Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

ADLOCUTIO

ADLOCUTIO, allocution militaire. L'allocution est une scène de la vie militaire fréquemment reproduite par les monuments romains. Dans les longues spirales de bas reliefs qui se déroulent autour de la colonne Trajane' et de la colonne Antonine comme sur les murailles sculptées des arcs de triomphe on voit le groupe des légionnaires dominés par leurs enseignes et la plate-forme élevée d'où le général, ayant à côté de lui le préfet du prétoire et quelquefois d'autres officiers, harangue ses troupes. Le môme tableau se représente, avec les réductions qu'imposait l'exiguïté de l'espace, au revers d'un grand nombre de médailles romaines 4, presque toujours avec une de ces in donnons ici trois exemples de ces petites compositions 5. Le premier (fig. 406), emprunté à un grand bronze de Galba, du Cabinet de France, est conforme au type généralement suivi. Les soldats y sont armés de hastes, ils ont le casque et le bouclier; au-dessus de leurs têtes on distingue l'étendard flottant (vexillum) des corps de cavalerie, l'aigle de la légion et le manipule [SIGNA MILITARIA]. Une estrade mobile (suggestum, suggestus , tribunal 7) sert de piédestal à l'imperator. Quelquefois il montait sur un tertre couvert de gazon (caesp= ticium tribunal', tribunal viridi caespite instructum 9). Les deux autres figures sont empruntées à des monnaies de Posthume, du même cabinet. L'un (fig. 407) 10, montre l'empereur debout sur le suggestus ou tribunal, entouré, comme dans l'exemple précédent, des troupes de toutes armes; on distingue les chevaux de plusieurs cavaliers; les porteenseignes sont rangés des deux côtés du tribunal. Il en est de même dans la plupart des bas-reliefs cités plus haut qui reproduisent la même scène. Les officiers qui, d'habitude, accompagnent l'empereur, sont remplacés sur la médaille par deux femmes, sans doute la Fortune et la Victoire qui le couronnent. L'autre médaille (fig. 108) 11 est un grand bronze du même empereur, que l'on voit, au revers, prononçant une allocution; il est à cheval et tient la main droite étendue, comme on représente ordinairement les orateurs. Le témoignage des historiens, d'accord avec les monuments, nous prouve que les généraux romains adressaient A DL 70 AD:11 des discours à l'armée dans toutes les circonstances graves. Les officiers et les drapeaux se réunissaient autour du chef qui profitait de cette espèce d'ordre du jour pour encourager les soldats, pour flatter leur ambition et leurs espérances, pour apaiser les révoltes, récompenser les traits de bravoure, ou dénoncer des coupables. On peut lire dans les auteurs latins des divers àges, dans Tite-Live surtout, une foule d'allocutions militaires; malheureusement elles sont toutes au moins retouchées, sinon entièrement composées par le trop élégant écrivain. Un savant épigraphiste français a retrouvé il y a peu d'années, mais seulement par lambeaux, le texte officiel d'une allocution militaire. Cette curieuse harangue est gravée sur les côtés du piédestal d'une colonne monumentale qui subsiste encore à. Lambessa, en Algérie ". Elle s'adresse aux cavaliers de la sixième cohorte de Commagène, et renferme les expressions les plus élogieuses pour ce corps de troupes dont elle énumère les services : exactitude dans les travauxdu camp, construction de retranchements en pierres énormes, ardeur infatigable aux exercices militaires, perfectionnements dans la manoeuvre et dans le maniement des armes. Malgré les lacunes regrettables qu'il présente, ce document est d'un grand intérêt pour l'histoire des armées romaines. Ily règne une certaine solennité dans le langage et une sorte de recherche oratoire dont les harangues militaires des siècles instruits ont toujours eu beaucoup de peine à se dégager. D'après les monuments et les textes, il est impossible de ne pas admettre que les allocutions militaires fussent effectivement prononcées par le général en chef du haut de son tribunal, en présence des officiers supérieurs et de ses étendards; mais la parole de l'imperator ne pouvait être entendue que d'un très-petit nombre d'hommes. On peut supposer que l'allocution était transcrite en plusieurs expéditions distribuées aux différents chefs de corps, et c'est sans doute d'après une copie de ce genre, que les cavaliers de la sixième cohorte de Commagène, voulant éterniser la mémoire de leurs exploits et la satisfaction de leur général, auront fait graver la colonne de Lambessa. Elle était placée dans le camp même des auxiliaires, et par suite incessamment exposée aux yeux des soldats. E. ROSCFIACH. ADMETUS ( 'eroç). Admète, fils de Pherès, le fon dateur et le roi de Pheræ, en Thessalie, et de Périclymène ou Clymène 1. Il est mentionné parmi les héros qui prirent part à la chasse du sanglier de Calydon [MELEAGERj, et on le voit figurer dans la représentation de cette chasse, désigné par une inscription, sur le célèbre vase peint d'ancien style, connu sous le nom de Vase François Il fut aussi un des Argonautes [ARGONAUTAE]. Apollon, lorsqu'il fut réduit à servir un mortel, en expiation du meurtre des Cyclopes, ou de Python selon d'autres récits, garda les troupeaux d'Admète sur les pentes du Pélion a, et la bienveillance que lui conserva le dieu fut pour lui une source hi% di\ .naa,.. iw 11 inépuisable de prospérités. Non-seulement ses bestiaux devinrent les plus beaux, ses chevaux les meilleurs ; mais lorsqu'il voulut épouser Alceste, fille du roi Pélias, ce fut encore à la protection d'Apollon qu'il dut de remplir la condition impossible que ce roi avait mise à leur union : il avait fait serment, en effet, de ne donner sa fille qu'à celui qui pourrait atteler à son char un lion et un sanglier 5. Sur le trône d'Apollon à Amyclae, Admète était représenté enchaînant à son char cet étrange attelage G. Une bague étrusque, en or, sur laquelle on voit gravé (fig. 109) un char traîné par un lion et un sanglier 7, offre, selon toute apparence, une image du même fait. 11 est représenté avec plus d'élégance et de précision, dans un bas-relief en stuc qui faisait partie de la décoration d'un tombeau romain a, découvert il y a peu d'années (fig. 110). Pélias est assis sur son trône, Alceste debout à côté de lui ; Admète lui montre le char, près duquel se tient Apollon, et derrière, s'avance Artémis, que l'artiste n'a pas introduite sans intention dans son tableau : cette déesse devait avoir, en effet, une influence funeste sur la destinée d'Admète. Irritée de ce que son nom avait été omis dans les sacrifices des noces, elle fit entrer des serpents dans la chambre nuptiale ; Admète était sur le point de périr, quand Apollon apaisa sa soeur, obtint des Parques, par d'instantes sollicitations, la prolongation de l'existence du héros, à la condition toutefois que son père, ou sa mère, ADM -71 ADM ou son épouse, voudrait bien mourir à sa place e. Alceste seule consentit à se dévouer [ALCESTIS]. Les adieux d'Admète et d'Alceste sont figurés sur un vase étrusque où les deux époux sont désignés par leurs noms (fig. 111) 16, Un bas-relief représentantdifférentes scènes de l'Alceste d'Euripide, montre encore Admète ordonnant aux habitants de Phères de préparer les funérailles de sa femme, puis reprochant à son père de n'avoir pas voulu mourir pour lui 11. On le voit encore sur deux sarcophages12 suppliant Hercule de ramener Alceste parmi les vivants. Il était représenté avec la même attitude dans une peinture décorative depuis longtemps détruite, mais dont les principaux traits ont été conservés par les dessins de Pighius 1t. D'après Pausanias 14 Admète figurait parmi les lutteurs combattant aux jeux funèbres célébrés en l'honneur de Pélias, sur une des faces du coffre de Cypsélus. E. SAGLIO.