Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

Article ARMAMENTARIUM

I. Les acropoles des anciennes cités grecques renfermaient des amas d'armes (eg6aupoi ô,rc)Ama) : c'était la place naturelle de pareils dépôts. Nous savons que l'orateur Lycurgue et son collègue Démocharès furent loués par décrets publics pour avoir renouvelé, lorsqu'ils furent chargés des affaires de la guerre, l'approvisionnement d'armes et de munitions d'Athènes'. Mais toutes les armes n'étaient pas certainement placées dans les acropoles ; des arsenaux furent construits ailleurs, quand toute la défense des villes ne se renferma pas dans une hauteur fortifiée. Les villes maritimes eurent des arsenaux (axeuot'4xr,) où l'on conservait tout ce qui était nécessaire à l'armement des vaisseaux De très-anciennes inscriptions mentionnent celui d'A thènes au Pirée. Après la guerre du Pélopouèse, il fallut en construire un nouveau, oeuvre magnifique de l'architecte Philon, terminé précisément sous l'administration de Lycurgue et; détruit par Sylla lorsqu'il prit Athènes. C'est sans doute dans l'arsenal du Pirée que l'on gardait les machines de guerre, dont Miltiade fit déjà usage à Paros ARM 432 -A-RU et dont l'importance ne fit que croître jusqu'au temps de Démétrius Poliorcète. Nous connaissons encore par les auteurs les arsenaux de quelques villes grecques, comme celui de Syracuse, abondamment pourvu d'armes et de machines 5; ceux de Corinthe, de Rhodes, de Cyzique, de Marseille', etc. If. Dans un discours que Tite-Live 7 met dans la bouche de Persée, la richesse des arsenaux des Macédoniens est oppose' à la pauvreté du soldat romain qui n'a d'autres armes que celles qu'il avait pu se procurer lui-même; mais il ne faut voir dans ces paroles qu'une exagération oratoire, qui avait pour but d'exciter le courage des Macédoniens. Cicéron parle d'un arsenal d'où l'on tire des armes a ; et Tite-Live lui-même fournit la preuve v que, sous la république, les armées romaines en campagne avaient des arsenaux où l'on gardait et où l'on fabriquait des armes. La nécessité le commandait ainsi. Après l'invasion des Cimbres en Provence, on amassa à Marseille une très-grande quantité d'armes et de machines de guerre10. Il y eut de pareils dépôts sous l'empire'', à Rome, en Italie et dans les provinces, soit dans les villes, soit dans les campements permanents °, et aussi dans les ports pour renfermer toutes les pièces [ARMAMENTA] nécessaires à l'armement des vaisseaux. Leur personnel comprenait, outre les ouvriers partagés en décuriei °, des employés chargés de la comptabilité, .scribae armamentarii'``, placés sous la direction de l'ARMORUM CUSTOS OU du MAGISTER OFFICIORUM''. Une inscrip signa d'abord, chez les Romains, comme sa forme l'indique, le réduit ou le meuble où l'on enfermait les armes' ; mais de bonne heure, à ce qu'il semble, il fut étendu à toute espèce d'armoire, quel qu'en fait le contenu, armes, vêtements, provisions, vaisselle, bijoux, numéraire, objets de toutes sortes °. On trouvera en leur lieu les explications relatives à certaines armoires dont la destination était toute spéciale, comme celles où l'on serrait les livres [BIBLIOTHECA], où étaient placées les images des ancêtres [IMAGINES MAJORUM], etc. Il suffira de montrer ici par des exemples que ces meubles étaient bien analogues par leur armamentario praeest... in numerum stipendiorum vescit. n-15 Drelli-Henzen, 6795. forme à ceux que nous nommons ainsi et se distinguaient des coffres qui, chez les Romains comme chez les Grecs, servaient aussi à serrer tout ce qui devait être enfermérARcA 1. Le premier exemple (fig. 522) est tiré d'une peinture d'Herculanum', où l'on voit de petits génies occupés à fabriquer des chaussures; quelques-unes sont placées sur les rayons d'une armoire fermée par des volets qui se replient sur euxmêmes. Le deuxième (fig. 523) reproduit un bas-relief romain représentant la boutique d'un coutelier4: les objets à vendre sont suspendus dans une sorte de placard dontlecorps inférieur est muni d'un tiroir. La figure 524 est un morceau d'un sarcophage romain où est représenté un homme lisant un manuscrit, auprès d'une petite armoire à deux battants, dans laquelle sont d'autres livres roulés et une écritoire ; la partie supérieure est disposée en pupitre. Enfin, sans entrer ici dans aucun détail au sujet des bibliothèques, nous rapprochons des figures précédentes l'image d'une haute armoire (fig.525) surmontée d'un fronton dans laquelle, comme dans la précédente, sont déposés les livres et les ustensiles d'un écrivain assis devant elle'. On pourrait citer un assez grand nombre de meubles du même genre, d'après des monuments qui appartiennent aux premiers temps de l'art chrétien 7. Quelques-uns de ceux qu'on y voit représentés sont des tabernacles, de véritables édicules, qu'il faut rapprocher de celles qui renfermaient des images de divinité et dont il a été parlé ailleurs [ALDICULA]; s'ils en diffèrent, et méritent le nom d'armarium, ce n'est que par la clôture, qui du reste ne manquait pas toujours aux édicules sacrées, fermées tantôt par une grille, et tantôt au moyen de rideaux, comme le ciborium (xtéô)p:ov) des anciennes églises chrétiennes : on voit cette clôture sur des médailles grecques et romaines', qu'il ne sera pas sans intérêt de mettre à côté des figures qui précèdent et de celles de l'article AEDICULA. Quoique l'on ne trouve pas la représentation d'armoires à proprement parler dans les oeuvres de l'art grec, il est difficile de croire que ces meubles n'aient pas été de bonne heure en usage dans la Grèce, puisqu'on rencontre fréquemment des édicules, renfermant des idoles ou des objets sacrés, auxquelles il ne manque pour ressembler aux armoires qu'on vient de voir représentées que d'être fermés par des portes ou par des volets. Le xo6 , employé dans quelques passages 9, soit à côté de xt~co 07,cuupapu\âztov, soit en opposition avec ces mots, pour indiquer un meuble plus élevé, ayant quelque chose de la forme d'une tour, semble bien s'appliquer à une armoire. Plaute parle aussi" d'armariola graeca. E. SAGLIO.