Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

Article AURUM

AURUM V ICESIMARIUM. Impôt romain sur les affranchissements, nommé aussi, pour cette raison, vicesirna manumissa;nom, qu'il ne faut pas confondre avec l'impôt du vingtième sur les successions et legs testamentaires [vlCESUUA nEREDITATUM]. Le premier fut établi sous la république en 397 de Rome (357 av. J.-C.) ', par un plébiscite proposé, dans le camp de Sutrium, aux soldats assemblés par tribus, par le consul Cnaeus Manlius Capitolinus. C'était un impôt indirect [vECTIGAL] et somptuaire qui dedevait être perçu au profit du trésor, lors de chaque affranchissement, au taux du vingtième (5 0/0) de la valeur vénale de l'esclave affranchi. Régulièrement, c'était à ce dernier à supporter cette contribution sur son pécule. Comme le trésor n'était pas riche et que le produit d'un nouvel impôt devait être assez considérable, le sénat ratifia ce plébiscite. Il est probable d'ailleurs qu'on commençait à se plaindre de la grande multitude d'affranchis qui envahissaient la cité. Les ressources considérables fournies parla vicesona manumisszonunz furent destinées à former un fonds de réserve placé dans l'AERARIUM SANCTius, c'est-à-dire dans le trésor extraordinaire, établi dans la partie la plus reculée du temple de Saturne, pour les besoins urgents de l'État. On admet généralement que cet impôt devait être acquitté en or, soit à cause de son nom, soit à raison d'un passage de Tite-Live 2 rapportant qu'en 542 de Rome (212 av. J.-C.), la neuvième année de la seconde guerre punique, douze colonies sur trente ayant refusé leur contingent en hommes et en argent, le sénat, à bout de ressources, fit retirer par les consuls, de l'aerarium sanctius, l'aurum vicesimarium, mis en réserve chaque année pour ne s'en servir que dans les dernières extrémités; or, on en tira 4,000 livres pesant d'or, probablement la somme totale produite par l'impôt depuis 145 ans', évaluée à environ 4,496,200 fr. de notre monnaie. Il n'y avait pas de monnaie d'or romaine à l'époque où fut rendue la loi Manlia; mais il devait nécessairement exister un rapport légal entre l'or et l'argent; ce qui permettait aux affranchis de payer l'impôt en lingots, ou aux questeurs de l'aerarium de convertir en lingots le produit de l'impôt, avant de le placer dans les caveaux de l'aerarium sanctius 4. Cette contribution subsista pendant toute la durée de la république, avec sa destination spéciale, et Cicéron en fait encore mention dans ses lettres à Atticus, vers 692 de Rome (62 av. J.-C.). L'aurum vicesimarium fut-il supprimé entre les années 693 et 760 de Rome, comme l'a conjecturé seul Dureau de la Malle 6? Cela n'est pas probable, car le texte de Dion sur lequel il s'appuie ne parle que de l'établissement par Auguste de l'impôt du cinquantième sur la vente des esclaves, quinquagesinza, et non pas sur l'affranchissement. Il est donc à présumer que le vingtième avait continué d'exister sans interruption Il fut plus tard élevé 7 à 10 0/0, c'est-à-dire doublé momentanément par Caracalla, en même temps que la vicesinma haereditatu,n 3. Le recouvrement de cet impôt était affermé à des publicains (publicani libertatis) 6, qui se formaient ordinairement en société pour ce bail et son exploitation 70, sous le nom de Socü vicesimae libertatas. Il paraît cependant qu'il s'établit plus tard une régie ou administration financière spéciale de viceszmarü chargés de percevoir directement cet impôt; elle était organisée en Italie par régions ", et au dehors par provinces'", avec un centre à Rome, sous le nom de fiscus libertatis et pecullorum. En effet, on trouve dans une circonscription un tabularius appartenant à cette caisse ".L'affranchi était tenu de payer l'aurum vicesimarium, mais ordinairement le patron complétait son bienfait par cette libéralité accessoire. Lorsque la liberté était donnée par testament, souvent le testateur léguait à l'affranchi la libération de cette dette, ou bien léguait la somme au fisc lui-même, ou enfin chargeait par legs ou fidéicommis ses héritiers de l'acquitter'4. Alors il y avait ce qu'on appelait gratuita libertas. On en voit un exemple remarquable dans le testament de Dasumius'S. Parfois aussi l'esclave auquel le maître abandonnait son peculium, rationibus redditis, devait payer les droits sur ce pécule 76. Enfin, le maître se faisait souvent acheter la manumission au prix du sacrifice de tout ou partie du pécule, et Tacite nous rapporte l'exemple de Pedanius Secundus, préfet de la Ville, assassiné par un esclave auquel il avait refusé sa liberté, après être convenu du prix avec lui". Du reste, l'aurum vicesimarium n'était dû que par l'esclave qui, par son affranchissement, acquérait la cité romaine ; il en était autrement lorsqu'il était affranchi par un mode privé; 18 car, dans l'origine, le propriétaire pouvait toujours lui retirer cet avantage imparfait 16. Plus tard, lorsque les lois Junia IVorbana et Aelia Sentia eurent créé deux classes d'affranchisperegrini, on ne voit pas que ces derniers aient été assujettis au vingtième. Enfin, le droit n'était pas dû non plus par les affranchis d'un maître peregrinus lui-même. Cet impôt disparut sous le bas-empire avec la plupart des autres contributions indirectes '0 du premier empire.