Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

Article ARRA

ARRA (t xCmv). -I. Les arrhes, dont l'invention paraît devoir être attribuée aux peuples de race sémitique 1 qui firent les premiers le commerce entre les côtes de la Méditerranée, consistaient, chez les Grecs, en une somme d'argent proportionnée à la valeur de l'objet du contrat. Dès que les arrhes avaient été librement données et reçues, le contrat était parfait (xûptov) et produisait tous ses effets, bien que chaque partie eût encore le droit, tant qu'elle ne l'avait pas exécuté, de le résoudre et de se dédire en perdant ses arrhes. Les arrhes étaient surtout usitées dans les ventes, c'était l'acheteur qui les payait au vendeur en avance sur le prix. S'il venait ensuite à se dédire, les arrhes restaient acquises au vendeur comme indemnité ; si c'était le vendeur qui se départît du contrat, la loi l'obligeait à payer à l'acheteur la valeur de la chose vendue, c'est-à-dire à racheter en quelque sorte cette chose P. Gies. Il. Arra, aralia ou arrhabo était en droit romain une certaine somme ou valeur remise par l'une des parties à l'autre, dans un contrat, comme gage de sa foi. Aussi cette expression fut-elle parfois employée improprement pour désigner un gage [PIGNus] 3. En matière de vente [EMPTIO VENDITIO], les arrhes indiquaient, dans le droit romain classique, c'est-à-dire au temps de Gaius, que le contrat était parfait 4. Si les arrhes consistaient dans une somme d'argent, on les considérait comme un à-compte sur le prix, payé par l'acheteur ; quand il avait livré un anneau, il pouvait, après paiement du prix, réclamer cet objet s. Justinien modifia les règles de la matières ; il décida que les arrhes dans la vente à rédiger par écrit auraient pour effet de fortifier la convention. En effet, celle-ci ne devant être parfaite que par la signature, chacune des parties pourrait s'en départir impunément; mais celle qui a donné des arrhes les perd, ou l'autre les restitue au double, si elle ne veut pas achever l'affaire. Au contraire, dans les ventes sans écrit, la dation des arrhes offre un moyen de dédit qui n'existerait pas sans elle T. Suivant M. Boissonade, la constitution de Justinien s'appliquerait seulement aux ventes par écrit. Dans les fiançailles [SPONSALIAI, il n'était pas permis de stipuler une clause pénale pour simple dédit de l'un des fiancés 8. Cependant d'habitude le fiancé, ou ses parents, en son nom, donnaient un anneau (anulus pronubus) à la fiancée 9 ; plus tard, les présents donnés en arrhes devinrent fort considérables 10. En cas de mort d'un des futurs, les arrhes devaient être rendues 1'. Mais celui qui refusait sans motif légitime de conclure le mariage, perdait le quadruple des arrhes. Cela fut réduit au simple par les mêmes empereurs pour les parents qui avaient fiancé la fille avant l'âge de dix ans ". Sous Léon et Anthémius, la peine fut fixée au double, sauf stipulation formelle 13. La mineure de vingtcinq ans ne remboursait que les arrhes reçues 14. Il ne faut pas confondre l'arrha sponsaliorum nomine data avec les présents entre fiancés (sponsalitia), autrefois irrévocables chez les Romains 16 institution modifiée ensuite en 336 par Constantin le [osmium], puis remplacée elle-même en Orient pal' les donations ante nuptias, et sous Justinien par les donations propter nuptias [DONATIO, DOS]. G. HUMBERT. III. Une pièce de plomb, dont on connaît plusieurs exemplaires 17, indique un usage particulier du mot arra. Elle porte au droit (fig. 539) une tête de femme avec les sigles c s, au revers quatre osselets [TALI] 8ATIS SIT (que celui qui joue donne une arrhe suffisante). Cette arrhe, était-ce une mise, un enjeu? et l'avis est-il une de ces sentences générales comme on en lit sur un assez grand nombre de cette fois sur les jetons qui servaient à marquer les points? Cela est possible. Peut-être aussi doit-on entendre par arra une entrée à donner au maître d'une maison de jeu, et le jeton servait-il de contre-marque 18. E. S. ARRI-IEPIIORIA ('AWr,rp6p«). Fête athénienne qui tombait dans le mois de Scirophorion (juin)'. Elle se l'attachait, d'une part, à la fête des Scirophories, de l'autre, tre jeunes filles de sept à onze ans étaient choisies chaque année, dans les familles les plus nobles par l'archonteroi. Ces jeunes filles, appelées arrhéphores, errhéphores ou erséphores (âg.lpôpoc, i~(rôpoc, ipcv~pôpoc 3), demeuraient pendant plusieurs mois sur l'Acropole, dans le voisinage du temple d'Athéné Polias 4, où une localité était même affectée à leurs jeux s. Deux d'entre elles (ipy«a-rivai) s devaient travailler avec les ouvrières chargées de tisser le péplos dont on revêtait la statue de bois d'Athéné à la fête des Panathénées7; ce travail, qui était celui de la fête appelée CIIALKEIA 8, commençait le dernier jour du mois de Pyanepsion. La prêtresse d'Athéné, qui appartenait toujours à la famille des Étéobutades', était chargée de la surveillance des arrhéphores. Dans la nuit qui précédait la fête20, cette prêtresse remettait à deux des jeunes filles des vases ou corbeilles dont le contenu était ignoré d'elles aussi bien que de celle qui les leur transmettait. Elles descen ART -- daient dans un souterrain, naturellement creusé dans une enceinte peu éloignée de l'Aphrodite des jardins °, y déposaient leur fardeau, et en prenaient un autre aussi soigneusement caché, qu'elles rapportaient dans l'Acropole. Cette cérémonie accomplie, les quatre arrhéphores étaient quittes de tout service, et étaient remplacées par d'autres qui, le lendemain, étaient conduites à leur tour en grande pompe à l'Acropole 1z. Les frais de cette pompe, de même que l'entretien des arrhéphores, constituaient une liturgie [LEITOURGIA], appelée aussi âppltpopiz et qui était probablement à la charge de leurs parents 13. Des pains d'une sorte particulière, appelés clvsr«Tot, ou plus brièvement vaaroi, étaient destinés à leur nourriture''. Elles devaient porter des vêtements blancs, avec des ornements d'or ; ces ornements restaient, quand elles quittaient l'Acropole, consacrés dans le trésor du temple 13 On a voulu reconnaître les arrhéphores et la prêtresse d'Athéné Polias dans un des bas-reliefs de la frise du Parthénon 76. Mais cette conjecture ne s'appuie sur aucun fondement certain. Les anciens" expliquaient cette cérémonie, en disant qu'elle avait lieu en l'honneur d'Hersé, soeur de Pandrose et d'Aglaure, les filles de Cécrops [CECROPIDES], et les compagnes d'Athéné, qui, avec Erichthonius, présidaient à l'agriculture et à la croissance des moissons. En effet, de même que le nom de Hersé (°Eparl), le mot per, é i,I ou part, signifie pluie, rosée 1e. Arrhéphores voudrait donc dire tt celles qui portent de la rosée, s et Otfried Müller 19 paraît avoir fait une juste supposition, en disant que les arrhéphores portaient simplement des branches couvertes de feuilles et trempées dans la rosée, sans doute pour demander le bienfait de la rosée pendant les chaleurs