Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

CLAMOR

CLAMOR. Comme la plupart des peuples, les Grecs et les Romains ont eu leurs cris de guerre : nous voulons parler non de cris de ralliement, mais de ceux que poussent les guerriers avant de marcher au combat pour exciter leurs courages et répandre la terreur parmi leurs ennemis. Déjà Homère 1 désigne par un nom, «aaar,TÔç, qui est une véritable onomatopée, le cri (âa«),â) des Grecs et des Troyens, au moment où ils vont s'élancer les uns contre les autres, et il compare ce cri à celui d'un vol de grues qui fend les airs, aux bêlements d'un troupeau de moutons, au fracas d'un torrent se précipitant du haut d'une montagne ou des flots de la mer que la tempête pousse contre les brisants. Pindare a personnifié l'attaque sous le nom d' Aaaa«, fille de la guerre'. On trouve plus tard, pour désigner un cri de guerre, les formes analogues âa .àxyrt.a, âaxaxvgàç3, et aussi EavaearU4, qui est peu différent des précédents. Des textes qui viennent d'être cités il ressort que les Grecs ont constamment gardé l'usage du cri de guerre ; en outre ils frappaient avec leurs piques leurs boucliers'. Cependant, dès que les troupes étaient formées en bataille, ils marchaient lentement afin de bien conserver leurs rangs °. C'est pour obtenir cette marche régulière que, depuis la guerre des Héraclides les Lacédémoniens placèrent dans leurs rangs des joueurs de flûte, qui réglaient la cadence du pas9. Les Crétois, les Arcadiens, les Thébains, eurent le même usage 9. Les Romains poussaient un grand cri (clamer), au moment de l'attaque 10, le renouvelaient chaque fois qu'ils recommençaient la charge'`, et l'accompagnaient d'une sonnerie de tous les trompettes"; cet usage était fort ancien13. Par cette clameur, ils épouvantaient l'ennemi tout en s'animant eux-mêmes" ; si poussée avec ensemble, elle marquait la résolution et la confiance, ils y voyaient des gages de victoire, tandis que l'hésitation et la dissonnance indiquaient une émotion de mauvais augure'. Tacite dit16 la même chose de l'effet que le cri de guerre des Germains produisait sur eux-mêmes et sur CLA 1221 CLA leurs ennemis. Ce cri appelé barritus ou barritus" était une explosion de sons rauques, que l'on rendait plus prolongés et plus retentissants en serrant le bouclier contre la bouche. Les Romains imitèrent le cri des barbares, quand ceux-ci furent admis dans les légions. C'était, dit Ammien Marcellin, un cri terrible qui, commençant par un murmure à peine sensible, augmentait progressivement et finissait par éclater en un mugissement semblable à celui des vagues qui se brisent contre les rochers; ce cri surexcitait le soldat18. Végèce mentionnet9 le barritus, en disant qu'il ne doit être poussé qu'au moment où l'on aborde l'ennemi, et en faisant remarquer que les lâches et les gens sans expérience sont les seuls qui crient de loin. Dans les Institutions de l'empereur Léon20, il est encore recommandé aux soldats d'en venir aux mains en jetant un grand cri et en faisant un grand bruit d'armes.