Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

Article APPELLATIO

APPELLATIO. Appel d'une sentence. Pour les Grecs, voyez ANADIKIA, EPIIESIS. 1. La faculté d'appel n'existait pas dans l'ancien droit romain; seulement plusieurs conditions étaient exigées pour la validité d'une sentence. C'est ainsi qu'elle était considérée comme entièrement non avenue, dans le cas d'incapacité soit du magistrat, soit du juge, soit d'une des parties; lorsqu'elle ne contenait pas condamnation à une somme d'argent; lorsqu'elle était en contradiction directe et manifeste avec les lois, etc.'. La RESTITUTIO IN INTEGIIUM était possible contre une sentence valable, comme contre tout autre acte, lorsqu'il existait une juste cause, telle que minorité, absence, dol, etc. 2. Quant au droit pour un magistrat d'empêcher ou de casser les actes d'un magistrat égal ou inférieur, il n'existait pas à l'égard des sentences, parce que celles-ci étaient l'oeuvre d'un juge et non point l'oeuvre d'un magistrat. L'empire modifia ces idées. On s'accoutuma peu à peu à considérer le pouvoir du juge comme une délégation du pouvoir du magistrat, à confondre la datio judicis et la delegatio jurisdictioni:s [JURISDICTio]. Dès lors l'empereur, en vertu de son pouvoir tribunitien, qui s'étendait dans tout l'empire, intervint pour réformer les sentences des juges, même en dehors des cas de restitution en entier, en déléguant ordinairement son pouvoir à certains magistrats 3. Lorsqu'une sentence était nulle, le condamné pouvait, au lieu d'appeler, se borner à attendre que la JUDICATI ACTto fût intentée contre lui, et opposer alors la nullité de la sentence, auquel cas il subissait une condamnation au double s'il succombait. Les textes parlent aussi d'une revocatio in duplurn b, dont la nature n'est pas bien connue. 11 est probable qu'elle avait lieu dans le cas où le condamné, au lieu d'attendre l'action judicati, agissait luimême pour faire déclarer la sentence nulle (et non pas simplement injuste), cas auquel il était raisonnable qu'il fût exposé à la même condamnation au double que s'il eût attendu l'action judicati. Sous Justinien, il n'est plus question de cette revocatio. L'empereur, comme juge d'appel, tantôt statuait par lui-même, avec l'assistance de son conseil, tantôt déléguait l'affaire, soit au sénat, soit à un magistrat ou même à un particulier. Peu à peu il s'établit à cet égard une espèce de hiérarchie. Ainsi on appelait d'un juge au magistrat qui l'avait constitués, des magistrats municipaux au préteur, ou au JUaIDICUS, ou au président de la province s. De celui-ci, on pouvait appeler au vicaire du diocèse ou au préfet du prétoire, et du vicaire à l'empereur. L'empereur jugeait rarement lui-même. Il déléguait la connaissance de l'affaire à d'autres, souvent au sénat 7. Théodose II établit à cet. égard une commission composée du préfet du prétoire et du quaestor palatii 8. Quant au préfet du prétoire, il remplaçait l'empereur, et ses décisions n'étaient pas susceptibles d'appel 9. On pouvait seulement les attaquer au moyen d'une supplique au prince 10 [sUPPLICATIO], laquelle était une voie de rétractation et non d'appel, car c'était le préfet lui-même qui était appelé à reviser sa sentence ou celle de son prédécesseur. Cette voie de recours pouvait être employée jusqu'à l'expiration des deux ans qui suivaient le remplacement de celui qui avait rendu la sentence. L'instance en appel était toujours une extraordinaria cognitio, terminée par un decreturn du juge d'appel [ORDO JUDICIORUM]. L'appel était suspensif de l'exécution de la sentence attaquée. Il pouvait être interjeté, soit de vive voix apud acta Il, au moment où la sentence était rendue, soit par un écrit, au moyen d'un libellas appellatorius 11, contenant la désignation de l'appelant et de la sentence attaquée. L'appelant devait en outre obtenir du premier juge des litterae dimissoriae, ou apostoli 13, c'est-à-dire un écrit destiné à faire connaître l'appel interjeté, et accompagné des pièces du procès. Sous Constantin1`, les appels à l'empereur devaient être accompagnés d'un rapport du juge qui avait rendu la sentence attaquée. Ce rapport (consultata), relatés 1K), pouvait être combattu par les parties au moyen de libelli refulatori. Le délai d'appel a varié de deux à dix jours. La peine d'un appel téméraire consistait à payer quatre fois les frais H et le tiers de la valeur en litige. Cette dernière pénalité fut ensuite remplacée par une amende laissée à la discrétion du juge i7. L'appelant devait assurer l'exécution de ces condamnations éventuelles en donnant caution ou en faisant un dépôt préalable 13. R. II. Nous devons considérer à part et examiner de plus près la faculté d'appel dans le droit répressif romain, L'appel dans le sens propre du mot n'existait pas, à l'origine, comme un recours hiérarchiquement organisé à un tribunal supérieur contre la condamnation prononcée par un juge inférieur. Sous la royauté, le roi, juge suprême, pouvait faire élire APP 330 --APP des diiaualviri pour un cas spécial, et admettre contre leur décision un recours au peuple 1 [PB.uvocAT1o]; niais ce n'était pas la une institution permanente et régulière. Sous la république, la création de eolléges de magistrats égaux en pouvoir permit à celui qui était condamné par l'un d'eux ei ,' invoquer un autre contre la sentence du premier (appetlyre esdeyam), et de mettre en mouvement le droit d'intercession [INTERCESSIO] qui appartenait à cha.eun d'eux. C'est l'application du principe de la par potestas plus forte raison, un magistrat ayant une autorité supérieure (imperiurc majus) aurait-il pu briser une sentence injuste ; le plus souvent le citoyen condamné par un magistrat était admis, s'il était à. Rome ou dans le rayon d'un mille, à invoquer l'aide d'un des tribuns ce qu'on nommait eppellare tribunum [IRIBUNUS PLEBIS], et arrêtait ainsi. en obtenant son intercessio, l'exécution de la sentence ; ce n'était pas une seconde instance, car l'opposition du tribun cessait avec la durée de sa charge; un recours au peuple (provocatio), permis seulement au coupable qui n'avait pas avoué ° ou qui n'avait point été pris en flagrant délit, pouvait seul saisir une juridiction souveraine de la connaissance du délit. Encore le recours ne fut-il pas possible contre les commissions déléguées par le peuple' [gl'AEsTio], ni contre les magistrats extraordinaires ni contre les sentences des généraux pour crime militaire, ni contre les condamnations correctionnelles7. Nous TIA, les développements sur les conditions et formes, soit du recours, soit de la justice criminelle exercée par le peuple dans les comices. Sous l'empire, le prince réunit au commandement militaire (imperi'u,aa procansuiais) tel qu'il s'exerçait jadis en province 3, l'inviolabilité et le droit d'intercession de la puissance tribunitienne à l'égard de toutes les magistratures anciennes, comme à l'égard des magistratures de création impériale [PRAEFECTUSi, ll en résulta pour tout accusé et même pour tout condamné le droit d'invoquer le secours du prince (appellare) et de lui demander justice ou même de réclamer la rescision ou la réformation d'une condamnation prétendue injuste" . Le droit de recours à l'empereur est devenu un privilége, remplaçant l'ancienne inviolabilité du citoyen romain 11, en vertu de la loi Julia de vi pvfilica„ qui a pris la place des leges Porciae. Ce système d'appel personnel àl'empereurT2(appellatio ('aesaris), écarté un instant par le caprice de Caligula 43, se régularisa et se généralisa 14, L'empereur dut organiser son conseil, à l'aide PRiNCtPis]. La communication de ce droit au sénat rie fut guère que transitoire 16, L'appel ne fut plus un moyen, analogue à l'intercessio, de paralyser ou d'annuler une sentence, il devint un mode de recours au tribunal suprême de l'empereur, qui put réformer la condamnation en dernière instance 17. Le prince, suivant le langage que Dion Cassius prête à Mécène, devint le supérieur de tous ceux qui jugeaient comme de tous ceux qui commandaient 18; les magistrats furent ainsi soumis à une hiérarchie comme délégués de l'empereur 19. L'appel à un juge plus élevé fut admis en règle générale, au moins sous le bas empire 20. On appliqua à l'appellatio en matière criminelle les mêmes conditions et formes qu'en matière civile 21, notamment en ce qui concerne les délais 42, l'effet suspensif de l'appel 23. Le refus de l'admettre ou de suspendre l'exécution était considéré comme une violence publique [vis PUBLtcA] 2L L'appel était ouvert non-seulement au condamné, mais même à un tiers 2', excepté dans les cas où l'intérêt public paraissait exiger une punition immédiate, comme pour les brigands célèbres, les auteurs de conspiration, etc. 2e Le juge remettait aussi à l'appelant un acte constatant qu'il avait interjeté appel (aposte" , litterae dimissoriae). Le droit de se faire représenter par un mandataire [PROCURATOR] était restreint aux cas de peine n'excédant pas la rélégation i8, La mort de l'accusé mettait tin à l'accusation et rendait l'appel inutile, mais non au point de vue des effets pécuMaires du premier jugement 29, auquel cas l'héritier devait justifier l'appel. Il n'était point autorisé 3V en cas d'aveu formel ou de flagrant délit, ni pour certains crimes graves, comme le rapt, la dépossession violente, ni enfin dans l'hypothèse de contumace c'est-à-dire d'absence volontaire 31, après citation. G. HUMBERT. A.PPLICATIONIS JUS. ®Le jus applicationis ne nous est connu que par un seul passage de Cicéron 1, qui ne nous en fournit qu'une notion fort incomplète. Voici latraduction de ce passage : « Celui qui venait en exil à Rome, en vertu du droit qui lui permettait d'y trouver un asile comme exilé, pouvait s'attacher à un citoyen qu'il prenait en quelque sorte pour patron. En supposant que cet exilé mourût intestat, ne faudrait-il pas qu'à cette occasion un avocat fût en état de développer en justice et d'éclaircir .APR 331 AQU pleinement ce jus applicationis si obscur et si méconnu d'ailleurs? .v 11 s'agit évidemment là d'un droit déjà entouré d'obscurités au temps de Cicéron, parce qu'il dépendait de l'antique institution de la clientèle [CLIENTES]. Le patron devait avoir des droits à la succession du client, à défaut d'héritier testamentaire de celui-ci. Quels étaient à cet égard les effets de l'acceptation volontaire d'une clientèle par un étranger réfugié à Rome? Telle était la question que Cicéron proposait à l'avocat digne du nom de jurisconsulte ; question difficile, parce que depuis longtemps sans doute les règles de droit privé relatives au recrutement et aux effets civils de l'ancienne clientèle étaient tombées en désuétude, ou avaient été abrogées par la loi des Douze Tables. G. HUMBERT. lait ainsi à Athènes l'instance introduite sans un ajournement régulier. Si le défendeur comparaissait en justice malgré l'irrégularité de l'ajournement, cette irrégularité était couverte ; mais, s'il ne comparaissait pas, il était présumé n'avoir pas été suffisamment averti, et le demandeur ne pouvait obtenir défaut contre lui. Le demandeur ne pouvait donc obtenir une condamnation par défaut contre son adversaire qu'en prouvant qu'il l'avait valablement assigné, et à cet effet il devait, en l'assignant, se faire assister de témoins ou recors (x),r,T"ripes) pouvant venir déposer en justice de la régularité de l'assignation'. P. GIDE. publique accordée par le droit attique contre les métèques qui négligeaient de se choisir un 7rpoaTéT71ç ou patron parmi les citoyens Cette action appartenait à l'hégémonie de l'archonte polémarque 2. Le métèque qui succombait était exposé au moins à la confiscation 3 ; peut-être même encourait-il des pénalités plus graves 4. D'après Suidas ', il y aurait eu également â76paT«a(ou 'lpz pj dans le cas où le métèque ne payait pas le METOIEION°, et dans le cas où il se faisait frauduleusement passer pour citoyen. Il est certain cependant que le non-payement du p.ETo(xto•t était réprimé par une APAGOGÈ, et que l'usurpation de la qualité de citoyen donnait passage à. la lev(zs yptctpij. Comment concilier ces divers témoignages? Voici l'explication que propose Meier 7 : le métèque qui n'avait pas de patron et ne payait pas le üETOtxtoV, celui qui n'avait pas de patron et usurpait la qualité de citoyen, pouvaient, par indulgence, être poursuivis seulement au moyen de l'ebteau-:satau ypap7i, dont les conséquences étaient moins rigoureuses que celles de l'tiuts p ou de la ev(aç ypyii. La condamnation qui intervenait contre le défendeur, en l'obligeant comme métèque à se choisir un patron, le soumettait par là même au p.oXotxtos et lui interdisait les actes permis aux seuls citoyens. L'emploi de l'l7poataatou ypxtplj était donc un acte de bienveillance et non pas une application des règles du droit. Pour qu'il fût possible, il fallait même que le défendeur reconnût, dès le début de l'instance, sa qualité d'étranger; car, si le défendeur soutenait qu'il était citoyen, comme il conservait la jouissance du droit de cité jusqu'à ce qu'un jugement l'en eût dépouillé, il ne pouvait plus être question, jusqu'au jugement rendu sur cette question d'état, de patron, ni d'.x7rpo M. Perrot 3 donne une autre explication plus simple : c'était; dit-il, le patron qui servait d'intermédiaire entre le métèque et le trésor public pour le payement du µETOtxtoV, Quand aucun 7rpos-éTYIÇ ne s'était présenté pour l'étranger domicilié et que celui-ci n'était pas venu payer la taxe, il était très-vraisemblable qu'il était dans une situation irré gulière et qu'il n'avait pas de représentant juridique. Le défaut de payement du gETOLXtoV appelait donc l'attention sur le métèque et l'exposait à voir signaler, par la ypairj Urpoo'isc ou, qu'il s'était abstenu de choisir un patron. ce nom, à Athènes, une action, mentionnée par Pollux, sur laquelle nous sommes réduits aux conjectures. Les mots cJré/M9 Siam servaient sans doute à désigner les actions qui, dans un intérêt religieux, poursuivaient la réparation des meurtres et des accidents occasionnés par des objets inanimés; elles appartenaient à l'hégémonie de l'archonte roi' ou des PIIYLOBASILEIS, sur lesquels nous avons peu de détails, et étaient jugées dans le Prytanée [PRYTANEUM]'.