Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

CLIMA

CLIMA. I. Mesure de surface des Romains, comprenant 60 pieds en carré ; elle valait par conséquent le quart de l'actust. II. Situation des différentes contrées par rapport à Cupeos, aâpµC. Les anciens avaient plusieurs mots pour désigner un bouclier, selon qu'il prenait telle ou telle forme, qu'il était particulièrement l'arme défensive de tel ou tel peuple, qu'il servait à l'infanterie ou à la cava CL1 1249 C Ll lerie, aux troupes légères ou aux soldats pesamment armés. Comme les objets que ces termes désignent servaient tous au même usage et se ressemblent par certains points, il convient de réunir dans un seul article les explications qui doivent être présentées au sujet des diverses sortes de boucliers. 1. Le clipeus ou âan(s était de forme circulaire et concave. « Les cla tiêes des anciens, dit le scholiaste d'Aristophane, étaient ronds'. » Homère joint souvent aux mots ai(s et a«xos, qui pour lui paraissent être synonymes, les épithètes e7xuxàoç, navTon'a ar 2; et Eschyle, qui se sert de la périphrase âatciêoç xûxaov, compare ce bouclier à une roue'. De même, chez les Latins, le mot orbis`, à tout instant uni au mot clipeus, qui luimême vient peut-être de xtixatos', ne laisse aucun doute sur la forme de ce genre de bouclier. Il ne paraît pas improbable toutefois que le grand bouclier homérique eût souvent la forme d'un cercle allongé et qu'on puisse s'en faire une idée par la vue des boucliers ovales, aussi bien que ronds, qu'on voit si souvent représentés par la suite. Il semble qu'au temps d'Homère la circonférence de l'anis était assez grande pour couvrir le combattant de la tête aux pieds. Aucun spécimen de bouclier aussi vaste ne se trouve, il est vrai, sur les monuments figurés; mais nous savons que les guerriers de l'Iliade, ces héros plus forts et plus grands que les antres mortels, ne craignaient pas de porter ces pesantes armes défensives que le poète appelle souvent Taputôaca«t, âµtp('i"40T«t nowaxxl'; il compare même celui d'Ajax à une tour 7. Tyrtée, plus précis encore , parle d'un bouclier qui protégeait tout le corps depuis la tête jusqu'au bas des jambes'. Cependant de bonne heure 1'cid paraît ~ avoir été plus petit; 9 il ne descendait que du col aux genoux: c'est la dimension qui lui est généralement donnée dans les monuments figurés. La fig. 1634 et plusieurs autres qui accompagnent cet article en offrent des exemples. On rencontre non moins fréquemment la représentation de grands boucliers ovales avec des échancrures (si pô,u«T«) sur les côtés (fig. 1635)'. Un bouclier de cette sorte est figuré sur les monnaies des villes de Béotie; (fig. 1636) on l'a appelé bouclier béotien, par opposition aux boucliers ronds, ordinairement désignés par l'épithète argien. (âpyatos, argolices) 10. S'il faut en croire Pline '1 et Apollodore ", c'est par les Argiens qu'aurait été inventé 1'âan(s. Prcetus, roi de Tirynthe, et Acrisius, roi d'Argos, deux 11. jumeaux ennemis, se seraient les premiers dans une guerre fratricide servis de cette sorte de bouclier. Le grand bouclier, rond ou ovale, resta l'arme défen sive des hoplites'', D'autres boucliers ronds, plus petits, qui ne couvrent le guerrier que de l'épaule à la hanche, rappellent par leur forme l «an(ç, mais appartiennent en réalité à une autre classe de boucliers, propres aux troupes légères et aux cavaliers, tels que la a à gg des Grecs et la parlera. des Romains, dont il sera question plus loin ; mais ils doivent être dès à présent distingués. C'est d'un bouclier de ce genre (fig. 1637) que sont armés des cavaliers sur un vase peint de style très ancien 14. Un autre cavalier, sur un vase / du Louvre, porte le bou clier béotien (plus loin, fig. 1640). Cependant le bouclier ne paraît pas avoir fait régulièrement partie de l'armement des cavaliers grecs, et il n'est mentionné par les auteurs que dans quelques circonstances exceptionnelles 1'. L'âan(ç est le véritable bouclier grec. Parmi les innombrables peuples orientaux qu'enrôle Xerxès en partant pour la Grèce, il n'en est pas un seul qui en soit armé. Quelques-uns, il est vrai, ont bien des âant8eg autxp«i: mais ces boucliers ronds, petits et légers ressemblent bien moins à i'éa7c(; des Argiens qu'au À«taiiov, qui était, 157 CH 1J30 s .lon Hérodote, Parme des Ciiirievis, et qui parait avoir été consnsun aux peupler asiatiques". Les scholiastes d'll„mère définissent le mot ,leutréttri lia, les mots uatciLov, ueiz r; x.,.. ç, ae xoû.~a ztil îàizypdi" et ils insistent sur la 'liliérence qui sépare le ?sut , ça ou âaa.i cov de '2270.:, le se;';fable L,;ui;:.r fond rées Grecs, Ces petites rondaches étaient faite; de peau de boeuf non tannée et sans ;soute ,fiielgilrf')l3 dOulle" de métal, comme le sont des armes semblables q;' .`o fabrique encore en Asie. De ce gesse parait être un petit bouclier (fig. 1638) découvert en 1875 dans un tombeau d'Amathonte, dans Ille de Chypre 1 , Il a 0,305 de diamètre et est couvert d'une feuille de bronze, d'un demi-millimètre d'épaisseur, doit les ornements repoussés appartiennent entièrement àl'art de l'Orient. Il est muni d'un ombilic pointu es saillant. Différents matériaux pouvaient entrer dans la compo sinon de l'uspis ou elipeus. Tantôt il était fait d'un seul morceau d'airain ; volontiers alors on lui appliquait chez les Grecs l'épithète de rcyya?nxoç, chez les Latins celle 'Iaereus 19. '.Tantôt il se composait de plusieurs plaques en métal, circulaires et superposées. Tel était, par exemple, le bouclier d'Achille fait avec cinq lames différentes, deux d'airain, deux d'étain_ par dessous, une d'or au arilie'u2". lie plus souvent la lame d'or étai remplacée n~.r des disques ail peau de boeuf", cousus ensemble. Sur les deux laces étaient appliquées des lames d'airain, ordinairement maintenues par une monture de bois ors de métal: c'est ainsi que le bouclier de Satie pédon 2E nous est représenté soutenu. d'une armature d'or ((3é6èot). Homère parie aussi des cercles )avxXot) qui de 3nêrne devaient servir à consolider le bouclier alitant qu'à l'orner. Celui d'Agamemnon22 avait dix cercles pareils en acier. Le bord de métal qui entourait la circonfé •ente du bouclier était ce qu'on appelas âv2u ires peaux étendues sur cette carcasse variaient en nombre. Il y en avait quatre au bouclier de Teucros et à celui d'Ulysse '5; sept au bouclier d'Ajax, sept aussi à celui de Tnrnus Toutefois, de même que la plaque centrale en or que le poète donne au bouclier des héros, était dans l'usage commun remplacée par des disques en cuir cru, de même aux lames d'airain ou d'étain disposées dans la partie concave, on substituait quelquefois un treillis de branches en osier, sur lequel étaient étendues les peaux de boeuf recouvertes à leur tour de plaques d'airain. Sur un beau vase de Panticapée, qui représente le combat des Amazones, une guerrière blessée laisse voir, en tombant, la partie intérieure de son bouclier 27; on y distingue très nettement(fig. 1639) les tiges entrelacées qui permirent aux Grecs de donner à cette espèce de boucliers les noms plus particuliers d'ivia, de 5x110, et de y4bo''9. Cette garniture se retrouve sur les armes de plusieurs peuples barbares. Eustathe parlant des boucliers perses 29 se sert de l'expression lx è,ûyciv. César3Ô à propos des boucliers de certaines peuplades gauloises, et Tacite 3t, à propos des boucliers germains. disent : viminum textus et vimi111/85s textis. Quelle que fût d'ailleurs la composition intérieure de l'uai4c, il était toujours recouvert d'airain, C'est au centre de cette surface convexe que se trouvait l'8 a),ir, turebe des latins (âgèsss), c'est-à-dire la partie relevée en bosse du bouclier. Homère a garni le bouclier d'Agamemnon de vingt bosses ou plutôt de vingt bossettes entourant l'igt,Lsllr central , elles étaient d'étain blanc et d'acier 33 Cette bosse prenait souvent la forme de têtes monstrueuses ; nous en voyons ,vay, plus loin, fig. 1646, 1647) des exemples sur les vases grecs 34. De là serait venu le nom de buccula, diminutif de busse, qui servit à désigner la bosse d'abord, puis le bouclier tout entier (buesula-bucculer'ia-bs, bouclai hi, bouclier`) "3. L'vrubo saillant rendait plus protectrice encore cette arme défensive8°. On verra que l'umbo servait tout particulièrement à protéger le soldat romain. A l'intérieur du bouclier se trouvaient une ou plusieurs peignée'. au moyen desquelles on le maniait. Les mots qui désignent en grec cette partie du bouclier l'à avov ou ôvtiâvr, ;ripés) ne se trouvent pas dans Homère. Agamemnon tient son bouclier suspendu à une courroie garnie d'argent 37 A l'origine, en effet, on se servait pour porter et pour gouverner le bouclier (utaxi'uuv)3B, d'un baudrier (ae),aeJro) qui se tenait attaché au col et de manière à couvrir l'épaule gauche39 [nnrdrnus]. L'arme ainsi portée, quand elle devenait inutile pour la défense laissait au guerrier ses mouvements libres pour diriger plus aisément son char ou son cheval, Plusieurs vases peints d'ancien style montrent des boucliers ainsi attachés et CLI 1251 CLI suspendus sur le dos40 (fig. 1640). Mais aucun monument n'est assez ancien pour nous expliquer comment on manoeuvrait le grand bouclier homérique, alors qu'on était réduit pour cela au te),auoiv. Peut-être prenait-on en main une des tiges de l'armature (xvover, dont nous avons parlé; ou bien doit-on supposer que, dès cette époque, le bouclier était intérieurement garni d'attaches analogues à celles de l'écu dont se couvraient les chevaliers au moyen âge? On 1 dut être naturellement amené à s'en servir de très bonne heure. On voit deux anneaux auxquels la courroie est fixée, et, de plus, deux anses ou poignées dans le bouclier (fig. 1641) placé auprès d'une statue célèbre, le Mars de la villa Ludovisi °t. L'exemple est, il est vrai, d'un temps bien posté rieur; mais ce n'est pas sans des sein assurément que le statuaire a tourné vers le spectateur ce côté du bouclier, contrairement à ce qui est habituel, et l'on peut supposer qu'il a voulu rappeler l'arme des temps héroïques, tout en la réduisant dans son groupe aux proportions d'un objet accessoire. II nous montre au moins le bouclier dorien tel qu'il resta en usage à Sparte jusqu'à la réforme de Cléomène III, au IIIe siècle av. J.-C. Ce roi fit échanger à ses concitoyens la lance contre la sarisse, qu'il fallait saisir à deux mains, et comme conséquence, il leur apprit à tenir non plus à l'aide du aopra, dit Plutarque", mais de l',5/«v-t-, ou ôxavov, depuis longtemps adopté par les autres Grecs. Hérodote attribue l'invention de l'Sxavov aux Cariens "'. Il est malaisé de déterminer exactement ce qu'il faut entendre par adortx et par à avov. Déjà, dans l'antiquité, les grammairiens qui discutaient la valeur de. ces termes les prenaient indifféremment l'un pour l'autre''°. Le passage de Plutarque, relatif au changement opéré par Cléomène, prouve qu'ils n'avaient pas été toujours confondus. Les monuments figurés et particulièrement les vases peints, où ces détails sont parfois très distincts, laissent voir à l'intérieur du bouclier plusieurs sortes d'appendice : d'abord une poignée placée à portée de la main (voy. plus haut, fig. 1635 et 1639) ; il y en a souvent deux, une de chaque côté du bouclier)", ou un plus grand nombre; et ces attaches, qui paraissent faites de courroies ou de cordes fixées de distance en distance, font quelquefois tout le tour de l'érZfg (fig. 16E4"; dans d'autres exemples on les volt tendues toutes (Hottes d'un bord à l'autre 47. En second lieu, comme il ne suffisait pas pour porter le bouclier, qui était grand et lourd, de la poignée, que l'on pouvait tenir dans sa main fermée, en avait l'habitude de passer le bras jusqu'au coude dans nne anse faite de métal, ou de cuir, ou de ces deux matières à la fois, tantôt formant un anneau assez large seulement pour que le bras y pût entrer (fig. 1639 et 1647), tantôt traversant le boucher d'un bord à l'autre dans toute sa largeur (fig. 1642 et 1643)''$. Deux cordons croisés en sautoir pouvaient en tenir lien, comme on le voit dans quelques exemples "1. Il faut encore signaler un autre appendice, moins nécessaire ---- que les poignées, qu'on trouve Fig. 1643'tabliRoteerl,or g .a "g" joint au bouclier rond dans un grand nombre de monuments (fig. 1613-1645). C'est une sorte de garniture de forme quadrangulaire, adaptée à la CLI -125'2 CLI partie inférieure de i'sspts, et qui descendait jusqu'au bas des jambes. Quatre guerriers sont représentés autour d'une sylis tic Ceré, et un cinquième au fond de la coupe (fig. 1613), armés de boucliers, au bas desquels pendent ces espèces de tapis frangés ou découpés à leur partie inférieure, et ornés de bandes, de méandres, de damiers, ou même de figures analogues à celles qu'on voyait sur le bouclier lui-même. Ce tablier était sans aucun doute destiné à protéger les jambes : on peut remarquer que les boucliers représentés avec cette garniture sont le plus souvent tenus par des guerriers sans jambières [ocaEAE]. La fig. 1614 représente un guerrier qui en est pourvu: mais on voit que la longue garniture suspendue au bouclier n'était pas inutile quand on soulevait celui-ci pour protéger le corps même, alors en partie découvert 50. Cet appendice était en cuir ou en étoffe, à en juger par les dentelures du bord inférieur et par les dessins, semblables à ceux des tissus employés dans les vêtements et le mobilier. Les monuments figurés et les textes les plus anciens nous apprennent que la surface extérieure des boucliers était recouverte d'ornements. Très simples à l'origine, ces décorations devinrent dans la suite souvent très compliquées et très riches. Sur un bouclier rhodien, conservé au nausée du Louvre, sur un autre, trouvé dans un tombeau de Corneto en Italie, et reproduit plus Ioin (fig. 167), on ne voit guère que des lignes brisées, courbes et enroulées t1. D'autres provenant des tombeaux de Cervetri et de Corneto, sont ornés aussi de dessins très primi tifs, de figures géométriques ou de ces boutons saillants qu'llomère nomme ôg-?a,of u comme l'Imbu central, mêlés à des animaux grossièrement esquissésr3. Si, à l'époque homérique, les boucliers des principaux guerriers grecs et troyens sont décrits comme de véritables chefsd'oeuvre artistiques, c'est que l'Orient, patrie des métaux ciselés, a conquis sur l'esprit et l'art grec une influence considérable. Sans doute, les descriptions de bouclier, dans Homère, sont en grande partie fantastiques. Cependant il est permis de croire, comme on l'a fait remarquer ailleurs [csrLATGRA], que le poète lorsqu'il a dépeint le bouclier d'Achille n'était pas guidé par sa seule imagination: il devait avoir sous les yeux ou dans l'esprit quelque modèle de l'Égypte ou de l'Assyrie, puisque c'est de là que viennent les belles armes ciselées qu'il met aux mains de ses héros 3`. Notons toutefois que les décorations des boucliers n'étaient pas à l'origine purement artistiques. Les vers des poètes et les sujets représentés indiquent que, loin de chercher à plaire, on préférait les images effrayantes, soit que l'on voulût, en complétant l'aspect terrifiant du guerrier, intimider l'adversaire et contribuer à sa défaite, soit plutôt que l'on attachât aux emblèmes choisis une idée de préservation pour celui qui les portait [rescixua]. Homère suspend aux épaules d'Agamemnon un bouclier e3 sur lequel est figurée la Gorgone aux regards horribles avec la Crainte et la Terreur pour compagnes. Eschyle garnit le bouclier de Tydée de clochettes d'airain qui sonnent l'épouvante 66. Ailleurs, ce sont des têtes de Méduse, des lions à la crinière hérissée, Jupiter brandissant un trait enflammé, Typhon entouré de serpents enlacés et vomissant une fumée noire 6', etc. La fig. 16'46 est tirée d'un vase peintae où l'on voit, déposés auprès d'Achille et d'Ajax qui jouent aux dés, leurs boucliers chargés de figures de serpents, de panthères et des masques grimaçants d'un satyre et de la Gorgone. Ces ornements avaient un autre avantage : ils permettaient de reconnaître au milieu de la mêlée les principauxguerriers, de les provoquer ou de les éviter, de les attaquer ou de les secourir. C'est grâce à la décoration de leurs boucliers que le péda gogue des Phéniciennes distingue et signale à Antigone les sept chefs rangés sous les murs de Thèbest9, et que le messager peut donner à Jocaste des détails précis sur le combat et les combattants 60. A ces emblèmes distinctifs (ci,t x-rx, a1,µ:12), dont une tradition attribuait l'invention aux Cariens 61, s'ajoutent quelquefois des inscriptions, menaçantes elles aussi : « rp jaco ncaaty, je brûlerai la ville», est écrit en lettres d'or sur le bouclier de Capanée, à côté CLI -'[2133 CLI d'un homme nu qui tient un flambeau allumé; ((Mars luimême ne me renverserait point à bas de ces remparts », vocifère, sur le bouclier d'Etéocle, un soldat qui monte les degrés d'une échelle appliquée contre une tour ennemie n. Peu à peu, de menaçantes qu'elles étaient dans le principe, les inscriptions et les décorations de boucliers deviennent simplement distinctives ; les premières, très explicites d'abord, comme celles qu'avait imaginées PolyniceG3, s'abrègent de plus en plus. Une lettre initiale finit par signaler seule la nationalité de chaque combattant. Les Lacédémoniens se reconnaissaient au A, les Sicyoniens au les Messéniens au M, les Argiens à l'A gravé sur le dos bombé de leurs boucliers fil°. Nous retrouverons un usage analogue à Rome. Quant aux représentations figurées, elles perdent, elles aussi, leur caractère guerrier. Les unes ne sont plus que des emblèmes distinctifs, qui désignent le combattant, son origine, sa patrie ou ses dieux. Sur le bouclier de Parthénope65 est représentée Atalante poursuivant un sanglier ; ce qui indique que le guerrier descend de l'illustre chasseresse. Le bouclier d'Aventinus, fils d'Hercule, est décoré de l'image de l'hydre de Lerne 66. De même Turnus, petitfils d'Inachus, porte sur son bouclier l'image d'Io changée en génisse G7. Hippomédon pour rappeler qu'il est Argien a, gravé sur le sien, Argus aux cent yeux83. Les habitants de Mantinée représentent sur les leurs un trident, symbole de leur dieu Poseidon R9. Les Thébains y placent le sphinx ou la massue d'Hercule 10. On pourrait multiplier ces exemples. D'autres figures plus simples telles que le lion, la panthère, le sanglier, l'aigle, etc., peuvent indiquer le courage du guerrier porteur du bouclier; d'autres comme le cheval, ou une partie de cheval, ou une simple jambe, symbolisent la vitesse. D'autres encore, tels que le dauphin ou les monstres marins, conviennent aux guerriers qui, comme Ulysse, ont beaucoup navigué, etc. ". Il est enfin une classe de représentations qui sont purement artistiques. On fut fort étonné à Athènes de ne voir sur le bouclier d'Alcibiade aucun des emblèmes ordinaires, mais un Amour portant un foudre 73. A cette époque, Ies armes étaient de véritables oeuvres d'art. Si l'or entre dans leur composition, c'est bien moins, comme au temps d'Homère, pour en augmenter la solidité, que pour en rehausser la valeur et l'éclat. On en vint à décorer même la partie concave du bouclier. Le bouclier de la Minerve du Parthénon et celui de la Minerve d'Élide étaient célèbres : Phidias avait ciselé le premier et représenté à l'extérieur le combat des Grecs et des Amazones, à l'intérieur celui des dieux et des géants 73 ; Pammnus, son frère, avait peint l'intérieur du second n. On trouve aussi sur les vases et sur les médailles de nombreux spécimens de boucliers dont la partie concave, voire même la poignée, ne sont pas moins richement ornées que la surface extérieure : ici ce sont des serpentslà une couronne de lierre 76, ailleurs un griffon n, ailleurs encore six figures ailées ". . A l'intérieur d=a bouler nit par la figure 1647, est représenté un combat7'. Du développement de l'ornement des boucliers devait venir l'idée de donner à l'arme même un emploi purernentdécoratif. (Voy. pour les imagines clipeatae la Il" partie de cet article.) Une pareille arme devenue un cadre élégant pour le sculpteur, le peintre et le graveur, avait besoin d'être protégée. Plusieurs au teurs" parlent d'une enveloppe ("e yg.s), qui la couvrait quand on ne s'en servait pas. Dans la peinture d'une coupe, autour de laquelle sont représentés des jeunes gens préparant leurs armes ou s'en revêtant on en voit un (fig,161fi3) qui, avec l'aide d'un jeanegarcon,enlève la draperie qui couvre un bouclier encore suspendu au mur 8S. Les Romains suivirent l'exemple des Grecs, des Samnites et des Carthaginois se leurs voisins et leurs ennemis. Longtemps on admira à Rome le fameux bouclier d'Hasdrubal, trouvé par 'flarcïas dans 1_e camp punique et consacré à Jupiter Capitolin". Ires Gaulois aussi, sensibles à la beauté des armes , appliquaient sur leurs bouchers de fines feuilles de Métal ornées de figures, de pierres brillantes on de ,.,.,;t" César _i'tt:ait" comme Alexandre 11 'a -n, r.° 7 mai-3' de ses soldats des boucliers ciselés resplendissant d'or et d'argent. Les testes aussi bien que Ies monuments prouvent l'identité du clipeus latin et de l'éar, ç argien 87. D'après Denys d'Halicarnasse et Diodore de Siciles"", c'est par les Étrusques que les Romains auraient connu le bouclier rond. Auparavant ils ne se seraient servis que de boucliers carrés. Le bouclier rond se trouve souvent figuré dans les monuments de l'Ftrurie, les vases, les bronzes (fig. 1649), les bas-reliefs et les peintures murales des chambres fu CH 125'I CLI uéraireoB9. tll:anit il fut adopté à Home, il devint, comme _n Cr" t'arme défensive de l'infanterie. Il était principalement fait de bronze 90. Au temps de Servius Tullius, tous les citoyens de la première classe devaient avoir le clipeus; mais, comme celui-ci ne protégeait qu'une partie du corps, ils devaient en même temps porter la cuirasse iLORIC.] 9t. Plus tard (115 de Rome, 310 av. J.-C.), quand l'usage s'établit de donner aux citôyens une solde pour leur service militaire, on remplaça définitivement le clipeus par le scutum 92. Dans des peintures de la fin de la République, y a peu d'années, et qui représentent des scènes de l'histoire primitive du Latium, on voit (fis, 16110 des Latins combattant contre des adver saires clans lesquels on doit sans doute reconnaître les Rutules, Les uns portent le bouclier rond ou clipeus, les autres, des boucliers allongés aux extrémités carrées ou plus ou moins arrondies, qui appartiennent à une autre classe dont nous allons parler maintenant. II. -Lescutum (Capté;) se distingue d'abord du clipeus par sa forme. Celui-ci est rond et est appelé xéxato; ou rotundusY4, celui-là est caractérisé par les épithètes F7tµr',xrç et looigu0aa_. Le scutum, en effet, avait la forme d'un carré long et ressemblait un peu à une porte; de là le nom de Oupit;, de tfis . elsïe lui donnaient les Grecs. Il semble que ses proportions se sont quelque peu modifiées dans la suite des siècles. Cette espèce de bouclier, d'après Polybe", mesurait deux pieds et demi de large, quatre pieds et parfois un peu plus de long. Les sentes des peintures dont on vient de parler ont à peu près cette longueur avec un peu moins de largeur. Ceux dont on voit armés (fig. 1651) des soldats de la fin de la république ou du commencement de l'empire, dans un bas-relief du musée du Louvre 98, se rapprochent davantage des dimensions indiquées par Polybe, en tenant compte de la courbure du bouclier, qui est creux à l'intérieur et présente à l'extérieur une surface bombée. La courbe est moins prononcée toutefois, dans les exemples qui viennent d'être cités, que dans les bas-reliefs de la colonne Trajane et dans d'autres monuments du même temps, où le scutum forme un demicercle, ce qui l'a fait comparer à une tuile faîtière°', Dans un de ces bas-reliefs 99, un soldat est représenté (fig. 1652) franchissant un gué ; il a posé sa cuirasse, son casque, son épée dans la concavité de son bouclier qu'il porte sur sa tête. Pendant la bataille, le scutum protégeait admirablement le corps, qui en était presque entièrement enveloppé. On voit, par les mesures données plus haut, et aussi en considérant le basrelief du Louvre, que le combattant n'avait qu'a se courber un peu pour être tout entier à couvert. On s'explique aussi comment des soldats en faction la nuit pouvaient s'endormir quoique debout (séantes), la tête appuyée sur le rebord supérieur du bouclier99. Dans les bas-reliefs de la colonne Trajane (voy. fig. 1656) le scutum n'a plus la même hauteur; mais peut-être faut-il admettre qu'il y est représenté, comme d'autres accessoires, d'une manière un pets conventionnelle et moins grand qu'il n'était en réalité. Le scutzlm était fait "° de planches de bois léger 301 jointes l'une à l'autre avec de la colle de taureau et couvertes extérieurement d'abord d'une toile et, par dessus, d'un cuir de veau (axtroç) 105. C'est cette enveloppe qui, dans les sièges, devint quelquefois la nourriture des soldats affamés''' Cette légère charpente était consolidée, d'abord, par une 1 Cli 1"25 t _ €;E.A bordure de métal, qui empêchait que le bouclier posé ii terre ne se pourrît à la longue par l'effet de l'humidité' ensuite par une armaiure dont la structure se comprendra. bien si l'on examine une de ces pièces (fig. 1653 retrouvée en Gaule 704. Elle consiste en une forte lige prolongée dans toute la hauteur da bouclier, se relevant en bosse et soutenant une plaque qui forme sous l'unabo une coquille ou boîte creuse, où le soldat pouvait mettre son pécule10u. On voit distinctement cette partie creuse à l'intérieur de plusieurs boucliers figurés dans un amas d'ar;nes romaines sur un bas-relief du musée de Berlin (fig. 1654)'0°. A. l'extérieur,l'umbo, dans ce basrelief, comme dans ceux de la colonne Trajane et dans d'autres monuments, a 1'ap parence d'un carré orné de dessins gravés ou en relief plus ou moins saillant, Ces dessins, qui décoraient le clipeus aussi bien que lescutum, avaient pour but de distinguer les soldats les uns des autres. Chacun, dit Végèce, avait sur son bouclier un emblème différent et au revers son nom avec l'indication de sa cohorte et de sa centurie On peut distinguer une grande variété de ces emblèmes (signa, digmata)sur les boucliers de la colonne Trajane (fig. 1656). Ici, c'est un foudre ailé, là une guirlande, ailleurs, un ou plusieurs croissants avec des étoiles, une ou plusieurs couronnes de laurier '08. On voit (fig. 1655)1°° la plaque centrale d'un bouclier du usiècle., trouvé dans le lit de la', r:a', en Angleterre'. csl en bronze avec nu e; s sai'' les figures sont gravées et incrustées en argent. L'inscription indique que l'arme appartenait à un soldat de la 3` Ln: , une autre inscription gravée sur le bord semble le possesseur du bouclier et peut-être sa venturi, . L'urnbo donnait au bouclier plus de, force pour repousser les traits les plus terribles, les grosses pierres et les redoutables sarisses macédoniennes". Que :pleines il. e+, I faisait même une arme offensive. Grâce à lin, le soldat serré de près dans la mêlée pouvait repousser et blesser son ennemi. D'une forte secousse du bras et de l'épaule (ala), il projetait le bouclier en avant, et l'adversaire, à la fois étourdi par la masse d'airain et percé de l'u;ralo, tombait à terre . il pouvait alors facilement être achevé. C'est ainsi que Cornelius Cossus, tribun nr , frappe et tue le roi ïolulnnius, que 1`d. Mann us pr un Gaulois du haut du.. CapitoleC Le. mot '0e La: souvent employé pour désigner le bouclier tout entier. Mais on ne le rencontre avec ce, sens plus général qu'à partir d'Auguste''a L'origine du seutuio est des plus incertaines. D'après Plutarque, c'est aux Sabins7', d'après Athénée '' et Clément d'Alexandrie', aux Samnites que les Romains auraient emprunté l'usage de ce bouclier. Le premier de ces trois auteurs qui, ici, se trouve en contradiction avec Tite-Live sur la date de l'adoption du scuivre par les Romains, attribue (s B 'ri'alus l'idée d'avoir pris aux Sabins la forme de leurs boucliers (bv eo;) et d'avoir ainsi changé l'armure de ses soldats, porteurs jusqu'alors de boucliers argiens (â,rc â«c . Clément d'Alexandrie prétend, au. contraire, que c'est un Samnite, nominé llaanas, CLI -1256 CLI qui le premier fabriqua et lit connaître aux Romains le scutum. C'est de ce bouclier que sont toujours armés les gladiateurs appelés Samnites. Ce qui augmente la difficulté, c'est que Tite-Live définit ainsi le scutum de cette nation : a forma erat scuti : summum taiius, qua psous attige liumeri teguntur, fastigio nequali, art imam cuneatior, rani,Ctatis causal" a. Plusieurs des boucliers figurés dans les peintures trouvées sur 1'Esquilin, qui ont été citées plus haut, se rapprochent de cette description, mais peut-on reconnaître dans celle-ci le bouclier long et rectangulaire que nous retrouvons constamment sur les monuments figurés? La solution la plus vraisemblable de ce problème obscur, c'est que les Romains employaient ce terme dans une acception très étendue et appelaient scutum non seulement les boucliers carrés et bombés dont sont armés les soldats légionnaires représentés sur la colonne Trajane, mais aussi les boucliers plats et ovales que portent dans les mêmes bas-reliefs et dans ceux de la colonne Antonine les cavaliers, les troupes prétoriennes et les auxiliaires fig. 1656). Le scutum ovale rappelle les boucliers ovales avec une large échancrure circulaire sur les côtés, les tupsoi d'origine béotienne, dont on a vu plus haut le type. Comme les auteurs qui se servent du mot scutum insistent surtout sur la grande taille de ces boucliers et l'appliquent souvent à des armes barbai-es118, il n'est pas téméraire de supposer que les Romains finirent par donner le nom de scutum à tous les grands boucliers, qu'ils fussent carrés, ovales ou terminés en pointe. ill.-Laparma(etsgJ.q) était, comme le clipeus, de forme circulaire. Ce serait même à sa forme, s'il fallait en croire `larron "°, qu'elle aurait dû son nom. Elle pouvait avoir jusqu'à trois pieds de diamètre, elle en avait souvent moins126, et consistait en une carcasse en fer garnie a l'intérieur d'une poignée et à l'extérieur de divers ornements, 1 n bouclier, dont on voit l'intérieur (fig. 16571, découvert en 1869, dans une tombe de Cornet() 1", est sans doute une parma: il mesure 6G centimètres de diamètre; en dessous sont fixés des anneaux où s'attachaient des courroies et une poignée en métal. Les deux faces sont couvertes des mêmes ornements consistant en une série de cercles concentriques remplis par des points, des ronds, des lignes brisées dont la disposition et l'exécution rappellent ceux qu'on trouve sur la plupart des boucliers des tombes italiennes. La plaque de métal, qui est tout ce qui reste de ces boucliers, est si mince qu'elle n'aurait pu résister aux coups : aussi on ne doit pas les considérer comme des véritables armes ayant servi au défunt auprès de qui ils ont été déposés, mais comme des imitations destinées à l'ornement de leurs tombes 122. La parma était particulièrement réservée dans l'armée romaine à la cavalerie [EQUITES] et aux troupes armées à la légère [vELrrES]123. Pour que les cavaliers pussent, comme le dit Tite-Live, sauter rapidement à bas de leurs chevaux, et terrifier l'ennemi par la promptitude de leur attaque, il leur fallait des boucliers très portatifs et facilement maniables. La partita remplisssait toutes ces conditions. Elle est figurée sur des monnaies (fig. 1658) et sur divers monuments comme un insigne de la chevalerie 15I et y paraît quelquefois richement ornée, et comme une arme faite pour la parade plutôt que pour la défense 12`. Dans les bas-reliefs de la colonne Trajane, le bouclier des cavaliers n'est plus de forme ronde, il est ovale (fig. 1659) et semblable à celui des fantassins des troupes auxiliaires. Plus tard, le scutum carré paraît tout à fait abandonné. C'est un clipeus rond ou ovale que l'on voit au bras des soldats figurés sur l'arc de Constantin, dans les basreliefs qui datent de la construction du monument et dans ceux de la colonne de Théodoset36; sur le disque 197 où CLI 1257 CLI cet empereur est représenté sur le trône, entre ses deux fils et entouré de ses gardes; ou encore sur le diptyque du trésor de Monza (fig. 1660), où est représenté un personnage dans lequel on croit reconnaître Aétius7 s, On le voit sur un grand nombre de sarcophages et d'autres monuments du lias empire. Pour la parma des gladiateurs nommés Thraces ,voy. GLADIATOH. IV.La cetra (ou caetra) était un petit bouclier rond fait de peau, d'environ deux pieds de diamètre. Servius la définit : « Scutum loreum quo utuntur Afri et Bispani n, et Isidore : « Scutum loreum sine ligno 130 n Les épithètes resona et crepitans accompagnent souvent ce mot730, parce que les soldats armés de ce bouclier avaient couturne de marcher au combat en frappant avec leurs glaives sur leurs cetrae, comme avec des baguettes sur des tambours. De Fig. 1660, Général romain, semblables boucliers sonores, uniquement faits de peaux tendues et collées l'une sur l'autre, sont encore en usage chez quelques peuples de l'Asie et de l'Afrique et l'on en a, dans l'Inde, en peau de rhinocéros et en peau d'éléphant, qui sont à l'épreuve de la balle et du sabre, comme ceux dont parle Pline 131 Cette peau était souvent ornée de peintures ; de là l'adjectif versicolor, joint quelquefois au mot cetra130. Elle pouvait aussi être garnie d'orne II. ments en relief, qui ajoutaient encore à la solidité de cette arme défensive133. La cetra était plus particulièrement l'arme des Africains, des Espagnols et des Bretons 93". On la voit (fig. [661), réunie à d'autres armes, dans un trophée formé de dépouilles de l'armée des Carthaginois, représenté sur un denier de la famille Caecilia frappé en mémoire des victoires de Scipion en Afrique tas Connue dans toute l'Asie, elle aurait été apportée sur les rivages de la Méditerranée et de l'Océan par les Phéniciens 136 Ce sont les Ibères qui semblent surtou t l'avoir adoptée. Ils en firent en quelque sorte leur arme nationale et lui donnèrent son nom. Le mot cetra ou caetra est un terme d'origine espa ne sont que la très indécise traduction138. La cetra, très légère, était portée dans l'armée romaine, comme dans celle de Philippe de Macédoine et d'Annibal135, par les soldats chargés des reconnaissances et des mouvements qui devaient être rapidement exécutés. Ce sont les cetratorum cohortes que César charge d'enlever à la course une position très importante sur une montagne très élevée7fi0 Les breves cetrae qu'Agricola vit aux mains des Bretons141 semblent s'être conservées jusqu'à nos jours : on croit les retrouver dans la targe des Écossais. V. -La pelta (né),rr) était un petit bouclier léger 162, dont la forme ordinaire était celle d'un croissant, un de ses côtés étant arrondi et souvent allongé, l'autre ouvert par une ou deux échancrures plus ou moins profondes. Cette forme l'a fait comparer tantôt à une feuille de lierre 143 tantôt au croissant de la lune 14"; de là l'épithète lunata qui sert chez les poètes à caractériser la pelta 1"s. Ce bouclier était probablement fait d'un treillage d'osier comme celui qu'on a vu plus haut (fig. 1639) et recouvert de cuir épais; aucun cercle (LTsç) ne le bordait". Il était muni d'une poignée et de courroies qui permettaient de le porter sur le dos. Au début de la bataille de Pydna, lesMacédoniens détachent les peltae suspendues à leurs épaules t47. Ce genre de bouclier était une arme barbare particulière aux peuples asiatiques et aux Thraces, par qui les Grecs le connurent 148. Euripide l'appelle Opo xta 140. C'est un Thrace, reconnaissable à son bonnet de fourrure [ALOPEKIS] et au manteau droit ou zeira qui tombe derrière ses épaules, que l'on voit (fig. 1662) tenant une pelta, au fond d'une coupe du musée du Vatican'''. Les soldats de Persée et de Philippe en étaient armés. Quand les Thraces entrèrent dans les armées helléniques, comme mercenaires d'abord, puis plus tard comme troupes régulières, ils conservèrent leur arme nationale 158 CL! 1258 -CLI et, à cause d'elle, reçurent pour se distinguer le nom de peltastes'51, donné ensuite à des troupes qui tenaient le milieu (ti),lets uto ) entre les soldats pesamment et les soldats légèrement armés 702 C'est comme arme caractérisant les Barbares de l'Asie du Nord, que le bouclier a été attribué aux Amazones par les poètes, qui ont coutume de les appeler peltatae, pelti ferae1E3, et par les artistes, qui les ont représentées armées de la pelta. Telles on les voit au moins dans des peintures de vases et dans des sculptures d'un âge peu ancien; car antérieurement on peut remarquer dans un grand nombre de monuments des Amazones portant des boucliers ronds ou ovales, semblables à ceux des Grecs qui les combattent154 Mais dans les peintures des vases de Ruvo ou de Bari, comme aussi dans beaucoup des culptures 1m, on voit des Amazones avec des peltae à simple ou à double échancrure (fig. 1663), ou même ayant un bouclier de forme ovale sans échancrure aucune. Plutarque dit que le bouclier des Amazones était enferme de losange parfait 158; mais ce spécimen de pelta ne se rencontre 157 que très rarement. On rencontre assez souvent des boucliers ronds avec une échancrure très petite 158; mais on voit rarement ces boucliers au bras de guerriers grecs. L'exemple ici reproduit (fig. 1664) est tiré d'un vase athénien 158. A Rome le mot pelta est souvent employé par les auteurs comme synonyme des mots cetra et scutum. Il y avait des gladiateurs qui portaient un petit bouclier appellé pelta [GLADIATOR]. La véritable pelta ne se retrouve que comme accessoire de comédie, au bras des concubines de Néron déguisées en Amazones. VI. On appelait elipeus un disque en métal ou en marbre sur lequel étaient représentées des images de dieux, de héros ou de grands hommes. Le nom donné à ces portraits s'explique par l'origine de cet usage, que les Romains avaient emprunté aux Grecs. Ceux-ci avaient l'habitude de suspendre dans les temples des boucliers transformés en ex-voto et ornés d'inscriptions rappelant une victoire t60 A ces boucliers, qui d'abord étaient des trophées pris sur l'ennemi, se substituèrent peu à peu des armes qui n'avaient jamais servi, et qu'on fabriquait exprès en souvenir d'un exploit guerrier181. Tels étaient les présents de Crésus, que l'on voyait dans le temple de Delphes et dans celui d'Apollon à Thèbes162 tels les boucliers d'or forgés après la bataille de Platées et accrochés par les Athéniens dans le temple d'Apollon deDelphes163; tel aussi le bouclier d'or attaché à la voûte du temple de Jupiter Olympien par les Tanagréens vainqueurs d'Athènes'': Les athlètes eux aussi suspendirent dans les temples à titre d'ex-voto de petits disques en métal gravés sur leurs deux faces et qui représentaient le vainqueur 165. Des boucliers sculptés en marbre portant des inscriptions furent placés dans les temples ou dans des lieux publics pour honorer des magistrats ou des citoyens qui avaient bien mérité 16s On a un remarquable exemple d'une consécration analogue dans un bas-relief (fig. 1665), démis vert en 1780 près du rivage de Laurentum, où l'on voit un bouclier, sur lequel est représentée la bataille d'Arbèles, soutenu par les figures de l'Europe et de l'Asie au-dessus d'un autel élevé à la divinité d'Alexandre 187. Un usage analogue se retrouve à Rome. On attacha CL.I 1259 CLI d'abord à l'architecture des temples les boucliers pris sur l'ennemi. T. Quintus, après la défaite de Philippe, consacra aux dieux dix boucliers d'argent et un d'or massif trouvés parmi les dépouilles 18e. Marcius offrit à Jupiter Capitolin le fameux bouclier d'Hasdrubal abandonné dans le camp punique 169. Sur ce bouclier d'or était représenté l'image du héros carthaginois. Les Romains eux aussi firent placer des portraits sur leurs clipei: Scipion portait sur le sien l'image de son père et de son aïeul 110, Puis, le clipeus ainsi orné cessa d'être une arme défensive et devint un cadre à portrait : ces portraits s'appelèrent imagines clipeatae, aix6vaç iv ô7tXto 171, ou simplement clipei et clipea 172. C'est Appius Claudius qui, le premier, introduisit cette coutume à Rome. De son autorité privée, il suspendit dans le temple de Bellone ses ancêtres représentés sur des clipei 173 Après lui, M. Aernilius, consul après la mort de Sylla, plaça les siens dans la basilique Aemilia, comme on le voit sur une monnaie de cette famille (fig. 1666)174, et dans sa propre maison. Cicéron, plaisante son frère Quin tus, qui s'était fait faire son imago clipeata dans de grandes proportions 175. C'est une image semblable, en marbre, représentant, à ce qu'il semble, Claudius Drusus l'ancien, que possède le musée du Louvre 176. L'Empire devait perpétuer cet usage. En effet, tous les empereurs depuis Auguste jusqu'à Claude le Gothique, firent ainsi représenter et suspendre dans les temples sur des clipei leur image ou celle des vertus pour lesquelles ils voulaient être honorés 177. Caligula alla même jusqu'à instituer une cérémonie annuelle dans laquelle une troupe de jeunes gens et de jeunes filles nobles accompagnait en chantant le bouclier-portrait de l'empereur jusqu'au temple de Jupiter 178. Le même honneur était fait après leur mort et même de leur vivant 179 à des personnages qui n'étaient nullement illustres. Rien n'est plus commun d'ailleurs que de voir sur un tombeau l'imago clipeata du défunt, le représentant quelquefois avec sa femme [ssrui csust]. Vers la fin de la République, l'usage de graver et de sculpter des disques en métal ou en marbre s'était généralisé et modifié. Sur ces clipei on représenta non seulement des portraits, mais des dessins de toute espèce destinés à décorer les édifices publics et les demeures privées. Les Grecs avaient connu cet usage. Pausanias dit avoir vu au prytanée d'Olympie des boucliers décoratifs placés là uniquement pour charmer les yeux 18°. De ce genre sont ceux (fig. 1667) qu'on voit dans une peinture de Pompéi, suspendus aux colonnes d'un édifice circulaire tel. Plusieurs de ces clipei, tous en marbre, ont été trouvés à Tusculum et surtout à Pompéi et à Herculanum. Dans ces deux dernières villes, ils gisaient à terre, quelques-uns brisés, la plupart encore intacts, dans les maisons particulières. Ils étaient autrefois suspendus entre les colonnes des portiques et des péris tyles, comme l'indiquent les crochets ou les anneaux dont ils sont encore munis, et comme on le voit plus clairement encore dans des bas-reliefs en terre cuite (fig. 1668, 1669) conservés au Musée du Louvre 182 Ces bas-reliefs, dont sont détachées les figures, représentent ces boucliers décoratifs à la place même qu'ils occupaient. Suspendus au plafond des portiques qui couraient autour de l'atrium, ils frappaient toujours les yeux, qu'on se promenât sous la colonnade ou dans l'impluvium. C'est pourquoi ils sont presque tous ornés de sculptures sur leurs deux faces. Les sujets représentés offrent entre eux de grandes analogies, et la figure 1670 donnera une idée exacte de tous ceux qui sont conservés au Musée de Naples: ce sont de gracieuses scènes empruntées au culte de Bacchus. Les personnages, Faunes, Bacchantes, etc., les animaux, panthères, boucs, etc., etc. ; les instruments, tambourins, thyrses, etc., rappellent le plus souvent le culte de Dionysos, le dieu de l'Apulie et de la Campanie [BACCHUS]. Ajoutons que les dimensions et les formes de ces élégants boucliers décoratifs sont plus variées que celles des imagines clipeatae. Le plus grand de tous ceux qui sont conservés au musée de Naples ne mesure pas en diamètre plus de quarante centimètres et le plus petit moins de vingt-trois ; mais entre ces deux dimensions extrêmes il serait possible de trouver une série complète d'intermédiaires, surtout entre les plus petits et les moyens, qui ont de trente et un à trente-cinq centimètres de largeur s'ils sont carrés, en diamètre s'ils sont elliptiques ou circulaires. Car les artistes n'ont pas imité seulement les boucliers ronds, le clipeus et l'cea7tiç ; ils ont adopté aussi les formes elliptiques et rectangulaires. De là vient que, parmi ces boucliers décoratifs, les uns rap l'ouest, depuis l'église Saint-Théodore jusqu'au Dipylon, en passant sous la Kapnikarea et en suivant, près de la rue d'Hermès, la ligne la plus creuse de la ville°. Des regards, profonds de 6 mètres, permettent d'y descendre. La construction, très diverse, appartient à différentes époques. Ici, la voûte, de 4',20 de diamètre, est construite en pierre du Pirée, plus loin, elle s'abaisse et n'est (l~ pbns qu'en brique; vers le Dipyle, sur une longueur de \ 5',60, ce n'est plus une vraie voûte, c'est une suite d'encorbellements (fig. 1672), qui rappelle la construction du CLO 1260 CLO pellent le clipeus ou la parme, d'autres, le sentent et d'autres CLITELLAE. Kave ata. -Double panier ou bissac, placé enfin, la pelta 153. MAURICE ALBERT. sur le dos d'une bête de somme, par-dessus le bai, ou la trousse, qui en est indépendant (fig. 1671. Ce mot est toujours employé au pluriel' les exemples ici reproduits sont pris d'un bas-relief de la colonne Trajane L. Snnno. CLOACA, cluaca (peut-être de xÀéCs), nettoyer, en latin, duo, `ï7lvvoy,oc)• Cloaque ou plutôt égout. Large canal souterrain, voûté le plus souvent, par lequel s'écoulent les eaux et les immondices d'une ville, pour se déverser dans le fleuve voisin ou dans la mer '. La construction des égouts remonte à la plus haute antiquité. Elle était pratiquée à Ninive avec une grande perfection. Les égouts que M. V. Place y a retrouvés ont 1",12 de largeur et 4m,4O de hauteur. Ils sont construits en briques cuites et très dures, le radier est formé de grandes dalles posées à bains d'asphalte. Toutes les formes de voûtes étaient connues des architectes assyriens; on retrouve dans leurs égouts la voûte en ogive, le plein-cintre, les courbes surhaussées, surbaissées, etc., et les particularités d'exécution les plus curieuses. Les Grecs sont accusés par Strabon d'avoir négligé les chemins pavés, les aqueducs et les égouts, dont les Romains se sont principalement occupés°. Ce préjugé n'est pas mieux fondé pour les égouts que pour les aqueducs [AQCAEDUCrUS]. Un égout existait à Athènes, presque aussi grand que ceux de Rorne, et on en retrouve aujourd'hui encore une partie importante, traversant la ville de l'est Trésor d'Atrée à Mycènes. C'est évidemment là la partie la plus ancienne, remontant à une époque où la voûte n'était pas encore pratiquée en Grèce. Chose intéressante, l'extrémité ouest de l'égout forme une espèce de réservoir sur lequel s'ou vrent des conduits en briques, cylindriques ou carrés, qui divisent et répandent les eaux de l'égout, pour les utiliser dans la plaine, où elles se dirigent vers les bois d'oliviers. Il y a donc ici un système complet d'irrigation, d'utilisation des eaux d'égout qu'on aurait pu croire une invention moderne. Le conduit cylindrique représenté A toutes les époques, depuis vingt siècles comme aujourt CLO 1261 CLO fig. 1673 a 0n',67 de diamètre; il est en terre cuite, formé de deux parties finement et solidement rattachées au moyen d'agrafes en plomb. Aux temps les plus anciens de Rome, quand elle comprenait seulement quatre des sept collines, le Palatin, le Capitole, le Coelius etl'Aventin, les habitants furent contraints par l'accroissement de la population de descendre dans les vallées; on fut obligé de dessécher et de combler ces bas-fonds, occupés par des marais, dont le plus considérable était le Vélabre, au pied du mont Aventin. C'est aux rois étrusques, et particulièrement à Tarquin l'Ancien, que l'on attribue la fondation du Forum et les commencements des vastes travaux d'assainissement qui préparèrent l'arène du Circus Maximus, celle du Forum, en un mot l'assiette de la Rome primitive'. Un gigantesque souterrain, construit en beaux matériaux et dans lequel aboutissaient d'autres égouts secondaires, fut appelé Cloaca Maxima, et il est resté jusqu'aujourd'hui le plus grand de tous les cloaques. Voici son parcours, en joignant aux indications de la Rome moderne celles des monuments antiques. Commençant au milieu du Forum en face du cimetière de l'église della Consolazione, il se dirige par la Via de S. Teodoro vers l'église de S. Giorgio in Velabro, passe sous l'arc de Janus Quadrifrons, traverse une fabrique de papiers où la voûte en partie détruite laisse voir cette magnifique construction ; il poursuit en traversant d'abord la Via dei Cerchi, sur l'emplacement de l'ancien Circus Maximus, puis la place Bocca della Verità et débouche dans le Tibre, près du Ponte Rotto (pont Palatin), après avoir passé entre les temples de la Fortune virile et de Vesta. Ce parcours est d'environ 800 mètres'. A mesure que Rome s'étendit sur l'Esquilin, le Viminal, le Quirinal et dans les vallées adjacentes, les successeurs de Tarquin l'Ancien créèrent de nouveaux égouts, les uns allant directement au Tibre, le plus grand nombre se réunissant à la Cloaca Maxima, qui était le véritable égout collecteur. Ce monument, le plus ancien que les Romains nous aient laissé, atteste la puissance de leurs conceptions pratiques. Après vingt-quatre siècles, cet égoût modèle sert encore aujourd'hui et conduit au Tibre les eaux d'une grande partie de Rome, car il reçoit l'égout dit de la Suburra, qui recueille les eaux du Quirinal, du Viminal, de l'Esquilin et (les vallées intermédiaires. L'embouchure forme, dans le mur du quai appelé autrefois Pulchrum littus,un arc plein-cintre d'environ 3'',00 de diamètre, à triple rang de voussoirs concentriques, dont les joints sont en liaison les uns sur les autres (fig. 167/e et 1675). La voûte, les murs, sont en blocs de grand appareil (2m,00delong sur 1n',00 de haut), posés sans ciment, de pierre de Gabie (peperieo), toujours employée dans les constructions de la Rome primitive. Certains auteurs modernes tels que Venuti, Nibby et Letarouilly, donnent à la Cloaca Maxima une hauteur égale à sa largeur; d'autres tels que Piranesi et Dezobry lui attribuent 10 mètres de haut et même davantage. La vérité serait plutôt que cette hauteur n'est pas connue, le lit du fleuve s'étant élevé et la vase ayant rempli l'égout jusqu'à la naissance de la voûte'. On y circulait en barque autrefois ; Agrippa, chargé par Auguste de la réparation des égouts, les par courut en entier'. Strabon et Pline nous disent que les égouts de Rome étaient assez larges pour qu'en certains endroits des chariots chargés de foin plissent y passer'. d'hui, ces prodigieuses constructions ont excité l'étonnement, l'admiration et même la stupeur". S'il faut en croire Piranesi11, une fouille lui aurait montré l'extrados de la Cloaca Maxima consolidé par des contreforts (anteridesl, lesquels, s'ils existent, pourraient dater de réparations dont parle Denys d'Halicarnasse et qui coûtèrent la somme considérable de 1000 talents12. Quatremère de Quincyl' et Letarouilly" disent que sur les côtés de la Cloaca une banquette règne tout le long des murs et que sur ces murs saillissent des corbeaux de pierre destinés à soutenir les principales conduites des eaux. Ces dispositions, qui feraient ressembler la Cloaca à nos égouts modernes, ne sont indiquées nulle autre part et nous les croyons douteuses, attendu que, si des banquettes existent, la vase du Tibre les a recouvertes et rendues invisibles depuis de longs siècles. Quant aux corbeaux, ils auraient pu servir plutôt à porter les cintres pour la construction des voûtes. Un autre égout datant également du temps des rois, à en juger par le mode de construction et par la nature de la pierre, qui est le peperiuo de Gabie, existe aussi à Rome. Partant de l'angle de la Via Paganica et de la Piazza Mattei, il se dirige en ligne droite, sous le Ghetto, pour déboucher dans le Tibre devant file S. Bartolomeo (insula Tiberiua). La construction y est aussi de grand appareil ; les assises, posées sans ciment, ont e,90 de CLO 1262 CLO haut; des blocs ont jusqu'à 2'1,50 de long. Le radier est pavé de grands blocs polygonaux. Cet égout sert encore ; il fut restauré et joint au grand égout dit « Bell' Olof() », construit en 160015. Ces égouts, construits par les rois, furent disposés suivant le tracé des différentes voies existantes. Après la destruction de la ville par les Gaulois (865 de Rome), dans l'empressement que l'on mit à la reconstruire, on ne prit pas garde d'observer les anciens alignements; des cloaques et leurs branchements (cloacula) se trouvèrent sous les maisons. Tite-Live nous dit que de son temps, l'ensemble de la ville annonçait encore le désordre d'une construction improvisée plutôt qu'une régulière distribution16. Le Digeste montre aussi, en plus d'un passage, les difficultés qui en résultèrent et qu'eurent à résoudre les juriconsultes romains 17. Cependant l'Aventin et d'autres parties de Rome étaient restés sans cloaques jusqu'en l'an de Rome 568, où les censeurs M. Porcius Caton et L. Valerius Flaccus en firent construire de nouveaux 98. Ils firent aussi réparer et curer les cloaques déjà existants, et c'est probablement à cette opération que se rapporte le passage cité plus haut de Denys d'Halicarnasse. En aval de l'embouchure de la Cloaca Maxima, avant les ruines du pont Sublicius, se trouvent dans le même mur de l'antique Pulehrum littus, les émissaires de deux autres égouts moins grands et dont la construction remonte à la République 19. Ils appartiennent, selon toute probabilité, à ces égouts de l'Aventin, construits par Porcius Caton et Valerius Flaccus 20. A présent, l'un est à sec, l'autre sert encore à l'écoulement dans le Tibre, del'Aqua Gratina, dite aujourd'hui Marrana, qui, venant de la villa de Cicéron à Tusculum, traverse d'abord la vallée Égérie, puis celle du grand Cirque. En 721, Agrippa, édile au sortir de son consulat, nettoie à ses frais les égouts de Rome et les parcourt en barque, comme nous l'avons déjà dit, jusqu'au 'Fibre 21. Pour en maintenir la propreté il y fait aboutir par sept canaux le trop-plein des sept aqueducs et établit par ce moyen des chasses d'eau abondantes qui enlèvent toutes les obstructions 22. Il construit aussi de nouveaux cloaques dans le Champ de Mars, où tant de monuments furent édifiés par lui. Un de ces cloaques, large de quatre mètres, haut de trois, fut retrouvé sous Urbain vni, au xvie siècle. On l'appelle aujourd'hui vulgairement Chiavica della Rotondit. Curé et nettoyé, il sert encore à l'écoulement des eaux de la partie la plus peuplée et la plus importante de la Rome moderne. Dans les fouilles qui furent exécutées en 1851 au Forum, sous la direction de Canina, un égout de petite section fut trouvé courant parallèlement au portique de la Basilica Julia, tandis qu'un branchement de ce même égout traverse sous la basilique même pour rejoindre la Cloaca Maxima 23. Parmi ces égouts secondaires, on trouve vers le Capitole, la section en plein-cintre (fig. 1676) ; un autre est couvert par une simple dalle (fig. 1677) ; au Palatin, c'est le plein-cintre en briques (fig. 1678); d'autres très nombreux sont en briques et couverts par deux grandes tuiles inclinées (fig. 1679) 24. Des renseignements que nous donnent les auteurs anciens, nous pouvons induire que certains égouts étaient découverts, qu'un certain nombre d'entre eux furent voûtés après coup et que les bouches en étaient grandes, au moins tommes celles qui existent encore à Pompéi, (plus loin, fig.1681). Trajan écrit àPlinele Jeune de couvrir le cloaque dont les exhalaisons sont dangereuses pour la santé des habitants d'AmastriaY0. Un passage de Plaute 96 indique bien aussi que, de son temps, des égouts de Rome étaient encore visibles, à ciel ouvert. Quant aux dimensions des bouches, Suétone nous raconte que le grammairien Cratès de Mallus, envoyé au Sénat par le roi Attale, tomba dans une bouche d'égout (in cloacm foramen), et s'y cassa la jambe''. Larnpridius, dans le récit de la mort d'Héliogabale, nous dit qu'après avoir traîné le cadavre de cet empereur sous les yeux du peuple, les soldats l'outragèrent au point de vouloir le jeter dans un égout 23 Le cadavre de saint Sébastien a pu entrer dans une bouche d'égout29.Dans les cours des palais ou sur les places richement décorées, les orifices d'écoulement étaient relativement petits et on les ornait de sculpture. Canina voit un spécimen de ces orifices dans le grand masque en marbre, aux yeux et à la bouche perforés, appelé vulgairement Botta della Verita (fig. 1680), et qui se trouve placé à Rome sous le portique de l'église de Santa Maria in Cosmedin 30. CLO 1263 CLO Tous les égouts n'offraient pas la solidité de la Cloaca Maxima. Pline l'Ancien raconte que lors du transport sur le mont Palatin, de colonnes de 38 pieds, en marbre lucullin, pour l'atrium de la maison de Scaurus, l'entrepreneur des égouts exigea une caution contre le dommage probable qu'elles pouvaient causer 31 La construction et l'entretien de leurs admirables cloaques imposèrent aux Romains de rudes travaux. La Cloaca Maxima joue un rôle important dans l'histoire de Rome et ne fut pas sans influence sur la chute de ses premiers rois. Rebutés par cette périlleuse besogne, aussi longue que pénible, les travailleurs se suicidaient. Tarquin fit mettre leurs corps en croix, exposés aux bêtes féroces et aux oiseaux de proie, expédient qui eut un plein effet sur la multitude 33 La rat cune subsista pourtant et Brutus sut la réveiller quand, après la mort de Lucrèce, il voulut soulever le peuple et chasser les rois 3a. Sous la République, l'administration et l'entretien des égouts appartient aux censeurs n. Sous Au guste, ce sont Ies édiles qui en prennent soin"; plus tard, de nouvelles charges sont créées par Adrien, sous le titre de curatores cloacaruin, qui se rencontre souvent dans les inscriptions à partir du second siècle de notre ère 36. Ce sont alors les condamnés et les criminels que l'on charge du nettoyage des égouts 37. Festus les appelle canalicolae; après Constantin, il semble que cette fonction fut réunie à celle des préfets et cela durait encore au v° siècle, sous les rois barbares. Théodoric informe Argolicus, préfet de Rome, de la nomination d'un fonctionnaire chargé de veiller sur les splendides égouts de la Ville (splendidas cloacas) n. Dans le vi° siècle, son petit-fils Athalaric fait une ordonnance concernant le nettoyage des égoûts de Parme. Il envoie aussi un délégué pour veiller à ce que la municipalité ne les laisse pas obstruerII9. Plus tard, dans les bas temps, après les désastres que Rome eut à subir, les égouts furent négligés, en partie détruits ou obstrués. De nos jours, en 1872, on en a trouvé dans le Forum qui étaient remplis de fragments de statues. Il faut arriver jusqu'au xni° siècle pour trouver trace de préoccupation des égoûts. Le pape Grégoire IX, vers 1230, répare et nettoie d'anciens cloaques et il en fait construire de nouveaux. Ces derniers, ainsi que les égouts creusés au xv° et au xvi° siècles, sont faciles à reconnaître, non seulement par le mode de construction, mais encore parce que leur niveau est généralement supérieur au niveau du sol antique. Les égouts anciens et modernes, si nombreux à Rome, forment sous le sol un labyrinthe inextricable °0. Des égouts existent à Pompéi, mais on n'en conna fit guère, jusqu'à présent, que les bouches et les orifices d'écoulement. Matois 4t nous donne l'aspect extérieur des égouts principaux de cette ville (fig. 1681). Les eaux s'accumulaient entre deux trottoirs élevés et, par deux ouvertures voûtées en plein-cintre, se précipitaient dans un égout qui, après avoir traversé l'Agger ou rempart, débouchait au dehors, laissant tomber les eaux du haut des murailles, le long des rochers, pour aller se perdre à la mer, autrefois très rapprochée de la ville. Une rampe douce, placée entre les deux bouches d'égout, permettait de monter facilement sur le trottoir. A Rome, à Pompéi, à Vérone, les latrines étaient reliées aux égouts. Le a tout à l'égout », que l'on parle d'établir aujourd'hui, existait chez les Romains; il existe encore à Rome. Nicomédie (aujourd'hui Ismidt), l'ancienne capitale de la Bythinie, construite comme Rome sur des pentes rapides et sur des terrains ondulés, eût été exposée également aux ravages des eaux pluviales et aux inondations sans un système d'égouts nombreux et bien entretenus. Ce système existe encore en grande partie, mais encom tiré, obstrué ; il ne fonctionne plus, et la ville moderne, égouts antiques que les orifices d'écoulement, percés dans par les jours d'orage, voit ses rues transformées en torun grand mur de soutènement qui plongeait autrefois rents dévastateurs. On ne connaît guère encore de ces dans la mer, retirée aujourd'hui à quelque distance. Ce CLO -126'tCOA mur est bâti en briques ; de grands contreforts de pierre, espacés de trois mètres environ, lui donnent une grande s-lidité. Entre ces contreforts s'ouvrent les égouts, de section très élevée, qui pénè trent dans l'intérieur des ter res (fig. 1682, 1683, 1684e Cet ensemble est d'un aspect Fig. Ou',, Plan. grandiose et donne une haute idée de la puissance d'une ville qui fut un moment, sous Dioclétien, la capitale du inonde romain La plupart des villes antiques où s'est développée la civilisation romaine avaient un système d'égouts analogues à ceux que nous venons de décrire. On en a constaté l'existence à Arpino, Parme, Aoste, Turin, Vérone, etc. et dans nos villes gallo-romaines Nîmes, Arles, Vienne, Lyon, Besançon, Périgueux, Metz, Reims, etc. ED. CUICLACME.