parfums consacrés à Apollon 14 ; l'un d'eux, plusieurs fois cité, avait été donné au dieu par une certaine Boulomaga, de naissance barbare. Une ville de Libye s'appelait UulAtxtiiptcvsans doute à cause de quelque particularité de sa disposition topographique, qui faisait penser plus ou moins justement à la forme des vases de ce nom. Chez les Romains le mot Oup.txti~ptov était traduit par turibulumz's, tiré de TUS, et le mot ic/zpx par ACERRA. Des porteurs de brûle-parfums et d'encensoirs figuraient dans les processions f7. Cicéron parle de turibula, richement décorés de reliefs, dont Verrès s'empara en Sicile'. Une constellation céleste avait reçu, par métaphore, l'appellation de turibulum10. Les brûle-parfums des anciens présentaient diverses formes, dont nous pouvons juger par les spécimens que possèdent nos musées d'antiquités et par les images que nous ont conservées les monuments figurés, reliefs, peintures murales,vases peints,rnonnaies etpierres gravées20. Il est inutile d'insister sur les petits autels portatifs dont il a été question aux articles ARA (p. 348 et fig. 414 et 415), AcrDUA (p. 22), FUCUS (p. 1195), SACHI ICIUSI (p. 978)". Mais il importe de constater que, contrairement à une opinion assez répandue 22, les anciens ont connu l'encensoir, au sens moderne du mot : les chrétiens n'ont pas été les premiers à se servir de coffrets suspendus à une chaînette ou à un cordon, qu'on balance devant les autels pour répandre dans l'air l'odeur du parfum -quel qu'il soit en combustion. L'emploi de l'encensoir, ainsi entendu, est de beaucoup antérieur à l'introduc tion de l'encens lui-même en Occident. On a découvert à Troie et à Tirynthe des vases dont les anses percées de trous attestent qu'ils étaient destinés à être suspendus 23; des objets analogues ont été trouvés dans les terramares de l'Italie septentrionale 2i. Ce sont vraiment des a encensoirs » que ces récipients, formés de deux calottes hémisphériques s'ajustant l'une sur l'autre, qu'on a recueillis en Étrurie à Corneto, sur le territoire falisque à Montarano et à Narce, en Picenum à Novilara et surtout dans les nécropoles de Felsina (Bologne) 25. Décorés au marteau de zones superposées de petites boules en relief, que séparent des lignes concentriques, ils reposent sur un pied assez large, sont percés au sommet d'une étroite ouverture circulaire et munis sur les côtés d'anses ou de crochets, auxquels s'attache une pièce de métal" (fig. 7474) ; ils étaient évidemment faits pour recevoir des parfums ; Bologne paraît TUR -543TUR avoir été, aux derniers temps de la civilisation dite de Villanova, le principal centre de leur fabrication, mais c'est d'Orient, par l'intermédiaire de l'Étrurie, qu'en venaient sans doute l'idée première et l'usage. Aux époques ultérieures les vases de ce type n'avaient pas complètement disparu ; on petit voir encore, dans une peinture de Pompéi, l'image d'un turibululn assezsetn blable aux encensoirs des modernes', et le Musée de Naples, entre autres, possède un brûleparfums circulaire, à couvercle mobile, pourvu d'une chaîne qui permettait de le balancer2 (fig. 71.70. C'est aussi d'Orient qu'était originaire la forme classique, toute différente, des buta. On la rencontre, dès les temps les plus reculés, en Égypte, en Assyrie, en Phénicie, à Chypre, en Étrurie 3. En Grèce la cassolette à encens revêt d'abord des formes assez fantaisistes; elle est, par exemple, supportée par un attelage de deux chevaux, sur lequel une femme voilée, assise, soutient de ses mains levées le récipient(fig. 7176) °. Mais, de bonne heure, dans le monde grec, on voit se constituer une forme plus régulière qui apparaît d'abord en Ionie, à Clazomène, sur des vases à figures noires du vie siècle 5, puis au ve siècle, sur l'un des bas-reliefs latéraux du prétendu « trône Lu dovisi » « fig. 7177), sur l'un des panneaux de la frise orientale du Parthénon 7 et sur des vases peints attiques à figures rouges 3, Le Oui.txTŸiptov consiste essentiellement, à cette époque, en un fût cylindrique, élancé et uni, reposant sur un pied circulaire, plus ou moins large, et surmonté d'un vase à couvercle conique percé de trous 9 (fig. 7178). Le parfum brûlait dans le vase et la fumée odorante se dégageait par les trous du couvercle; un pareil objet ressemblait moins à nos encensoirs qu'à un can délabre [CAN qui le distinguait de celui-ci, c'était la présence du couvercle perforé 10. Le musée national d'Athènes possède un Oup.ta-rs(ptov de ce modèle, en terre cuite, trouvé à Érétrie et parfaitement conservé ; il ne mesure pas plus de 17 cm. de hauteur " (fig. 7179). Par assimilation on peut penser que certains beaux meubles étrusques, richement ouvragés et ciselés, (lui passent pour des pieds de candélabres, ont pu porter à la, partie supérieure un récipient à encens (fig. 7180) t2. Dans la suite, les Ouiutstr,pta et turibula des Grecs et des Romains se sont peu àpeu modifiés et compliqués, comme les candélabres eux-mêmes 13: ceux que représentent les vases attiques de la fin du ve siècle et du Ive, les vases apuliens et les terrescuites Campana, les sculptures héllénistiques et romaines, les peintures pompéiennes, les poteries sigillées de Germanie, etc., ont un fût surchargé d'ornements et, au lieu d'un pied circulaire unique, un soubassement triangulaire ou quadrangulaire supporté par trois ou quatre pieds 14. On peut citer, comme exemple de ce que devient le 0,.i Œ1 ptov à partir du ne siècle avant J.-C., un fragment de la draperie de Lycosoura 1°. Au terme de cette évolution, nous trouvons des récipients qui ne rappellent plus que de très loin le type primitif: tels sont entre autres ces Ouµto:'r' ix de terre cuite d'Olbia, au British Museum et au musée de l'Ermitage, qui affectent TUB TUB l'aspect d'une construction circulaire à deux étages ; le sommet sert de couvercle ; l'étage supérieur renfermait les aromates, et à l'étage inférieur, séparé du premier par une cloison percée de trous pour laisser passer la flamme, se consumaient les charbons allumés fig. 7181). On connaît aussi, de Syrie, pour l'époque de la basse antiquité romaine, des brûle-parfums qui reproduisent, d'une façon fort instructive pour nous, des édicules à colonnettes et à coupole (percée de trous pour laisser passer la fumée odoriférante), véritables copies d'édifices qui ont disparu (fig. 71821 D'autre part on a reconnu récemment, dans de longs tubes en terre cuite jaunâtre de la région du Rhin, d'une techni que et d'une ornementation grossières, des supports de brûle-parfums; à la partie supérieure du tube devait s'encastrer le vase où brûlait l'encens ; la forme des Ouptx ',ptx du ve siècle avant notre ère s'était donc fidèlement conservée en Germanie jusqu'à la fin de l'antiquité'. La question s'est posée de savoir si quelques vases d'une forme très particulière n'étaient pas en réalité des brûle-parfums, employés dans certains cas ou à certaines époques aux lieu et place des 9up.txii,ptx classiques. Pen est ainsi, notamment, pour les kernoi ou kerclanoi de terre cuite, percés d'ouvertures latérales, qui servaient d'accessoires dans les cérémonies relatives au culte et aux mystères des divinités éleusiniennes et qui étaient destinés à jouer le rôle, selon les uns de vases à parfums, selon les autres, et plus vraisembablement, de vases d'éclairage [IXERNOS]. 11 en est de même encore pour ces vases circulaires de terre cuite à bords relevés qu'on appelle communément kûtiténs [côTnôN, p. 1345 et fig. 2024]; en général on y voit des vases à boire; M. Pernice le conteste': ils sont beaucoup plus anciens que les textes mentionnant les véritables kôthôns ; ils ont exactement la même disposition et les mêmes proportions que la partie supé rieure d'un petit trépied de fer et de bronze de l'Antiquarium de Vienne, dont l'emploi comme brûle-parfums ne fait pas de doute (dans le bas, en fer, pour mieux supporter de hautes températures, on plaçait les charbons ; dans le haut, en bronze, les parfums: fig. 7183) 6 ; les plus anciens Ouutxzsptx de l'Attique, avant l'invention de ceux qu'on voit représentés sur le « trône Ludovisi n et sur le Parthénon, et qui venaient très probablement d'Ionie', devaient être, d'après M. Pernice, soit des trépieds de bronze ou de terre cuite identiques à celui de Vienne. soit de ces vases de terre cuite auxquels on a coutume de donner le nom impropre de kôthôns. MM. Burrows et Ure, qui ont trouvé à Rhitsona en Béotie, plus d'une centaine de prétendus kôthôns, ne croient pas que ces objets aient toujours et nécessairement servi à un seul usage : quelques-uns ont pu être employés, ainsi que le suppose M. Pernice, comme encensoirs, d'autres même comme vases à boire; mais la plupart leur semblent être tout simplement des lampes à mèche centrale 3. MAURICE BESNIEn. Tciui. . Division de la cavalerie romaine. Les eguites légionnaires, à l'époque républicaine, étaient répartis en dix turmes de trente hommes chacune, commandée par un des trois décurions de la turme. A la fin de l'Empire on trouve encore des turmes dans la cavalerie légionnaire [EQUITES].La cavalerie des alliés était pareillement divisée en turmes, cinq pour chaque aile EQlil l'ES]. Sous l'Empire les ailes de cavalerie auxiliaire se composaient,suivantqu'elles étaient composées de mille hommes ou de cinq cents, de seize turmes ou de vingt-quatre [ALA]. Les prétoriens [PRAETOIIIAE COHORTES] et les EQUlTFS SINCULARES étaient également groupés en turmes. Tout ceci a été expliqué aux articles cités. R. CAGNAT. fortification gréco-romaine, permanente et passagère, TUR 55 TUR utilise la tour comme procédé ordinaire de flanquement, d'abord aux points faibles, aux portes' et aux saillants 2, ensuite sur toute l'étendue du mur 3. Les tours paraissent aux anciens préférables aux mouvements du tracé bastionné : outre le flanquement elles assurent une situation dominante et des vues lointaines 4. Elles peuvent enfin isoler les éléments de courtine qu'elles encadrent et localiser l'avantage de l'ennemi qui se serait rendu maître d'une partie de l'enceinte Elles trouvent place dans les tracés curvilignes de Philon s et de Végèce comme dans le tracé rectiligne de Vitruve' : ici elles se répartissent sur les fronts droits de la muraille à une distance (uETm7épytov)fixée par la portée du trait et telle que le pied de chacune puisse être battu des deux voisines'. Dans la fortification prémycénienne la tour flanquante apparaît sous deux formes: 1° De larges terrasses, dépassant en plan et peut-être en élévation la courtine, recouvrent et protègent les couloirs d'accès aux portes d'Hissarlik Ill l0 ; 2° Des bastions, fortement talutés, de la même construction que la courtine (socle de pierres et mur de briques) ", occupent les angles des enceintes d'Ilissarlik 12 et d'llissarlik 1I2 13. D'autres, élevés sur un socle vertical et de dimensions identiques, flanquent, à des intervalles de 6 m. 50, le mur d'Hissarlik1I314 La tour garde dans l'architecture mycénienne l'aspect d'un bastion, particulièrement aux pylônes13. Un contrefort, soigneusement appareillé, d'un front de 7 m. 90 et dépassant de 12 m. 10 la volée du mur, couvre la porte des Lions à la droite de l'assaillant, c'est-à-dire sur son côté nu18. Mais déjà l'acropole de Tirynthe projette vers le S.-0. un ouvrage rectangulaire renfermant Ix. deux chambres et conservant les traces du plancher d'un second étage 17. Des plaquettes de faïence découvertes à Cnossos donnent une idée de la superstructure des tours cré toises, sans créneaux, renforcées de poutres vertim cales, percées ; parfois d'une porte de plain-pied 73, telles à peu près qu'on les retrouve sur un vase d'argent de Mycènes (fig. 5181)19 Enfin la sixième couche d'Ilissarlik a livré le plan de trois tours adaptées postérieurement au mur20. Assises sur le roc, la première21 flanque une entrée,ladeuxième(Ii, fig. 7184) 22 une courtine, la troisième 23, à l'angle N.-E., laisse passage à une poterne et contient un puits. La tour h, large de 11 m.25, porte, à 8 m. 65 en avant de l'enceinte, un mur de front très épais; une chambre inférieure, accessible par une échelle, s'étend jusqu'au côté extérieur de la courtine, que chevauche la chambre supérieure. Le profil de la tour g dessine savamment une ligne deux fois brisée. En dehors des pylônes, les architectes d'Ilissarlik VI24 surent construire de vraies tours flanquantes, dont l'épopée homérique semble n'avoir pas perdu tout souvenir 26 69 TUR 546 TUR De la chute des royautés achéennes à la fin du ve siècle, l'emploi de la tour se régularise : ronde ou carrée', à cheval sur le mur, elle ne se confond plus avec lui 2 ; mais on ne lui donne pas toujours son effet. Le dispositif du mur des Lélèges (vie siècle) dont les tours demi-circulaires présentent à hauteur d'homme cinq fenêtres et, contiguës au mur, deux poternes de sortie, reste exceptionnel [suNITIo, fig. 5162]. Les tours de Megara-Ilyblaea rappellent par la forme les tours d'Iasos 4; mais elles sont rares et parfois mal placées. La muraille des acropoles se défend par son assiette et sa masse °; les tours renforcent les points accessibles ' et les portes 8. Elles sont distribuées plus régulièrement autour de l'enceinte du Pirée'. Le progrès apparaît mieux dans la construction. Les tours bâties tout entières en appareil polygonal sont rares". Dans les enceintes acarnaniennes du ve siècle", tandis que les métapyrgies admettent encore une technique polygonale, les tours, contemporaines f2, sont, construites en assises horizontales ; à hauteur d'étage se relève une corniche décorativel3. En Locride, en Étolie, tandis que les assises des courtines montrent encore des joints obliques et des décrochements, les tours sont d'un appareil qui ne se distingue plus guère de l'appareil quadrangulaire des tours de l'Italie méridionale 1i. De même dans les acropoles étrusques, qui se munissent de tours au début du Ive siècle ". Les quatorze tours, carrées et demi-circulaires, inégalement distantes, qui font saillie au dehors et en dedans du mur polygonal de Cosa1G, montrent un appareil presque régulier. Les deux tours de la porte N. de Pérouse" associent habilement deux techniques : à la partie inférieure le talutage est obtenu par le retrait régulier des assises, ensuite par l'inclinaison d'une paroi unie. L'enceinte de Falerii Novi (nie siècle) " est flanquée de cinquante tours carrées, à des intervalles d'une trentaine de mètres. Mais ni le nombre ni la disposition régulière de ces tours ne doivent être considérés comme des caractères de la fortification italique"Au cours du Ive siècle les engins de siège furent importés d'Orient en Grèce 20 [TORMENTA;. Dès lors la portée des machines permettait de répartir les tours sans les multiplier excessivement sur toute la longueur du mur21. Les enceintes de Mantinée°° et de Messène23 présentent des métapyrgies de 25 et de 100 mètres d'étendue moyenne. En même temps le principe, imaginé par la poliorcétique grecque, d'une défense offensive et mobile" donna aux tours une importance nouvelle, puisqu'elles facilitaient l'établissement des poternes 25 et des réduits avancés. A Mantinée (fig. 5762) de très nombreuses tours portent au flanc droit, pour qui regarde la campagne, d'étroites ouvertures qui permettent aux défenseurs de se défiler sous la protection de la courtine, sans offrir le côté découvert26. Au front nord de l'enceinte de Sélinonte s'adosse un système triangulaire, dont les trois pointes sont pourvues de tours demi-rondes; la tour centrale, reliée au rempart par une galerie de 15 mètres, est assise sur un bastion isolé par une tranchée circulaire. Les trois tours, qui se couvrent mutuellement en croisant leur tir, peuvent battre un rayon de 400 mètres ". La construction se perfectionne. Sur le roc même 29 repose le socle, qui supporte le mur de pierres ou de briques crues2°. Carrées, rondes ou demi-circulaires", parfois pleines jusqu'à la courtine31, s'élevant à Pergame en forme d'escalier3', elles sont de dimensions +ri'. â i 1.1 TUR très inégales ', suivant les enceintes et leur emplacement'. Les assises sont de pierres régulières bien appareillées, souvent bombées extérieurement (rustico) A Mégalopolis l'espace de la chambre inférieure est pris s u r l'épaisseur du mur 4. Pour éviter cet incon vénient, les tours de Priène, de Démétrias, de Sélinonte sont simple ment appliquées au rempart 5. Mais elles ne sont plus assez soutenues. D'où le dispositif de la tour sans poterne de Mantinée : le rempart reste intact ; il est traversé d'un couloir d'accès à la chambre inférieure, dont le front saillant a une épaisseur triple de la ligne extérieure de la courtine, et qui contient seulement l'escalier de bois menant aux chambres supérieures et à la terrasse, qui s'étendent au-dessus du chemin de ronde. Le rempart n'est pas affaibli ; si la tour s'effondre, les débris obstruent le couloir ; enfin le chemin de ronde est barré par les tours qu'il traverse au moyen de petites portes faciles à défendre(fig. 7185' G. La tour grecque atteint à Messène (370 av. J.-C.) son type classique (fig. 5761, 5766). Carrée, assise sur le mur, elle est àun ou deux étages. La plate-forme, munie de créneaux, s'abaisse vers l'intérieur. Le premier étage est percé de meurtrières ogivales; le second, de larges fenêtres, que ferment des volets. A la hauteur du chemin de ronde s'ouvrent deux portes trapézoidales surmontées d'un linteau (fig. 7186) 7. Ainsi constituée, la tour, défense et ornements de la ville, prend une sorte de personnalité ; elle porte un nom s, qui, à Téos, désigne administrativement les quartiers attenants 1U. 547 TUR La tour passe en Italie avec les autres procédés de la fortification grecque. Mais l'emploi de la voûte lui donne plus de solidité. Ainsi les tours carrées à trois étages, distribuées le long de l'enceinte elliptique de Pompéi suivant les besoins de la défense 11, reproduisent les caractères essentiels des tours de Messène seulement les casemates des deux premières chambres et les portes sur le chemin de ronde sont voûtées en plein cintre 12 Entre les guerres civiles et les invasions barbares la fortification romaine ne s'applique guère qu'au limes 13 ; les murs d'arrêt sont flanqués de tours soigneusement appareillées 14; les camps permanentsfcASTELLUDI, CASTRA,, le plus souvent rectangulaires et arrondis aux angles, renforcent leurs quatre portes et, sur les points dangereux, leurs fronts 17 au moyen de tours généralement carrées, mais rondes aussi (fig. 1223, 5168, 5169), octogonales et à pans coupés16, de dimensions très différentes (fig. 5767). Les tours du camp de Wiesbaden ont aux portes 1 m. 88 et 1 m. 57 de côté, aux angles 5 mètres de front et 2 m. 50 de flanc, sur les courtines 2 m. 50 de côté i i; le camp de Gamzigrad montre à ses quatre sommets des tours rondes de 54 mètres de diamètre18. Ces tours font souvent saillie à l'intérieur, notamment à Lambèse 1°. Les Romains attachaient peu d'importance au flanquement des cas/ella ; la tour devait ménager une position dominante aux machines de jet, pour lesquelles il eût fallu élever des terrassements, dont les talus forcément très développés auraient occupé trop de place. L'influence de cette manière se marque sur les rares enceintes qui s'édifient pendant cette période à l'intérieur de l'Empire : le mur rectangulaire d'Aoste (teP siècle ap. J.-C.) est muni de tours espacées de 170 m. sur les grands côtés, de 130 in. sur les petits, et qui ne dépassent pas le niveau des courtines : vrais bastions de 4 m. 50 de saillie, oit l'on accède par le chemin de ronde et par des escaliers mobiles20. Au contraire, dans les enceintes construites à partir du milieu du lue siècle sous la menace des invasions V1, la tour, parfois ajoutée après coup à une courtine élevée en hâte22, montre une technique très sûre. Des tours quadrangulaires, dressant leur mur de briques sur un massif de blocage, flanquent à des intervalles de 28 m. 50 à 29 m. 50 le mur d'Aurélien 23 (DicNITlo, fig. 5171]. Au rez-de-chaussée une pièce rectangulaire voûtée, oit l'on accède par le chemin de ronde interne qui les traverse, présente deux embrasures sur la ville, TUR ri!f.8 TUR deux meurtrières vers lacampagne(fig.5172). Un escalier, muni de meurtrières, mène à la chambre supérieure, où s'ouvrent latéralement deux passages, pli descendent à la plate-forme supérieure des courtines, et deux meurtrières ; sur le front trois autres meurtrières; vers la ville, deux ouvertures. La toiture plate est soutenue par des corbeaux de travertin. Les tours sont étroitement liées aux courtines, dont elles possèdent tous les éléments défensifs, sauf le parapet crénelé. Dans les enceintes gallo-romaines le nombre des tours, rondes pour la plupart' et de dimensions inégales, est très variable : elles s'espacent de 226 mètres à Cologne et d'une centaine de mètres à Sens, de 25 mètres à Poitiers et au Mans Elles sont bâties sur un massif, où l'on trouve souvent, comme dans les courtines, des fragments architectoniques, épigraphiques et sculpturaux, qui peut-être consacrèrent le murs. Évidées à la hauteur du premier étage, elles sont percées d'une ouverture centrale et de deux latérales. Elles comportent généralement un second étage "'. Certaines, d'un diamètre plus petit, sont pleines: elles s'arrêtaient sans doute à la hauteur du chemin de rondes. L'enceinte de Nîmes comprend des tours à gorge ouverte, d'autres qui ne communiquent pas avec le chemin de ronde et constituent des sortes de forts indépendants'. La plate-forme est crénelée comme la muraille 8, mais les tours rondes ont pu recevoir des toits coniques'. A Fréjus une petite tour se termine par une pyramide hexagonale à pans coupés 10. Une tour surmonte la porte même de Trajanopolis 71. Le flanquement est parfois complété par des tours supplémentaires de bois, qu'on élevait en hâte entre les tours de pierre trop distantes12, et par de petits ouvrages en encorbellement placés à la hauteur du chemin de ronde, les premiers types de l'échauguette 13. La tour byzantine, en Orient et en Afrique, conserve et perfectionne les procédés de la technique romaine is La fortification passagère n'ignore pas l'emploi de la tour flanquante. Au siège de Platées les deux remparts de gazon (7rn(vlot, antv9(z), distants de 16 pieds, qui constituent la ligne de circonvallation, sont réunis de 10 en 10 créneaux par de larges tours i5 Dans le camp romain [CASTRA] des tours plus hautes que les remparts16 encadrent les quatre portes et flanquent le retranchement (fig. 1217). Elles sont de bois, à plusieurs étages, parfois reliées entre elles par des planchers, où se tiennent les défenseurs, couverts du côté de l'ennemi par des clayonnages 11. La ligne de circonvallation devant Alise est renforcée au moyen de tours distantes de 80 pieds'° ; les tours du camp de Cicéron s'espacent tous les 611 pieds". Le côté sud des lignes de Numance2D montre sur un front de 300 mètres 8 tours, dont quelques-unes atteignent 13 mètres de largeur et étaient évidemment destinées à porter des batteries de cinq à sept machines de jet. II. Tours isolées. Pour compléter le système permanent de défense, on construisait aussi des tours isolées (,t syot, V,ovcttto'tot, cp côpta, aro7x(, trères, speculae) 21 Il yen avait à l'intérieur de certaines places fortes, où elles servaient de réduits". Dans les forteresses importantes, le donjon se composait de plusieurs tours, que reliait une courtine ; à l'Euryélos de Syracuse, il comprenait cinq tours, aménagées pour batteries de catapultes23. Dans les caste/la des frontières romaines, il est constitué par une tour intérieure, à la fois poste de vigie, corps de garde et refuge2' On disposait des tours isolées aux abords des places, pour en sur veiller l'accès, pour garder des points stratégiques, pour observer et transmettre des signaux 2. Elles se dressaient à proximité des portes, comme la tour circulaire de la forteresse phrygienne de Pichmich Kalé2t, ou bien au bord des routes 27, comme le prétendu temple de Janus à Autun, qui est une tour carrée (fig. 7187) [PnoeuGNAcuLunf], ou encore sur des hauteurs dominant la cité, comme le pltrourionvoisin d'Alinda, en Carie28. Quelques-unes de ces tours furent plus lard réunies par des murailles à l'enceinte agrandie des villes : telles à Pergame une tour de la porte sud29 et à Nîmes la Tour Magne30. D'autres protégeaient des sources alimentant l'agglomération urbaine" : telles une tour ronde au pied de l'oppidum des Convènes32, et la tour de l'Aieadibeque à trois kilomètres de Conimbriga (Portugal) 33 Dans les cités maritimes, des tours défendaient l'entrée Tilt -519 TUR des ports'; on les utilisait en même temps comme Enfin des tours isolées, loin des centres d'habitation, contribuaient à la défense des territoiresOn trouve fréquemment des ruines de tours en pisé, ou en pierres sèches, sur les hauteurs d'Afrique et d'Espagne' ; elles sont antérieures à la domination romaine. Les nouraghe de Sardaigne, les tala yot des Iles Baléares, les truddi de l'Italie méridionale semblent appartenir à un système défensif qui remonte à l'âge du bronze (fig. 7188) 3. Il y avait des postes optiques dans la Gaule celtique'. Sur les côtes grecques, en particulier dans les îles', subsistent de nombreuses tours-phares, qui ont été des refuges contre les pirates. Aux frontières des cités grecques, la défense naturelle se complétait de tours, abritant une petite garnison ou un poste de guetteurs' ; on retrouve nettement ces dispositions sur les territoires d'Athènes, de Mégare, d'Argos, de Sicyone, de Mantinée 7. Les Romains ont appliqué ces mêmes principes sur les frontières de leur empire. Des séries de tours isolées, établies sur la ligne même du limes ou dans son voisinage immédiat, servaient de liaison entre les camps permanents, caste/la murata [LJMEs]e. On y laissait des postes, qui avaient pour mission de surveiller les mouvements de l'ennemi et qui correspondaient avec les camps au moyen de signaux de feu [siGNGM, fig. 6454] 9. Aux points les plus importants, par exemple au débouché des cols 10, ces tours constituaient de véritables fortins". D'autres, plus petites, près des chemins traversant le rempart, abritaient seulement des gardes-barrières12. Sur le limes d'Afrique, où l'on multiplia les tours à signaux fia, elles sont très souvent par groupes de trois il. En Germanie, on en rencontre aussi le long des principales routes stratégiques; leur distance varie de 100 à `?500 mètres15. Quand les frontières de l'Empire furent gravement menacées, les empereurs augmentèrent le nombre de ces tours isolées". Constance, Julien, Valentinien en firent élever toute une série nouvelle aux frontières des Gaules, sur des monticules naturels ou factices. Ces mottes militaires sont l'origine des donjons féodaux. Beaucoup de stations romaines portent le nom de Turris, avec ou sans épithète topique 1". Ce vocable reparaît surtout en Espagne, en Sardaigne, en Afrique où il est plus particulièrement fréquent au bord de la mer et sur les limites du désert. Il indique la présence d'une de ces tours isolées, devenue le centre d'une petite agglomération. Ces tours sont construites tantôt sur plan carré, tantôt sur plan circulaire. Les tours rondes sont plus communes dans les îles grecquest9 et sur le limes romain d'Afrique20, les tours carrées sur le limes de Germanie et sur celui du Danube 21. Bâties de façon à braver les surprises et à opposer une résistance passive'', percées de meurtrières et crénelées, elles dressaient leurs étages de pierre de taille 23, de maçonnerie, de brique, de terre ou de boise'", sur de forts soubassements en pierre. Quand le soubassement ne forme pas un socle massif, il renferme une salle voûtée, TUR citerne ou cave à provisions: celle-ci communique avec l'étage supérieur par un simple oculus et quelquefois avec le dehors par une poterne basse, munie de défenses intérieures'. On n'accède en général au premier étage que par une échelle ou un engin à poulie. A la tour d'Andros, qui est le plus intéressant spécimen de cette architecture dans la Grèce du Ive siècle, la porte s'ouvre à 5 m. 60 au-dessus du sol (fig. 7189) 2. Certaines tours sont accompagnées d'une cour fortifiée; à Ténos, cette cour mesure 25 mètres de longueur (fig. 7190) 3. Aux tours isolées il fautrattacher les tombeaux en forme de tours SEPULCHUM, p. 1233, 1239]'. On en connaît des exemples en Perse, en Phénicie', en Syrie', en Phrygie, en Lycie', en Étrurie', à home '°, en Sicile 11, dans l'Afrique du Nord 12. A Nîmes, la Tour Magne fut peut-être un mausolée avant de se transformer en poste d'observation. Le type de certains monuments funéraires semble imité des tours de guet, surtout en Lycie, où la division par clans avait multiplié ces tours ; la chambre funéraire y remplaçait, au sommet, la cellule des guetteurs. Près des villes, en cas de guerre, les tourstombeaux pouvaient contribuer à la défense13. Aussi Philon de Byzance recommandait-il de construire en forme de tours les tombeaux des grands hommes et les polyandres des guerriers morts pour la patrie : « de telle sorte, tout en leur donnant une sépulture honorable, on renforcera la ville »'~. Enfin il est vraisemblable que les tours-trophées, comme celle de la Turbie, pouvaient être aménagées en postes d'observation 1' TROPAEIM, fig 7122]. Dans la fortification passagère, la tour isolée ne joue pas un rôle moins important que dans la fortification permanente". Généralement en bois ou en terre, elle surveille et défend des points stratégiques, des gués, des ponts. Nicias" et plus tard Himilcon 13 bâtirent de véritables phrouria devant Syracuse. César, quand il voulait assurer la possession d'une bonne ligne de défense, faisait construire aussitôt des tours et des redoutes sur les positions enlevées à l'ennemi 'y. Sur le Rhin, après avoir coupé la partie du pont qui touche à la rive ubienne, il fortifie l'autre extrémité par une tour à 4 étages30 Valens et Caecina, après avoir établi sur le Pô un pont de bateaux, le ferment par une tour garnie de machines ; sur la rive opposée, les Othoniens dressent une tour, d'où ils lancent pierres et torches sur le pont". Des tours mobiles, turres ambulatoriae22, faisaient partie du matériel de siège [OPPUGNATIO, TORMENTA]. Elles passaient pour être une invention des ingénieurs de Denys le Tyran ou de ceux de Philippe de Macédoine 23 Le type en fut fixé, ce semble, par un ingénieur d'Alexandre le Grand, Diadès, qui perfectionna la poliorcétique macédonienne24. C'est d'après les écrits de Diadès que Vitruve nous en donne la théorie. Faite avec des pièces de bois22, la tour est à base carrée et s'amincit vers le haut'', ce qui en favorise la stabilité. Elle se subdivise en étages, tabulata21, que constituent des galeries de pourtour munies de meurtrières et reliées par des escaliers ou des échelles. Le centre reste libre, pour permettre de monter les projectiles. La surface extérieure est recouverte de peaux fraîches, qui protègent le bois contre les torches enflammées; de plus, à chaque étage, une réserve d'eau permet d'éteindre l'incendie. Grâce aux roues placées entre les longues traverses de la base, des hommes ou des boeufs peuvent traîner ces tours d'attaque". On les approche assez près des murs d'enceinte "o, Car non seulement des machines de jet sont disposées sur les galeries; mais l'étage inférieur renferme souvent un bélier 30, tandis que les étages supérieurs sont munis de ponts volants, sambucae, qui peuvent s'abattre sur la muraille pour un assaut 33 Quant aux dimensions des tours ambulantes, elles sont très exactement déterminées par Diadès et Vitruve 32. Il y a des tours à 10 et des tours à 20 étages 33. La hauteur des premières est de 60 coudées (29 m. 50), et leur largeur à la base est de 17 coudées. Pour les secondes, on double la hauteur (120 coudées, 59 mètres) et seulement la surface de la base (ce qui donne 23 coudées et demie environ de côté). Une troisième catégorie de tours TUR 551 TUR est celle des hélépoles ou preneuses de villes t. Leur masse dépasse encore celle des précédentes. Mais on édifiait aussi des tours plus petites; Josèphe en signale une dont la hauteur atteignait seulement 50 pieds (1m. 80)2, En Orient, on faisait porter par les éléphants de guerre des tourelles de bois, où se dissimulaient des soldats [ELEPFAS, fig. 262313. Dans les armées d'Antiochus III de Syrie, les bataillons d'infanterie étaient séparés par deux éléphants tourelés; chaque tour renfermait quatre combattants r. Sur une terre-cuite de Pompéi, la tour est quadrangulaire, crénelée et percée de fenêtres'. III. Tours de navires. Tourelles eu bois, élevées sur le pont (constratum) des navires de guerre, et d'où les classiarii attaquent l'ennemi. Voir NAVIS. IV. Tours de maisons.La tour est souvent aussi un élément de la maison antique. Elle sert de belvédère, en même temps qu'elle contribue à la décoration architecturale de l'édifice. Mais elle peut devenir un poste de vigie et un refuge. Telle fut même, vraisemblablement, sa destination primitive; la tour d'habitation dériverait de la tour-forteresse '. Déjà dans les villes d'Orient elle apparaît à la fois comme tour de défense et comme tour d'agrément. Du toit plat des maisons assyriochaldéennes 7, des maisons égyptiennes', s'élance une tour-belvédère. La tradition s'en était particulièrement répandue dans les pays de plaines. Néanmoins elle passa en Crète et dans la Grèce mycénienne ; sur une série de plaquettes en faïence, trouvées à Knossos, on voit des habitations qui s'exhaussent en forme de tours9. Il y a des maisons pourvues de tours dans la Grèce classique 10 ; et parfois la tour dominatrice donne son nom, rupyo;,àlamaison tout entière". On utilisait les étages de ces tours en y logeant des esclaves12. Les Romains ont emprunté ce type de construction à la Grèce et à l'Orient. Il paraît s'être propagé dès la fin de la République13. Des tours s'élevèrent à l'intérieur des villes, pour que la vue pût s'étendre sur la campagne environnante. A Rome on en citait de célèbres : la terris !Ilaecenatiana dans les jardins de Mécène, sur l'Esquilin li, la terris Momifia dans la région de Subure4°. Mais c'est surtout dans les domaines ruraux que la tour a pris une importance considérable. Tantôt elle se dresse isolément dans un parc, sur un tertre, sur un promontoire16; tantôt elle flanque le principal corps de logis 1'. Souvent on érige une tour à chaque extrémité du bâtiment1°. Blanchie à la chaux t9, elle signale au loin les riches villas. A l'intérieur sont aménagées de petites chambres, diaetae, salles de repos ou cabinets de travail20. Un étage ou une tour entière sert depigeonnicr21. Le sommet forme une terrasse, qui est tantôt découverte, tantôt abritée par une toiture [sor,AR1EM, fig. 6505]22. Certaines maisons des champs, par originalité, prenaient elles-mômes l'aspect de grosses tours23 Au bord de la mer et sur les frontières peu sûres, les tours des villas sont de véritables ouvrages de fortification. Des tours flanquent le mur de clôture 24 et le portail d'entrée (fig. 6505)21. Ce type de fermes fortifiées est fréquent sur le limes africain 26. La villa de Nador, entre Cherchell et Tipasa, présente deux tours carrées aux extrémités de sa façade et deux tours rondes pour garder sa porte 27. La terris hlanilioruln Arellioruin, sur la frontière de Tripolitaine, est un édifice privé, un refuge pour le personnel d'une exploitation agricole ; ce bordj23, où tout se trouvait subordonné aux nécessités de la défense, doit son nom à la tour qui occupait le centre de son enceinte carrée29. Turres, salaient caltas, dit une inscription d'Afrique 30. Lorsque commence la période des invasions, c'est dans tout l'Empire que les villas seigneuriales se transforment en châteaux forts. La tour y reprend partout son rôle défensif". V. Tours emblèmes. Tours en bois que l'on promenait dans les pompes triomphales, et qui représentaient les villes prises 32. Pour la couronne lourdée, donnée aux divinités ou aux vainqueurs, voir CoxoNA, fig. 1966, '2010, 2011. VI. Un certain nombre de constructions affectaient la forme de tours. Nous ne citerons comme exemple que la Tour des Vents à Athènes. Cette tour octogonale, en marbre blanc, décorée de sculptures 33, était une horloge hydraulique, avec cadran solaire[nonoLoGluM, fig. 3887] .Elle fut élevée par le Syrien Audi'onikosde Kyrrlios, sans doute après la guerre de Mithridate, mais avant l'année 35. VII. Cornet à dé, 7épvo;, pyrgus, turricula. Cornet cylindrique, en forme de petite tour, servant aux joueurs à agiter et à lancer les dés. Voir rnrrlLLUs, fig. 3297-98. VIII. On désignait aussi sous le nom de turris, en langage militaire, certaine formation tactique 34 ; il s'agis sait d'un bataillon carré. H. GIIaILI.OT ET H. FIIEBE. TUS 55 TUS(Atôxv(ar6ç). Encens. Ilestquestion dans Homère d'un bois, 'r Otlov, qui répandait un parfum agréable en brûlant; c'était sans doute une sorte de citrus 1. L'encens véritable ne paraît avoir été connu des Grecs, par l'intermédiaire des peuples de la Méditerranée orientale, qu'au vie siècle avant notre ère ; le premier auteur qui le mentionne sous son nom classique est Ilérodote2. On appelait en Grèce l'arbre à encens ).(i)'xvo; et l'encens luimême, gomme du %il3xvr„ ),te«vt,c; ; quelquefois cependant )i vo; était employé lui aussi, par extension, avec le sens d'encens Ces mots font image et s'expliquent par la façon dont la gomme parfumée était produite et recueillie 6 : les Grecs désignaient en effet sous le terme général de tout liquide qui s'épanchait goutte à goutte, eau d'une source 7, larmes8 ou lait . Les Romains, qui n'adoptèrent qu'assez tard l'usage de l'encens, au contact du monde hellénique 10, lui donnèrent un nom tiré du grec et dérivé du verbe Odïty, sacrifier, à cause de la grande place qu'il tenait dans les cérémonies du culte ; l'aspiration disparaissant, la forme primitive thus devint ensuite tus" ; elle se retrouve encore parfois dans les inscriptions t2, mais c'est la forme lus que donnent le plus souvent les textes littéraires t3 et épigraphiques''. Tout l'encens dont se servaient les anciens provenait de l'Arabie 1^, et plus précisément du pays des Sabaei 1 °, situé dans le sud-ouest de la péninsule ; les essais d'acclimatation tentés par les rois orientaux à Sardes 17, en Carmanie et en Égypte '8, ne paraissent pas avoir eu grand succès. Strabon mentionne à plusieurs reprises l'encens parmi les productions les plus importantes de l'Arabie Heureuse ".Théophraste 20 et Dioscoride 21 chez les Grecs, le roi Juba 22 en Occident avaient réuni des informations détaillées sur sa culture et son commerce. Pline lui a consacré plusieurs chapitres de son Histoire naturelle, qui contiennent l'exposé le plus complet de ce que l'on savait dans l'antiquité sur ce sujet 23. L'arbre à encens, nous dit-il, est mal connu ; aucun auteur latin ne l'a décrit de visu et les Grecs se contredisent ; on l'a comparé, à cause de ses feuilles, tantôt au poirier, tantôt au lentisque ou au térébinthe, et, à cause de son écorce, au laurier ; d'après Juba son tronc serait tortueux, ses branches ressembleraient à celles de l'érable du Pont et sa gomme à celle de l'amandier ; des ambassadeurs arabes en ont apporté à Rome quelques branches, qui montrent que le tronc est uni et sans noeuds. On faisait d'abord une seule récolte d'encens chaque année, et maintenant deux : en été et en hiver on pratique une incision dans l'écorce du )sffixvo;, à l'endroit où elle est le plus gonflée de sève ; par cette fente la gomme s'écoule ; pour la recevoir on prépare au pied des arbres une aire de terre battue, ou l'on y étend des nattes de palmier ; on ramasse l'encens à l'automne et au printemps, sous forme de petites boules ou grains desséchés ; celui de l'automne est très blanc et très pur, celui du printemps rougeâtre et moins estimé. Des caravanes transportaient la précieuse substance, à dos de chameau, jusqu'à Sabattha et delà elle gagnait par voie de terre, à travers le pays des Dlinaei et les déserts de l'Arabie septentrionale, les frontières de la Judéeetle port de Gara; le voyage durait soixante-cinq jours ; les frais de route (gîte, fourrage, droits de douane, redevances aux rois indigènes, sans parler de la dîme au dieu Sabis à Sabatllla) s'élevaient à 688 deniers par chameau. L'encens était vendu de trois à six deniers la livre, selon sa qualité. Il fallait se défier des falsifications ; souvent on mêlait de la résine blanche à la gomme du ) nvoç ; contre ces fraudes on avait pris à Alexandrie des précautions minutieuses. Le Périple de la mer Érythrée donne des indications intéressantes sur une autre direction du commerce de l'encens ; l'auteur anonyme du Périple nous atteste, comme Pline, que Sabaltha était le principal centre de l'exportation ; de là des caravanes conduisaient l'encens sur la côte du sinus Aualiles, à Cane chez les Chatralnotitue, au cap Syagrus chez les Sachalitae et jusque dans les ports du pays des Omanitae ; il était emmené ensuite par mer en Inde, dans la Barbarique et en Égypte 24. L'encens passait pour avoir (le grandes vertus curatives ; Pline insiste, selon son habitude, sur l'emploi qu'en faisait la médecine antique et sur les remèdes nombreux et variés dans la composition (lesquels il entrait25. Mais, en Grèce comme à Borne, il servait avant tout à rehausser l'éclat des solennités religieuses [sAcnlFlclcsl, p. 96!] ; c'est à cet usage rituel et sacré que se rapportent presque tous les textes qui le mentionnent 26. On employait tantôt des pains plus ou moins volumineux, zdvôooç ),téx'ico sO 27, tantôt des grains broyés en une fine poussière. l,.zvva ï`teOxnu'tc 23. L'encens était jeté sur la cendre chaude des autels29 ou bien consumé dans des récipients de terre cuite ou de métal fabriqués spécialement à cet effet [TCRIBIILu3l] ; en brûlant il répandait une fumée épaisse et odorante, dont le parfum passait pour être particulièrement agréable aux dieux. Plusieurs inscriptions de file de Cos et des villes hellénisées d'Orient, Alexandrie, Didymes, Pergame, etc., le citent parmi les objets de prix qui figuraient dans les inventaires des temples 30. Chez les Romains on l'offrait chaque mois aux dieux Lares, protecteurs des familles" ; on le faisait brûler aux funérailles 92 ; l'encens était associé au vin dans les supplications publiques et la formule ture et vino sacri ficiunt facere ou Pire et vino supplicare se rencontre très fréquemment chez les TUT l'i53 TUT auteurs latins 1 et dans les inscriptions 2. La participation à l'oblation de l'encens était considérée comme l'acte essentiel de la religion officielle, celui qui permettait de distinguer les païens des chrétiens ; Prudence appelle les idolâtres turifera grex2 et saint Cyprien turificati ceux des chrétiens qui, pendant la persécution de Dèce, ont cédé aux injonctions des magistrats romains et sacri fié aux divinités de l'Empire 4. AIAuRICE BESNIEB.