Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

AEDICULA

AELHCULA. Ce diminutif du latin AEDES, auquel cor ptov, diminutifs de oixoç et de vaôç, signifie une maisonnette, dn petit temple ou chapelle, une niche, un tabernacle, en général un petit édifice. 1. Dans le sens de maison, il est employé ordinairement au pluriel (aediculae)'. Plaute s'en est servi au singulier pour désigner seulement une des pièces de la maison. Cette acception du mot n'a pas besoin de plus amples ex n plications. Nous nous étendrons un peu plus sur ce qui touche aux édicules consacrées au culte. II. Aedes est rapproché et en même temps distingué nettement de son diminutif dans un passage de Tite-Live' où il est question d'une chapelle dédiée à la Victoire vierge, auprès du temple de la Victoire (aediculam Victoriae virgin;s prope aedem Victoriae M. Porcins Calo dedicavit). Le territoire consacré entourant les temples renfermait souvent des temples plus petits ou chapelles. A ceux que font connaître les auteurs on peut ajouter des exemples de ces édicules encore subsistantes. On en voit une placée dans l'un des angles de l'enceinte du temple d'Isis, à Pompéi 5; à Lambèse, en Algérie, dans une vaste cour qui s'étend devant un temple d'Esculape, on a retrouvé les restes de chapelles dédiées à Jupiter, à Apollon, à Mercure, à Hygie, à Sylvain D'autres édicules isolées, non dépendantes d'un temple, étaient répandues partout dans les villes et dans les campagnes. Les oeuvres d'art, et notamment les peintures de Pom péi et d'Herculanum, en fournissent des représentations très-variées. Ce sont tantôt des chapelles ne différant guère des temples que par leurs dimensions réduites et par une construction plus simple : ainsi, dans une peinture d'Herculanum (fig. 129), on en voit deux côte à côte, autour desquelles sont déposés des objets d'offrande 7. On en trouvera ailleurs d'autres exemples [SACELLUM, ARBOR, BIDENTAL] : tantôt ce sont de simples niches abritant une statuette, comme celle qu'on voit sur une pierre gravée de la galerie de Florence «fig. 130), représentant un sacrifice à Priape. Nous renvoyons à des articles spéciaux ce qui concerne les édicules d'un caractère particulier où l'on plaçait, devant les habitations ou dans leur intérieur, dans les rues et dans les carrefours, les images des dieux et des génies protecteurs [GENIUS, COMPITUM, ARA], les lares [LARES] et celles des ancêtres [IMAGINES MAJORUMLes tombeaux aussi étaient des édicules rappelant souvent par leur construction la forme extérieure d'un temple ; et, en effet, ils n'étaient autre chose que les monuments élevés aux morts, considérés par les anciens comme divinisés [sEPULCRUM, PARENTATIO]. III. Comme le temple tout entier n'était dans le principe qu'une construction destinée à abriter l'image sacrée, un édifice plus petit, mais de même apparence, marqua dans le temple agrandi la place considérée plus particulièrement comme le siége de la divinité (êloç) où devaient s'adresser' les adorations. C'est ce qu'indiquent les expressions dont se servent les auteurs pour le désigner, aussi bien que les représentations plus ou moins fidèles qui nous en ont été conservées. Ces expressions sont ou des termes généraux, tels qui précisent quelque détail de la forme de l'édicule ou de son emploi. Ainsi testudo e est le nom des édicules voûtées de manière à rappeler la courbe de la voûte céleste ; on en voit de semblables, abritant des statues sur diverses monnaies : Apollon de Milet, sur des monnaies impériales de cette ville, Aphrodite, sur celles d'Aphrodisias, en Carie, sont figurés dans des édicules de cette espèce 1Ô; soliûnl signifie l'endroit où est assise l'image de la divinité 11; armarium (€puâpov), indique celui où elle est enfermée n. Ces deux derniers noms conviennent également bien à l'édicule où était placée l'image de Jupiter assis sur un trône dans le temple du Capitole, au-dessus d'un soubassement élevé''. Tite-Live i4 ajoute que sur le faîte [FASTIGIUM] étaient placés des quadriges dorés, et qu'elle était en outre ornée de boucliers [eLIPEUS] également dorés. De tous ces renseignements il résulte qu'elle avait la structure et la décoration extérieure d'un temple. Une monnaie d'argent de Vitellius (fig. 131), dont le type est clairement déterminé par la légende I. o. MAX. CAPITOLINUS 95, n'en offre qu'une image abrégée et conventionnelle, où tous ces détails ne sont pas visibles, mais il n'est pas douteux qu'elle ne représente l'édicule à l'intérieur du temple, et non le temple lui-même. Il faut en dire autant d'un grand nombre de médailles grecques et romaines où l'on voit des constructions analogues. La divinité ainsi figurée est celle à qui le temple était consacré ; si d'autres étaient associées à son culte, c'est-àdire si leurs autels n'étaient pas distincts et si elles avaient part aux mêmes sacrifices (Oeoi aégêcagot, auvéartot), leurs images pouvaient être placées sous la même édicule : les Grandes Déesses étaient ainsi réunies à Éleusis ; Latone et ses enfants dans un temple de Mantinée 16; Junon, Minerve et Hébé dans un autre temple de la même ville 17; Esculape et Hygie dans celui qui leur était consacré à Titané 18; et, à Rome, dans le temple du Capitole, Juventas était placée à côté de Minerve clans la cella particulière de cette déesse 19. On en pourrait citer encore plus d'un exemple. Au contraire, si les divinités rapprochées clans le même temple avaient des cultes séparés, chacune devait habiter une édicule qui lui fût propre 20. Ainsi, à Rome, dans ce même temple du Capitole où Jupiter, Junon et Minerve étaient réunis dans une sorte de communauté (contnberniunz P1), chacun avait sa cella, qui n'était autre chose que l'édicule qui lui avait été primitivement consacrée, plus tard enfermée clans l'enceinte ou le péribole du grand temple E2. Pour la Grèce, il suffira de rappeler que dans un temple de l'acropole d'Athènes, Minerve Poliade et Érechthée avaient des sanctuaires séparés; les auteurs mentionnent c'est-à-dire consacrés à plusieurs dieux dont les cultes ne pouvaient pas être confondus. Tels étaient le temple de Mars et de Vénus à Argos 23, et près de Mantinée, un temple déjà cité n qui était divisé par une muraille : d'un côté étaient placées les images de Latone et de ses enfants; de l'autre, celle d'Esculape, etc. II y avait encore dans les temples des effigies peintes ou sculptées de dieux et de héros qui n'étaient pas associés au culte de la divinité à laquelle ce temple était consacré, mais qui en étaient comme les hôtes; leurs figures placées dans des niches ou sous des édicules, contribuaient à l'ornement de l'édifice. Les exemples en sont nombreux. On voit ici gravée (fig. 432) une des édicules composées d'un piédestal, d'une niche et de deux colonnes surmontées d'un fronton, qui décorent richement encore aujourd'hui le pourtour intérieur du Panthéon à Rome 2'. IV. Les édicules dont nous avons parlé jusqu'ici étaient des constructions complétant l'architecture du temple luimême; d'autres étaient de véritables meubles, de petits ta bernacles de proportions assez réduites pour être placés sur les tables d'offrandes 'mucus, DoNARIA], comme le s3; (ipxzLs 26 qui contenait l'image de Junon, dans le temple de cette déesse sur le mont Albain; et peut-être comme l'édicule d'or qui renfermait celle de Ptolémée dans le temple de Jupiter à Alexandrie (xpuersoç Sdso; t'a ièg ofxte) 27. Telle est aussi (fig. 133) celle qu'on voit sur une table, avec divers instruments du culte, dans une peinture d'Herculanum représentant Oreste et Pylade amenés devant Iphigénie 23. La piété et l'orgueil avaient multiplié ces édicules dans les sanctuaires. Des fabricants et des marchands établis dans le voisinage en offraient de pareils à ceux qui ne pouvaient en faire construire de plus considérables. Il y en avait en matières précieuses, comme les édi cules d'argent qu'on vendait à Éphèse auprès du temple de Diane'-'; ils étaient plus ordinairement de terre cuite, comme l'édicule de Cybèle trouvée à Athènes 30, qui est ici reproduite (fig. 434). On a rencontré en quelques endroits de ces dernières en si grande quantité, qu'on a pu en conclure qu'il avait existé là des fabriques ou des dépôts de ces objets. Celui qui est dessiné (fig. 435) a été recueilli à Marseille avec d'autres semblables en grande abondance 31. Des édicules portatives étaient promenées hors des temples en certaines occasions. Hérodote 32 parle d'une idole traînée A'F D 95 clans une édicule en bois doré sur un char à quatre roues, à peu près sans doute comme celle d'Astarté qu'on voit 33 sur une monnaie romaine de Sidon (fig. 136). Ces ,:.°~~~ exemples appartiennent, il est vrai, l'un à l'Égypte, l'autre à la Phénicie; mais en Grèce aussi de, édicules figuraient quelquefois dans les processions, soit sur des chars (val); uy0tiop0uUEVr;) 3''; soit sur les épaules de porteurs, comme on le voit dans une peinture découverte à Pompéi 3s il y a peu d'an nées (fig. 137). E. SAGLIO.