Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

Article VINARIUS

VINARIUS (Oivo7rtâ)1S). Marchand de vin. Le commerce des vins, tant en gros qu'en détail, a été très actif dans tout generis mercium transmarinarum 5, un négociant en vins de Lyon importe aussi de l'huile de Bétique G. A Ostie, les vinarii se divisent en deux groupes, dont l'un, les negotiatores vinarii ab urbe 7, vinarii urbani 3, est en relations avec Rome, et l'autre, les vinarii Ostienses9, se réserve le commerce local. A Lyon les negotiatores vinarii tiennent un rang éminent dans la cité ,°: dans une dédicace où sont nommés les décurions, les chevaliers, les seviri augustales, ils sont seuls mentionnés à part, en tête des autres collegia autorisés ". Les oivo-waat de Délos 12 semblent être également des mar chands en gros. Comme d'ordinaire, les négociants se groupent dans le même quartier : il y a à Rome un portos vinarius 13, près du Monte Testaccio, et aussi'un forum vinarium 14 ; à Ostie, un forum vinarium 15 ; à Lyon, les negotiatores vinarii sont installés dans le quartier des Ganabae, près du confluent de la Saône et du Rhône is Les marchands en détail, vinarii 17, vinariarii' 8, mercatoresvinarii19, sont dispersés dans les divers quartiers de la ville 20. Les boutiques [TABERNA] sont signalées à l'attention publique par des enseignes [sIGNIJM], qui le plus souvent figurent une scène appropriée au commerce du vin (fig. 6451) 21. Un relief de Gaule 22 (musée de Dijon) montre un marchand de vin dans sa boutique, en train de servir un client : le marchand est debout derrière un comptoir et verse le vin d'une cruche 23 ; au-dessus de lui sont suspendus des pots de diverses contenances (fig. 7497). La disposition est la même que dans la plupart des boutiques [TABERNA, fig. 6725], en particulier dans les cabarets et les thermopolia (fig. 6878). Une autre installation nous est connue par un bas-relief, VIN 897 VIN enseigne ou pierre tombale (fig. 7498).' La scène se passe en plein air, tout près du vignoble ; parmi les pieds de vigne, des doua sont profondément enfoncés dans le sol et bouchés à l'aide de couvercles de bois ; des esclaves vont et viennent, l'un portant une amphore vide sur l'épaule, d'autres puisant du vin dans un des doua pour en remplir une amphore ; le marchand ou son représentant est assis à un comptoir, que semble abriter un auvent, et fait des comptes avec un client. Les marchands de vin sont groupés en corporations On y rencontre aussi bien des affranchis 3 que des citoyens. Le collège des vinarii reçut une consécration officielle sous Sévère Alexandre 4 ; il dut être tenu sous le Bas-Empire à certaines obligations en vue de l'approvisionnement de la capitale, sans que nous puissions. préciser ses privilèges et ses devoirs 5. VtNCULU31 (.Eaudç). I. Les chaînes, entraves, noeuds et liens ont déjà été étudiés ou signalés dans différents fig. 1122; SERVUS, fig. 6382; THIUMPHUS, fig. 7094. Nous n'y ajouterons que quelques références complémentaires ou quelques monuments nouvellement publiés. Un des plus anciens exemples de personne enchaînée se voit sur le Vase François (vIe siècle) et se rapporte à la légende d'IIéra liée sur son trône par les SEcp.ol âcpavat; d'Héphaistos [VULCANUS], qui consentira plus tard à la délivrer, après que Dionysos sera venu l'enivrer et le ramener triomphalement dans l'Olympe' ; le même épisode figurait dans un des bas-reliefs en bronze du temple d'Athéna Chalkioicos exécuté par Gitiadas 2. L'aventure d'Andromède exposée au monstre marin a fait naître aussi, dans le répertoire mythologique, d'autres représentations d'entraves, d'un aspect fort différent, qui entourent les poignets comme de forts bracelets rivés au roc (4. 7499 ; fig. 5585) 3. Des chaînes de ce genre se voient aussi àux pieds de condamnés, sur un cratère corinthien très ancien du Musée du Louvre [NUMELLAE, fig. 5339]. Parmi les récentes découvertes concernant les chaînes mises aux pieds des captifs ou des esclaves, il faut XI. signaler la trouvaille, dans le lit de la Saône, à Châlon, de trois entraves en fer, toutes pareilles et munies de serrures à clef pour ouvrir et fermer l'appareil. Nous reproduisons ici un de ces curieux dispositifs (fig. 7500) 4 ; le cadenas, en forme de tube, est muni d'une ouverture par où pénètre la clef en S ; la serrure interne est assez com compose d'un res sort à trois languettes buttant contre un cran d'arrêt; les dents de la clef, en soulevant ces languettes, ouvrent la serrure. E. P. II. On a déjà parlé à l'article NODUS des superstitions qui se rapportaient aux noeuds de ceintures et de parures. Nous nous occuperons ici de la croyance populaire qui attribue aux liens de toute sorte une vertu magique. Cette idée d'une influence pernicieuse ou salutaire, selon les cas, semble avoir été répandue chez beaucoup de peuples. Un grand nombre de textes anciens prouvent que les Grecs et les Romains ne faisaient pas exception à cet égard. Les personnes qui étaient consacrées aux dieux ° et les objets dont on se servait dans les cérémonies religieuses 7 ne pouvaient être entourés de liens. Les femmes dénouaient leurs cheveux lorsqu'elles prenaient part aux processions 3 et aux fêtes dionysiaques' ; les prophétesses 10 se débarrassaient de tout lien qu'elles avaient sur le corps, quand elles se sentaient inspirées par le souffle divin. A Rome, il était interdit au n'amen dialis de porter des anneaux fermés ou des noeuds sur ses vêtements ; aucun objet attaché ou fermé par des liens n'était toléré dans sa maison". Ceux qui se livraient à des pratiques magiques ne portaient pas de liens dans les cheveux ni aux chaussures, pas de ceinture, souvent même pas d'anneau au doigt". Tout lien était proscrit dans la maison d'une femme en couches 13. Les femmes, à la mort d'un parent ou de leur mari, dénouaient leur chevelure f4; c'était devenu un simple signe de deuil ; mais je n'accorderais pas à M. Sommer 15 que pareille coutume n'ait pas eu, à l'origine, des racines plus profondes. Autrement, comment expliquer que les femmes frappées d'un deuil quittaient aussi leurs chaussures 15 ? N'était-ce pas là encore, primitivement, un effet de la crainte des liens, qui eussent pu arrêter au passage les esprits qui voltigent autour du corps ou dans la maison du défunt ? L'interdiction de porter des chaussures, quand on entre dans certains sanctuaires, ou quand on pratique certains rites, se rencontre fréquemment en VIN 898 VIN Grèce 1, comme d'ailleurs en lgypte et en Orient. Cette aversion pour les chaussures (ntoS-ilN.ara, vincula) peut être rapportée à la même croyance qui a inspiré tous les autres usages mentionnés plus haut et il semble naturel d'admettre qu'il doit en être ainsi toutes les fois qu'une même interdiction frappe les chaussures, les ceintures et les liens qui maintiennent les cheveux. Cependant il convient d'ajouter que certains textes donnent clairement à entendre que les sandales étaient proscrites à cause de leur impureté, parce que, étant de cuir, elles provenaient de la dépouille d'un animal mort 2. Une conséquence logique de la croyance que les liens sont nuisibles, c'est que les noeuds les plus lâches sont les moins dangereux, ou même, relativement, les plus salutaires. Pour les pansements 3, qu'il fallait bien attacher, on avait coutume de se servir du noeud dit nodus Ilerculaneus, qui était, comme il a été démontré plus haut [Noms] et, ailleurs, par M. Wolters `, un noeud peu serré et des plus faciles à dénouer. M. Ileckenbach 5, il est vrai, est d'avis que le nodus Herculaneus était, au contraire, un noeud extrêmement difficile à défaire. Cette opinion, qui d'ailleurs se rencontre déjà à l'époque byzantine 6, n'est corroborée par aucun témoignage ancien Il suffit, pour la réfuter, de renvoyer à un passage connu de Festus, d'après lequel la ceinture de la mariée était attachée par un « noeud d'Hercule u, que le mari devait défaire lui même 8. Si les anciens cherchaient à se préserver de l'influence pernicieuse des liens, ils s'efforçaient aussi, inversement, d'utiliser à leur profit, et de plusieurs façons, la force magique qu'ils leur attribuaient. Ils tâchaient, en premier lieu, de diriger cette force contre leurs rivaux et leurs adversaires (devinctio, XxTezag.oç). Le plus souvent on se contentait de prononcer ou de graver sur une tablette de plomb les paroles par lesquelles on déclarait lier l'ennemi 9 [TABELLA, p. 4] ; mais il arrivait aussi fréquemment qu'on le liât en effigie. On a trouvé en Attique une figurine en plomb qui porte des entraves aux pieds et aux mains 10, [cf. MAG1A, fig. 4786 à 4789]. De plus, les anciens comptaient sur la puissance des liens pour combattre le mal qui les menaçait; non qu'on leur reconnût, du moins à l'origine, une vertu vraiment curative, mais on supposait qu'ils pouvaient par une influence magique guérir les fractures, arrêter les maladies accompagnées d'un flux, d'une inflammation, de tumeurs, etc. Cependant on allait aussi jusqu'à prétendre lier la fièvre et, d'une façon géné raie, la maladie f 1. De là à attribuer aux liens une vertu préservative, il n'y avait qu'un pas. On s'explique ainsi qu'un lien ou un noeud porté à dessein sur le corps ait pu tenir lieu de talisman ou d'amulette destinée à enchaîner, en quelque sorte, le danger qui viendrait à menacer le porteur. Les mystes d'Éleusis s'attachaient un fil à la main droite et au pied gauche 12, el M. Wolters a montré qu'il y a dans l'art grec un grand nombre d'exemples de représentations d'hommes et de femmes qui portent des rubans ou des fils attachés par un noeud autour du cou, sur les bras ou sur les jambes 13. Enfin, troisième point, on chargeait aussi de liens l'image de celui qu'on voulait s'attacher 1c ou réduire en sa puissance. A Vetulonia, on a trouvé deux statuettes, l'une masculine, l'autre féminine, qui sont réunies entre elles par deux chaînettes ts Ce genre de pratiques s'étendait même aux images des dieux qu'on voulait se rendre propices 16. W. VOLLGRAFF,