Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

Article AQUA

AQUA. L'usage de l'eau, dans l'antiquité, peut être envisagé soit au point de vue de la vie privée, soit au point de vue du régime légal ou administratif. I.-Quant à la vie privée, il suffit de rappeler ici que les Grecs et les Romains usaient de l'eau abondamment soit en boisson, soit pour les bains, soit pour le blanchissage ou l'arrosage On buvait l'eau pure («qua niera) ou, le plus fréquemmenf, mélangée an vin 2 [cosvivluM]. En été, on employait de l'eau glacée', ou rafraîchie avec de la neige ou de la glace, en prenant soin de faire bouillir l'eau avant de la congeler 4 ; au contraire, en hiver, on faisait tiédir l'eau destinée à la boisson [CALDA]. On trouvera aux articles spéciaux ce qui se rapporte à ces usages et à l'emploi de l'eau pour les purifications [LOSTRATIO], pour° les sacrifices [SACRIFICIUM], pour les bains [BALNEGM], pour le blanchissage [FULto], pour les mariages' [NU PTIAE], Ott:. Rappelons que, d'après Jean Lydus on avait l'habitude de boire de l'eau le ter juin pour prévenir les maladies. II. -Au point de vue juridique, les Romains distinguaient les eaux pluviales (aqua pluvia ou coelestïs), et les eaux courantes (aqua profluens). Parmi ces dernières, en laissant de côté ce qui concerne la mer [MARE, LITTUS, RES coSMUNrs], il. faut considérer les sources [FONTES] les ruisseaux (rivas) et torrents (flumen non perenne) et les cours d'eau permanents (flumen perenne). A. L'eau pluviale, avant de tomber, appartient au premier occupant; une fois qu'elle a touché le sol, le maître du terrain peut s'en emparer pour son usage, ou la laisser couler vers les fonds inférieurs ; mais il lui est interdit de faire aucun travail (opus facere) de nature à accroître la charge de leurs propriétaires 7, en augmentant le volume ou la rapidité de la chute de l'eau, ou en altérant sa qualité, AQU 332 AQU de manière à causer un dommage. Réciproquement, le maître d'un fonds inférieur ne pouvait pratiquer aucun travail ou changement de nature à repousser les eaux sur le sol supérieur 3 ; la partie lésée obtenait du préteur une action personnelle dite aquae pluviae arcendae 9, pour faire rétablir les choses dans leur état primitif. L'affaire était renvoyée par le magistrat supérieur à un juge arbitre (arbiter), qui décidait après descente sur les lieux. Du reste, il paraît que la loi des Douze Tables avait déjà réglementé cette matière, comme le prouvent certains mots de son texte, cités par le jurisconsulte Pomponius 10. Quant au dommage résultant du cours naturel de l'eau, il n'était dû aucune indemnité 11. Le propriétaire d'un mur ou d'une construction devait diriger les eaux de pluie qui tombaient sur cet ouvrage de main d'homme, de manière à les faire couler sur un terrain ou sur la voie publique, à moins d'avoir acquis la servitude urbaine 12de stillicide (stillicidium) ou celle de /lumen, qui supposait le droit d'envoyer l'eau par un tuyau, fluminis immittendi [SERVITUTES]. Du reste, en matière d'eau pluviale, le droit commun pouvait être modifié par la loi provinciale, comme en Afrique, ou par la loi municipale, ou par une possession immémoriale équivalant à une loi 0, velustes quae semper pro lege habetur. Nous renvoyons pour les détails aux Pandectes de Pothier, qui a réuni, dans un ordre méthodique, les textes de ce titre du Digeste, et à quelques interprètes 16. B. Quant aux droits du propriétaire d'une source [FONs], il suffit de rappeler ici que le maître du sol pouvait user de ta source à sa volonté, sauf à laisser l'eau prendre ensuite son cours naturel vers les fonds inférieurs 1s. Le maître d'un fonds pouvait même, en y cherchant une source, tarir celle du voisin. C. Le ruisseau (rivas) et le torrent (/lumen non perenne) appartenaient d'ordinaire aux propriétaires riverains, et en principe n'étaient grevés d'aucune servitude quant à leur rive; seulement celui qui avait le droit d'accès vers l'eau, pouvait y puiser l'eau courante, chose commune 18, à sa volonté. L'usage et les lois municipales ou les interdits prétoriens paraissent seuls avoir réglementé la distribution des avantages de ces petits cours d'eauE7 entre les riverains supérieurs et inférieurs ou parallèles. Le Digeste ne s'occupe pas spécialement de cette matière. D. Au contraire, les arpenteurs [AGaIMENSOR] et les jurisconsultes avaient traité en détail du régime des cours d'eau permanents (/lamina perennia). Le texte des Institutes de Justinien '$ parait admettre que tous ces fleuves sont publics ; mais le jurisconsulte Marcien est plus exact en disant presque tous (perse omnia) 19. Nous devons entendre cela des cours d'eau qu'Ulpien nomme perennia 29, et qui sont seuls publics, d après l'avis de Cassius, approuvé par Celsus et par Ulpien. Quelle était la condition de ces fleuves publies? Ils ne l'étaient que dans leur forme actuelle et dans leur destination. Les explications au sujet, tant du lit abandonné par les eaux (alveus derelietus), que des îles qui venaient à se former (insola), ou des terrains détachés et transportés par la violence des eaux (avulsio), sont résumées aux articles ALLUVIO et INSUi.A. Les propriétaires riverains pouvaient se garantir de l'action des eaux par des travaux défensifs, à condition de ne pas porter aussi préjudice à leur voisin u. Le préteur accordait un interdit (de ripa munienda) à celui qui voulait protéger ses travaux régulièrement faits et de nature à ne pas nuire à la navigation. Il devait d'ailleurs donner la caution du dommage futur (cautio damni infecti) pour dix ans, boni arbitratu 22. On appliquait les mêmes règles par analogie aux rives d'un lac ou d'un étang 23. Quand les ouvrages nuisibles avaient été exécutés sans caution préalable, la partie lésée n'avait d'autre voie que celle de l'action de la loi Aquilia de damno injuria dato 2h. Les riverains des fleuves publics conservaient la propriété du sol de leur rive, qui n'était pas commune comme celle des rivages de la mer [LITTUS]2o. En effet, les premiers avaient seulement une propriété grevée d'une sorte de servitude , du moins quand il s'agissait des fleuves navigables, que les Romains distinguent expressément (fiumiea navigabilia) 23. Le maître de la rive demeurait propriétaire des arbres nés sur le sol; nul ne pouvait y construire sans son consentement, ni rien occuper ou acquérir sur la rive ; mais l'usage de la rive était public pour les besoins de la navigation. Sous ce rapport, on confond parfois improprement la rive parmi les res communes27. Chacun peut pêcher, naviguer sur le fleuve, attacher des câbles aux arbres, y débarquer 23. Mais le peuple ou ses magistrats exercent une juridiction exclusive sur le fleuve et ses rives pour empêcher ce qui nuirait à l'usage public. Sous ce rapport, le /lumen est une res publica29 Quant au volume d'eau du fleuve, il est res communie, et chacun peut y puiser de l'eau courante (aqua profluens) pour les usages domestiques. Mais le droit de prise d'eau ne peut être exercé sans autorisation pour les besoins de l'agriculture ou de l'industrie dans un fleuve public navigable, ou dont l'adjonction est nécessaire pour rendre navigable un autre cours d'eau. Ainsi la prohibition était la règle pour laqua in usa publico; dans le cas contraire, à moins d'une prohibition spéciale du prince ou du sénat, rien n'empêchait le riverain de prendre ou de dériver de l'eau (quo minus ex publico flamine aqua ducatur nihil impedit) 30. Au contraire, le maître des deux rives n'aurait pu pratiquer un pont pour son usage privé 31(pontem privati juris). Un édit du préteur défendait tout travail dans le fleuve navigable ou sur la rive, de nature à nuire à la navigation; à cette occasion, il proposait deux interdits, l'un prohibitoire, l'autre restitutoire 32 Un autre interdit concernait spécialement le rivage de la mer [LITTUS] 3'. Quant aux fleuves publics non navigables, Labéon pensait qu'on pouvait demander au préteur d'accorder un interdit utile [INTERDICTUM], pour défendre toute entreprise de nature à dessécher le fleuve ou à retarder AQU --333 AQLF-- le cours de l'eau. Le préteur avait encore offert un interdit tendant à prévenir les travaux ayant pour but de détourner le cours d'un fleuve public, navigable ou non 34 et un autre défendant de troubler la navigation sur un cours d'eau ou un étang public 35, ou d'empêcher les troupeaux d'arriver à la rive d'un fleuve publie pour s'y abreuver u6. On a vu quelles étaient les limites du droit de prise d'eau dans les fleuves publics 37 ; pour les eaux appartenant à des particuliers, rivi ou fontes, le droit d'abreuvoir (pecoris ad aquam appulsus), ou de prise d'eau (aquae haustus), et le droit de conduite d'eau (aquae ductus) à travers le fonds d'autrui d'une manière permanente (aqua perenni), ou en la tirant du fonds d'autrui, ne pouvaient s'exercer qu'à titre de servitude, ou en vertu d'une possession immémoriale 38 (vetustas). L'intérêt de l'agriculture exigeait cette dérogation à l'impossibilité d'acquérir les servitudes par prescription, prohibition consacrée par la loi Scribonia. Nous renvoyons, pour ce qui concerne la construction, la réglementation et l'administration des aqueducs publics Au point de vue du droit privé, il convient de dire quelques mots de la servitude d'aqueduc (jus aquae ducendae) 39; elle était en général considérée comme une servitude rurale b0 (praediorum rusticorum), elle était donc chose mancipi en Italie, et susceptible d'hypothèque et d'extinction par le non-usage pendant deux ans. Cependant quelques textes 41 qualifient un droit d'aqueduc de servitude urbaine (praediorum urbanorum ). Cette antinomie a fort embarrassé les interprètes ; les uns se sont attachés à la nature du fonds dominant, les autres à la circonstance que l'aqueduc, destiné aux besoins d'un collegium, supposait nécessairement l'idée d'un édifice. Suivant nous, cette servitude était en général rurale, parce qu'elle ne supposait pas de sa nature une construction en maçonnerie ; on se servait de simples tuyaux de conduite; mais on pouvait convenir d'établir un aqueduc en maçonnerie (per lapidem aquam duci posse) 42, ce qui suppose aussi habituellement des regards. Alors la servitude consistant à maintenir un certain état de la superficie, ou in habendo, était réputée urbaine. Du reste toute servitude d'aqueduc a plus d'étendue que le simple droit de puisage ou prise d'eau (aquae haustus ou servitus hauriendae ou hauriendi jus) `i3 ; car celle-ci n'implique pas l'ouverture d'un conduit sur le sol d'autrui, mais seulement la faculté de passer (iter, aditus)44 Aussi un fonds dominant ne peut exercer que l'aquae haustus et non le droit d'aqueduc à travers une voie publique qui le sépare du fonds servant 45. Le maître qui jouit d'un simple droit de passage sur un fonds (iter ou rictus), ne peut y élever les arceaux d'un aqueduc, ni y établir un pont40, sans une concession spéciale. Quelquefois la servitude consistait n à prendre de l'eau à la source d'autrui pour la conduire au fonds dominant ; d'autres fois, seulement à conduire à travers le terrain d'autrui u l'eau de la source dont on était maître, sur un autre fonds dont on avait également la propriété (iter aquae per funduoz tuum). Le droit de prendre l'eau en tout temps, hiver ou été, se nommait aqua quotidiana; si on n'avait ce droit que pour l'été seulement, il prenait le nom d'aqua aestiva 49 Le jus pecorts ad aquam appeilendi, ou pecoris ad aquam appulsus 50, contenait le droit de conduire ses bestiaux boire à la source ou au bassin situé dans le fonds d'autrui, et impliquait le passage (iter, aditus, jus adeundi ad fontenl). Quant aux eaux ménagères ou corrompues par un usage spécial, nul ne pouvait les envoyer sur le fonds d'autrui, sans avoir obtenu une servitude particulière (jus immittendi, ou jus cloacae mittendae vel ionmittendae) 51. Lorsqu'un égout passait ainsi sous le bâtiment d'autrui, chacun de ceux qui avaient le droit d'user de la cloacapouvait le curer ou le réparer et obtenait à cet effet un interdit prohibitoire 68. Il y avait un interdit restitutoire pour les cloaques publics 63. G. HUMReRT. III.Pour la Grèce, nous avons aussi relevé dans les auteurs quelques textes relatifs aux charges et aux avantages qui pouvaient résulter pour les immeubles du cours natus rel des eaux. A. Le propriétaire d'un fonds inférieur était obligé de recevoir les eaux qui découlaient d'un fonds plus élevé, notamment les eaux pluviales 64. Cette servitude, dérivant de la situation naturelle des lieux, était justifiée rationnellement par un argument sans réplique, que nous trouvons dans Démosthène : « Si le maître du fonds sur lequel est tombée l'eau pluviale ne peut pas s'en débarrasser en la laissant couler sur les terres de ses voisins ou en la conduisant sur la voie publique, quel usage pourra-t-il bien en faire? Vous ne le condamnerez pas sans doute à la boire 65. n Platon ajoute toutefois que le propriétaire du fonds supérieur (6 i7r vo)) devait faire tout ce qui était en son pouvoir pour atténuer la charge imposée au propriétaire du fonds inférieur (8 x«2m) 56 Celui-ci ne pouvait pas élever de digue pour empêcher l'écoulement des eaux J7 C'est ce que prouve, nonseulement le texte formel de Platon, mais encore tout le plaidoyer de Démosthène contre Calliclès. Calliclès se plaignait que Tisias dit entouré son fonds d'un mur qui faisait obstacle au passage des eaux. La plainte de Calliclès était mal fondée, attendu que le fonds de Tisias n'était pas contigu au fonds de Calliclès, et qu'ils étaient séparés par une voie publique suffisante pour l'écoulement. Mais, si la règle que nous venons de formuler n'avait pas été admise, le procès n'aurait pas eu la moindre raison d'être. Les propriétaires s'entendaient quelquefois pour faciliter le cours des eaux sur leurs propriétés respectives; ils creusaient un fossé qui recevait les eaux des fonds les plus élevés, et les transportait jusqu'à une rivière, un étang, ou une voie publique, à travers les fonds inférieurs, qui déversaient eux-mêmes leurs eaux dans ce fossé. Il est évident que l'un des propriétaires ne pouvait pas par sa seule volonté annihiler la convention et détruire le canal. Voici ce que nous dit encore le fils de Tisias : « Si autrefois il y avait eu dans ma propriété un fossé pour recevoir les eaux, je commettrais certainement une injustice en refusant de les recevoir. Dans beaucoup de propriétés, il y a, en effet, des AQU e-334 _ AQ1.1 canaux dont l'existence est parfaitement reconnue. Les propriétaires des fonds supérieurs y versent les eaux pluviales et les eaux qui proviennent de leurs maisons ; ils les passent aux fonds inférieurs, qui agissent, à leur tour, de la même manière 65. » B. Tout propriétaire dont le fonds était contigu à une voie publique pouvait se servir de cette voie pour l'écoulement des eaux existant sur sa propriété e3. « C'est votre usage à tous. dit le fils de Tisias, de conduire les eaux de vos maisons et de vos terres sur la voie publique (slç T.;1v lu s C. Dans un pays accidenté et rocheux, où les pluies sont rares et l'eau peu abondante, l'une des plus grandes préoccupations de l'agriculteur doit être l'irrigation de ses propriétés. Aussi, dès les temps les plus anciens, les Grecs songèrent à aménager soigneusement les eaux et à les répartir le mieux possible entre les propriétaires. Homère peint déjà le laboureur, la houe à la main, dirigeant à travers ses vergers l'eau d'une source et débarrassant les canaux d'irrigation de tout ce qui a pu les obstruer 6f, Xénophon parle des rigoles que les Milésiens avaient établies pour arroser les champs fie. Les Grecs n'abandonnaient pas les eaux à leur libre cours ; ils détournaient le lit des rivières (epsx'pénovçaç ôyéeov) 63, afin de répartir les eaux, entre tous les intéressés, dans un vaste réseau, que Platon compare au système de la distribution du sang dans le corps humaine'•. Il y avait même d'anciens règlements locaux qui fixaient les bases de la répartition; ces règlements avaient pour eux l'approbation traditionnelle des cultivateurs, et Platon, clans son. Traité des lois 60, vante leur sagesse. Malheureusement, ils ne nous ont pas été conservés intégralement : « Celui qui voudra irriguer son champ devra établir une prise d'eau sur la rivière voisine, si elle fait partie du domaine public ; car il ne serait pas admis, même dans l'intérit de l'irrigaLion de ses fonds de terre, àdépouiller le propriétaire d'une source ou d'un cours d'eau rentrant dans le domaine privé... Les fonds intermédiaires seront obliger, de subir le passage des eaux, que l'on dirigera de telle façon que le préjudice causé soit aussi faible que possible,., » Par des raisons de convenance, que notre loi du 29 avril 1845 n'a pas négligées, le législateur exemptait de cette servitude d'aqueduc les maisons, les temples et les monuments Ge. Pour éviter les contestations entre les propriétaires qui se disputaient avidement les eaux, on déterminait à l'avance la quantité d'eau que chacun aurait le droit de prendre et petr1-être aussi la durée de la prise. La part d'eau ainsi attribuée à. un propriétaire (i piç iCreoç) s'appelait, d'après chias, vop:h 67. Dans les actes de disposition du domaine, les parties mentionnaient le droit aux eaux, attribut précieux, qui augmentait la valeur de la propriété. Il en était de m@me dans la description des biens hypothéqués. On a retrouvé, sur le 'territoire de l'ancien dème d'Acharnes, une alveo Jutai. leges,jus c,.-Halle, 1861; Demangcat, Cours de droit rom. inscription hypothécaire de l'archontat de Nicoclès (302 av. neurs orphelins, Charippus et Clrarias, fils de Charias, petitsfils d'Isotélès, frappe des fonds de terre, une maison et deux parts d'eau appartenant aux fonds de terre. » titre les notions qui nous sont parvenues sur l'usage des eaux thermo-minérales dans l'antiquité. Les anciens en connaissaient un grand nombre, et auprès de la plupart d'entre elles, l'affluence des baigneurs et des buveurs avait formé de véritables stations de malades, Elles sont ordinairement désignées par les écrivains latins sous le nom de Aquae : telles sont, pour ne citer que quelques-unes de ces eaux restées célèbres dans notre pays Aquae Sextiae (Néris), Aquae Calidac, (Vichy), etc. Les noms modernes de beaucoup de Iocalités où entrent les formes Aigues, Aix, Ax ou Dax, rappellent l'ancienne désignation. De même, Thermae était le nom de divers endroits où se trouvaient des sources chaudes,parmi lesquels le plus renommé pour poilai, aujourd'hui Termini), au nord de la Sicile. Cette station fut fondée après la destruction d'Himère par les Carthaginois, non loin de cette ville déjà connue par les mêmes eaux minérales. On voit sur des monnaies de Thermae 2, d'un côté la tète d'Hercule et de l'autre les Nymphes qui, d'après Diodore de Sicile a, pour complaire à Minerve, firent jaillir la source destinée à réparer les forces du héros qu'elle protégeait; et sur celles d'Himère (fig. 394), Hercule recevant sur son épaule l'eau qui s'épanche du masque de lion d'une fontaine°. On peut rapprocher de ces médailles, des bas-reliefs, des pierres gravées et des inscriptions 3 où Hercule se trouve réuni aux Nymphes et considéré comme présidant aux eaux chaudes. Suivant une autre légende, c'était Minerve elle-même; selon d'autres encore, c'était Vulcain qui avait fait couler aux Thermopyles, sur le bord de la mer, les sources sulfureuses où Hercule le premier retrempa ses forces 6. On retrouve en beaucoup d'endroits des traditions semblables attribuant à Hercule la découverte des eaux thermales et expliquant pourquoi ces eaux étaient appelées bains d'Hercule (`lipzxàtia )iourp«) et lui étaient consacrées'. L'indication qu'on rencontre ehez les écrivains anciens, de sources dans le voisinage des temples d'Esculape et des asiles qui y étaient ouverts aux malades [ASKLEPEIoa], seul AQUAE. t Vos. L'énumération des lieur qui ont porté le nom d'Aquae dans la Peaieneyclopddie de Pauiy, t. I, 29 éd. p. 1366. 2 Torremu,eu, Sied. net. uuhahi, pi. xc, 5 et 6.6 Diod. 1V, t, 1, p. 268 Wcsseling. M1 Méd. du commet de France; 476 ; Gori, Mus. Floc. Il, pl. xrv, 4; d'Anse de Villoison, Mes, de : ic. des Orelii, briser. 1560. 6 Herodot. Vii, 176 ; Schol. Aristoph, .Vnt. 4047; T, Liv. XXVI, 15. 7 Sehoi. Aristoph. 1. l.; Aristot. Meteor. II, 8; Selo!. Hom. 1/Md. aXIV, 61G; Euet. p. 1273, 2; Athen. XII, 6 ; Schneidewin, Ad (Lyot /main,. p. MU. AQU Pte= 335 __ A-QU hie attester qu'elles servaient à la médication 3; en tout cas, beaucoup d'eaux thermo-minérales sont mentionnées par les auteurs et par les inscriptions, tant dans la Grèce continentale que dans les îles et en Asie 9. ➢lais à quelle époque les Grecs commencèrent-ils à faire usage de ces eaux? Pline a remarqué qu'Homère n'en avait point parlé 10. Cependant il est question dans l'Iliade de la source chaude du Scamandre, qui mêle ses eaux fumantes à celles d'une autre source glacée 11. Hippocrate connaissait leurs effets 18, mais rien ne prouve que leur emploi mit passé dès le temps où il vivait dans la pratique médicale. Les eaux de Scotussa en Thessalie, celles d'lEdepsus en Eubée sont mentionnées par Aristote i3; ces dernières étaient fréquentées par les malades au moins dès le 1118 siècle av. J.-C. 1`, et devinrent par la suite une station recherchée autant pour les agréments qu'on y trouvait réunis que pour les soins de la santé n ; il en était de même des eaux de Lébédos, de Téion et d'autres indiquées par Pausanias1°. Elles étaient visitées surtout au printemps et à l'automne 17. La vénération que les Grecs avaient pour les sources en général [FONTES, vvarPHAE] est attestée, à l'égard de celles à qui ils demandaient la guérison, par des inscriptions u exprimant leur reconnaissance et quelquefois mentionnant des offrandes faites aux Nymphes, à Esculape, à Hercule, à Apollon, à Artémis Thernzia ou protectrice des eaux chaudes. C'était une coupe précieuse, une statue, un bas-relief, quelquefois d'un grand prix, représentant ces divinités 19; plus souvent sans doute des figurines de bois ou d'argile 20 , ou des tablettes peintes , semblables à celles qu'on voit(fig. 395), dans une peinture de vase Y4, déposées par de pieuses mains à l'intérieur d'une fontaine ; ou bien des représentations des parties du corps guéries par le secours des eaux : on en a trouvé dans beaucoup de sta tions thermales datant de l'époque romaine, et de pareilles offrandes n'étaient pas moins dans les habitudes des Grecs [nONARIA]. E. SAGLIO. Il. Les sources minérales furent extrêmement fréquentées par les Romains. Ils dépassèrent de beaucoup les Grecs par l'emploi et par les applications variées qu'ils en firent dans les maladies' 2. L'Italie était riche en eaux thermo-minérales 29. Les écrivains grecs et latins du temps des Césars, de même que les nombreuses inscriptions découvertes près des sources, font foi que les malades s'y portaient en foule, et que dès lors beaucoup de gens en faisaient aussi des lieux de plaisir. Déjà du temps de Caton le censeur, on faisait un grand usage des eaux minérales; car Plutarque affirme dans la vie de ce Romain célèbre, qu'il acheta des sources naturelles d'eaux chaudes, comme étant plus productives que des champs cultivés. II résulte également des mêmes documents que les Romains préféraient aux eaux thermales les eaux minérales froides. H est probable, comme le fait justement remarquer.. Greppo 24, que cette préférence tenait à ce qu'ils étaient trèsadonnés à l'usage des bains chauds, qui faisaient, pour ainsi dire, partie de leur vie domestique. Les Romains regardaient aussi comme sacrées les sources thermales, et les avaient placées sous la protection des dieux. C'est pour cela que Pline dit qu'elles ont grossi la liste des divinités et que pour elles on a bâti des villes : par exemple, Pouzzoles en Campanie, Statyelles en Ligurie, Aix dans la Narbonnaise 25. En effet, outre les dieux du Panthéon romain, beaucoup de dieux ou de déesses topiques présidaient à ces sources, sans que pour cela les Nymphes perdissent rien de leurs droits sur elles. Et ces divinités locales imposèrent leurs noms à beaucoup de villes d'eaux : ainsi en Gau'se, du dieu tierce ou Bormo, trois villes thermales ont pris leur nom: ce sont Boutebonne les-Bains, Aquce Boroonis 26, Bourbon-Lancy 27, Agttae 1Visineiæ, et Bourbon-l'Archambault, Aquae Boranonis 23, Le dieu indu() ou Ll;:co a donné le sien à Luchon 29; et le dieu Lsxouius ou Lissoius, à Luxeuil 39. En Italie, une déesse ou un dieu appelé Ille,fitis était invoqué en plusieurs endroits où existaient des eaux sulfureuses 31 Les malades guéris ou soulagées par les eaux adressaient à ces divinités ou aux Nymphes des eaux leurs voeux exprïmés dans des inscriptions dont il nous reste un assez grand nombre 32. Leurs actions de grâces se retrouvent sur des autels votifs avec cette dédicace : AQUTS ou FONTIBCS 33. Les auteurs 3' et les inscriptions nous apprennent qu'elles étaient, comme chez les Crees, fréquemment consacrées à Hercule 36. Les malades ne se contentaient pas d'adresser des actions de grâces et de faire des dédicaces aux divinités des eaux, ils leur payaient en outre un tribut en jetant dans les piscines des pièces de monnaie, et d'autres objets. Effectivement, en faisant des réparations aux anciennes piscines des Aquae Apollinares (Bagni di Vicarello), on découvrit en 1853, dans l'eau minérale -AQU -= 336 AQL_ elle-même 36, outre une grosse masse de cuivre brut, une grande quantité de pièces de monnaie, quelques-unes très-anciennes, d'autres plus récentes, appartenant aux temps de la république et de l'empire. On trouva en même temps quelques vases d'airain et d'argent dédiés à Apollon, à Sylvain et aux Nymphes. Parmi ces vases, il s'en trouvait trois en argent (fig. 396) sur lesquels était gravé l'itinéraire de Gadès à. Rome. De même aux bains d'Arles, dans les Pyrénées-Orientales, pendant les travaux exécutés pour augmenter le volume des sources, la masse des eaux expulsa de l'intérieur, avec des monnaies d'Ernpories et de Nîmes, de petites lames de plomb pliées en trois ou quatre et chargées de caractères cursifs gravés à la pointe et très-altérés. Ce que l'on peut en déchiffrer démontre que ces objets sont des ex-voto en l'honneur des Nymphes et des divinités du lieu 94. Enfin, on a trouvé à plusieurs stations thermales des têtes, des membres, mains, bras et jambes, et même des figures entières en argile, analogues à celles en cire qui sont appendues dans nos églises. C'étaient sans doute les offrandes et ex-voto des pauvres gens [DONARIA] S8. Les villes d'eaux thermales étaient, nous l'avons dit, anciennement comme aujourd'hui, tout à la fois des lieux de traitement pour les malades et des endroits de plaisir et de mode pour les gens bien portants 39. Aucune n'égalait, sous ce rapport, les thermes fameux de Baïes, qui présentaient à la fois toutes les délices que peuvent réunir la nature et l'art 40. Strabon, Josèphe et d'autres auteurs disent que ces eaux attiraient un immense concours de baigneurs, mais qu'on y venait chercher moins encore la santé que les plaisirs de tout genre 41. Cicéron déjà, et après lui les auteurs du temps des Césars, célébraient Bides comme un lieu de délices où tout concourait à l'agrément des visiteurs, et qui retentissait incessamment du bruit des concerts. De nombreux passages des écrivains latins prouvent aussi que Sénèque n'a guère exagéré en affirmant que Baïes était bien dotée par la nature, mais que la débauche en avait fait son séjour favori; que c'était un rendez-vous des vices où le libertinage ne se refusait aucune satisfaction, où les désordres étaient tels que la licence paraissait un tribut que l'on devait à ce lieu 44. Il ne faut pas s'étonner après cela si dans des thermes moins célèbres et moins recherchés, on essayait d'attirer les baigneurs par des représentations théâtrales. I1 est difficile de dire quel degré de vraisemblance on peut assigner à cette conjecture; ce qui est certain, c'est qu'on a découvert à Bourhonne-les-Bains une inscription qui men tionne un Maronus, histrio, âgé de trente ans et surnommé Itocabaius 43. 11 se peut sans doute que ce Maronus soit venu aux eaux pour sa santé, mais il ne faut pas oublier que l'on a trouvé des ruines de théâtre dans plusieurs stations thermales. Dans des fouilles faites à Baden en Suisse, on a trouvé un nombre considérable de dés à jouer en os (tesserae fuse» iae) b1. Quant aux traitements que suivaient les malades, ils ne différaient pas sensiblement de ceux qui sont mis en usage de nos jours. Les anciens, en effet, avaient appris par l'expérience la plupart des applications des eaux thermales aux diverses maladies. C'est ainsi qu'ils les employaient en boissons, en bains et en douches ". Ils faisaient un grand usage de la vapeur se et même des boues minérales b7. Bien plus, au dire de Pline, ils employaient l'eau de mer ellemême, froide ou chauffée, en bains, en douches, en clystères et même en boisson comme purgatif". Ils en faisaient d'artificielle pour être employée loin de la mer 69. Malgré leur défaut absolu de toutes connaissances chimique, ils avaient appris à distinguer les divers caractères des eaux thermales et à les diviser en espèces suivant qu'elles contenaient du soufre, de l'alun, du nitre, du sel, du bitume, de la chaux, du cuivre, du fer. On peut voir dans le livre xxxl de l'Histoire naturelle de Pline jusqu'à quel pois t l'observation leur avait enseigné à employer telles ou telles eaux dans les différentes maladies, en variant les espèces d'eaux et leurs applications suivant les espèces et les caractères des affections diverses qui affligent l'homme. Presque aucune des stations n'a échappé à l'exploitation des Romains, et, à la grandeur des ruines qu'on y a retrouvées, on peut voir combien l'affluence des baigneurs y était considérable. Il y a aussi des raisons de croire que les Gaulois en faisaient usage même avant la conquête de César". Aucun texte précis ne démontre que des médecins fussent attachés aux stations thermales dans l'antiquité. Les habitudes administratives des Romains, telles que nous les connaissons, ne permettent guère de croire que l'État se soit occupé de ce détail. Mais il est certain pourtant que des médecins s'y rendaient ou y demeuraient pour donner des secours aux malades et les diriger dans leurs traitements thermaux. D'ailleurs, dans toutes les familles serviles un peu nombreuses, c'est-à-dire appartenant aux gens riches, il y avait un ou plusieurs médecins. On peut donc conjecturer avec toute vraisemblance, que les grands et les riches qui fréquentaient les stations thermales, s'y faisaient accompagner par le médecin de leur maison. construction destinée à conduire les eaux. 1. CIEZ LES GRECS. L'eau est une des plus précieuses richesses, et son absence une des plus cruelles privations des AQU 337 _AQU pays chauds. De bonne heure on dut sentir en Grèce la nécessité non-seulement de la recueillir et de la conserver au moyen de fontaines, de puits et de citernes, mais encore de l'amener d'une grande distance. Les villes bâties sur des hauteurs ( sur tout dans les plus anciens temps)étaient souvent dé pourvues de sources, ou bien elles en possédaient qui ne fournissaient qu'une quantité d'eau insuffisante. Peutêtre les Grecs prirent-ils d'abord exemple des Phéniciens, dès longtemps habiles à construire de remarquables édifices pour la conservation et la conduite des eaux, de même qu'ils apprirent d'eux à faire des routes 1; en tout cas ils restèrent constamment fidèles à la pratique de l'Orient, en dirigeant les eaux par des conduits souterrains qui se conformaient à la configuration du sol et en suivaient la dépression ou l'élévation naturelle, et non, comme le firent les Romains, à l'aide de canaux supportés par de longues séries d'arcades traversant presque en ligne droite les monts et les vallées. L'absence de ces somptueuses constructions en Grèce, avant l'époque romaine, a fait répéter souvent que les Grecs n'avaient pas eu d'aqueducs; on s'est fondé principalement sur un passage de Strabon "-, qui n'a fait que comparer cependant les beautés naturelles que les villes grecques devaient à leur site, toujours heureusement choisi, avec celles que les Romains ajoutaient aux leurs par de grands travaux d'utilité publique, tels que les chaussées et les aqueducs. Les aqueducs des Grecs, pour n'être pas apparents au-dessus du sol, n'étaient pas moins remarquables par la hardiesse de leur percement, par l'intelligence avec laquelle ils étaient accommodés à la nature du pays et par le soin apporté à leur construction, dont on peut juger dans les endroits où l'on en a conservé des restes. Les canaux d'écoulement du lac Copaïs en Béotie', auxquels l'Orchomène des Minyens dut sa plus grande prospérité, ne sont pas des aqueducs, dans le sens ordinaire du mot, puisqu'ils servaient, non à amener les eaux, mais au contraire à déverser le trop-plein du lac; mais ils peuvent être cités comme exemple de ce que les Grecs ont su faire en ce genre dès l'époque la plus reculée de leur histoire. Un canal de plus d'une demi-lieue de long, traversant la montagne au nord-est, faisait communiquer le lac avec la mer. On rencontre encore aujourd'hui dans celte direction, de distance en distance, de grands puisards par lesquels on peut atteindre à des conduits artificiels situés à une profondeur de soixante, de cent pieds et quelquefois davantage. Toute cette construction ressemble à celle des anciens aqueducs de l'Asie, qui consistent partout en conduits souterrains (uadvouol) et en puits verticaux (mps rfxt). Tels étaient, d'après Polybe qui emploie précisément ces termes, ceux 1. qui portaient les eaux du Taurus à HécatompyIos, l'ancienne résidence des Arsacides. Ils ont été retrouvés en partie par les voyageurs modernes, et des observations semblables ont été faites en Perse, en Phénicie, en Palestine, en Syrie et dans l'Asie Mineure. Nous donnons ici (fig. 397 et 398) la coupe d'un aqueduc construit à une époque moins ancienne que celle qui nous occupe, mais d'après les mêmes principes, qui a été retrouvé parmi les ruines de Palmyres; il est en beaucoup d'endroits interrompu et détruit, mais en d'autres parfaitement conservé ; ses ramifications s'étendaient en partie sous le sol, en partie au-dessus, dans la ville entière. Il n'est guère douteux que ce système n'ait passé d'Orient en Occident dès un temps fort ancien. Nous avons parlé des canaux d'émission du lac Copaïs. Thèbes attribuait à Cadmus l'établissement des conduits qui portaient l'eau jusque dans sa citadelle G. Argos faisait remonter à Danaüs la canalisation des eaux torrentielles des montagnes, qui avait, dès avant Homère, converti sa plaine aride (no)u:f~wv 'Apyoç 7) en champs fertiles et en pâturages creusés, en partie édifiés, recevaient les eaux au sortir des montagnes pour les conduire dans la ville; il en existe encore des traces. On en rencontre d'autres sur l'emplacement de l'antique Mycènes Samos avait un aqueduc, admiré par Hérodote10 comme un des plus magnifiques ouvrages de la Grèce, qui traversait une montagne pour conduire les eaux à la ville. Une galerie avait été percée sur une longueur de sept stades ; elle avait huit pieds (2°',48) de hauteur et autant de largeur, et dans le sol de cette galerie on avait creusé un canal d'une demi-coudée (0`",237, ataûnS 3) de profondeur sur trois pieds (Om,93) de largeur. Cette remarquable construction, vraisemblablement du temps où Polycrate régnait à Samos 1f, était une oeuvre de l'architecte Eupalinos de Mégare. Des fouilles faites par M. Guérin ont fait retrouver les restes d'un canal souterrain qui devait être la prolongation de celui-là, et de puits verticaux servant de regards. Mégare aussi possédait une fontaine d'une somptueuse architecture, alimentée par des sources du Cithéron, et qu'elle devait au tyran Théagènes 12. L'époque de la tyrannie paraît avoir été favorable, en Grèce comme à Rome, à l'exécution de grands travaux publics; et il n'y en avait pas de mieux faits pour la rendre populaire que ceux qui assuraient l'abondante distribution de l'eau, Il en fut de même à Athènes 13. La sécheresse du sol de l'Attique devait rendre ses habitants particulièrement industrieux à se procurer l'eau ; elle en fut surtout pourvue sous le gouvernement des Pisistratides. Athènes n'avait, à l'origine, 43 At;-. 338 -je- en dehors de l'Acropole où coulait le mince filet de la Clepsydre, qu'une seule source d'eau potable, la célèbre Callirhoè94 ; elle reçut ensuite les eaux de l'Hymette et celles du Pentélique.Del'Hymettepartaient deux cours d'eau qui se dirigeaient vers la ville, en passant sous le lit de l'Ilissus par des canaux taillés dans le roc. Le Pentélique en fournissait davantage : des conduits souterrains, qui subsistent en grande partie et dont on peut voir encore les regards placés à une distance de 40 à 50 mètres l'un de l'autre, quelques-uns ayant leur ouverture un peu au-dessus du sol, aboutissent à l'est, du côté d'Alopèkè, de même que les eaux de l'Hymette, au réservoir commun d'où elles se distribuent encore aujourd'hui dans la ville. Le Paridés aussi fournissait de l'eau à Athènes, et quelques restes de ses anciens conduits et des ouvertures servant à leur aération existent encore; d'autres conduits viennent du Lycabète ; on a reconnu aussi un aqueduc clans la vallée au sud de l'Acropole. Les canaux, de formes et d'époques différentes, que l'on a pu observer à Athènes sont pour la plupart construits en pierre et couverts de tuiles ou de dalles plates; les plus importants sont assez larges et assez hauts pour que deux hommes puissent y passer. Sur quelques points, par exemple près de la Tour des Vents, on rencontre trois aqueducs superposés de dates diverses. Une partie des eaux dont il vient d'être parlé, coulaient jusqu'au Pirée', qui en recevait en outre par un autre aqueduc souterrain venant du Korydalos. Toute la plaine anlon,' d'Athènes recouvre un vaste réseau d'aqueducs qui mettaient à portée des besoins de chacun, les uns l'eau qui descendait des montagnes, les autres celle qu'on recueillait en creusant jusqu'à la couche inférieure d'argile 's. Longtemps oubliés, parce qu'ils sont enfouis, ils ont cependant survécu au somptueux aqueduc romain qui conduisait dans la ville agrandie par Hadrien l'eau du Céphise, et l'Athènes moderne profite encore des travaux exécutés, il y a tant de siècles, par l'Athènes antique. Les aqueducs par lesquels Syracuse 17 recevait et reçoit encore en partie, au nord, l'eau de l'Anapos, au sud, celle des sources du Crimiti, sont de même placés sous terre ; on peut en reconnaître la direction, en observant les restes des réservoirs et des fontaines qu'ils alimentaient, et les ouvertures, d'un beau travail grec, pratiquées dans le roc vif, des puits nombreux qui servaient à leur entretien et à leur aération. De la ville, l'eau coule, comme jadis, sous le fond de la mer, jusqu'à Ortygie. Nous ne ferons que mentionner d'autres aqueducs dont on trouve l'indication dans les anciens écrivains, ou dont les restes ont été observés par les -voyageurs, à Cirrha'a, à Sicyone 48, à Crissa en Phocide 20, à Chalcis ", Démétrias de Magnésie 2', à Philippi23, à Gythiurn '4, à Cyrène 2°, dans la Troade 26, etc. Dans ce dernier endroit ont été trouvés des tubes de terre cuite (n piYyet ŒD,ol), intacts, d'un excellent travail, dont un est ici reproduit (fig. 399) ; mais il sera parlé ailleurs des tuyaux servant à distribuer les eaux Nous renvoyons aussi à un autre article pour les conduits qui alimentaient les fontaines et qui faisaient partie de leur construction [FONTES]. Les aqueducs de la Grèce dont on voit des restes élevés audessus du sol peuvent être considérés, en règle générale, comme appartenant à la période romaine. Il s'en rencontre, même de ce temps, qni sont souterrains, comme celui qui, sous l'empereur Hadrien, fut établi entre Stymphale et Corinthe 27 sur une longueur de près de cent mille mètres. La pratique des Grecs fut celle que leur enseignait la nature : elle leur montrait les sources des montagnes se frayant des routes profondément encaissées dans les rochers, et disparaissant souvent entièrement pour reparaître plus loin fraîches et limpides ; ils surent en l'imitant conserver à leurs cours d'eau artificiels une température égale, et leur assurer une durée illimitée, puisqu'on en retrouve qui fonctionnent encore en beaucoup d'endroits. Ils surent aussi, avant les Romains, qui ont profité de leurs enseignements, ménager des ouvertures pour aérer l'eau et donner un dégagement aux gaz qu'elle contient; ouvrir des regards où elle pût reprendre son niveau, dans les endroits où les conduits s'abaissent avec le terrain (xocÀiu, venter 20) ; la faire reposer pour la clarifier dans les réservoirs, puis la diviser pour la distribuer avant son écoulement par les fontaines. E. SAGLIO. Orient et dans les pays grecs, que l'on a construit des aqueducs suivant la méthode qui vient d'être exposée. On en rencontre de semblables en Italie, dans les contrées qu'habitèrent les Étrusques, si habiles dans tous les ouvrages destinés à faciliter l'écoulement des eaux, et qui furent en cela les maîtres des Romains [EMISSARuusl, CLOACA]. Nous nous contenterons de faire remarquer que, pour ouvrir l'émissaire du lac d'Albano, dont les travaux furent conduits d'après les procédés habituels aux Étrusques, un canal souterrain, que l'on peut suivre aujourd'hui sur une longueur de 2,500 mètres, fut creusé pendant que le cratère du mont Albain était rempli d'eau; ce canal n'avait qu'une hauteur d'homme environ, sur un mètre et demi de large; des puits verticaux, dont quelques-uns existent encore, placés à 40 mètres l'un de l'autre, servaient à la ventilation et à l'extraction des déblais. L'exécution de cette opération gigantesque fut, grâce à cette division du travail, poursuivie sur plusieurs points à la fois; deux cents ouvriers pouvaient travailler en même temps, ce qui explique la rapidité avec laquelle elle fut achevées. E. S. III. CHEZ ms ROMAINS. Il n'est pas douteux que les Romains n'aient suivi d'abord, dans la construction de leurs aqueducs, la coutume ancienne. Le premier qu'ils élevèrent 30 sur des arcades, ce qui donne à ce genre de monuments, chez eux, un caractère si frappant, n'était porté par ces substructions que dans un espace de soixante pas; il commençait à deux lieues environ de Rome, sur la voie Prénestine, et aboutissait, au pied de l'Aventin, entre la porte Capena et la porte Trigemina. Toute la partie en AQI1 ®-3-39 AQU dehors de la ville était sous terre. Cet aqueduc fut édifié l'an 441 de Rome (313 av. J.-C.), sous la censure d'Appius Claudius Camus, d'où il prit le nom d'aqua Appia. Des fouilles récentes ont fait retrouver, près de la Porta Maggiore, le canal de cet aqueduc taillé dans le roc, haut de six pieds, large de trois, et aéré par plusieurs puits ver ticaux n. Quarante ans plus tard, en 273 av. J.-C., M. Curius Dentatus commença pendant sa censure, et Fulvius Flaccus acheva, en 271, un nouvel aqueduc qui prenait au-dessus de Tibur l'eau de l'Anio, à vingt milles de Home. Il avait une longueur de 113,000 pas ; sur 221 seulement les constructions s'élevaient au-dessus du sol. On l'appela Anio vetus, pour le distinguer d'un autre aqueduc qui reçut aussi sous l'empire l'eau de l'Anio (Anio novas) ; la dépense fut défrayée par une partie du butin fait sur Pyrrhus 3'. En 144 av. J,-C., le préteur Q. Marcius Rex, sur l'ordre du sénat, construisit le grand aqueduc qui porta le nom d'aqua Marcia. Il avait une longueur de 61,710 pas, dont 7,463 au-dessus du sol; dans un espace de 6,935 pas il était supporté par des arcs assez hauts pour conduire l'eau jusqu'au sommet du mont CapitolinII3. Il fut réparé plusieurs fois sous les empereurs 34. Une grande partie est encore debout, Un autre aqueduc, laqua Tepula, qui amenait au Capitole de l'eau prise dans le champ de Lucullus, vers le dixième milliaire de la voie latine, fut construit en 126 av. J.-C. par les censeurs Cn. Servilius Caepio et L. Cassius Longinus"; il rejoignait au septième mille 1'aquaMania, et coulait clans un canal séparé, porté par les mêmes substructions. La quantité d'eau (11,348 quinarii) amenée par ces quatre aqueducs n'était déjà plus suffisante au temps d'Auguste, qui, l'an 34 av. J.-C., fit embellir Rome de 700 bassins (bleus), de 105 fontaines jaillissantes (salientes), et de 130 châteaux d'eau (castella), dont plusieurs d'une grande magnificence ; il ouvrit 170 bains gratuits à l'usage du peuple. Par les soins de son édile Agrippa, l'an 35 av. J.-C., il avait réparé les anciens aqueducs et amené, par un nouveau conduit de laqua Marcia, Vaqua Jolie, recueillie dans la vallée comprise entre Tusculum et le mont Albain3°; l'an 22, il inaugura laqua Virgo, aqueduc qui conduisait, et conduit encore, par des canaux en partie souterrains, en partie supportés par des arcs, l'eau d'une source située au huitième milliaire sur la voie Collatine, et qui aboutit à Rome, au sud du Champ de Mars et à l'est du Panthéon". Claude le répara38. Cette eau était surtout estimée pour 1.es bains". Auguste amena aussi laqua Alsictina, tirée du lac Alsietinus (lago di Martignano), à 6;500 pas à droite du quatorzième milliaire de la voie Claudia. Son eau peu estimée servait aux arrosages et à alimenter la naumachie; elle desservait aussi le quartier de la rive gauche du Tibre, quand l'eau venait à y manquer40. Deux aqueducs plus importants encore, 1' (qua Claudia et l'Anio novas, furent ajoutés aux sept que Rome possédait déjà, et qui ont excité l'admiration de Strabon et de Denys d'Halicarnasse 41 : l'un et l'autre furent commencés sous Caligula et achevés sous Claude. Le premier recevait les eaux de deux sources très-pures, appelées Caerulus et Cure Hus, vers le trente-huitième milliaire de la voie Sublacensis, et d'une troisième un peu plus près, l'Albudinus, non moins estimée. Cet aqueduc parcourait un espace de 46,406 pas, dont 36,230 dans des conduits souterrains42. Vespasien, Titus, Dioclétien y firent des réparations 43 L'aqua Claudia, qui s'élevait à 47m,42 au-dessus du quai du Tibre, n'était dépassée en hauteur que par l'Anis novas, dont l'eau recueillie vers le quarante-deuxième milliaire de la voie Sublacensis, était portée par les mêmes arcs que 1'aqua Claudia, mais dans un conduit supérieur. C'était aussi l'aqueduc qui avait le plus long développement : il parcourait un espace de 58,'700 pas. Ces neuf aqueducs sont ceux dont parle Frontin, qui fut curator des eaux sous Nerva et Trajan. Il faut y ajouter l'aqua Crabra, dont l'eau, prise à ce qu'il semble un peu au-dessus de Tusculum, ne fut sans doute jamais conduite à Rome par un aqueduc particulier et fut abandonnée aux besoins de Tusculum par Agrippa : c'est, selon toute apparence, celle que l'on trouve plus tard désignée sous le nom de Damnait'''. Deux nouveaux aqueducs furent construits, l'un sous Trajan, l'aqua Trajana, qui porta les eaux du lac Sabatinus (lago di Bracciano) au Janicule et dans la région transtibérine " ; l'autre sous Alexandre-Sévère, l'aqua Ale.randrina, destiné à alimenter les thermes qui portaient le nom de cet empereur4°. Nous laisserons de côté d'autres aqueducs secondaires sur la direction desquels on n'a que des données incertaines, ou qui ne sont que des dérivations de quelques-uns des précédents47; c'est seulement en les comptant, ou par des confusions de noms, qu'on arrive à compléter la liste des dix-neuf aqueducs indiqués par la Notifia regtonum urbis et, le Curiosum urbis b'omae regionum xIIII, documents qui datent du quatrième siècle de notre ère. Procope dit4fi qu'il y en avait quatorze en 537, quand Vitigès assiégea Rome. Disposition et construction des aqueducs. Les eaux étaient dirigées par des canaux dans un réservoir commun où l'aqueduc prenait naissance (caput aqua.e). Quand les eaux étaient tirées d'un fleuve, comme les deux AutÙ, ou d'un lac, comme l'Alsietina, le conduit (specus, candis) s'ouvrait immédiatement sur le fleuve ou sur le lac. Vitruve recommande 49 de ne pas prendre les eaux aux sources de plaine. « Le soleil, dit-il, qui absorbe les parties les plus légères de l'eau dont la terre est imbibée, n'y laisse que les parties les plus pesantes, les plus crues et les plus désagréables. » C'est pourquoi il prescrit aussi de couvrir les aqueducs de façon que le soleil ne darde point sur l'eau ses rayons; on leur donnait la ventilation nécessaire au moyen d'ouvertures (lumen, spiramen) placées à intervalles de 240 pieds °". Pendant longtemps, on l'a dit plus haut, les Romains enfouirent les conduits, peut-être _AQL` 340 AQU par crainte qu'ils ne fussent coupés, dans leurs guerres incessantes, par des ennemis qui venaient jusqu'à leurs portes; ils s'assujettirent par conséquent à suivre, par des canaux souterrains (cuniculi), les contours des vallées. Dans la suite, lorsque quelques-uns de ces anciens conduits se trouvaient ruinés par le temps, on abrégea leur parcours en traversant les vallées, au moyen de constructions soit pleines, soit évidées, suivant la hauteur G1. La pente donnée à ces conduits (libramenlum, vis currendi) n'était pas toujours la même : il résulte des mesures prises sur les ruines subsistantes qu'elle variait de un pied pour cent à un pied pour cinq mille 5â. Cette dernière mesure s'approche de celle que donne Pline, qui indique un pied de pente sur 4,860 53. L'aqua Vit-go (actuellement eau de Trevi) prouve encore aujourd'hui qu'une telle déclivité est suffisante. La pente de l'aqueduc du Gard est d'un pied pour 2,500. Vitruve veut que l'on donne aux canaux en maçonnerie une pente d'un demi-pied pour cent au moins. L'aqueduc moderne d'Arcueil n'a que 0",162 sur 3890,807 ; celui de Roquencourt a 00,975 sur 3,3130,361. Quand, par suite du rapport entre la distance de la source à la ville et la différence des niveaux de ces deux points, la pente était trop rapide, on l'atténuait en faisant parcourir aux conduits un espace plus grand que la distance entre la source et le point d'arrivée : ainsi les sources qui alimentent l'aqueduc du Gard ne sont situées qu'à 3 lieues de Nîmes, et cependant l'aqueduc se développe sur un parcours de 7 lieues 5'. Des coudes, en coupant le courant, étaient la conséquence de ces détours; ils servaient parfois à modérer l'impétuosité de l'eau qui, augmentant toujours de vitesse, aurait par sa force d'impulsion détruit ou détérioré les canaux. On obviait aussi à l'inconvénient d'une trop grande pente, en adoptant tout d'abord une inclinaison convenable; puis, au lieu de prolonger le specus sans interruption jusqu'à la ville, on s'arrêtait après un certain parcours et on établissait un autre specus à un plan inférieur, ayant même inclinaison que le premier; on réunissait ces deux specus par des gradins ou par un puits circulaire, comme à l'Anio novus. Quelquefois aussi ces détours étaient le résultat de la recherche, au fond des vallées, des niveaux de sols assez élevés pour éviter d'établir des constructions trop hautes : c'est ainsi qu'à l'aqueduc de Ségovie, en Espagne, on remarque, entre deux collines, un angle ou pli exécuté pour aller retrouver dans le centre de la vallée, un terrain plus élevé 55. On peut voir plus loin (fig. 400) une déviation analogue de l'aqueduc d'Aspendus en Asie Mineure. Quand un aqueduc avait à traverser la masse résistante d'une montagne, on revêtait simplement les parois avec un composé de chaux et de pouzzolane bien mélangés, pour éviter toute filtration, ainsi qu'on peut le voir encore dans quelques-uns des aqueducs qui ont été conservés. Si le roc était trop dur, on faisait un détour pour l'éviter. Si, au contraire, le terrain était susceptible de s'effondrer, on construisait des voûtes et des murs revêtus de tuiles pilées, de chaux et de sable (opus signinum 56); parfois ces murs étaient entièrement construits de chaux, de sable et de cailloux cassés ne pesant pas chacun plus d'une livre, mélange appelé aussi opus .signinum 57. A Tusculum il y a un reste d'aqueduc souterrain dont la partie inférieure est creusée dans le roc. Au-dessus de Tivoli, à Vicovaro, on peut suivre, pendant plus d'un mille, un aqueduc taillé dans le roc, qui a cinq pieds de haut sur quatre de large. Le tuf de la campagne romaine, par sa consistance, permettait de ne pas construire de murs ; telle est raqua Virgo qui, en entrant dans Home, traverse le monte Pincio, sous la villa Médicis. Des canaux souterrains, assez élevés pour qu'un homme pût y passer, conduisaient les eaux de l'aqueduc de Metz à la naumachie J8. Des canaux analogues se reliaient à l'aqueduc du Gard. Près de Chelves, en Espagne u, le rocher est percé en certains endroits pour livrer passage à l'eau. En un point, il a été complétement coupé depuis son sommet jusqu'au nivellement de l'aqueduc : c'est un canal à jour de 33 mètres de profondeur sur une longueur de plus de 67 mètres; on a laissé quelques masses de pierre entre les deux parois pour servir d'arcs-boutants ; l'empreinte des instruments employés pour ouvrir ce conduit est encore visible. Des puits, de distance en distance, permettaient d'aérer les canaux souterrains et d'extraire les déblais fi0. Ces puits étaient creusés au-dessus de ces canaux, ou sur leurs flancs. Le canal était quelquefois mis en communication avec l'extérieur au moyen d'escaliers, comme on le voit au monte Pincio, et à l'émissaire du lac Fucin 61 L'eau coulait enfermée dans un canal de maçonnerie (specus, aquagium, forma, canalis structilis), ou dans des tuyaux de plomb ou de terre cuite [Yunus, FISTULA], quelquefois de bois ou même de cuir épais. Les conduits (specus) des aqueducs étaient en pierres, en maçonnerie ou en briques, revêtus d'un fort enduit en opus signinum. Le canal du pont du Gard, tout en pierre, a 10,32 de large sur 1m,64 de haut dans oeuvre; ses murs latéraux ont 00,825 d'épaisseur ; il est couvert en dalles de 0m,33 d'épaisseur, sur 1 mètre de large et im,99 de long, en sorte qu'elles portent d'un mur à l'autre : les joints sont garnis en ciment. Sur les parois latérales une épaisseur en ciment de 0",(82 recouvrait les pierres, et sur ce ciment on avait passé une couche de peinture ou enduit très-fin de bol rouge, pour empêcher toute filtration. Le fond de ce canal est en blocage de chaux, de gravier et de petites pierres, ayant d'épais 00,22. Les canaux superposés de la porta Maggiore à Home sont en pierre de travertin. Le canal de l'aqua Claudia a 1',12 de haut sur 00,91 de large ; celui de l'Anio a 20,73 de haut et 1',58 de large. Il y a un bel exemple de specus à la section de l'aqueduc de Trajan, près la villa Panfili; le canal est en maçonnerie de briques revêtue d'un fort ciment de chaux, sable et tuileaux bien broyés et bien battus. Le specus de l'Anio novus, au delà de Tivoli, est en briques ; des soupiraux 68 ont été ménagés de distance en distance dans la partie supérieure, tant pour exercer la surveillance que pour faciliter les travaux et l'aération. Le canal de raqua Antoniana, construit en briques par l'empereur Antonin Caracalla, avait de large 00,82, de hauteur, jusqu'à la naissance de la voûte, et de corde 00,39; les murs avaient 00,91 63. Le specus de l'aqueduc de Patare 64 est composé de pierres calcaires percées suivant une forme cylindrique, de telle sorte qu'étant placées les unes au bout des autres, elles présentent un canal blocage citerons pour exemple un aqueduc situé entre les villes de Kenkbelen et de Selek en Asie Mineuresa; ou bien encore on se servit des pierres jointes à la brique et au blocage : tel est l'aqueduc de Mérida. trois cours d'eau qu'il portait et le détail de sa construction''. L'aqueduc de Z umhat-Kalesi est en grand appareil"; chaque pierre posée sans ciment est taillée en bossage. Les aqueducs dont il vient d'être parlé n'ont qu'une seule rangée d'arcades, tandis que d'autres en ont deux AQU AQU semblable à un tuyau. Ce canal réunit les collines qui dominent la baie de Kalamacki ; il suit les deux pentes de la vallée qu'il traverse, et remplit l'office de siphon renversé. Vitruve es ne conseille les aqueducs de ce genre qu'avec l'emploi de tuyaux en plomb ou en poterie. Ils ne pouvaient recevoir d'ailleurs une grande quantité d'eau; autrement la force d'impulsion eût tout rompu , quelle qu'eût été la résistance des conduits. L'application de tuyaux en plomb, posés dans des conditions analogues, a été faite à l'aqueduc de LyonBe; qui traverse le mont Pilate et les vallées de Garou, de Bonan et de Saint-Irénée. Les eaux descendaient au fond de la vallée et remontaient ensuite, en vertu de leur propre pression, dans des tuyaux disposés en forme de siphon renversé, et soutenus dans leur partie inférieure, qui était horizontale, par des arcades en maçonnerie. Un autre exemple d'aqueduc à. siphon est celui d'Aspendus, en Pamphylie, qu'on voit ici (fig. 400) dessiné d'après une photographie 67. Le specus était supporté par un mur (substructio), plein ou percé d'arcades (aecltationes). L'emploi du mur était rare au delà d'une certaine élévation. Les arcades,moins dispendieuses, présentaient aussi plus de solidité et ne fermaientpoint lavue. Ces constructions ont des caractères différents suivant le pays et l'époque où elles ont été faites. On s'est servi de pierres quadrangulaires,pépérin, tuf ou travertin, sous la république, comme le prouve raqua Mareia,etsousles premiers empereurs, comme l'indique laqua Claudia. La maçonnerie de blocage revêtue de briques ou d'opus reticulatuni fut ensuite employée : telle on la voit à laqua Antoni niana; on fit aussi usage des moellons réunis au et à l'opus reticulatum : nous A l'approche de la cité on utilisait quelquefois les arcades d'un aqueduc pour supporter un deuxième et même un troisième canal. Les aqueducs, qui traversaient les voies principales conduisant à Rome, étaient à cette intersection décorés d'un motif spécial et même monumental dans le style des arcs de triomphe : tel est celui de laqua Virgo qui se voit encore dans le palais du Buffalo. Le double aqueduc de l'aqua Claudia et de l'Anio nouas; le triple aqueduc qui porte laqua Marna, laqua 3'epula et l'aqua Julia, en sont surtout de remarquables exemples. Le premier, qui forme à son entrée dans Rome la Porta Maggiore (fig. 401), fut commencé par Caligula, inauguré par Claude aa ; il est construit en blocs de tuf, de pépérin et de travertin; ses arcs mesuraient 70 jusqu'à 35 mètres de haut. Les conduits de raqua Claudia ont un parcours de 46,106 pas, dont 10,176 en arcades ; ceux de l'Anio, 58,700 pas, dont 9,100 en arcades; réunis, ils apportaient 9,345 quinarii, dont 4,607 pour la Claudia et 4,738 pour l'Anio, tandis que les sept autres aqueducs en donnaient ensemble seulement 15,460. Le second des deux aqueducs cités plus haut montre clairement, par la coupe faite sur l'arc appelé actuellement Porta San-Lorenzo (fig.409.), la superposition des superposées, comme celui de Ségovie, en Espagne, ou même trois, comme celui du Gard, L'aqueduc de Ségovie" est en pierres de taille posées sans ciment; les arcs ont 5m,72, les piles ont le quart des arcs. Les piédroits de la première rangée d'arcades s'élar -isseni de haut en bas par des retraits couronnés de moulures. L'aqueduc a 66 mètres de 1 les faces intérieures des arcades. L'aqueduc du Gard, près de Nîmes (fig. 403)", est bâti en gros quartiers de pierres polies, à joints secs et bien posés, qui ont 2,60, largeur de la face des piles, sur 2°',65 et 0°',57 de haut. Il est composé de deux étages de grandes arcades, et d'un troisième rang de petites, qui porte le speeus. L'arc sous lequel passe le Gardon est plus large que les autres. Laqua Alexandrina, construite par Alexandre-Sévère, l'an 225 de l'ère vulgaire, est un ouvrage tout en briques n dont les haut. Celui de Tarragone a aussi une double rangée d'arcades ; il est construit en pierres à bossage ; sa hauteur totale est de 31 mètres, sa longueur de 218 mètres 74. Les piliers des ares inférieurs sont en talus des quatre côtés; ceux des arcs supérieurs sont, en façade, à-plomb de la dernière assise des précédents, et ne diminuent que sur arcs étaient coupés par d'autres de manière à former deux étages dans les endroits où il y avait trop de hauteur; il en était de même à l'aqueduc de l'Anio, au-dessus de Tivoli, et à l'aqueduc de Carthage " qui avait vingt-trois lieues de long. L'aqueduc de Metz ie est en briques, avec des retraits aux piédroits dans le milieu de la vallée où passe la Moselle, les arcs, plus larges que ceux des extrémités, sont surmontés d'un rang d'arcs plus petits et plus nombreux. Nous citerons encore, parmi les travaux en briques les plus remarquables, les contre-forts que dut établir A grippa lorsqu'il plaça au-dessus de la Nlnn-cia et de la Tepula le conduit de la Julia; et les arcades que Néron fit construire pour conduire les eaux de l'Anio novas et de la Claudia au mont Coelius et à l'étang qui porte son nom. Ces arcades furent prolongées par Septime-Sévère pour amener les eaux au Palatin, à l'Aventin et dans la région transtibérine. Les restes de l'aqueduc de Trajan près de la villa Panfili, en dehors de la porta San-Pancrazio, sont composés en partie d'opus relieulatum, en partie de briques, beau travail, d'une grande précision. Pu temps de Procope, cette eau faisait mouvoir les moulins placés sur la pente du Janicule 79. Tronqué par Vitigès, relevé par Bélisaire, abandonné dans la suite, il fut rétabli par Paul , lorsque celui-ci créa la fontaine Pauline. Les deux aqueducs de Mérida dans l'Estramadure ne le cédaient en rien à ceux de Rome 80. Le plus grand a 37 piles encore debout, et quelques-unes soutiennent trois rangs d'arcs, les uns au-dessus des autres. Le conduit est élevé à 23,50 au-dessus du sol. La construction est un mélange de pierres et de ciment, revêtu à l'extérieur de belles pierres bien taillées en bossage, d'une symétrie parfaite, d'une grande dimension et séparées, de cinq assises en cinq assises, par des filets de briques. Constantinople avait des aqueducs de pierre, dont deux, qui subsistent encore en partie, nous en montrent toute la magnificence : l'un porte le nom de Valens, l'autre celui de Q --1343 OU Justinien; ruais quelques personnes pensent que ces noms sont ceux des empereurs qui les ont restaurés, et que le premier fut élevé par Hadrien, le second par Constantin; ils furent souvent réparés par la suite sous les empereurs grecs et sous les Turcs, leurs successeurs. L'aqueduc de Justinien avait un passage pour le public, qui traversait les piles dans leur milieu, au-dessus du premier rang d'arcades, sur une largeur de 1m, 299 81. Aux aqueducs romains qui ont été indiqués dans ce qui précède, on en peut ajouter un grand nombre dont on voit encore les ruines". Nous devons nous contenter de renvoyer aux études dont ils ont été l'objet de la part des antiquaires et des voyageurs et de faire remarquer que les Romains ont pourvu au besoin d'eau, partout où ils se sont établis, avec une abondance et une magnificence qui dépassent de beaucoup ce qu'ont fait les modernes 83. Les eaux étaient reçues près des murs de la ville dans de grands réservoirs où elles se purifiaient, en y déposant les matières qu'elles tenaient en suspension, et dans les châteaux d'eau, où débouchaient les tuyaux destinés à les répandre dans les différents quartiers [CASTELLUM, PISCINA LIMARIA]. La distribution des eaux s'opérait par des tuyaux [FISTULA] dont les orifices étaient de 25 modules différents. La jauge Si des tuyaux se faisait dans le château d'eau, au moyen de calibres en bronze (catix), au nombre de 25. Celui qui servait d'unité était appelé quinarius, et avait pour diamètre u un doigt ,M; il présentait une surface de 0m,423 millimètres carrés, Le doigt (digitus) était l'unité de mesure; il égalait la seizième partie du pied romain, soit 0m,019. Le pied romain, ou pied du Capitole, égale 0m,297. Sous la direction de Frontin, les neuf aqueducs , d'après les mesures prises par lui aux sources mêmes, devaient apporter à Rome 24,805 quinarii. Mais ce chiffre n'était pas celui des registres sur lesquels étaient inscrites toutes les eaux distribuées dans la ville et dans les environs : il y avait beaucoup de fraudes et de déperditions. Le niveau de ces eaux était différent : l'Appia, la moins élevée, avait 8m,37 au-dessus du quai du Tibre, à la cloaca Maxima, après un parcours de 11,190 pas, dont 60 seulement en arcades, près de la porte Capena, La Marria avait 37m,48 d'élévation, après un parcours de 61,710 pas. L'Anio, la plus élevée de toutes, avait 47m,52, toujours audessus du quai du Tibre, après un parcours de 58,700 pas. Le pas était égal à lm,485, On peut apprécier le débit que les aqueducs avaient à Rome, d'après celui des trois conduits anciens qui amènent encore aujourd'hui l'eau dans la ville. L'aqua Virgine ou de Ï revi, l'ancienne aqua Vingt), réparée sous Nicolas V, Sixte IV et Pie IV, débite 65,780 mètres cubes d'eau, et l'aqua Felice, l'ancienne Alexandrine, restaurée par Sixte V 80, produit 20,537 mètres cubes en vingt-quatre heures. L'agita Paola, anciennement l'Alsietina, rétablie par Paul V, fournit 94,181 mètres cubes; ce qui donne, pour ces trois aqueducs, un total de 180,500 mètres cubes. Les empereurs et beaucoup de particuliers construisirent aussi de leurs propres deniers des aquedu saient l'eau à leurs bains, ou aux fontaine cascades qui embellissaient leurs villas. C ment à grands frais que ces eaux étaient an t par des aqueducs spéciaux qui remontaient j'même, soit par un embranchement sui les l'État, Près de Tivoli, on voit encore les restes qui alimentait la villa Adriana, et dont les prises à l'aqua Claudia : il existe des vestiges ii'; qui amenait l'eau à la villa des Quintilil, tres exemples, il suffit de parcourir la came pour voir qu'elle est sillonnée de ruines qi] do la quantité de ces aqueducs particuliers. 1. Construction et em,, sous la république, lac ueti,.,s ;, tr ,nait saurs; nous devons écarter 1 -irlt'u q dot) e a aux édiles; les aqueducs de Rome, pendant la repu. que, ont tous été établis ci par les censeurs, vérit, ']les ministres des finances et des travaux publics[aENSUs]. Tous furent exécutés, en effet, avec les fonds de l'État votés par le sénat, et le plus souvent sur les excédants des recettes ; ces entreprises avaient lieu à cbagae renouvellement de lustre'°. La plus forte dépense de l'E Mt, écrit Polybe", est celle que les censeurs font tous les cinq ans pour élever et réparer les édifices; c'est le sénat qui l'autorise et donne le pouvoir de la faire, Il faut voir une exception dans l'aqueduc que construisit le préteur Marcius (608 de Rome): il agissait en vertu d'un sénatus-com suiteIl nous paraît donc incouteslable que toutes les fois, que la république avait un censeur en charge, lui seul avait le droit d'ordonner ces travaux, de les organiser, de choisir l'adjudicataire, etc. L'exemple d'Agrippa, le vendre d'Auguste, qui construisit plusieurs aqueducs", à une époque où la censure avait cessé d'être ce qu'elle était sous la ré publique, n'infirme point ce qui vient d'être dit. Agrippa en fit seul tous les frais, usant du droit, que lui donnait son titre d'édile de s'occuper des travaux publics [AEDILES]. Les Romains avaient un mot pour caractériser les actes de générosité de ces magistrats : largitio aedilitia, il était aussi d'usage, sous la république, d'affermer les travaux à exécuter, si minime que Rit leur importance. Des entrepreneurs publics (redemptores) étaient pour ce motif tenus d'et voir un certain nombre d'esclaves employés constamment :à entretenir et réparer(restituere, reponet'e, retlceee, resarei"P[ les aqueducs, tant dans Rome que hors de Rome.Les noms de tous ces ouvriers, l'ouvrage dont ils étaient chargés, et le quartier où ils devaient l'exécuter, étaient fuser;, sur dus registres publics (tabulae puilie,ae) 9zp Grâce à nos Lions, le contrôle des magistrats s'exerçait plus fut et plus sûrement. L'entreprise des travaux publics comprenait des devoirs de deux sortes : la lecatio et la probalio°°. il appartenait en principe aux censeurs, et par exception seulement au," consuls, aux préteurs, aux édiles et aux questeurs, aie AéOli donner les travaux à l'entreprise (locntio)9". Le soin d'approuver les ouvrages" (probatio) était confié tantôt aux censeurs, tantôt aux édiles, ou môme aux questeurs; il en devait sans doute être ainsi lorsqu'il était nécessaire de réparer plusieurs aqueducs en même temps. L'établissement des aqueducs donnait lieu à de véritables expropriations pour cause d'utilité publique. L'État ou la commune achetait le terrain entier sur lequel devait passer l'aqueduc. On arriva de cette façon à fixer d'une manière certaine le droit des limites entre les particuliers et la républiqueD0. Le terrain inutile était revendu; mais de chaque côté de l'aqueduc, on avait soin de réserver, en en marquant la limite au moyen de bornes, un espace de quinze pieds pour les constructions élevées au-dessus du sol qui conduisaient l'eau à Rome97: de cinq, pour les conduits souterrains ou situés à l'intérieur de la ville98. Ces délimitations, fixées longtemps après la fondation des premiers aqueducs, étaient nécessaires pour prévenir les dégradations, pour empêcher la construction d'édifices adossés aux aqueducs, ou la plantation trop rapprochée d'arbres, dont les racines, en s'insinuant dans les murs, les eussent fait éclater; enfin pour rendre la surveillance facile. Les contrevenants étaient condamnés à l'amende. Les sénatus-consultes qui réglaient ces matières entrent dans des détails que nous ne pouvons reproduire ici". Tous les matériaux nécessaires pour les réparations (terra, licous, lapis, arena, ligna) devaient être pris dans les fonds les moins éloignés, et nul ne pouvait en empêcher le transport à travers sa propriété, sauf à être indemnisé, Il en fut ainsi au moins depuis Auguste'. Les particuliers dont les propriétés étaient traversées par les aqueducs, furent dispensés sous l'empire des charges extraordinaires, à condition qu'ils entretiendraient et nettoieraient les canaux ; s'ils n'exécutaient pas la convention, on confisquait au profit du trésor la partie riveraine de leur fonds; ils étaient aussi tenus de planter des arbres le long des canaux, à intervalles de 15 pieds'-'. La surveillance que devaient exiger les censeurs et les édiles était réglée par de nombreuses prescriptions. Les champs qui étaient, au mépris des règlements, arrosés avec l'eau destinée au public, étaient confisqués; on prononçait aussi une forte amende contre les fermiers publies qui avaient favorisé cette contravention. Si quelqu'un était convaincu d'avoir corrompu l'eau à dessein, il était condamné à une amende de 10,000 sesterces 102. Celui qui avait percé et rompu des canaux, pratiqué des irrigations ou tenté de le faire, était condamné à une amende de 100,000 sesterces»3. Le souvenir des rigueurs dont avait usé Caton pendant sa censure, n'était pas encore oublié sous Auguste. On sait par Tite-Live 104 qu'il rendit à leur destination toutes les eaux publiques détournées pour l'usage des édifices ou des champs particuliers, et qu'il put exécuter de grands travaux avec le produit des amendes. Pour assurer l'exécution de tous ces règlements, les édi -34?~ AQU les curules avaient préposé, dans chaque canton, deux des habitants à la surveillance des eaux publiques las Des lois analogues existaient pour les colonies et les municipes: par exemple, à Venafrum, dont les habitants devaient, pour toutes les contestations sur ces points, s'adresser à Rome Auguste, après la mort d'Agrippa, qui avait été chargé de la surveillance perpétuelle des aqueducs, constitua le régime des eaux sur des bases nouvelles; il confia à Messala Corvinus, ancien consul, l'administration des eaux avec des droits très étendus, et le titre de curator aquarum 701, qui fut désormais attaché à cette fonction (12 après J. -C.).Deux aides (adjutores) lui furent adjoints,avec les mêmes marques de dignité qu'on accordait aux magistrats. Un sénatus-consulte de la même date détermina l'étendue de leurs fonctions108 : hors de Rome, les curatores avaient à leur service deux licteurs, trois esclaves publics, un architecte (architectus) ; pour chacun d'eux, des greffiers (sersbae), des expéditionnaires (librarii), des huissiers (occensi), des crieurs (praecones), etc., en un mot tout le personnel attaché à l'administration des eaux. Ils dirigeaient et surveillaient ce personnel et en répondaient 109, particulièrement des AQuARII, dont ils avaient souvent à réprimer les fraudes. Dans Rome, ils avaient droit au même cortége, à l'exception des licteurs. Ce sénatus-consulte réglait aussi les salaires et les états de frais, ordonnait qu'il fût remis aux curateurs, les tablettes, le papier et tout ce qui était nécessaire à leurs fonctions, et décidait enfin que les consuls régleraient avec le préteur du trésor, la forme de ces fournitures. Il fut réglé aussi que les curatores vaqueraient pendant la quatrième partie de l'année aux jugements publics et particuliers, de leur compétence etc. lla Les fonctions des curatores aquarum n'étaient limitées que par la volonté du prince; dans l'espace de 107 ans qui s'écoulèrent entre Messala choisi par Auguste et Frontin qui exerça ces fonctions sous Nerva et qui nous a laissé la liste de ses prédécesseurs, on ne compte que quinze curatores "'. Ces fonctions importantes ne furent confiées qu'à des personnages consulaires : de là le titre de consulares aquarum que nous voyons apparaître, au second siècle de notre ère, à la place de l'ancien nom 110 Les consulares aquarum furent placés sous les ordres du PRAEFECTUS URBI. Les attributions de ces magistrats étaient analogues à celles des curatores, à Rome et à Constantinople. Nous renvoyons, pour de plus amples détails, aux titres du Digeste et des Codes (De aquaeductibus). Sous l'autorité des consulares aquarum étaient placés des procuratores aquarum et comites formarum, chargés d'une surveillance plus immédiate et de l'exécution des ordreslt3 Il. Concession des eaux. Anciennement, il n'était accordé aux particuliers aucune concession d'eau (jus aquae irnpetratae, ou ducendae), sans doute à cause du peu d'abondance de l'eau à Rome. Défense est faite à tout citoyen, disait la loi, de prendre d'autre eau que celle qui tombe 44 AQU -9'l AQU du réservoir à terre 114 , c'est-à-dire l'eau superflue (caduca). L'eau n'était concédée que pour l'usage des bains publics et des foulons qui blanchissaient les vêtements. Mais après la construction des nombreux aqueducs que nous avons énumérés, on accorda facilement des concessions (aquaeductus), moyennant un droit (vectigal) payé au trésor public 116. Sous les empereurs, les habitants de Home eurent l'eau sans redevance; elle devait couler jour et nuit ad usum populi 116; mais on conserva l'ancien système pour les villes de province : on n'y pouvait obtenir une concession que moyennant une redevance à la caisse municipale 11. Les concessions étaient essentiellement personnelles, elles ne passaient ni à l'héritier ni au nouveau propriétaire. Dès qu'une concession devenait vacante, on l'annonçait an public ; il en était fait mention sur le registre des eaux, et l'on interrompait la distribution aussitôt que sa durée était épuisée 118. Nerva, par une sage mesure, accorda une prorogation de trente jours pour donner aux intéressés le temps de faire les démarches nécessaires et pour ne pas priver tout à coup un domaine de l'eau qui le fécondait (ne praedia subito destituerentur) 119. Le droit d'accorder des concessions d'eau (aquant dare, distribuere, describere vendere), fut sous la république confié aux censeurs et aux édiles ; mais, sur ce point encore, il paraît résulter des textes, que les édiles n'avaient de pouvoir que lorsqu'il n'y avait pas de censeurs en charge. C'était donc à ceux-ci que devaient s'adresser les particuliers 1"0. Après la mort d'Agrippa, qui, à la suite de son édilité, avait été chargé de l'administration perpétuelle des aqueducs 1"1, les particuliers qui désiraient avoir des prises d'eau, durent adresser une demande au curator quorum, qui la remettait à I'empereur, seul dispensateur des concessions 122. Frontin nous fait connaître les moyens employés pour que chacun eût la quantité d'eau qu'il payait, et pour prévenir les fraudes des employés, Les particuliers eux-mèmes pouvaient exercer un contrôle, à l'aide du tuyau de bronze servant de compteur, par lequel l'eau passait du réservoir public dans les canaux de distribution 12' [cALIx]. Les termes des concessions variaient beaucoup : tantôt l'eau n'était distribuée qu'à des heures dé terminées (aqua certis /loris ducta 124); et il parait que cette indication était inscrite sur les tuyaux ; nous y lisons par exemple : «ah bora secunda ad horam sextam» 126 ; tantôt ces concessions étaient limitées à un jour, à une saison, etc. (aqua quotidiana, aestiva) 1"6. Les fontainiers devaient fermer les conduits après l'expiration du délai. Les aqueducs devinrent pour l'État la source d'un revenu si considérable, que leur construction. quoique coûteuse, n'en fut pas moins une dépense productive au pre mier chef. On vendait chèrement l'eau aux concessionnaires; les établissements publics, les bains, etc., payaient à l'État, comme les particuliers, un droit annuel (vectigal ea aquaeductibus, ou vectigal foranae)1 `. Il faut aussi compter le produit des amendes, qui était très-élevé, et dont le taux fut même porté à des proportions énormes 123. Les seuls domaines et édifices placés près des conduits des châteaux d'eau, des bassins et des fontaines, payaient au trésor un droit annuel de 250,000 sesterces 'i9. On peut juger approximativement du revenu total produit par les aqueducs d'après l'élévation de cette somme, et en tenant compte des quantités qui se distribuaient pour les antres usages. Bureau de la Malle 100 estime que les concessions n'absorbaient pas le vingtième des quinaires concédés aux particuliers, ce qui constituerait pour l'État un revenu de 4,244,000 fr. Frontin nous apprend que tout le personnel de l'administration des aqueducs était payé sur le trésor public 131. La quantité d'eau frauduleusement détournée que Frontin rendit à sa destination est encore un élément qui permet d'apprécier l'importance de cet impôt. Bureau de la Malle 13' a comparé le nombre et le prix des pouces d'eau distribués à Paris en 1813 avec ceux qui étaient distribués à Home sous Trajan; d'après ses calculs, 51,380 pouces d'eau constituaient un revenu de 890,000 fr. La longueur totale de tous les conduits qui apportaient de l'eau à Home était de 428,000 mètres, dont 3,000 sur arcades; la mesure d'eau puisée aux sources était de 24,600 quinaires133. Hors de home, il se distribuait 4,063 quinaires, dont 1,718 pour l'empereur et 2,345 pour les particuliers; en ville, 247 châteaux d'eau distribuaient 9,955 quinaires ainsi répartis : pour l'empereur, 1,707 ; pour Ici particuliers, 3,847 ; pour les usages publics, 4,401.On comprenait sous ce dernier titre les pièces d'eau, les fontaines, les spectacles, les établissements publics 134 Les eaux étaient classées d'après leur qualité. Laqua Mai. cia, par exemple, était tout entière reseroée pour la boisson, alors que celle de l'Anio servait à l'arrosement et aux usages ordinaires 136. 1V. Administration des eaux dans les municipes. -Les magistrats des cités, chacun suivant sa compétence, se partageaient toutes les fonctions attribuées à Rome aux censeurs, aux édiles et aux curateurs ; les documents épigraphiques nous montrent des quinquennales 136, des quatuorviri 137, un duumvir 13o et les édiles d'un PAGUS, établissant des conduits ou les réparant. Des légats de l'empereur, des gouverneurs de provinces, des chefs militaires, construisirent aussi des aqueducs 139. Les empereurs enfin en dotèrent souvent les cités 1D. AQU a_.:~3 S et AQt AE ILS USTE S. Pour les servi fades riez s9'xE. .' Qi Vii. " tG stS INFERDICTIO [EvsILIUaa]. saeel E 'o SLIENI ES TONTES]. AQI ELICUUM ou AQUILICIUW. Cérémonie à laquelle on avait recours à Renie dans les temps d'extrême Seslie esse. nommes e, femmes, pieds nus, les dernières vêtues de la STOLS et les cheveux épars, montaient au Capitole, et y adressaient leurs prières à Jupiter afin qu'il envoyât la pluie'. Une cérémonie semblable se rattache au culte de Mars. Prés d+ ''son temple, situé hors de la porte Capena, était déposée une pierre qu'on appelait lapis manalto (la pierre qui carde) : lorsque les pontifes la promenaient par la ville, la pluie, disait-on, ne manquait pas de tomber'. Cet usage, fort ancien et que Rome avait, à ce qu'il semble, emprunté aux Étrusques, paraît avoir été pratiqué ailleurs encore en t2aas '. èi, '";, dl.ïo. A U?OEMANALIS, aquiminale ou aquamanile, aquiminarnun (spvi5ov). Pot à eau, aiguière, servant à verser l'eau dans une cur=ette'. 11 était d'usage chez les Romains de distribuer de l'eau aux convives pour se laver les mains avant et pendant le repas 2. Delàvient que ces vases sont nommés, avec les bassins qui les accompagnaient nécessairement, parmi l'argenterie et la vaisselle de table Dans une peinture d'un tombeau étrusque de Corneto représentant un festin, on voit (fig. 403), sous un Iressoir, où sont rangés des Dupes, des cratères, etc., deux vases munis d'une anse, et placés dans des cuvettes, dont l'emploi était vraisemblablement celui que nous venons d'indiquer. E. SFCLïo. A.QUÀ.Rll.I. Esclaves publics chargés, sous la direction des magistrats, de l'+e^nteetien des fontaines, des aqueducs et en générai de la distribution des eaux chez les Romains '. La construction et les grosses réparations étaient seules confiées à t'es erstreprencurs (tedempteres). Sous la république, les censeurs et les édiles avaient la haute surveillance de ce service important s, qui fut confié sous Auguste à an ,:licier spécial, le cura ter aquarm z [AQUAEDUC Tosr 3. Pli I nous a conservé 4 six sénatus-consultes _eudu ve 1:1 de Rome av. J.-C., concernant la juridiction de ces ci' -tores, et notamment l'organisation et le traitement de leurs apparitores ou employés. Un plébiscite a rendu i-n 744 av. J.-C,, établit des mesures de police et tee peines contre les infi°acteurs aux règlements sur les eaux publiques. Une farnilia fut établie par Agrippa sous le nom de publica, composée de deux cent quarante hommes ; une autre par Claude, sous le nom de caesarea, qui en comptait quatre cent soixante. Prontin distingue différents emplois : ceux de villicus ou intendant, chargé de contrôler la distribution des eaux ; de castellarius, fontainier du château d'eau [CASTELLUM] ; de caûcitor ou castes, inspecteur ou chef de ronde; de paveur (silicarius) ; de stucateur (tector), etc. 9. La tâche des ouvriers était réglée chaque jour. Vers la fin de l'empire, les curateurs des eaux, alors appelés consulares aquarum 7, avaient sous leurs ordres des comites for-immun, hommes du métier exerçant une surveillance plus directe, un nombreux bureau (offreium) et un personnel considérable d'esclaves publics. Une constitution de Zénon 8, après avoir rappelé les prohibitions de dériver l'eau des aqueducs, et de nuire aux conduites par aucune plantation ou construction, sous peine de confiscation de celle-ci, ordonne que les employés des eaux de Constantinople (aquarii ou aquarum custodes quos hydrophylacas nominant) porteront désormais sur la main le nom du prince. Ce stigmate, usité également à l'égard des ouvriers attachés aux fabriques impériales [FABRICENSES] 9 et des TIBOIIES ou recrues, devait faire reconnaître en tout temps les gardiens des eaux, de manière à empêcher les procuratores de la maison impériale de détourner ces agents de leur destination spéciale, et à libérer ceux-ci de toute charge de transport (angariae) ou de travaux publics. A la mort de chaque aquarius, son successeur devait être immédiatement marqué de la même empreinte, en sorte qu'il n'y eût aucune interruption dans le service. H. On voit par les inscriptions 10 qu'il y eut dans les municipes des aquarii réunis en corporation. Les riches particuliers eurent aussi des aquarii ou fontainiers employés au service des eaux dans leurs maisons et dans leurs domaines": c'étaient ou leurs esclaves, ou des ouvriers loués pour ce travail, et c'est sans doute pour ces derniers que I'édit de Dioclétien " fixe le prix de la journée à vingtcinq deniers. Des aquarii étaient aussi employés à porter l'eau nécessaire aux soldats ". On appelait encore aquarii et aquarioli des hommes de condition infime et décriés, la plupart affranchis, qui portaient dans les maisons l'eau nécessaire à la cuisine, aux bains, etc., et en profitaient souvent pour faire le métier d'entremetteurs "' (ropvoltc.xovoç). La fig. 406 reproduit une sculpture du musée de Lyon 16, de basse époque, où Fig. 406. Aquarius. un aquarius représente vraisemblable ment le signe du Verseau, appelé aquarius et Husiéoç, dans les écrits des astronomes. E. S.