Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

Article ANTIGRAPHE

ANTIGRAPIIL (A)rrrloa?r) .Ce mot signifie proprement contre-écrit : dans toute action en justice, à Athènes, le demandeur devait formuler ses prétentions par écrit, et c'est aussi par écrit que le défendeur devait y répondre. Cette réponse pouvait se présenter sous trois formes difi'érentes, qui sont toutes trois désignées dans les sources par le terme commun d'«v etypatili. La réponse du défendeur pouvait d'abord consister en une dénégation directe de la demande ; en ce cas le débat se réduisait à une question unique, à savoir, Si la demande était ou non fondée; il n'y avait qu'une seule instance, une seule instruction, un seul jugement Uni Fui. Le défendeur pouvait encore, sans contredire les allégations du demandeur et tout en reconnaissant que son action était fondée, prétendre seulement qu'elle était mal intentée (par exemple formée trop tôt, ou trop tard, ou portée devant un tribunal incompétent), et qu'elle était par suite non recevable. Ici, à la différence du cas précédent, l'objection soulevée par le défendeur constituait une question nouvelle, distincte de la question de fond et préalable à celle-ci : car, avant de rechercher si l'action du demandeur était ou non fondée, il fallait bien examiner si cette action était ou non admissible; cette question donnait donc lieu à une instance incidente, avec débats séparés, constitution d'un jury ad hoc, et jugement spécial; et ce n'était qu'après ce jugement rendu et l'action reconnue recevable, que le procès sur le fond, jusque-là tenu en suspens, reprenait son cours. Ce mode de défense, bien qu'appelé comme les autres «vrtypuyi)', portait un nom plus spécial, celui de Trupaypa4 : ici, en effet, le défendeur, au lieu d'aller directement contre (ebni)les allégations du demandeur, élevait à côté enapx) des prétentions de celui-ci des prétentions distinctes [PA RAGRAPIIà]. Enfin le défendeur, au lieu de chercher à repousser l'action comme mal fondée ou à l'écarter comme non recevable, pouvait prendre à son tour l'offensive, et intenter luimême une demande contre le demandeur. C'est là le sens le plus exact d'«vrtypettpr,, contre-action. C'est ainsi qu'Eschine, actionné par Timarque en reddition de comptes (oie EûOwaç), accuse lui-même Timarque d'infamie 2 ; que Théophime, poursuivi par l'action d'injures (Ex5 »ixiaç), intente à son tour une action d'injures contre son adversaire ; que Bceotus, partageant l'hérédité paternelle avec son frère consanguin qui demande à prélever la dot de sa mère, répond en réclamant de son côté le prélèvement de la dot que sa propre mère a reçue 4. Ici, comme dans la7apoypay'l, la prétention du défendeur donne lieu à une instance séparée et à une procédure distincte; mais, tandis que la 72pay2ap4 se rattache au procès sur le fond comme une question préalable à la question principale, au contraire, la contre action et l'action sont entre elles compléte,ment indépendantes : elles s'introduisent l'une et l'antre dans les mènes formes, par un ajournement (apécxar,atç, «vTeyxa ào v, «vnraTryopeiv, «vruAayrâvero, «vrtr*poaxaaeieOat), et chacune est instruite et jugée séparément, sans que le jugement de l'une soit subordonné à celui de l'autre. Le seul AIN' 291 AN'l' point commun par lequel l'«vrtyp t se relie à la demande principale, c'est qu'elle est, dans la plupart des cas, portée devant le mémo magistrat, lors même que, considérée isolément, elle ne rentrerait pas dans sa compétence ; en sorte que la demande principale attire à elle l'«vTtypxlii. Mais suffira-t-il que deux demandes s'engagent réciproquement entre les mêmes parties, pour que la seconde devienne l'«vTtypac[ti de la première et la suive au même tribunal? Non, il faut de plus qu'il y ait entre les deux demandes une certaine connexité; cette connexité se rencontre clans les divers exemples que nous avons cités toutà l'heure : ainsi, dans celui où elle est le moins apparente, clans l'«vTt' -tS d'Eschine contre Timarque, elle consiste en ce que, si Timarque était condamné et par suite frappé d'infamie, il devenait par cela même incapable de suivre l'accusation qu'il avait intentée contre Eschine [ATIMIA]. Notons, en passant, deux particularités qui différenciaient l'«vTtypayil des actions ordinaires. 1° Torde partie qui succombait dans l'éo typoupi devait payer à l'autre partie l'épobélie, somme égale au sixième de la taxation primitive Toute partie 11 ne faut pas, en effet, distinguer, avec certains jurisconsultes, le cas où le vaincu était le demandeur primitif, et celui où la défaite portait sur le demandeur dans l'«vTtypa 1. Le perdant, quel qu'il fùt, devait être soumis à l'épobélie, et cette solution paraît assez raisonnable. Si le demandeur reconventionnel perd son procès, l'«v7typxtvj est déclarée de mauvaise foi et son auteur doit en porter la peine. Si, au contraire, le perdant dans l'osTtypayr~ est le demandeur dans la première instance, il est prouvé qu'il a eu tort de continuer la lutte et de ne pas s'entendre avec son adversaire'. '2° Le demandeur qui intentait la é(« aix(aç était exceptionnellement dispensé du dépôt des prytanies. Si l'adversaire, usant du droit d'«sTtypce , intentait reconventionnellement la même action, l'exception n'était plus appliquée au premier demandeur et le second ne pouvait pas s'en prévaloir. Le fait que les deux parties s'accusaient respectivement rendait vraisemblable la réciprocité des torts, et dépouillait les plaideurs de l'avantage que la loi accordait habituellement à celui qui se disait victime de l'aix(a 7. La distinction entre les trois espèces d'«vTtypops que nous venons d'exposer se retrouve clans le droit romain et les législations modernes, qui distinguent de même entre les défenses au fond, les exceptions, et les demandes reconventionnelles. Mais nulle part, peut-être, cette différence n'est accusée avec autant do réalité et de précision que dans les formes de la procédure grecque. Nous devons indiquer en terminant une autre signification toute spéciale du mot «vTtypap,i, dans certains procès en pétition d'hérédité. Lorsqu'il n'y a pas d'héritiers saisis, c'est-à-dire de descendants du défunt, la succession est vacante et ouverte à tous les prétendants qui peuvent, pendant un certain délai, venir former leur demande devant l'archonte; le délai expiré, la lutte s'engage entre tous les candidats à la succession, et, comme dans ce débat chacun joue un même rôle, sans qu'il y ait propre ment demandeur ni défendeur, les conclusions respectives de chaque partie prennent toutes également le nom d'«vTtypatpti. P. GTDE, E. CAILLEMEB. A10'l'1GRAPHEIS (AvTtypo' i ç). Les inscriptions de l'Attique prouvent qu'il y avait un assez grand nombre d'cèruypat.9aiç ou contrôleurs ; ainsi, près du trésorier de chaque dème, se trouvait un Ttypooaéç chargé de surveiller sa gestion'. Mais deux surtout occupaient une position considérable dans la république : Le contrôleur du sénat («vTtypaèdÛç T-1ç (iou)sr,ç), et le contrôleur de l'administration («vttypapaè; TŸiÿ totx7,aamç). Le premier fut à l'origine un magistrat élu (cipsT.éç). Plus tard, on le désigna par la voie du sort (x).rlpcé éç)'. Il fut toujours pris dans le sein du sénat; niais on n'exigeait pas qu'il fût l'un des prytanes, et, dans les inscriptions où son nom figure parmi les atn;Tot, il n'appartient jamais à la tribu dirigeante 3. Sa mission était de contrôler les délibérations du sénat : 7câvra «vTaypârpOTO Le second, àuliypooiiii T~ç otxvicamç, était élu par le peuple ('stporov' néi). Il était le surveillant, le contrôleur du trésorier de l'administration [TAffilAS npr Ti niolos t]. D'après Eschine, la république avait autrefois un contrôleur élu, qui, dans chaque prytanie, rendait compte au peuple des revenus. Plus tard, à raison de la confiance qu'inspirait Eubule, les fonctions de cet «vttypo oéi furent réunies à celles d'intendant du Théorique [rueoiucx], ainsi que celles des APODExTAI,... Si bien que, à partir de cette époque, toute la gestion des finances se trouva dans la meule main°. Dans sa première édition, Bickh avait pensé que l'«vnypx',av; dont parle Eschine était le contrôleur du sénat'. Opinion peu vraisemblable! Car, quel rapport pouvait-il y avoir entre le contrôleur du sénat et l'intendant duThéorique, pour que leurs fonctions fussent réunies? Bdckh a lui-même reconnu son erreur7. C'était donc l'«v-rtypoc oè; rr,ç otxr',aa6lç, qui, à la fin de chaque prytanie, rendait compte au peuple de la gestion financière. E. COILLEMEiI.