Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

ALABARCHES

ALABARCI-IES ('A?tadapyr,5). Fonctionnaire siégeant à Alexandrie pendant la domination romaine I. On ne doit pas le confondre avec un autre fonctionnaire romain 2 qui, sous le nom d'Apedap;tr,s, administrait l'épistratégie de Thébaïde [PRAEFECTUS AUGUSTALIS]. Suivant Cujas', dont l'opinion est adoptée par Marquardt, l'alabarehes aurait été un agent (magister scriptu.-ae) chargé du recouvrement de l'Impôt indirect sur les animaux [SCRIPTUR4, VECTIGALI. Franz voit dans l'alabarches un employé inférieur de l'ethnarque juif d'Alexandrie. G. HUMBERT. cpov). I. Albâtre, marbre de formation particulière, plus ou moins transparent, très-recherché des anciens et souvent employé par eux' pour des ouvrages de sculpture, pour des revêtements, des dallages, des vases, des colonnes, des tables, des urnes sépulcrales, des vasques, etc. Les eaux calcaires, filtrant dans les cavernes, y forment par concrétion les stalactites et les stalagmites, d'où l'on tire les albâtres. Ces eaux, suivant les terrains qu'elles ont traversés, donnent aux albâtres les couleurs les plus variées, et leur direction capricieuse, pendant cette lente concrétion, détermine une grande variété dans les ondulations des veines. Ce made de formation explique aussi comment l'albâtre se trouve rarement en très-grands morceaux. L'albâtre ainsi formé est l'albâtre calcaire qui est, comme nous l'avons dit, un véritable marbre; les anciens ont confondu sous le même nom une pierre gypseuse, appelée aussi alabastrite, faux albâtre ou albâtre gypseux. Elle a bien quelques-unes des qualités du véritable albâtre, comme la transparence et la facilité à prendre le poli; mais sa composition, sa formation sont différentes et elle a moins de dureté et d'éclat. Primitivement, l'albâtre fut appelé onyx ou marbre onyx (tvo ), à cause de la ressemblance qu'il offre parfois avec l'agate onyx. Le nom grecâaxtasrrpov (littéralement: insaisissable) viendrait, selon certains auteurs, de celui des petits vases sans anses et très-polis qu'on fabriquait généralement en cette matière, parce qu'on la croyait propre à conserver les parfums, les baumes, les onguents (voy. §II). D'autres auteurs prétendent, il est vrai, que ce fut la matière qui donna le nom aux vases'. L'albâtre que nous nommons aujourd'hui oriental est celui que les anciens préféraient; ils l'appelaient plus particulièrement onyx, parce qu'il était veiné par zones sinueuses, ondulées et plus ou moins circulaires. On le tirait des montagnes d'Arabie, et aussi de la Syrie, de la Cardianie, de l'Inde et de l'Égypte. Une ville de ce pays, située dans les montagnes de la Thébaïde, entre le Nil et la mer Rouge, près des carrières d'où l'on tirait l'albâtre le plus estimé, s'appelait Alabastrum 3. L'albâtre le plus commun était celui de la Cappadoce, il était dépourvu de tout éclat. La Grèce, l'Italie et la Germanie en donnaient également. Les premiers morceaux apportés à Rome, d'Arabie, n'étaient pas de grande dimension. On en fit des coupes à boire, des pieds de lits ou de siéges. Plus tard, en l'an 64 avant J.-C., P. Lentulus Spinther montra aux Romains étonnés des amphores en onyx aussi grandes que des barils de Chio. Cinq ans après, on vit des colonnes de cette matière hautes de 32 pieds (9`°,525). Des colonnes d'albâtre décorèrent aussi le théâtre de Cornelius Balbus; enfin Pline vit trente de ces colonnes, plus grandes que celles de Balbus, décorant la salle à manger de Calliste, affranchi de Claude Parmi les monuments construits à Athènes par l'empereur Adrien, on admirait surtout des portiques formés par cent vingt colonnes de marbre de Phrygie et dont les murs étaient du même marbre; on y voyait des salles contenant des livres, dont les plafonds étaient ornés d'or et d'albâtre et qui étaient décorés de tableaux et de statues'. Chez les Romains on recherchait surtout les albâtres de la couleur du miel, non transparents et offrant de petites zones disposées en tourbillons. On regardait comme défectueux les albâtres couleur de corne, ou blancs, ou se ALA 176 ALA rapprochant du verre. L'albâtre de Damas étaitle plus blanc; celui d'Égypte se trouvait en plus grandes masses. Aussi les Égyptiens en ont-ils fait des statues. Des figures d'Isis en albâtre sont conservées au collége romain et à la villa Albani. Soit pour la rareté des grands blocs, soit à cause de la difficulté que présentent au travail les couches de l'albâtre, les Romains n'ont guère fait de figures complètes en cette matière. La tête et les extrémités étaient ordinairement en marbre ou en bronze. Les ouvrages qu'ils nous ont laissés en albâtre sont principalement des bustes des familles impériales et des représentations d'animaux. Pour ceux-ci, certains albâtres, par leurs taches, aidaient beaucoup à l'imitation. La diversité des albâtres est très-grande, mais les noms qui désignaient, chez les anciens, ces variétés nombreuses et qui dérivaient sans doute des lieux de provenance, de la forme ou de la couleur des taches et des veines, nous sont inconnus. A Rome, où presque toutes ces variétés se trouvent dans les fouilles ou sont conservées dans les musées, dans les villas, les églises, etc., on leur a donné des noms plus ou moins motivés par les particularités de chacune d'elles. Nous indiquerons les noms des principales et leurs plus beaux spécimens. Alabastro cotognino (de la couleur du coing). Le beau vase trouvé près du mausolée d'Auguste et que l'on suppose avoir contenu les cendres de cet empereur, et un buste (l'Othon, conservés au Vatican, sont faits de cet albâtre, ainsi que les bustes de Septime-Sévère et d'Adrien, qui sont au musée du Capitole. Alabastro e onice (albâtre onyx). Il y a un très-beau vase de cet albâtre dans le musée de la villa Albani. Alabastro a occhi (semé d'yeux). Un vase de la galerie des candélabres, au Vatican, offre un remarquable spécimen de cette variété assez rare. Alabastro a tartaruga (semblable à l'écaille de tortue). Cet albâtre est des plus rares. C'est celui du buste de Jules César au musée capitolin. Alabastro a pecorella (moutonné). Voir la chlamyde d'un buste de Vespasien et le buste de Tibère au musée du Capitole. Alabastro fiorito (fleuri). Cette variété serait mieux appelée albâtre veiné, à cause des zones déliées, de différentes nuances qui le caractérisent. De cet albâtre sont formés : la grande colonne du musée Capitolin, dans la salle du Gladiateur mourant; la colonne du musée de la villa Albani, la plus grande connue aujourd'hui (environ 6 mèt.); une petite statue du musée Chiaramonti au Vatican; un léopard de la salle des animaux, également au Vatican, et un buste de Lucille, au musée Capitolin. Alabastro palombara (trouvé pour la première fois dans la villa Palombara). Voir un buste d'Adrien, dans la salle des Empereurs, au Capitole. Alabastro a rosa (à roses, semé de taches qui ont la forme (le roses). Le plus beau spécimen de ce magnifique albâtre est représenté par un cerf de la salle des Animaux, au Vatican. Alabastro dorato (doré). Deux morceaux de cet albâtre existent au musée du Vatican; l'un forme le piédouche d'une petite tête dans le musée Chiaramonti, et l'autre est un pied de statue colossale dans la galerie des Candélabres. On peut voir aussi à Rome, dans la chapelle Borghèse, à Sainte-Marie Majeure, une très-belle décoration obtenue par l'emploi d'albâtres antiques, appliqués en revêtement. L'albâtre gypseux ou faux albâtre, que nous avons déjà défini en commençant cet article, est le plus souvent d'un blanc laiteux, d'une grande pureté Il est d'un grain fin, mais, comme il est plus tendre que l'albâtre vrai, il est en même temps plus facile à travailler, à rayer, et son poli est moins beau. Divisé en lames minces, il est translucide comme un verre dépoli. Les anciens l'appréciaient surtout à ce point de vue et l'employaient parmi leurs pierres spé Il est probable que la pierre découverte sous le règne de Néron, en Cappadoce, pierre blanche et transparente, nous dit Pline, ce qui la fit nommer phengite, n'était autre qu'un albâtre gypseux d'une transparence particulière, puisqu'il n'était même pas nécessaire de la réduire en lames minces pour qu'elle pût donner passage à la lumière En effet, Néron ayant fait reconstruire avec cette pierre le vieux temple de la Fortune, consacré par le roi Servius, et qui se trouva renfermé dans sa Maison dorée, on voyait clair dans ce temple, les ouvertures étant fermées, par la seule transparence des murs 6. On a exagéré la transparence de cette pierre en disant que Domitien en avait fait construire un portique où, en se promenant, il pouvait, sans être aperçu, épier tous les mouvements du dehors'. Suétone dit simplement ceci : « A mesure qu'ap« prochait le péril, Domitien, chaque jour plus inquiet, fit « orner de phengites les murailles des portiques où il avait « l'habitude de se promener, afin que la réflexion de ces « pierres brillantes lui rendît comme un miroir l'image de • tout ce qui se ferait derrière lui'. » Aujourd'hui, les carrières les plus abondantes et les plus estimées de l'albâtre gypseux sont à Volterra, en Toscane. Les Étrusques en ont tiré ces urnes sépulcrales de forme rectangulaire, dont le modèle si répandu comporte un bas-relief et une ou plusieurs figures couchées sur le II.-Vase destiné à renfermer des parfums, des essences, des baumes. Son nom est tiré, selon les uns de la matière dont il était le plus ordinairement fabriqué, l'albâtre (ou plus souvent l'onyx oriental confondu avec l'albâtre). Les anciens attribuaient une fraîcheur constante à cette matière, et la croyaient particulièrement propre à la conservation des parfums 2. Cependant ils fabriquaient, et on possède encore, des vases semblables, destinés au même usage, en toute autre matière, en verre, en argile peinte ou émaillée, en argent ou en or, Aussi beaucoup d'archéologues suivant une étymologie déjà acceptée dans l'antiquité `, font-ils dériver le nom de la forme de ces vases, qui sont dépourvus d'anses (â, aa6«c). Plusieurs pensent même que le nom d'Àceaa.rpov a d'abord désigné le vase et s'est ensuite étendu à la matière dont il était fait. Le type le plus ordinaire est un flacon cylindrique, plus ou moins allongé, à base arrondie, au col court, un peu plus étroit que la panse, sans anses et, à la place, ayant ALA 177 ALB de chaque côté ou près de l'embouchure, des oreillons, quelquefois percés d'une ouverture par où l'on peut passer un fil, afin de les tenir suspendus. Tels sont des vases trèsnombreux en onyx oriental d'un seul morceau évidé (ab-o/Ei),Aç)6. On en voit deux (68.200 et 201), dessinés d'après des exemplaires du musée du Louvre. Quelques-uns remontent à une haute antiquité : on en rencontre en Grèce et en Italie, aussi bien qu'en Asie et en Égypte dont ils paraissent originaires. Nous citerons seulement un grand vase de ce genre trouvé dans le tombeau de Mausole 7 et portant des inscriptions hiéroglyphiques et cunéiformes en quatre idiomes, où on lit le nom de Xerxès. On présume qu'il fut donné par ce prince lui-même à un ancêtre de Mausole, et, d'après l'ordre des inscriptions, on peut en déduire onyx oriental. que les hiéroglyphes ont été gravés en Égypte et les autres caractères en Perse, après que les vases y eurent été portés. D'autres sont en argile peinte, de même forme, comme celui qui est représenté fig. 202 , provenant d'Athènes 8; ou très-effilés, ou terminés en pointe, ou au contraire très-renflés, en sorte qu'il est souvent malaisé de les distinguer Los, etc.] qui avaient le même emploi et dont la forme était plus ou moins semblable. On en voit ici des exemples empruntés au musée du Louvre (fig. 203 et 204) appartenant à la période des vases corinthiens. D'autres, découverts notamment dans les tombeaux étrusques, ont le col terminé par une tête ou une double tête, comme Palu bastrum du musée de Chiusi e représenté figure 205. Il est en albâtre, comme beaucoup de ceux qui ont été trouvés dans les tombeaux grecs ou étrusques d'Italie, Le modèle de la figure 206, du musée du Louvre, est en verre coloré, à fond bleu marbré de jaune, probablement de fabrication égyptienne ou phénicienne [vITRUM], se rapproche davantage 1. du type ordinaire : des flacons semblables, qu'on trouve aussi dans les tombeaux grecs, paraissent avoir été répandus jusqu'à une époque avancée dans tout le monde romain. Pline 10 nous apprend quelles étaient les formes de ces flacons les plus usitées de son temps, en les comparant aux perles en forme de poire (elenchus) que les dames portaient en pendants d'oreilles, et encore au bouton de rose qui commence à s'ouvrir. Beaucoup de ces objets conservés dans les collections sont antérieurs aux mentions les plus anciennes que l'on trouve dans les auteurs grecs. Hérodote " le premier nomme des alabastra parmi les présents que Cambyse, roi de Perse, envoya au roi d'Éthiopie. Aristophane 14 se sert de ce mot comme d'un terme général qui désigne un vase à parfums. Les nombreux vases de ce genre trouvés dans les nécropoles de l'Italie centrale prouvent que les peuples qui l'habitaient en firent usage longtemps avant que la conquête de la Grèce et de l'Orient par les Romains eût rendu chez eux cet usage commun". Dans les poètes" le nom d'onyx, sans autre qualification, sert à désigner souvent des vases contenant de l'huile ou des parfums : il est synonyme de vas unguentarium1e. On ne continuait pas moins d'appeler alabastra des vases du même genre fabriqués en métal précieux i$ et quelquefois employés à un autre usage 17 Les monuments de toute espèce,et surtout les vases peints, montrent de quelle manière on employait les alabastra, qui contenaient les parfums destinés aux rites, aux sacrifices, aux funérailles, à la toilette, etc. On en trouvera des représentations aux articles qui se rapportent à ces matières. On voit aussi fréquemment dans les peintures de vases, des boîtes ou alabastrothèques (é).aêasteoOr,xat 18) où sont renfer niés les flacons ; mais rarement ceux-ci sont nettement reconnaissables. Nous en offrons ici deux exemples qui ont toute la clarté désirable : le premier emprunté au recueil de vases peints de Millingen 19, le second d'après une peinture analogue du musée du Louvre. E. SAGLIO.