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BRITOMARTIS (BptTÔ ougrtç). Divinité de l'ancienne religion pélasgique' de la Crète. C'était originairement une déesse lunaire, présidant comme telle à l'élément humide, adorée des chasseurs et des pêcheurs à laquelle on attribuait l'invention des filets 3, une déesse tenant à la fois d'Artémis [DIANA] et d'Aphrodite [VENUS] et appartenant à la même famille de divinités de la nature que la Diane Éphésienne'. Son nom signifiait « la douce vierge 5 ».
Quand le culte de l'Artémis hellénique eut été introduit en Crète par les Samiens de Cydonia 6 et par les Doriens, la parenté de conception et de nature conduisit d'abord à les rapprocher, puis à les confondre. Il en fut de la Britomartis crétoise comme de la CALLISTO arcadienne, on la réduisit au rôle d'une simple nymphe, compagne de la fille de Latone et particulièrement chérie d'elle 7. La nymphe Britomartis était même représentée comme ayant élevé un temple à la déesse 8. On dit ensuite qu'Artémis elle-même avait pris le nom de sa compagne favorite et s'était fait adorer sous ce nom par les Crétois Enfin elles furent complétement assimilées tn, et certains auteurs la firent fille de Latone 11, tandis que la tradition crétoise indigène lui donnait Zeus pour père, marque de son antique importance, et pour mère Carmé l', dont on a fait une nymphe de Gortyne, mais qui paraît avoir été à l'origine une divinité d'un ordre plus relevé On fit alors de Britomartis l'Artémis des pêcheurs, Artémis Dictynna, de Ltrr ov, « filet » ; il semble que ce furent les Sauriens, auxquels on attribuait la construction du temple de la déesse à Cydonia 14, qui lui appliquèrent les premiers ce nom grec 15. Mais pour les Crétois eux-mêmes, Britomartis resta toujours une des plus grandes déesses, et nettement distincte d'Artémis, qu'ils nomment quelquefois à côté d'elle dans leurs inscriptions 16. Pausanias f7 fait
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la même distinction. Britomartis avait des temples à Chersonesus n, au port de Lyttus, à Phalasarna 19, à Olonte, où l'on montrait un vieux xoANON attribué à Dédale n, enfin à Polyrrhénium, où son sanctuaire était très-célèbre et gardé par des chiens féroces on n'y pouvait entrer que pieds nus ~'. Le nom de Dictynna n'était usité en Crète même dans une époque ancienne qu'à Cydonia, ville auprès de laquelle était situé le promontoire Dictynneeum 23 ; on l'y appelait aussi Artémis Cydonias n. On employait dans les fêtes de Britomartis des guirlandes de pin et de lentisque, mais le myrte en était absolument exclu
Les formes hellénisées du mythe de Britomartis, telles que nous les possédons, ont dû garder beaucoup des traits de l'ancien symbolisme indigène. II y en a deux versions principales. Dans l'une, c'est celle de Callimaque n et de Pausanias 28, Britomartis, fille de Zeus et de Carmé, la fille d'Eubulus, compagne des chasses d'Artémis, fut l'objet de la passion de Minos, et ne lui échappa qu'en se jetant du promontoire Dictynnium dans la mer, où elle se prit dans les filets tendus par les pêcheurs. Artémis la divinisa. Elle apparut ensuite à Égine, où elle fut adorée sous le nom d'Aphæa, tandis que les Crétois l'appelaient Dictynna (d'après les filets). Ainsi que l'a remarqué Ottfried Müller, ce récit a manifestement sa source dans les légendes locales de Cydonia. La version conservée par Antoninus Liberalis 27 fait toujours de Britomartis la fille de Zeus et de Carmé, mais celle-ci est la fille de Phoenix. Venue d'abord de Phénicie, Britomartis habita quelque temps à Argos, auprès des filles d'Erasinus, Byzé, Mélité, Mura et Anchiroé. Passant dans l'île de Céphallénie, elleyfut adorée comme déesse par les habitants sous le nom de Laphria [DIANA1. Elle gagna ensuite la Crète, où elle excita la passion de Minos et tomba dans les filets des pêcheurs en le fuyant, ce qui lui valut le nom de Dictynna et les honneurs divins dans ce pays. Un marin du nom d'Andromède la recueillit dans les flots et la porta sur son bâtiment à Égine. En y arrivant il tenta de la violer, mais elle s'enfuit dans le bois sacré d'Artémis, où elle disparut aux yeux humains. Les Éginètes l'appelèrent Aphsea et lui rendirent un culte. C'est ici bien manifestement une légende péloponnésienne, qui faisait passer dans les aventures de la déesse les voyages de son culte, répandu de proche en proche dans la Grèce et dans les îles sous la forme grécisée de Dictynna, car le nom de Britomartis resta toujours confiné en Crète.
Plutarque Y8 dit qu'il y avait des temples et des autels d'Artémis Dictynna dans presque toutes les parties de la Grèce. En effet les poètes de la belle époque connaissent cette déesse 25. Pausanias signale à Sparte un temple d'Artémis Issoria, appelée aussi Limnua, qui n'est pas proprement Diane, dit-il, mais la Britomartis crétoise 20; la même Issoria avait un sanctuaire non loin du cap Ténare III, et tout auprès, à Hypsus, on en voyait un autre de Dictynna, où l'on célébrait une fête annuelle 32. Dictynna était encore la principale divinité d'Amphryssa en Phocide, où sa
statue, oeuvre de l'école éginétique, était faite en marbre noir "". On retrouve même son culte jusqu'à Marseille J4.
Tous les temples de Britomartis et de Dictynna étaient situés dans des ports ou sur le rivage de la mer 30, et quand il en est autrement, comme à Sparte elle est groupée avec des divinités essentiellement marines. Elle garda donc toujours, même hellénisée, son ancien caractère de divinité des eaux n, qui appartenait aussi à l'Artémis arcadienne [MANA]. Tout ce qui se rapporte aux fleuves, aux fontaines, à la mer dans le culte de la Diane hellénique, vient de son assimilation à la Britomartis de la Crète et à la Callisto de l'Arcadie.
La nature lunaire de Britomartis se conserve surtout dans le culte qui lui est rendu à Égine sous le nom d'Aphseaa, 'Ao7da 3', la déesse « qui disparaît » périodiquement 99, épithète essentiellement caractéristique de l'astre nocturne. Dans cette localité, elle se confond, du reste, avec Hécate 49, la déesse en l'honneur de laquelle les Éginètes célébraient des mystères dont on attribuait l'institution à Orphée 41. Par suite de son introduction dans ces cérémonies secrètes s'était formée la légende, rapportée par Néanthe, qui faisait de Britomartis la fille d'Hécate, née après qu'un oracle avait annoncé à Jupiter que si cet enfant était un fils il le chasserait de son trône 42.
Sous les Romains, le nom de Britomartis était tombé complétement en désuétude, même dans la Crète, et remplacé par celui de Dictynna 43. Apulée nous montre cette divinité confondue, dans le syncrétisme des derniers siècles païens, avec Isis et les déesses mères de l'Asie.
C'est dans la numismatique de la Crète qu'il faut chercher les images de Britomartis ou Dictynna. Les monnaies des villes où la déesse crétoise avait ses principaux temples, Chersonesus 44, Olonte n, Polyrrhénium 4fi, portent sa tête laurée ou son buste avec le carquois sous des traits qui ne diffèrent en rien de ceux de l'Artémis hellénique [DIANA]. C'est aussi la déesse nationale qu'ont voulu représenter les monétaires qui ont placé une Diane chasseresse sur les pièces du xotvôv des Crétois sous les empereurs romains 47 et sur celles de Lappa 48. Pour trouver un type offrant des particularités spéciales, il faut recourir aux tétradrachmes de Cydonia a9, où la Dictynna de cette ville est représentée debout, avec la tunique courte de la Diane chasseresse, accompagnée d'un chien et tenant de la main droite une grande torche allumée (fig. 882). La
même figure est reproduite trait pour trait sur une pièce de bronze de Lacédémone 50, que Neumann n a déjà com
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parée à celles de Cydonia. Les types de plusieurs autres monnaies de Cydonia se rapportent au culte de Dictynna, comme le chien 5' et le croissant, qui est tantôt seul 53, tantôt avec une étoile 5`', signe important pour déterminer le caractère lunaire de la divinité.
Sur une monnaie des Crétois en général, à la tête dé Trajan 55, l'on voit sur le revers la légende elKTTNNA KIST.aN, accompagnant l'image de Dictynna, en habit de chasseresse, assise sur un rocher entre deux Curètes armés, debout. De la main droite elle tient une flèche, de la gauche elle porte un enfant (fig.883). C'est là proprement la Dictynna Àoxeim, ou protectrice des accouchements, comme l'Artémis grecque, dont parlent quelques écrivains 56. Les Curètes qui l'accompagnent indiquent que dans ce type monétaire elle est la déesse qui a reçu à sa naissance le petit JUPITER ou le petit zAGREUS, c'est-à-dire l'un ou l'autre des deux dieux enfants de la mythologie crétoise.
Nous reconnaissons aussi Britomartis dans la déesse en costume semblable à celui de Diane qui accompagne dans son temple le dieu Marnas, Crétois d'origine, sur plusieurs monnaies impériales de Gaza de Palestine 57.
F. LENORMANT.
BRIZO.-Déesse marine et prophétique adorée à Délos. Elle annonçait l'avenir par le moyen des songes. Les femmes lui adressaient des voeux, particulièrement pour qu'elle protégeât les navires sur les mers, et lui portaient des offrandes de toutes sortes, parmi lesquelles les poissons seuls devaient être exceptés'. E. S.