Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

Article CAPUT

CAPUT. I. Le droit Romain désignait, par cette expression, d'abord les personnes (homo) ', même les esclaves (servile capot) 2; et par extension la personne juridique constituée par l'ensemble de ses droits. En ce dernier sens l'esclave, n'ayant pas de droits, ne pouvait être compté pour une tête : servus nullum capot habitt, dit le latin un peu relàché des Institutes de Justinien Les droits eux-mêmes dans leur ensemble portaient le titre de stratus, et on les divisait en trois chefs principaux : liberté, cité, famille ; tria sont quae habemus, libertatem, civitatem, familiam °. L'état, quant à la liberté, consistait à être libre ou esclave, ingénu ou affranchi; quant à la cité, à être citoyen, ou étranger, ou latin, etc.; et quant à la famille, à être sui ou alieni juris, c'està-dire père ou fils de famille, et à appartenir à une famille ou à une autre. Tout changement dans ces états, quand il empirait la condition de la personne qui le subissait, c'est-à-dire toute perte des droits de liberté, de cité ou de famille, s'appelait capitis deminutio ou deminutio, que nous traduirons avec M. Pellat par déchéance d'état et l'homme était dit alors capite minutas. Les explications que nous venons de donner sur le capot éclairent assez cette expression bizarre et la font entendre comme une diminution de l'état ou de la personne juridique. Mais les commentateurs modernes sont loin de s'accorder à cette interprétation. Hotoman et après lui Vinnius et Heineccius s'entendent en ce sens, qu'il y aurait une tête de moins dans la classe des hommes libres, dans la cité ou dans la famille ; mais alors l'expression de capite minutas appliquée à celui qui perd ses droits n'aurait plus de sens. Niebuhr pense que capot signifiait le chapitre ouvert au compte de chaque citoyen dans les registres du cens, et que la capitis deminutio aurait été l'action de rayer ce chapitre. Mais Puebla remarque avec raison' que, si les chapitres des registres du cens portaient le titre de capot, CAP 511 t,'s plErlllt l'effet .qu la cause tien indique de ce mot. On distinguait trois degrés datas le cor r 'éurto du même coup on perd les droits de cité et de famille Elle arrivait de plusieurs manières : i° quand on devenait prisonnier de l'ennemi'. C'est en ce sens qu'Iiorace appelle Régulus capais minor9, lorsqu'il est prisonnier des Carthaginois [POSTLIC INMUIvil ; 2° quand un cito;en était vendu comme esclave, pour s'être soustrait à l'inscription sur les registres du cens afin d'éviter le service militaire Muni in eensus aliquis venier'£'t) 10; 3° de même pour le vo leur manifeste, pour l'homme libre qui se faisait vendre frauduleusement afin de toucher le prix et de revendiquer Ensuite sa liberté. pour la femme qui avait un com merce illicite avec l'esclave d'autrui [,E,RATuS CONSULTUSL ccnuulAxcel] : dans tous ces cas la condamnation adjugeait le délinquant comme esclave à la partie lésée, 4° dans les temps antiques, quand le débiteur insolvable était vendu au delà du Tibre par ses créanciers (xnxuaij, d° quand un citoyen romain était livré à une cité étrangère par le chef des fériaux (pater patratus), pour dégager Rome d'une obligation, par exemple d'un traité conclu par lui et que la république ne voulait pas ratifier", 6' dans les cas où la loi pénale prononçait ce qu'on appelait l'esclavage de la peine (serviles poenae 121, Telle était la condamnation aux mines (in metclllum) : le condamné appartenait à l'État et travaillait à son profit. Capais deminutio media ou mïnor, lorsque, sans perdre la liberté, on perdait les droits de cité et par conséquent de famille ; ce qui arrivait I° dans l'ancien droit, pat l'exil ou interdiction 'le l'eau et du feu ; 2° quand des citoyens romains se faisaient inscrire dans des colonies latines qui n'avaient que le jus Laid" et en général quand un citoyen romain entrait dans une autre cité, car on ne pouvait être à la fois citoyen de Home et d'un autre État '0. sous l'empire la moyenne capais deminutio fut encourue par la déportation (in sans perdre les droits de liberté ni ceux de cité, une personne sortait de sa famille par -Mutes las dations ai rraanc,piurrt i3, c'est-à-dire par l'émir ,_patian, l'adoption, i'adrogation, et, pour les femmes, par la convenue in maLes filles qu'on faisais; vestales", et sans doute aussi les fils qui étaient nommés /lamines diales 17, sortaient de la puissance paternelle sans subir la petite rapins Les interprètes du droit romain ont beau„cap discute sur le sens de la petite rapin derninutio, qui ii "tait pas une perte d'état (strlus air£:ssisa), comme la grande et la moyenne, mais seulement un changement d'état (stalus droit romain, irad, franç. Paris, 28 édit, 58551 H, app. 6; ld, Lieder Steueruerfasi expliqués, paris, 8° édit. 1851, I °, 233 e: a., Craran, Laplie. historique des II, st. 11e pou. ,i. On , pe .t . t. en supposant ne considérr.a,ar. t due la famille dont on sorte:: tenir compte de celle o' on entrait. Nous croyons en trouvera plus aisément la raison dans cette ocensta.nce, que les actes juridiques d'où résultait l.a pet °s capitis deminutio et que nous venons d'énumérer, avaient lieu dans l'état primitif au moyen de la mancipation, c'est-à-dire d'une réduction fictive en esclavage 19° Cr, l'esclavage emportant de droit la capiti.s riern.ànuiïa, celui-ci, bien qu'imaginaire seulement, en emportait une aussi, mais de moindre conséquence, et qui. n'avait d'autre siiite que la perte des droits de famille, jusqu'à l'époque un ils furent restitués pat le dre,it prétorien. La nlêrne rai fait comprendre pourquoi les fils et les filles de i' nommés vestales et fia:.in.es aides devenaient sans subir la capitis deminutio : c'est qu'il ri 'inter t e. s'' pas de maneipation dans cette libération de l'autorité paternelle. Au resta l'explication que nous tentons ici ne fait que généraliser celle que donne le juriscons.. Les suites de la grande et de la moyenne canins deminutio ressemblaient à notre mort civile , les jurisconsultes romains les comparaient à la mort : serin:1w morts Quant à la petite, ses suites se réduisaient à la perte des droits d'agnation, de gentilité et de patronat appartenant à la famille dont on sortait, et des droits de succession et de tutelle qui en dépendaient; à celle de certains droits, tels que l'usufruit et les ueerae J/lbertoruin °e, et â, l'affranchissement des dettes suivant le droit civil dais le droit prétorien et le droit impérial effacèrent peu à peu ies effets de la petite i'op,tito deminutio, qui finit, sous Justinien, par n'avoir plus qu'un sens historique et perdre; comme l'agnation, toute valeur pratique par suite de la novelle cxvtu. P. RauDRY, II. -On appela aussi capta ou jugum', en Orient, sous le Bas-Empire, l'unité imposable frappée par 1"im.-pêt nomma Chi''iTC'rtO rERRRYa ou j, généralisé se. . Dioclétien et Maximien, et qui ét, ), ;iii moins p, _a plus grande partie, .n impôt ft.-itCier. Cette parait avoir varié suivant les provinces, net en itt;r(pu elle prenait le nom de Lins: maxi, en Italie de minima. Walter ° avait fait prévaloir l'idée que le capot o.., jugula, était synonyme de rrtiliiena et signifiait une unité fictive, ou valeur immobilière de 1,000 solidi aurei, sur. laquelle l'empereur, dans son édit, ordonnait de prei.e., tant d'aus-esu sotie. :Liais le texte, de la nova 02€; Bauge, Peint. Alti , Berlin, 1856; 1, p. 156 et s. , Rein, Dos I CAPU. tl. 1 Le jugum, qui n'était une mesure qu'en Espagne (varro, R. rusa. r, iii) n'est pas la mesure appelée j' ge rio,; du reste, ta synonymie de captif et de jugnm n'a jamais été oentestée. Voy, Cod. Theod,, 931, 20, 6; At, 23, 1; Vit, 6, 3; XII, 4, 1; Cod. dust., X, 25, 2, xn, 24, 1 et 5. t GeseS. des rdiii. iteehts. n' 406, suivi depuis par Savigny, berna, Sch, iften, 11, 193; Bureau de la Malle, Biton. pole II, c. veu ; âaudi de S nome, Dei tribati relie Gatlie, Tutin, 1839, et 1, CrrLad, Essai sur l'hist. du droit fr.; 1, p, 99 et s., et Append., p. t19. li CAP 914 CAR solidos, per juga singula vel singulas millenas, a été contesté et interprété autrement 3; et un document nouveau, que nous donnons en note, prouve que, en Orient au moins, le capot ou jugum était une unité réelle de biens immeubles déterminée par la loi, d'après leur mesure combinée avec leur qualité, pour servir de base à l'impôt. Cette interprétation a été adoptée par MM. Rudorff, T. Mommsen, J. Marquardt, d'après les Symbolae syriacae °. Les preuves qui ressortent de ce documeut ont été résumées par le dernier de la manière suivante. Dioclétien fit mesurer ou cadastrer les immeubles de l'empire par JUGERUM, arpent romain, dont l'étendue bien connue est de 2518'9,88. Le même empereur établit et détermina l'unité imposable appelée jugum, et l'appliqua ainsi à sept classes de terres. En effet le jugum = 57 jugera de vigne; 120 jugera de terre de 1r° classe ; 40 jugera de terre de 29 classe; 60 jugera de terre de 39 classe; un domaine planté de 225 oliviers de 1r° classe; un domaine planté de 450 oliviers de 2° classe. Les pascua ou pâturages étaient évalués d'après leur produit; quant aux landes ou aux rochers improductifs, ilsparaissent avoir été mesurés mais non imposés. Il est donc démontré que, en Orient au moins, le caput ou jugum n'était pas une unité idéale ou abstraite, mais une unité réelle, formée d'une quantité déterminée de jugères, suivant la qualité des terres cadastrées et évaluées. Chaque capot devait supporter un certain nombre de solidi aurei fixé par I'indictio ou édit de l'empereur [cAPITATIO TERRENA]; niais en Afrique, on appelait centuria l'unité imposable, qui devait être quelque chose d'analogue ah jugum, bien que d'ailleurs le mot centuria se prenne d'ordinaire dans le sens d'une mesure araire spéciale de deux cents jugera. En Italie, l'unité imposable était le millena, mentionné comme telle dans plusieurs textes 8, et dont le nom avait donné lieu à la conjecture de Walter, que tout caput ou jugum était une valeur idéale de 1000 sols'di, et non un groupe réel de terres, qui devait supporter tant de deniers par jugum, ou une part proportionnelle par fraction de jugum qu'il formait, d'après sa mesure et sa qualité La détermi nation de la centuria en Afrique ou du mana en Italie ne nous est pas connue d'une manière parfaitement authentique; elle devait être assez forte, d'après la fréquence et l'immensité des LATIFUNDIA dans ces provinces, puisqu'au temps de Frontin on y comptait déjà par mille jugera 7. III. Le mot capot s'appliquait encore à un article ou chapitre de loi? Par exemple, la loi Aquilia, de damna injuria dato, renfermait trois chefs relatifs à des délits privés distincts, punis d'une peine particulière 8. IV. Caput désigne aussi un article spécial du cens concernant chaque citoyen dont la personne est déclarée au censeur 9. G. HUMBERT.